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(02.06.2023) STQ FÊTE SES 5 ANS HAPPY BDAY !

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 Les jeunes filles (Imra)

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Messaline Maraï;

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Messaline Maraï



Lily Nova
Ethereal (ava)
Orphée, Virgil, Grisha, Céleste, Eleusis
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755
Les jeunes filles (Imra) RI3HmOT
29
La fille des draps aux billets verts, elle appartient à tout le monde, à personne
Prostituée pour payer son loyer. Et puis elle apprend les lois, double master d’avocate et de science politique.

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Message Sujet: Les jeunes filles (Imra)   Les jeunes filles (Imra) Empty Mer 23 Sep - 11:19


les jeune filles
Cette disposition me donne un grand élan dans certains moments, mais le plus souvent elle tourmente sans cause, agite sans fruit et fait beaucoup souffrir ceux qui la possèdent.

  Messaline est devenue absente, ombre des décombres de sa psyché en décomposition, elle a le cœur ravagé et le corps exaspéré, une scission, une coupure, une syncope, une maladie, la nécrose creuse dans les veines son agonie ; elle a les larmes toujours à sa paupière qu’elle essuie et refoule, la solitude au bord des lèvres. Premier jour, elle ne se réveille pas, puis elle hausse les épaules, elle n’ira pas. Deuxième jour, elle se recroqueville, dans son lit, ne mange rien. Elle n’a pas pris conscience que son corps réclamait les substances pour le nourrir, pour le faire vivre. On voit ses cotes quand elle se déshabille, rêve inconscient de faire fuir chaque client qui passe, en vague trépassent, sur elle et leur odeur, sur elle. Elle reste des heures dans la baignoire, sa tête sur ses genoux et les yeux scrutent, obsessionnels, le pauvre meuble au dessus de l’évier toujours impeccable, parce que Messaline lave, dépèce, la peau de ses mains d’ailleurs s’écartèle, une rugosité et du carmin, des stries pour la peau décapée, pour la peau parcheminée, sèche et solide. Des lambeaux. Messaline retire son regard, fasciné, par les promesses d’éternité, dans la boite à pharmacie des médicaments. Et chaque jour l’emporte ; elle ouvre la boite de Pandore, la referme, tente de se convaincre qu’il y a encore de l’espoir, quelque part, qu’elle arrêtera, qu’elle ira voir une psy, qu’elle se faufilera dans les bras de sa mère, et la voix surgit, déplace le bonheur imaginaire, ce brin maigre et fragile, un brin d’or dans l’océan brumeux et gluant de ses idées qui transpercent. Ils ont appelé ça la décompression mais Messaline ne comprend pas, elle ne souhaite pas comprendre. Tout ce qu’elle voit semble noyé dans les affres d’une pensée puissante, d’un questionnement émotif et seule, Messaline hausse les épaule, se recroqueville, une répétition acharnée pour trouver le sommeil. Seul, le sommeil lui permettra de couler des jours meilleurs.

 Elle regarde, fatiguée, la ruelle déserte, quelques chalands, jeans et vestes de cuir, les épaules droites et rigides, devant les bâtiments, ils surveillent, alpaguent les clients, se meuvent dans les corridors et les artères de briques, ils fouillent, les policiers, patrouillent, surveillent, enquêtent, il y a, dans ce quartier, la violence des gangs, le désir de s’appartenir à une entité, s’oublier dans le groupe, fusionner. Messaline regarde, amorphe, vide, son cerveau n’analyse plus puisqu’il se meurt, puisqu’elle le bloque. Et, lorsque la silhouette de cette fille aux mèches corbeaux et au visage dur pénètre dans l’antre du minotaure, des étages et des étages avant de déposer son offrande sur le pas de la porte, Messaline n’entrevoit qu’une présence étrange, celle d’un spectre aux longues voiles d’ébène. Elle ferme ses paupières, imagine cette présence, pense alors à cette collègue autrefois admirée en secret, Messaline se nourrissait de sa force, son aura, elle qui vagabondait, toujours droite, fière, elle avait ce côté de la présence authentique, transcendante, elle disait je suis là, par cet épiderme et sa manière de s’élancer dans les voitures des clients, aucune peur mais le fer dans les pupilles. Imra. Elle se souvient encore de son prénom. Messaline sursaute quand elle entend les pas, d’une ouï agile et puissante, elle récupère trop d’éléments qu’elle ne peut s’empêcher d’analyser, la curiosité la pousse à observer par le vasistas. L’écho de la réminiscence. Imra Saint-Clair apporte encore dans son sac des outils pour taillader la mort qui rôde. C’est elle qui chuchote dans son absence, par ces menus objets qu’elle offre, contre la porte écaillée.

  « Je n’ai rien à t’offrir mais j’aimerai que tu viennes chez moi. » Messaline se surprend, la phrase jaillit de sa gorge, vole et éclate contre les cloisons d’un couloir immonde, ton éraillé par le silence qu’elle garde depuis des jours, des jours qu’elle n’a fréquenté personne, qu’elle a scellé la sociabilité pour une solitude gourmande et hargneuse.  « J’ai besoin de toi. » Elle murmure assez fort pour sa demande percute. Se frotte les yeux afin d’éponger la tristesse tout autour et en elle, cette résignation immonde dans l’ichor de porcelaine. Elle ne suppliera pas Messaline, espère même qu’elle refuse l’invitation.  


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devant une porte fermée
je n'ai jamais écrit croyant le faire, je n'ai jamais aimé croyant aimer, je n'ai jamais rien fait qu'attendre devant une porte fermée. Marguerite Duras
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Message Sujet: Re: Les jeunes filles (Imra)   Les jeunes filles (Imra) Empty Dim 11 Oct - 1:49


les jeune filles
Un visage de lune, des yeux rêveurs, mais bientôt on s'apercevait que le visage exprimait autant de violence que le corps.

Ce matin, j’ai pensé à toi.
Ce matin, j’ai ouvert les yeux pour m’égarer,
Au hasard, vers ton visage et ton prénom.
Messaline, comment te portes-tu ?
Messaline, le bonheur t’a-t-il enfin rejoint ?


Le cynisme borde la mine patibulaire de cette longue silhouette sombre errant dans les couloirs blancs d’un supermarché où se bouscule les pressés, les détendus, les vacanciers, les costards-cravates qui boufferont leurs salades sans en savourer l’arôme, les mères de famille aux yeux criant leur immense lassitude, les enfants pensant que le carrelage fracassé est un terrain de jeu assez amusant pour leurs esprits insouciants et naïfs, encore inconscients de la noirceur du monde. Et au milieu de cette vague d’ordinaire, il y a elle, sa veste de cuir craquant à chaque mouvement, le bracelet d’or aux breloques inquiétantes cliquetant lorsqu’elle élève sa main vers une conserve et une bouteille, les mèches noires entourant ce visage terni de pâleur, de cette fatigue avec laquelle elle semble être née, les lignes de ses traits dessinés par la colère silencieuse, par le mépris. A croire que rien ne brille plus en elle, ciel noir sans étoiles à contempler, ectoplasme que les vivants ne peuvent réellement percevoir tant elle se fait petite. Imra n’a pas envie d’être là. Imra n’a que rarement envie d’être dans l’ici et maintenant, errante entre le passé déprécié et le futur tant craint que les cartes lui dictent comme tout aussi gris que son présent. Elle pourrait bien choisir de s’ouvrir la gorge pour se laisser mourir dans un coin de son sanctuaire et se faire oublier, cesser tout de suite la torture qu’est de vivre, dépressive de plus dans une marée de dépressifs qui ne se soignent qu’aux pilules d’une belle couleur pour faire croire qu’ils avalent de la magie.

On passe près d’elle et son nez se fait agresser par le parfum féminin d’une fleur adolescente. Le regard qui n’est qu’un cratère dans lequel il ne faut pas se risquer à tomber se détourne pour mirer la silhouette innocente dont la main pâle rejoint celle d’un garçon de son âge. Leurs lèvres se rejoignent et la fleur ayant encore toutes ses pétales esquissent un sourire inspiré d’un amour dont personne ne pourrait douter, les opales brillants d’allégresse, à croire que l’amour rend intouchable. Ce simple sourire l’agresse, la rappelle à un mort six pieds sous terre, à tous ceux qu’elle a un jour cru aimer. Messaline. La fille et sa chevelure entremêlés d’ondulations dans lesquelles son amant doit bien laisser trainer ses doigts lorsqu’il est inspiré lui rappellent cette nymphe croisée sur le béton strié il y a dix ans de cela. Encore si jeune et frêle, elle donnait son corps aux badauds en manque d’érotisme, jouir pour jouir, pénétrer le ventre creux de n’importe quelle putain désespérée qui voudrait bien d’eux, que leurs panses soient énormes ou velues, qu’ils soient laids ou insipides, à l’haleine putride ou aux chicots jaunis. Qu’importe, ils payaient alors elle devait bien s’abandonner à eux, dépendante de leur fortune. Et si la nausée la prenait à chaque passe terminée, sentant les courbatures d’étreintes sans saveurs lui laminer les entrailles, elle ne pouvait rien faire de plus qu’abdiquer, remonter la bretelle élimée d’une robe maintes fois mises, déplisser son jupon trop court, haillon de lubricité pour attirer les regards des gourmands sur son corps famélique et reprendre sa route, auto-stoppeuse de la luxure. Et c’est ainsi qu’un soir parmi tant d’autres, elle a croisé le doux visage d’une Messaline dont le prénom est aussi tendre qu’est sauvage celle qui le porte. Elle l’a séduite sans même le vouloir ni même le savoir. Oisillon aux ailes encore frêles, de couleurs vives, elle a refusé de voir les mains crasseuses du monde la détruire davantage. Mais Imra n’est pas de celles qui sauvent. Elle observe, témoin de la destruction et panse les plaies lorsqu’elle le regard de la blessée se détourne avant de s’échapper.

Et ce jour n’échappe à aucune règle écrite depuis des années. Il lui a fallut prendre quelques objets nécessaires dans son sac et prendre la route vers le château du cerbère la gardant prisonnière sans qu’elle ne le sache vraiment. Innocente et inconsciente des chaînes qui entourent les poignets et les chevilles de sa douce colombe, le corbeau pénètre l’antre du monstre pour déposer son maigre présent sur le perron. Les bottines bordeaux et vernis sont prêts à crisser pour se détourner, ne supportant pas la réverbération de ses pas coupables dans ce long couloir qui semble se resserrer sur elle. A son tour, elle se fera peut-être prendre par les filets du pêcheur cherchant à hameçonner de nouvelles sirènes. Pour l’heure, elle ne pense qu’à fuir, qu’à reprendre sa route sans trop s’épancher sur ce geste plein d’une générosité qui ne lui ressemble pas et qu’elle n’abandonne qu’à de rares âmes, le bruit du plastique et des babioles se bousculant heurtant le silence comme un écho qui la condamne. Messaline n’aura droit qu’à quelques mots sur un écran gelé, qu’un maigre présent de son passage, comme si ce n’était rien et des mois passeront sans qu’elle ne signe de sa présence dans la vie bien grisonnante de l’oisillon. Jusqu’ici, la porte est demeurée close et à chaque fois qu’elle lui tourne le dos, rien ne bouge et bien heureusement. Les mains plongées dans les poches de son cuir, elle se prépare à la fuite avant de se figer, le déclic d’un battant coulissant faisant rater au charbon qui lui sert de cœur quelques battements vitaux. Douleur et crainte se mélangent en son ventre que plus aucun homme ne visite tandis qu’elle se détourne à demi vers cette apparition fantomatique. Elle se laisse aller à croiser ce regard qui ne la juge pas et qui semble la caresser tout en étant mort. La vision de cette maigreur infantile la bouleverse mais elle ne dira rien, demeure impassible face à l’horreur d’une vie qui flétrie, les dents crissant lorsque vient l’audace de cette proposition. Ça n’a jamais été dans leur contrat. Elle n’a aucun droit de demander, de murmurer de telles choses à elle qui n’est qu’un poison. Alors, elle manque de la fusiller de ses prunelles noires, le ton sec. « Tu n’as pas besoin de moi. Tu as tout sauf besoin de moi. » Rocailleuse, la voix agresse ce grand néant sans le vouloir et si le refus ne sonne pas, il se sous-entend sans qu’elle n’ose pourtant bouger, fleur fanée s’enracinant dans le marbre. D’une glissade gracieuse, elle se retourne totalement pour parvenir en quelques enjambées face à ce corps que la vie aimerait fuir ou peut-être est-ce le corps qui tente de fuir la vie. Elle aimerait lui demander depuis combien de temps n’a-t-elle pas manger ou bu, demander de quoi elle peut bien se nourrir si ce n’est de tristesse et d’apathie, si quelques fois elle sourit ou rit, si respirer lui fait mal, si elle ne manque de rien. A la place, elle ne peut qu’entrouvrir les lèvres à nouveau pour déposer sa sentence dans un murmure « Tu devrais prendre garde à qui tu invites sous ton toit. Il y a des âmes qui finissent par maudire les lieux. » L’ombre d’un sourire qui n’a rien de joyeux mais tout de triste et d’amer s’esquisse alors, une fatalité que les lèvres lui exposent sans honte « Je ne sais pas si tu as vraiment envie que quelqu'un comme moi pénètre ton dernier refuge. Réfléchis bien. As-tu vraiment besoin d’moi ? »

Réfléchis Messaline,
Car je suis un fantôme qui bouleversera tout,
Qui s’accrochera aux murs et hantera tes nuits,
J’ai amené avec moi des démons qui ne devraient pas avoir à te toucher,
Toi, mon intouchable colombe.  
 


(c) corvidae
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Message Sujet: Re: Les jeunes filles (Imra)   Les jeunes filles (Imra) Empty Ven 20 Nov - 9:49


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Cette disposition me donne un grand élan dans certains moments, mais le plus souvent elle tourmente sans cause, agite sans fruit et fait beaucoup souffrir ceux qui la possèdent.

  J’ai besoin de toi. La phrase la surprend, pénètre les artères, hante l’esprit, arrondit les angles de son âme assez fière, parfois ; Messaline a le désir de contrôler sa vie, mais ce désir parti, elle a sa peau décapée à la sensibilité. S’échappent à ses lèvres les aveux ; ce besoin de l’autre afin de ne pas se noyer profondément dans les abysses que l’on nomme dépression, ce désir de rien, ne reste que celui de s’engouffrer dans le lit, sous la couette et ne jamais en sortir, souhaiter dormir, pour l’éternité, ne pas se relever, apaisée sous la chaleur factice des draps. Dans le couloir, l’on entend les bruits des enfants, les rires, les cris, les jeux enfantins et les chamailleries. Dans ce quartier où les voitures de polices patrouillent et enquêtent pour des histoires sordides de drogue mais jamais ne sauvent les victimes de la prostitution, il y a un rayon de bonheur dans ces petites silhouettes insouciantes du danger et des menaces. Ce qu’elle aimerait retrouver l’élan de son enfance, enfance déracinée par l’environnement de pauvreté. Il y a dans ce quartier un mélange de langues et de culture, de classes et de profils, les crimes se mêlent au respect, les politesses se mélangent à la violence des coups. Et, dans ce couloir de nacre sale, deux jeunes filles se toisent.

Imra désenchante l’atmosphère de drame qui s’écoule entre les cloisons, cette tension à voir le corps maigre, le corps recouvert d’un surplus de couches de coton, trois pulls pour masquer le squelette d’une prostituée se refusant à prendre soin d’elle. Elle a fermé les rendez vous, elle a éteint son portable, elle s’est engouffrée dans la solitude crasse, celle imposée par la honte et la culpabilité d’être soi et de vivre aussi. Cette responsabilité de vivre, Messaline n’en veut plus. Imra parle et, certainement qu’elle ne dit pas cela pour faire fuir l’enflammée fanée par les années de coups de boutoir, entendre le bruit des épidermes qui claquent. Sous l’agressivité, Messaline se replie, l’envie de fuir, de se cacher. Messaline se culpabilise car elle a péché, tous les jours, quand elle recevait les billets sales, l’argent de la vente de son enveloppe. J’aimerai simplement être un esprit pense-t-elle dans la baignoire, immergée dans l’eau de la purge, à se décaper la peau à trop frotter la peau.

 « Tu as raison. » Elle sonne faux, cette réplique. Elle ne dira plus rien, elle se trouve bête. Raison de quoi d’ailleurs ? Quand une âme en souffrance cherche quelques détours et demande de l’aide, la majorité se détourne ; voile ce que je ne saurais voir pour ne pas perturber ma petite vie sereine, protégée de ces rumeurs et de ces légendes qui ne sont pas réelles pour moi. Messaline n’a jamais su quémander de l’aide, n’a jamais su dire ce qui la contraignait. Silencieuse personne, on ne la voyait pas. Invisible par désir, elle semblait l’ombre que l’on apercevait et qui disparaissait.  


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Message Sujet: Re: Les jeunes filles (Imra)   Les jeunes filles (Imra) Empty Lun 8 Mar - 14:15


les jeune filles
Un visage de lune, des yeux rêveurs, mais bientôt on s'apercevait que le visage exprimait autant de violence que le corps.

Et la voilà prête à rebrousser son chemin, mettant la fée aux ailes froissées au défi de laisser entrer un démon bien aigri dans son antre crasseuse. Elle ne voulait pas se faire prendre par les yeux de cette fille qui partagea un jour un bout de son béton où elles dansaient ensemble, plus que des ballerines, elles étaient les courtisanes d’un autre temps, puritaines sans l’être, se donnant aux hommes qui voulaient bien d’elles et Messaline, angelot bien fragile, trop jeune pour apparaître dans la nuit sous l’auréole jaunâtre d’un lampadaire, se glissa sous les ailes noir du corbeau dont le bec s’abaisse vers elle, sous l’orée des cheveux qu’elle n’a pas pris le temps d’attacher. Elle voit sa mine, sa pâle mine qui espère sans plus vraiment le faire, elle voit la saleté de la tristesse dans ses yeux, cette immense lassitude que délaisse la déprime derrière elle. Solitaire, Messaline l’est, de feu et d’eau, elle oscille et Imra aimerait s’y enrouler pour la protéger du monde où les hommes mordent et griffent pour se croire plus puissants qu’une femme qui en supporte déjà bien assez. Elle aurait voulu ne pas être ce qu’elle est, plus pure. Pour la première fois, elle se voit comme une vieille dame errante aux mains trop noires pour oser la toucher. Elle s’est déjà bien assez fait souiller. Messaline semble être cette jeune sœur qu’elle n’espéra jamais, protégeant plutôt son frère des coups bas de sa mère mais elle ne put l’empêcher de le faire marionnette d’un crime qu’’elle peine à pardonner. Il lui semble parfois que sous ses ongles s’accumule encore le sang de Dris, qu’elle tient encore sa poigne froide et dure, rigor mortis dit-on et elle se rappelle l’avoir pensé. On ne pense pas que les morts refroidissent si vite, on dit qu’ils sont encore chauds mais elle se souvient qu’elle est arrivé trop tard, ayant fermé les paupières de son amant qui posé sur elle des yeux attendris et trop plein d’espoir comme le fit Messaline.

Finira-t-elle comme lui ?
A cause d’elle.
Encore et toujours à cause d’elle.


Elle n’oserait l’avouer mais la peur pourrait l’étreindre face aux traits auréolés de boucles sauvages, se disant que les hommes, les clients réguliers ou non, doivent aimer tenter d’embrasser le bouton de rose ses lèvres qu’elle fixe avec placidité, sans envie, sans rien d’autre qu’une contemplation objective car elle se met dans la tête d’un homme qui voudrait sauter une fille comme elle, oscillant entre l’âge de l’enfant et l’âge adulte, innocente dans le visage, déjà pourrie dans l’âme. La rage pourrait se mêler à la peur, la rage pourrait la mener à tuer ceux qui osent s’approcher encore de la tendre colombe qu’elle recueillit un jour sans comprendre ce qu’elle lui trouvait. Et elle ignore encore pourquoi elle est venu jusqu’ici. De toute son apparence sombre, du noir des cheveux aux bottes de cuir, elle bloque brutalement la porte prête à se fermer de cette main qui teint la sienne dans les nuits sombres où elles empestaient la sueur et le sexe. Elles empestaient la décadence même. Elles étaient de simples putes, comme on leur beuglait, un rire suivant l’insulte, le désir malsain dansant dans les iris des passants, le mépris dans les filles qui les croisaient, qui ne pouvaient comprendre que certaines ne voient rien d’autre comme alternative, que certaines n’ont point le choix de se vêtir de rien pour laisser leur fierté et leur orgueil sur le pas de la porte en attendant de passer la nuit à avaler les hommes, à les entendre gémir, à voir leurs hideux visages se crisper sous l’arrivée d’un orgasme disgracieux. Ils ne sont pas tous beaux, ils ne sont pas tous de doux amants. Ils sont parfois vieux, ils sont parfois sales, ils sont parfois trop jeunes. Mais ils aiment le pouvoir d’avoir la thune qu’ils leur jetteront à la gueule ensuite. Bien sûr. Bien sûr, qui n’aime pas le pouvoir et le montrer dès qu’il est en leur possession, que l’on soit directeur d’une immense entreprise ou simple ouvrier d’une usine aux mains calleuses ? « Non. » J'ai tort. J'ai souvent tort mais je ne le dirai jamais. Ça tonne dans ce grand couloir, sa voix grave, son timbre de gorge, qui fait penser qu’elle veut séduire à tout prix alors qu’il n’a rien de plus naturel en elle que cette voix de tentatrice. La main crispée à s’en blanchir les phalanges, elle n’ose que déposer la pointe de son pied sur le perron mais n’entrera pas sans l’autorisation de la propriétaire des lieux, cherchant son regard tendre, élevant sa main libre jusqu’au menton bien doux pour lui faire élever la tête « Quelqu’un t’a fait du mal, Messaline ? » Un autre couard qui pense que tes cuisses sont une belle maison dans laquelle se réfugier et tout saccager, ne laissant que tes pleurs derrière lui, ne laissant pas grand chose que ta maigre carcasse. Je pourrais te venger, tu le sais déjà. « Laisse moi entrer, on pourra parler, s’tu veux. » Elle caresse la peau sans vouloir manipuler car elle se refuse à être un monstre de plus face à elle. La jeune fille en fleur a croisé déjà bien trop de ronces pour qu’elle en soit une de plus. « J’ai pris du thé. Je peux en faire. Des biscuits aussi, je sais que tu en aimes certains. » Je sais aussi que peut-être que tu ne manges pas à ta faim, je sais aussi que la fin t’a peut-être désertée et m’en voilà désolée.

Laisse moi entrer et je prendrai tous tes secrets pour qu’ils pèsent moins lourds sur toi.
Laisse moi entrer et je prendrai ta misère car la mienne est déjà sous ma peau, elle ne fait plus mal.
Laisse moi entrer, Messaline, tu m’as prise au piège, me voilà prisonnière et je l’accepterai.


Élevant ses yeux, elle cherche à détecter l’écho d’une présence. « Y’a quelqu’un avec toi ? » Et si c’est le cas, elle la fera partir, mère ou autre, elle la jettera dehors le temps d’être ici pour qu’elles ne soient que deux et que Messaline retrouve un bout de paix dans le chaos qui est sa vie.


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