smalltown boy -- / gideon

hymn for the missing. you took it with you when you left, these scars are just a trace, now it wanders lost and wounded, this heart that i misplaced. — L’enfant se sait différent, comme si quelque part dans sa conception, ses parents avaient manqué de cocher une case et qu’il en pâtissait de bien des manières. C’est à peine s’il arrive à articuler un mot sans trembler comme une feuille, l’angoisse remontant de ses tripes jusqu’à sa gorge et lui donnant l’impression soudaine d’étouffer, alors ce dernier se complait dans un silence qu’il trouve réconfortant mais que les autres considèrent étrange. Si ses parents s’inquiètent de son inaptitude sociale, ce souci est balayé par un tout autre. Physiquement ils voient leur enfant pâlir et maigrir, sa peau bleutée d’ecchymoses qui apparaissent bien trop facilement, sans même qu’il ne se cogne ou ne se fasse véritablement mal de n’importe quelle manière, son petit corps peinant si souvent à le tenir debout. Anémie aplasique, qu’il entend sans même en comprendre la signification. Pour lui, tout ce que ces deux mots veulent dire, c’est qu’il est encore davantage différent de ses pairs. Il est bientôt isolé du monde qui l’entoure, scolarisé à la maison, seulement entouré de sa mère et quelques fois de son père lorsque celui-ci ne cherche pas à le fuir. On parle de moelle osseuse, d’opération, de greffe, de transfusion, de traitement. Le gamin ne demande jamais d’explication, hoche seulement la tête et attend. Il se nourrit de l’angoisse de ses parents. Il prétend aussi, ne pas les entendre se disputer dans la cuisine, ni rythmer son sommeil au son des pleurs de sa mère, encore moins se réveiller en plein milieu de la nuit lorsqu’il entend la porte d’entrée s’ouvrir puis se refermer. Chaque jour qui passe, chaque fois qu’ils se rendent à l’hôpital et qu’on lui parle sans qu’il ne cherche même à comprendre, chaque instant enfermé dans cette maison dont les murs se referment sur lui, chaque seconde finalement, il reçoit la confirmation qu’il est différent, pas de la bonne manière mais de la plus mauvaise, et en vient à détester ses parents de l’avoir mis au monde.

10th november, 2002, 6pm, home
— Where’s dad?
— He’s working, sweetheart.
— He can’t be working all the time.
— Gideon…
— You can say it, I won’t be hurt or anythin’. I already know.
— I don’t know what you’re talking about, but I don’t want to hear any of it. Your father is working very hard to—
— To what? To avoid me? Us? We barely see him, it’s like he doesn't even live with us. I mean, at this point, I don’t even know if I should call him dad or if he’s just some random guy sleeping in our house from time to time.
— That’s enough, Gideon Marsh. You shouldn’t—
— Whatever. I’m not hungry anymore, I’m gonna go back to my room.

traduction:

goodbye. my pretty bird, my favorite lullaby, how'd i become the thorn in your side? all your laughter turned into a cry, it's alright, goodbye. — Des perles d’eau de pluie dégoulinent de la pointe de ses cheveux, se mêlent aux larmes que le presque orphelin ne perdrait pas de temps à nier si on les pointait du doigt, et roulent le long de ses joues déjà rougies par un froid hivernal. Alors que les lèvres du prêtre se meuvent, ses tympans eux n’entendent que le son de ses propres dents qui claquent, de froid, d’un trop plein d’émotions qu’il est incapable de verbaliser. Il évite de poser le regard sur sa mère, elle qui pourtant s’accroche à son bras comme si elle craignait de le voir disparaître à son tour, se concentrant sur la plaque dorée qui habille le cercueil lui aussi noyé par une pluie qui refuse de s’arrêter, comme si elle aussi lamente cette mort si inattendue qu’elle en est d’autant plus douloureuse. Christopher Marsh. Les lettres s’impriment à l’encre indélébile, là sur les parois mille fois égratignées de sa boîte crânienne, sous sa chair aussi glacée qu’elle n’est scarifiée sans que personne ne puisse même se l’imaginer, au beau milieu de cette poitrine qui porte péniblement un myocarde dont le sang a déjà trop été pompé, partout où elles peuvent se faire une place éternellement lourde. L’adolescent a soudainement envie de vomir. Et quelques minutes plus tard, une fois le cercueil plongé dans l’obscurité, la paume de Phee tapote son dos alors que ses tripes se vident sur le bitume. Elle aussi a pris la pluie, ses cheveux aussi trempés que les siens, mouillant encore davantage son manteau. Elle aussi aurait pu déjà s’être éclipsée pour aller se sécher, oublier cette cérémonie funèbre, puis reprendre une vie normale, une existence non teintée par ce deuil que lui n’est pas certain de vouloir débuter, mais la plus jeune reste à ses côtés. Cette dernière prend le rôle de cette sœur qu’il n’a jamais eue, peut-être même de cette mère qu’il n’aura plus jamais. I’m sorry. Il ne sait pas bien à qui il s’excuse, pas certain de demander pardon à Euphémia pour la garder dehors par un temps pareil, surtout pour l’obliger à encore une fois s’occuper de lui, ou à ce père trop souvent méprisé, aujourd’hui disparu pour toujours, pas absent pour le travail ou fuyant parce qu’il ne sait pas comment gérer son fils, mais tout simplement plus là.

* j'suis désolé.

20th february, 2005, 2pm, funeral eulogy
— Uh, hello. I… My dad was… Crumpled up paper sound. He was… Pauses. Looks at his mother, then back at his wrinkled piece of paper. I just… Sighs. He did his best. Goes back to his seat.

traduction:

wolf. when i run through the deep dark forest long, after this begun. where the sun would set the trees were dead, and the rivers were none. and i hope for a trace to lead me back home from this place, but there was no sound there was only me and my disgrace. — Il s’avère que la Terre continue de tourner autour du Soleil, que la Lune monte et descend au même rythme qu’avant, que les heures passent à la même vitesse et que les mois s’enchaînent toujours les uns après les autres, que l’hiver est remplacé par le printemps, que les flocons de neige se transforment en fleurs bourgeonnantes, que le monde entier ne voit pas la différence entre l’avant et l’après, finalement que son père n’est peut-être plus là mais lui est obligé de sortir de son lit, d’ouvrir ses volets, de se préparer sans grande motivation et de se nourrir avec la même envie de vomir au fond de la gorge. Les devoirs s’empilent sur son bureau poussiéreux, entre les cadavres de bières que le patriarche ne viendra plus jamais réclamer, un cendrier improvisé rempli à ras-bord et un carnet de dessin qui lui sert plus à gribouiller sa frustration qu’à véritablement dessiner. S’il remercie toujours ses camarades se donnant du mal à les lui apporter, jamais ses doigts ne viennent s’en emparer. Personne ne sait que son ambition est d’arrêter l’école pour se trouver un travail, après seulement deux ans de retour dans le système, comme un vrai adolescent et non pas un enfant étouffé par les angoisses de ses parents, parce qu'elle n’est jamais verbalisée à haute voix. Après un peu plus d’un mois, néanmoins, les feuilles volantes cessent de lui parvenir. Le lycée ne tente plus de contacter les Marsh, que ce soit par appels téléphoniques ne recevant jamais aucune réponse ou par lettres entassées sur cette table à manger qui ne sert plus qu’à ça : entreposer, empiler, laisser dépérir ce dont les survivants veulent se tenir éloignés. La vérité est que si lui continue de vivre, avec plus ou moins de facilité, sa mère, elle, n’est plus présente que physiquement. Elle refuse de sortir de son lit, de se nourrir, même de ne prononcer qu’une syllabe depuis l’enterrement. C’est un fait que l’adolescent, comme tout ce qui concerne sa famille maintenant que son père n’est plus là, garde pour lui dans son entièreté. She's still sick, qu’il crachote à travers la ligne lors d’un appel avec sa meilleure amie, but she’ll be alright. Si cette dernière se rend compte du mensonge qu’il lui offre sur un plateau d’argent, elle n’en dit rien. Dans le fond, même en surface, le presque orphelin sait que rien ne va et que rien n’ira plus jamais.

* elle est toujours malade, mais ça ira.

5th march, 2005, 5pm, phone call
— You don’t have to call me everyday, Phee.
— Your birthday’s coming up.
— I’m aware.
— I know you probably aren’t in the mood for any sort of celebration but—
— You’re right, I’m not. I don’t like parties to begin with and who’re you gonna invite anyway? It’s not like I really have friends other than you. Not that you’re not enough, I just—
—  I was thinking of doing something with just you, me and a birthday cake, actually.
—  I… That’s thoughtful of you.
—  So, what are you saying?
—  I can’t, Phee.
—  Why?
—  My mom.

traduction:

made of stone. see i left my mother's arms, see i left my father's home, and i fell into a well of hope. i'm carrying my heart but it's made of stone. i'm carrying my heart but my heart is made of stone. — L’argent manque et ce dernier doit toujours se traîner jusqu’à l’hôpital, quand bien même il prétend qu’il ne s’est jamais senti aussi bien, alors qu’il est aussi clair intérieurement pour lui que extérieurement pour les autres que les symptômes sont toujours présents, parfois même plus aigus qu’ils ne l’ont été depuis la première fois qu’ils se sont manifestés. C’est d’abord à des petits boulots que celui-ci s’essaye mais, ne pouvant que travailler à mi-temps au vu de son jeune âge et devant se battre contre les manifestations de son anémie chronique, son salaire ne règle le problème qu’en surface. L’adolescent est bientôt obligé de voler dans la caisse du supermarché où il travaille, un peu d’abord, un peu trop une de ces fois où il se laisse submerger par la panique, réussissant à s’en sortir sans que son patron appelle la police grâce à un jeu d’acteur qu’il ne pensait pas avoir en lui, pour ensuite se mettre à chiper dans la rue, dans les sacs et les poches, partout où la présence d’un porte-monnaie ou d’un portable se matérialise. Et si ce dernier a conscience de l’ironie de la situation, de lui le gamin de policier rackettant les passants qui croisent son chemin à la recherche de même pas dix dollars, tant qu’il peut offrir un dîner digne de ce nom à sa mère, lorsqu’on l’entraîne dans une structure qui fait de lui quelqu’un, quelqu’un de mauvais peut-être mais quelqu’un tout de même, quelqu’un qui peut s’occuper de la femme qui l’a mis au monde sans se réduire à quémander dans la rue, quelqu’un à la moralité bancale pouvant, à défaut de vivre dans la droiture et la régularité, offrir à la personne qui compte le plus pour lui une vie qui vaut la peine d'être vécue, il suit sans y penser à deux fois. Lorsque le presque orphelin y pense, il s’imagine son introduction aux DKV-99 comme le début de la fin — ou la promesse d’un high avant une descente violente. Avec la découverte et l’implantation, les soupçons puis la confiance mutuelle, l’addiction s’est faite un nid sous son épiderme. Elle s’est d’abord nourrie de l’adrénaline avant de se muer en un amour un peu trop prononcé pour les joints fumés de temps à autre en compagnie de ce mentor-ami, de cet homme qui en a trop vu et pas assez à la fois, figure paternelle aussi bancale que la dernière mais bien plus compréhensive, finissant avec une balle entre les deux yeux quelques années plus tard. Sa mort, au lieu de le réveiller, est une énième condamnation à perpétuité. Ce qui n'était qu'un usage récréatif, parfois moyen utilisé pour apaiser les douleurs aussi physiques que psychiques, toujours avec ce semblant de père à la moralité saccadée et jamais seul, comme une promesse que ça n'ira jamais plus loin, devient alors plus envahissant et les joints eux sont vite couplés de plus.

3rd february, 2008, 11pm, t’s place
(current state: high)
— My best friend’s brother died of… this.
— This? What’s this for you, Gid?
— I don’t know, you tell me.
— Just a way to pass time. To relax. Y’know the drill.
— D’you want to hear what I think?
— Go ahead, kiddo.
— I think you’re just avoiding whatever's goin' on inside your mind. Weed’s actually a way to escape it all.
— Smart ass.
— Hey, T.
— Yeah?
— Does it mean… Does it mean I’m doin' the same thing?
— I don’t know, y’tell me.
— Nah, I'm good. I think.
— I'm gonna tell you what I think. You deserve some damn peace, kiddo, and there's no shame in seekin' it in weed.
— You sound like a junkie.
— But I'm not. And either are you. This... It's a father and son bonding experience, if you will. We smoke, we talk about our fuckin' feelings, we forget for a little bit, then we do what we gotta do and keep on goin'.

24th may, 2010, 7pm, exterior stairs
(current state: drunk)
— I don’t know why I thought it’d be different this time.
— What’re you talking about?
— This. This whole thing. He fuckin’ paid for my mom’s whatever this is and I was like… I don’t know, Evy. He didn’t have to help us but he did. Fuck he did. And y’know, like, when he thought about dying, he thought ‘let’s give this stupid kid some money when I finally get myself killed.’ I just… Fuck, I liked the guy.
— Gi—
— But in the end, I’m not surprised he left too. I mean that’s a dad’s thing, ain’t it? When they’re not fuckin’ assholes, they just… leave.

traduction:

family. they is my family, they is my family. they might be crazy, but they is my family. you can't get to them unless you get through me. you fuck with them you fuck with me. a motley crew, a rodeo, a goddamn zoo, a circus show, but oh don't you know how it goes: we are all walking each other home. — Les pères vont et viennent, ils s’immiscent dans les failles de leurs enfants et repartent avec une partie de ces derniers, un bout si gros que c’est comme s’il ne restait plus rien après leur départ, juste une carcasse stigmatisée sur et sous l’épiderme. Le jeune adulte apprend à faire sans, sans la présence de son père biologique et de ses remontrances mêlées à son inquiétude à peine suffoquée, sans l’épaule de son adoptif pour se reposer lorsque le monde semble s’écrouler autour de lui et ses conseils qui ont été ses sauveurs plus de fois qu’il ne peut compter, sans cette réassurance qu’il est là et que, quoi qu’il arrive, il le sortira toujours des pires emmerdes. Ce dernier continue de faire ce qu’on lui demande et se fait une place, une plus grande, celle qu’il tente de combler depuis cette mort dont le deuil stagne au même seuil que le dernier. Il se fait un nom qui lui appartient, coloré de cette affection et de ce respect que le défunt éprouvait à son égard et qu’il ne s’est pas retenu de glisser aux oreilles de la majorité de ses compagnons d’armes. Et toujours, après la soirée suivant la crémation où les mots se sont échappés par mégarde et intoxication, ses émotions reposent avec les cendres de son second père. Il essaye de ne rien laisser paraître, encore moins avec Euphémia, mais il n’est un secret pour aucune personne de ce qu’il appelle aujourd’hui sa vraie famille. Ils savent tous ce qui se cache derrière ce visage se voulant si souvent impassible, quand bien même il retient une grimace de douleur ou qu’il sent sa gorge se serrer, derrière tous ces i’m fine qui sonnent faux même à ses propres tympans mais qu’il continue d’affirmer sans un clignement d’yeux, parce qu’ils connaissent tout de lui. Le presque orphelin est un livre ouvert à leurs yeux, une foutue collection de disques rayés qu’ils peuvent écouter en boucle, qu’ils pourraient malmener si l’envie les prenait mais qu’ils prennent toujours soin de ranger dans leur pochette. Et lorsque celui-ci pense que rien ne pourra combler le vide au creux de sa cage thoracique, ils viennent s’y caler et le remplissent sans très grande difficulté, tous à leur façon ; Ares par cette bienveillance le caractérisant si bien, par ses regards d’encouragement et jamais de pitié, par son respect de ses limites et tous ces silences qu’il lui offre lorsque le plus âgé sait que sa langue le démange ; Ades par cette affection un peu brusque et profondément vraie, par cette violence dont ils font preuve l’un envers l’autre parce qu’ils se comprennent parfois trop bien et qu’ils n’arrivent pas à l’exprimer autrement ; Evy par cette présence qui va et vient physiquement mais qui reste toujours ancrée spirituellement, par leurs disputes devenant trop vite leur normalité et ces moments où ils se muent entre autre chose, ses bras à lui encerclant son corps et ses lèvres murmurant un everything’ll be alright qu’il pense véritablement pour la première fois de sa vie ; Phee par cette douceur que ce dernier ne croit pas mériter mais qui lui est offert si généreusement, par toutes ces promesses qu’ils se sont faits au fur et à mesure des années, celles murmurées dans le silence ou presque hurlées dans leur cage thoracique ; puis O par cette vulnérabilité dont elle fait preuve et cette compréhension qui passe entre eux sans même articuler ne serait-ce qu’un mot, par leurs échanges épistolaires et discussions dans le froid du parloir, sa présence réchauffant doucement la pièce tombeau. Quand son esprit divaguent jusqu’à cette amitié qui est là et y reste, le presque orphelin se dit que, oui, tout ira bien — jusqu'à ce que ce ne soit plus le cas.

* je vais bien, tout ira bien.

gideon a écrit:

18th August, 2020, FCI Otisville
(extract from a letter sent to o)

I feel so out of it, O. Life goes on and I’m still here. Ares says you’re all waiting for me on the outside, but I’m so scared that… you’ll just have moved on with your lives when I finally go out. I can’t really say this to any of them. Ares is Ares. He’ll just say this is a stupid thought and no one’ll ever leave me behind. Ades, well, he’ll get mad for the hundredth times in two years. Phee… Phee will get sad and I’ve already hurt her enough just by being in here. And Evy… I don’t even want to think about Evy. I’ve ruined her life, I think. No, I’m sure I did. Damn, O, I want to believe Ares. I used to… before. Now, I just don’t know anymore.

traduction:

i hope you die. baby your love is bigger than a football field, i'm the hooligan of your heart. sometimes we win but sometimes we lose our dreams, but i always wear the colors of your team. maybe it's all beyond control, but baby you can have my soul. i hope you die by my side, maybe it's all ages away, but i hope we die at the exact same time. — Il est difficile de pointer du doigt le moment exact où cette amitié s’est muée en quelque chose de différent, pas forcément de plus profond, mais bel et bien de plus intense. Dans le fond, peut-être qu’il y a toujours eu plus sans qu’ils ne se l’avouent à eux-mêmes pour des raisons différentes et similaires à la fois, l’avant venant ternir le maintenant à en effacer toutes ses teintes colorées et ne laisser que du noir et du blanc, jusqu’à ce que la frontière ne soit franchie et que les couleurs reviennent petit à petit dans le paysage, parfois gribouillé de tâches noirâtres qu’ils effacent toujours à un moment donné. Fuck it. Deux mots ayant réverbéré entre les parois de sa boîte crânienne à quelques secondes de leur premier baiser, toutes ses restreintes et angoisses abandonnées au profit de lèvres qu’il ne se lassera jamais de goûter. Fuck it avant toutes leurs premières fois. Fuck it finalement tout le temps lorsqu’elle est là. Il s’aime à s’oublier dans ses bras et à se fondre dans ses étreintes, sous ses baisers et ses touchers, à prétendre que le monde n’est composé que d’eux deux et qu’ils n’ont besoin de personne, de rien non plus, si ce n’est de la présence de l’autre et de tous ces mouvements dont ils sont les seuls à connaître le secret. I love you. Trois mots ayant échappé à ses lippes trop de fois pour les compter avant qu’elle ne vienne les twister et les transformer en des I hate you qu’il ne pense même pas. I love you murmuré dans le creux de son épaule lors de ces nuits qui lui donnent envie d’arrêter le temps, lorsque ses bras l’empêchent de s'éloigner et que leurs deux corps s’échauffent sous leurs draps froissés. I hate you hurlé au beau milieu de leur cuisine avant que la porte claque et que les pas rageurs se fassent entendre dans la soudaine immensité. Stay with me qui se mêle à un get the fuck away, don't leave me à un never come back, comme leur mélodie imparfaite jouée sur leur piano qui ne tient qu’à un fil.

* et puis merde, je t'aime, j'te déteste, reste avec moi, barre-toi, me laisse pas, reviens pas.

7th July, 2012, 2am, drinking with the boys in his apartment
(current state: drunk)
— I think I might love her.
— You what?
— I love her. Evy. Y'know.
— This is the stupidest thing I’ve heard all day. Tell him, Ares, that he isn't making any fucking sense.
— I mean… It’s kinda obvious, bro.

10th July, 2012, 4am, rushing to wake ades up
(current state: drunk again)
— Wake the fuck up, Ades.
— What the hell? Get out of here.
— I will but look. What do you think she meant?
— It’s… 4am?! I don’t give a fuck, leave me alone.
— Come on, I’m freakin’ out, you can’t leave me like that.
— She wants to fuck you.
— Wait, what?
— I don’t fuckin’ know, man, so I’m assuming that’s what it is. If you wanna know, ask her. And get the fuck out of my bed.

text messages a écrit:

17th July, 2012

2:35 am / gid: ok i kissed her
2:35 am / ades: tell me she slapped u in the face
2:36 am / ares: how did it go???
2:45 am / gid: it went... well
2:46 am / ades: for real bro? it went well? that's all u gonna say?
2:46 am / ares: he's got a point. u can't leave us with just that
2:50 am / gid: i'm just thankful i'm not drunk
2:50 am / ares: ???
2:51 am / gid: otherwise i would've asked her to marry me
3 am / ades: the fuck are u on bro

traduction:

empty. say a prayer for me, help me to feel the strength i did. my identity, has it been taken? is my heart breaking on me? all my plans fell through my hands; they fell through my hands, on me. all my dreams, it suddenly seems, it suddenly seems empty. — Son monde se retrouve ravagé pour la énième fois, seulement cette fois il en est le seul responsable, lui et cette colère qui explose après des années à s’immiscer partout où elle le peut, à couler dans ses veines et nourrir son myocarde amputé, lui et ses poings qui ne s’arrêtent plus, lui et ses jointures ensanglantées, pas essentiellement de son sang, surtout de celui de cet homme qu’il ne connaît ni d’ève ni d’adam, là au mauvais moment et au mauvais endroit, qui aurait pu être n’importe lequel des autres dont les lèvres sont venues se cogner aux siennes. Le verdict tombe vite : quatre années fermes. Il cherche son regard et rencontre celui d’Ades à la place, teinté d’une déception que ce dernier ne tente même pas de dissimuler, lui provoquant un violent haut-le-cœur. Cette déception le suit partout, lui colle à la peau comme ses tatouages y sont ancrés, contamine jusqu’à la dernière de ses pensées et les noircissent lors de ces fois où la réalité lui paraît trop réelle, que ses pieds frôlent le sol des mêmes couloirs, que sa langue goûte aux mêmes plats et que ses yeux se posent sur le même plafond craquelé. Il est déçu de lui-même mais il se hait surtout d’être devenu l’homme qu’il est aujourd’hui, le petit ami jaloux, le fils ingrat, un raté, un lâche, un putain d’animal. Ce n’est pas une vie ça et pourtant, il a fait le choix de foutre en l’air sa dernière.

29th june, 2018, fci otisville visiting room
— Do you think they’ll ever forgive me? And I mean Ades and… Evy.
— They’re not angry at you, Gid.
— They should be. You should be.
— Why would I ever be mad at you?
— Come on, Phee, you have plenty of reasons to be mad at me.
— Well, I’m not. And neither is Ares.
— It’s true. I’m not angry and Ades isn't either. He’s just… Y’know.
— And Evy?
— Evy loves you.
— She can’t even look at me.
— She loves you. Please, don’t argue with me now.

10th march, 2021, fci otisville, unit cell
— Did you see your girl today?
— Yeah.
— How was it?
— I don’t know.
— Doesn’t mean anything.
— Means I don’t know if she’s still my girl.
— For what it’s worth, I’m pretty sure you can pull any chick you want, G. Just wait until you get out.
— Thanks, man. Though that’s not what I’m worried about.
— Yeah, I know. Don’t think too much about it, it won’t help.
— I guess.
— Come on, cheer up. It’s your freakin’ birthday.

traduction: