26.02.1974 : Né dans l'Oregon d'une mère trop faible pour quitter son époux, vétéran de la première guerre du Golfe. Une petite histoire, une si petite histoire qui tourne et tourne encore, depuis que le monde se voit foulé au pied de l'Humanité. Le père est un homme renfermé, quelque fois violent avec ses enfants qu'il estime devoir élever dans la stérilité des sentiments. À quoi bon s'encombrer ? Sa soeur Meriam en a développé une agoraphobie particulièrement présente dans ses jeunes années. Iskandar essuyait les coups pour elle, un lien que l'on aurait pu croire indéfectible jusqu'à ce qu'il le brise pour s'émanciper.
1993-1994 : Il quitte son domicile sans se retourner, sans un mot, sans effusion aucune, à l'image de son père. Il entreprend à Salem des études d'Histoire pendant quelques années mais comprend vite que son esprit méthodique et ses analyses pourraient être utilisées dans d'autres domaines que la culture. Il rencontre Hank Anderson, dans le cadre d'une option intitulée "criminologie et histoire de la violence". L'agent lui propose alors de rejoindre les programmes de la police d’état.
1995 : Par esprit de contradiction pour cette figure paternelle de substitution, il s'engage dans l'armée de terre, peut-être pour braver la peur dont il hérite de son géniteur. L'entraînement et l'esprit de corps lui sont rapidement insupportables. Il abandonne les classes quelques mois après avoir débuté et retourne sur les bancs de l'Université.
1996 : Il réussit les tests d'entrée en tant que cadet de la police d’Etat et en subit dès lors l'entraînement rude et millimétré. Le soutien d'Anderson lui permet d'oublier la contrition qu'il doit subir, il se force à rentrer dans le rang. Il se spécialise dans les crimes majeurs, et la psychologie des criminels.
Il excelle dans les épreuves de tir à l'arme à feu.
1999 : Devenu lieutenant, il sort enfin des griffes du système pour entreprendre sa première enquête. Jugé associable et irritant, il ne se fait que peu d'amis sur le terrain mais attire le respect lors du premier interrogatoire qu'il mène. Sa propension à s'identifier au meurtrier lui permet de résoudre l'affaire et lui vaut une réputation d'analyste qui ne fera que se confirmer au fil des années.
2001-2002 : Muté dans l’état de New-York, il est mobilisé suite au drame du 11 Septembre. C'est dans la panique générale et le désoeuvrement d'un monde qui croit bien s'écrouler qu'il rencontre par hasard Maxine, qui devient son épouse l'année suivante. Le couple s'installe à Brooklyn dans la foulée.
été 2002 : Il décide de rentrer dans l'Oregon. Le hasard des humeurs, la recherche d'un écho. Il ne parvient pas à passer le seuil de la propriété familiale. Il demeure une ombre à la lisière des arbres, à chasser ce hasard, sans jamais véritablement le trouver. Les rencontres se font avortées, et la réconciliation avec l'ombre d'un père désormais proche de la tombe semble à jamais proscrite.
2003-2007 : Maxine peine à tomber enceinte. Le couple se déchire une première fois quand Iskandar expose sa vision du monde et son détachement glacial : avoir un enfant n'est pas au coeur de ses préoccupations. Il choisit de répondre à une annonce d’Interpol et il passe quelques années à Lyon, principalement pour fuir les échos saccadés de son passé à chaque fois qu’il est question de cet enfant.
2005 : C'est lorsqu'elle baisse totalement les bras et qu'elle abandonne toute démarche pour tomber enceinte que la vie piège Maxine de la plus belle des manières. Elle mettra des mois pour avertir Iskandar, craignant sa réaction.
2006 : Hannah est dans les bras de son père, et tout change, tout bascule. Une seconde qui consume tous les a priori, qui élève des croyances sur une psyché qui se clamait d'un réalisme torve. La froideur et le détachement crèvent sous le regard bienveillant que la petite fille échange avec lui. C'est une histoire passionnelle qui débute. Qui s'arrêtera bien trop tôt.
2007 : Il retourne au service de la police d’Etat, fort d’une expérience qui le fait paraître tel un dieu. Hank imagine pour lui une section spéciale, qui se pencherait sur les crimes les plus violents perpétrés par ceux qui ont la voracité de l’animal et l’intelligence des diables.
2014 : C'est un jour ordinaire. C'est un jour si ordinaire. On le joint sur son téléphone pour lui dire que sa fille a eu un accident. Mais l'on ment. L'on ment. Sa fille est morte. Il l'apprendra en rejoignant Maxine à la morgue et en posant un dernier regard sur la pâleur du cadavre de son enfant.
2015 : Le deuil et la colère ont raison de son mariage qui ne tarde pas à exploser dans les cris et les larmes. Iskandar abdique vite, bien trop vite. Plus rien n'a de sens, ni de saveur. On lui a collé dans les pattes une affaire de trafic de femmes et de stupéfiants pour le détourner de son désespoir. Comment peut-on encore espérer, dans les bas-fonds de Chicago ? Il n'est plus jamais là et lorsqu'il rentre à la maison, il est absent, dans la solitude de sa tête, et dans son apathie troublante. Il commence à consommer de la cocaïne et se laisse dériver dans des délires qui frôlent la psychose.
2016 : L'enquête débute fort, il traque les prostituées et les dealers, et finit par trouver alliance et espoir dans les grands yeux noirs d'Abelina. Elle sera son salut, et peut-être également sa condamnation. S'il la sauve et fait tomber en grande partie le gang qui niait l'être pour ne plus la dessiner qu'à l'état d'un objet qui se fait abuser, le réseau est tentaculaire. Et Iskandar se perd dans ses méandres.
2018 : C'est camé jusqu'à l'os et pourtant l'esprit extrêmement clair qu'il imagine pour la première fois donner la mort. Apporter à Abelina une délivrance que jamais personne ne lui offrira. Ce constat fascinant porte l’effroi dans sa carcasse déjà vide. L’acte se manque, il n’ira pas au bout, il n’y aura qu’une étreinte un peu trop passionnée et sa gorge bleuie sous la fièvre de ses instincts. Elle n’en a jamais parlé. Après tout, qu’est-ce que le témoignage d’une pute ?
2019-2020 : Iskandar est réintégré à la tête de l’unité qui lui fut offerte par Hank il y a des années. Il y revient en divinité noircie par des rumeurs qu’il ne dément jamais. Les dossiers se succèdent et pourtant l’ennui devient un tendre confident qu’il ne parvient plus à chasser. Puis soudain c’est l’été, Orphée apparaît, et le projet de la modeler dans des matières aussi brutales que satinées prend forme dans son esprit dérangé.