(grace) in the middle of the night

les yeux rivés vers le plafond grace est incapable de bouger, comme paralysée. son souffle s’accélère et son corps refuse de se secouer. son regard quant à lui est libre de toute entrave, il se balade de gauche à droite et tombe sur un corps endormi à ses côtés. la gosse est privée de ses mouvements, elle est incapable d’hurler. elle peut sentir son pouls s’accélérer. la chaire de poule la gagner. ses paralysies nocturnes sont une plaie qu’elle ne sait gérer. purulente à souhaits.  les hallucinations vont bon train, elle entend sa voix distinctement comme si rien avait changé. comme si aucun procès n’avait eu lieu, comme si tout n’avait pas été révélé. Hargreaves se retrouve contrainte à l’état de jouet. poupée désarticulée. elle lui appartient, qu’il lui susurrait. elle ne lui échappera jamais. la mioche est sienne et personne ne saura jamais la lui dérober. quelques notes sur un piano voilà où les leçons étaient sensées s’arrêter. voilà ce pourquoi il était rémunéré. non pas abuser d’une gosse en manque d’attention car les parents sont trop occupés. grace ne peut toujours pas bouger combien même tout son être entier semble lui intimer. son corps est nu, dénudé. impuissant, désemparé. elle s’est endormie sans avaler ses cachets. bêtement elle s’est dit que l’alcool et la fatigue allaient compenser. que la présence d’orito à ses côtés allaient suffir à lui offrir une bonne nuitée. quelle insolente, quelle idiote elle a été. les crampes l’assaillent et les hallucinations redoublent d’efforts pour la faire caner.  la mioche oscille constamment entre cauchemars et réalité. hantée quotidiennement par des fantômes qu’elle pensait bel et biens enterrés. grace peut sentir ses côtes se mettre à brûler. ça part de sa clavicule jusqu’à ses hanche dans de fins tracés. comme si l’épiderme avait pourri après avoir été bafoué. meurtri et entaché. son myocarde bat la chamade, sur le point de succomber.  dans sa tête, la jeune héritière répète le mantra qu’on lui a intimé de ne jamais oublier. « je suis une victime, je suis en sécurité, j’ai survécu et plus rien ne saura m’atteindre ou me blesser. » dix neuf mots qu’elle se répète sans arrêts. dix neuf mots qui lui permettent d’exister. à cet instant précis l’argent et la puissance ne signifie rien, elle est vulnérable comme tout les autres, comme tout ceux qu’elle passe son temps à mépriser. à ses côtés le mécano ne se doute de rien, il se contente de se reposer. embrasse les bras de morphée en s’y logeant fièrement après une longue journée. grace suffoque, incapable de respirer. depuis combien de minutes l’héritière est-elle entrain d’agoniser? « baby girl est mienne, elle le sera à jamais. » la déchirure est brûlante et pourtant sa carcasse refuse de se cambrer. la mioche ressent tout à nouveau comme si le temps ne suffisait pas à panser ses plaies. il voulait faire d’elle sa femme, son trophée. le petit prodige qu’il avait tant couvé. hargreaves se bat de tout son être, en son for intérieur elle espère pouvoir se mouver. rompre le cercle vicieux et reprendre le contrôle sur son sommeil et toutes ces nuits qui lui sont ôtées. comme si elle n’avait pas assez donné. comme si le masque qu’elle portait n’était pas assez lourd à assumer. être l’enfant parfait, sans jamais s’arrêter. mettre un pied devant l’autre comme si rien n’était jamais arrivé. comme si son nom n’avait pas fait les gros titres en plein procès. pauvre fille de riche à l’innocence dérobée. une autre privilégiée de l’upper east side dont les parents étaient trop occupés. captive, pendant des années grace l’a été. aujourd’hui elle souffre toujours atrocement de cette impuissance il n’y a qu’à voir la façon dont elle est reste paralysée. ni le japonais ni personne ne saura la sauver. sera t’elle assez forte pour pouvoir un jour se relever?

l’asiatique se retourne, son gros bras tatoué vient s’écraser sur le flanc de l’héritière tétanisée. tout ça, c’était il y a des années. c’est sensé être derrière elle, bien profondément enterré. ses parents n’en parlent pas, depuis le procès le sujet est tabou, interdit, comme oublié. grace n’a aucune emprise sur sa paralysie ni les démons qui semblent déterminés à ne vouloir délaisser ses côtés.  il était sensé prendre soin d’elle, lui enseigner les gammes et la protéger. les ombres lèchent les murs de la chambre inanimée.  la môme peut sentir la sueur perler sur son front. couler, rouler jusqu’à mourir sur son menton. son être est meurtri, profané. à l’intérieur de sa poitrine cogne un myocarde agité. seul organe répondant à l’instinct de survie et à l’adrénaline parcourant ses veines bleutées. la gosse est stupide de croire qu’elle s’en est tirée. à quoi bon aller voir un psychothérapeute toute les semaines pour lui servir la même salade in avariée? « je vais bien je tiens sur mes deux jambes vous voyez! » merci l’oxy, le xanax et tout ce qu’elle peut bien gober. tout ce qui peut l’aider à encaisser. car ni les scandales, la renommée ou bien le sexe ne l’aident à exister.  grace se noie perpétuellement dans un océan glacé. suffoquant, espérant qu’un jour quelqu’un se rende compte de sa détresse malgré qu’elle soit une pestiférée. avec un peu de chance, le petit matin ne saurait tarder. venant la délivrer des cauchemars scarifiant ses poignets. avec un peu de chance, orito va se réveiller.  bougonner, la sommer de mettre les voiles et se barrer. tout ce qu’il lui faut c’est un peu de courage pour endurer cette fin de nuitée. sans sombrer.