(caïn) no light shall save us

tête baissée contre le comptoir le corbeau est silencieux. il ne pipe aucun mot et se contente d’observer les lieux. entre ses doigts assassins un peu de poison liquide couleur ambré. alcool brûlant l’œsophage pour garder la bête sous contrôle, la garder muselée. la rétine se balade sur l’assemblée. rien que de la viande soûle juste bonne à tituber. sous sa veste en cuir le holster est à sa place, toujours prêt à être dégainé. si ce n’est la lame contre la poche arrière de son jean finement aiguisée. caïn est un boucher. il dépèce, taille des sourires sur les visages par l’horreur émaciés. son destin était tout tracé depuis bien avant qu’il ait poussé son premier cri. le jumeau carnivore, le seul a voir le jour après avoir dévoré l’autre moitié qui l’accompagnait, qui aurait dû être à ses côtés pour toute la vie. le môme a été élevé à la dure avec une mère psychopathe rongée par le chagrin du fils qui lui a été enlevé. avec un père alcoolique et brutal dont la colère avait sa manière singulière de résonner. le gamin a fait l’école buissonnière, s’est façonné comme il le pouvait. il a volé, racketté sans jamais se faire attraper. en vieillissant, le géniteur s’est rapproché. a prit caïn sous son aile lorsqu’il eu l’âge requis pour rejoindre les rangs des ravens comme son père avant lui. puis la place de bras droit des années plus tard lorsque ce dernier perdit la vie. les dead ravens sont tout ce qu’il possède, tout ce qu’il est. le gang pour lequel les wesker se sont damnés, la famille à qui ils ont tout donné. « t’es seul ce soir? si tu veux j’pourrais t’accompagner. » l’homme relève le regard et se pose contre la poule aux courbes dénudées. il jauge de haut en bas puis en revient à son verre de bourbon déjà bien entamé. la gonzesse s’énerve, s’égosille à moitié. caïn n’a pas le temps pour ce genre de futilités. pas ce soir, pas avec la première venue faussement intéressée. il a ses habituées qu’il visite de temps à autres quand ses pulsions se font trop violentes. oppressantes. jamais il ne se laisse aller. jamais vraiment, ce n’est pas pour ça qu’il est fait. caïn est fait pour obéir, pour exécuter les ordres qui lui sont donnés. il est fait pour assassiner, kidnapper, participer aux macabres activités de new-york une fois la pénombre tombée. il est fait pour protéger le gang, son honneur, son chef même s’il devait en caner. dans sa poche, son téléphone se met à vibrer. le poisson est ferré. la cible repérée. l’oiseau de geai se lève après avoir fini son verre en une gorgée. sur le bois usé du bar il glisse un billet. l’appel de l’hémoglobine est plus fort que tout, il n’a jamais su lui résister. cette nuit encore il cueillera une âme sans ciller. cette nuit encore il déposera un corbeau aux pieds d’un corps inanimé. certains perpétuent la tradition comme il le fait. ils sont de ceux à craindre, à ne pas contrarier. derrière lui, la porte du pub se met à claquer. il quitte les lieux sans un regard en arrière, s’enfonce dans la nuit en quelques enjambées. une fois encore il fera honneur à la bible et au nom qui lui a été attribué. caïn l’assassin aux phalanges d’hémoglobine teintées.