Le meilleur moyen de réaliser l’impossible est de croire que c’est possible. - Warston

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Les yeux posés sur la pile de vêtements qu’elle est en train de ranger, Isabella écoute néanmoins avec une certaine attention les confidences de son petit-ami au sujet de l’arrivée prochaine de sa nièce. Cela lui tient à cœur, elle le voit bien, il paraît même assez inquiet quant à la suite des événements. Mais cela fait plusieurs fois qu’ils en parlent maintenant, et elle commence à craindre qu’il se montre un peu trop… Présent, envers la jeune fille. Peut-être qu’elle se trompe, peut-être que c’est exactement ce dont elle a besoin après que sa propre mère l’ait laissée tomber. Mais elle a la sensation qu’il oublie qu’à dix-neuf ans, elle est loin d’être une enfant. Ou peut-être que c’est son propre passif qui lui fait voir les choses de cette manière. Elle n’a jamais été une enfant, elle, elle n’est sûrement pas le bon exemple. Mais elle pense aussi à Peyton, aux garçons… Elle prend une petite inspiration alors que son regard se pose un instant sur Nikolaï. Cherchant la manière dont elle peut lui dire ce qu’elle pense sans le blesser. – N’oublie pas ce que c’est d’avoir dix-neuf ans quand même. dit-elle simplement avant de poursuivre ce qu’elle faisait. Elle ne veut pas se mêler parce qu’au fond, elle se trompe peut-être complètement. Elle préfère le laisser agir selon son instinct. Elle ne peut rien faire d’autre que lui donner un ou deux conseils, elle. Acquiesçant d’un signe de la tête lorsqu’il confirme vouloir laisser à sa nièce l’occasion de décorer sa chambre comme elle l’entend, silencieuse, elle reste pensive. Elle imagine sans mal le désarroi d’une jeune fille qui doit subitement tout quitter pour partir à l’autre bout du pays. Mais elle ne sera pas seule. Alors qu’ils retrouvent le silence quelques secondes, Nikolaï finit par reprendre la parole pour évoquer un sujet beaucoup plus préoccupant pour la Latina. Elle reste impassible, elle l’invite même à poursuivre alors qu’il lui propose de s’arrêter. Elle veut savoir, elle doit savoir. Faisant mine de s’occuper, elle écoute pourtant avec une extrême attention les paroles de l’enquêteur. Il veut se rendre à un rendez-vous entre Luke et l’un de ses contacts. – Comment… Comment est-ce que tu l’as su ? Elle ne devrait pas poser ce genre de questions, Isa. Elle s’inquiète déjà à l’idée qu’il ait mis son mari sur écoute, alors, entendre qu’il veut aller l’espionner physiquement… C’est loin de la rassurer. Elle laisse échapper un soupir à peine perceptible alors qu’elle lui tourne le dos pour aller ranger les dernières affaires qu’elle a sorties du carton. – Et tu comptes t’y rendre tout seul ?

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Il faut bien qu’elle sache tout, Isabella. Elle ne peut pas simplement se douter que l’homme qu’elle aime est en pleine enquête sur celui qu’elle a épousé, sans se tenir un minimum au courant. Elle a besoin de savoir ce qui attend Luke… Ce qui l’attend elle, également. Car en tant qu’épouse, et ancienne employée de la Kingston Corporation, elle sera entendue, elle aussi. Qu’elle le veuille ou non. Mais c’est compliqué d’affronter cette situation. Ce n’est pas n’importe quelle affaire, pas pour elle. C’est malgré tout son mari qui va être arrêté, un homme qui lui a fait beaucoup de mal, mais à qui elle en a fait tout autant. Elle a détesté, haï Luke. Mais l’idée de le savoir en prison lui fait plus de mal que de bien, elle doit bien se l’avouer. Sa culpabilité est toujours présente. Et pas seulement. Elle a aussi peur pour Nikolaï, terriblement peur. Elle n’aime pas le sentir si proche du danger, car quoi qu’il en dise, elle sent bien qu’il y a un danger. Pourtant, la jeune femme reste relativement calme, en apparence. Elle l’interroge, elle tente d’emmagasiner les informations qu’il lui donne pour mieux comprendre ce qui se passe. Luke est sur écoute. Elle en a la confirmation. Elle apprend par la même occasion que l’enquête a pris beaucoup plus d’ampleur puisqu’ils sont plusieurs sur le coup. Voilà au moins une chose qui la rassure. Mais elle ne dit toujours rien, Isa. Elle fait mine de ranger les toutes dernières affaires qu’il manquait dans l’armoire de son petit-ami. Elle l’entend qui se lève, mais elle lui fait toujours dos. Car s’il la voit, s’il croise son regard, il comprendra qu’elle est loin, très loin d’être rassurée. Seulement, il la connaît, Nikolaï. Il n’a pas besoin de plonger son regard dans le sien pour comprendre toute l’angoisse qui l’envahit. Il la rassure, elle comprend bien qu’il essaie en tout cas de la rassurer. Il enlace même sa taille pour la serrer contre lui alors qu’il lui affirme que tout va bien se passer. – Pourquoi est-ce que c’est toi qui dois t’en charger ? lâche-t-elle enfin, la voix plus faible qu’elle ne le voudrait. Elle se retourne enfin vers lui, pour lui faire face. Elle a les yeux remplis de peur, Isa. – Si vous êtes plusieurs sur cette affaire, quelqu’un d’autre pourrait très bien s’en occuper et toi… Toi tu aurais quand même les informations dont tu as besoin. ajoute-t-elle avant de déglutir difficilement. Et c’est vrai, bon sang. Il n’est pas la bonne personne pour une telle intervention, non, pas avec Luke. – Tu es impliqué Nikolaï, il… Il te déteste. Je ne veux pas que la situation dégénère.

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Pourquoi ? Pourquoi faut-il que ce soit Nikolaï qui se charge d’une mission pareille ? Il y a bien assez de criminels à New-York pour l’occuper ailleurs, mais non. Il n’a pas été seulement réquisitionné dans cette enquête, il en est à l’origine même. C’est lui qui a commencé, il y a déjà des mois, à soupçonner Luke. Il ne la connaissait même pas encore. Il paraît normal que ce soit lui qui finisse par l’arrêter… Oui, c’est ce que son cerveau se dit, en tout cas. Mais son cœur, lui, est beaucoup plus en proie à ses sentiments. Elle a peur, Isa. Elle a peur qu’il lui arrive quelque chose. Elle a peur que ce qui ressemble à une enquête comme une autre finisse par une véritable vengeance, un conflit entre les deux hommes en rivalité trop longtemps. Il veut aller jusqu’au bout… Il ne voit que cela… Mais le reste, ne le voit-il pas ? – Mais je ne veux pas qu’il t’arrive quelque chose ! laisse-t-elle échapper, son regard ancré dans le sien, plus comme une supplique que comme une réelle protestation. Elle tente bien de lui ouvrir les yeux, elle tente bien de lui faire comprendre qu’il n’est pas obligé de prendre de tels risques. Il aura beau lui répéter des centaines de fois que tout va bien se passer… Elle aura toujours peur. Elle tient beaucoup trop à lui pour qu’il en soit autrement. Mais elle écoute ses tentatives pour la rassurer, elle les écoute quand même parce qu’au fond, elle est si effrayée qu’elle ne demande que ça, être rassurée. C’est juste que cela paraît clairement impossible. Silencieusement, elle le laisse terminer sans l’interrompre. Elle entend bien ce qu’il lui dit. Elle entend bien qu’il ne se confrontera pas à Luke, elle entend bien qu’il y aura d’autres agents prêts à intervenir à tout moment. Elle entend tout ça. Mais elle a peur quand même. – Je te crois… Je t’assure que je te crois, et j’ai confiance en toi. Mais… Elle l’aime. Elle l’aime plus que tout au monde. Alors, bien sûr, elle a du mal à rester rationnelle. Et peut-être que ce sont ses sentiments pour lui qui faussent son jugement, sans doute que oui. Seulement elle ne peut pas approuver l’idée qu’il se mette autant en danger. Cette affaire n’est pas uniquement une enquête comme les autres. Luke n’est pas un suspect comme les autres. Elle ne sait pas si Nikolaï peut vraiment garder son calme face à lui mais, ce qui est sûr, c’est que le contraire n’est pas possible. S’il se rendait compte de sa présence… Luke réagirait mal, bien plus qu’avec n’importe quel autre policier, elle le sait. Mais que peut-elle dire d’autre, Isa ? C’est son travail, cela n’est même pas censé la concerner. Elle passe d’un geste fébrile la main dans ses cheveux avant de reprendre, la gorge nouée, mais le ton de la voix plus calme. – De toute manière, je n’ai pas mon mot à dire, je me trompe ?

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Elle se sent prise au piège, Isa. Elle se retrouve dans cette situation qu’elle déteste, celle où elle est impuissante face à ce qui arrive. Cela ne se produit pas en règle générale, jamais. Mais Nikolaï, il n’a pas l’air de lui laisser le choix. Il l’informe de ce qui va arriver, certes, parce qu’elle lui a demandé de le faire. Mais il n’attend pas son accord, ni même son approbation. Il veut juste la prévenir. Il essaie aussi de la rassurer bien sûr. Malheureusement, malgré toutes ses tentatives, la jeune femme a toujours cette boule d’angoisse qui envahit son ventre. Cette peur irraisonnée de le perdre, le perdre à cause de cette enquête, cette vengeance. Mais elle l’écoute quand même, elle écoute chacun de ses mots et se les répète aussi, comme pour tenter d’y croire. – Et où est-ce que c’est, « là-bas » ? demande-t-elle, son regard rivé dans le sien. Elle a besoin de savoir, Isa. Comme si cela l’aidait à contrôler un peu mieux les choses. Même si, au fond, elle ne contrôle rien du tout. Elle n’a aucune emprise sur cette situation, c’est bien ce qui la rend aussi nerveuse. Elle a confiance en Nikolaï, comme elle l’affirme, mais c’est tellement dur d’être ainsi écartée… Alors que c’est elle qui souffrirait, si les choses se terminaient mal. Dans tous les cas, en vérité, c’est elle qui souffrira, et elle le sait. Mais elle n’a pas son mot à dire, comme elle le comprend bien. C’est même ce qu’elle finit par dire à son petit-ami qui confirme ses propos. Elle ferme les yeux une seconde comme pour l’encaisser. – Si tu le dis. répond-elle simplement à sa promesse, beaucoup moins assurée que lui. Elle ne prolonge pas davantage son baiser, pas parce qu’elle lui en veut, mais parce qu’elle a bien trop de mal à accepter cette situation. Cette position. Elle se recule et acquiesce d’un simple signe de la tête avant de quitter la pièce. Elle rejoint le rez-de-chaussée, Nikolaï derrière elle. – Je peux m’occuper du salon si tu veux, et toi de la cuisine ? Non, là tout de suite, elle n’a pas vraiment envie d’être avec lui. Elle a besoin d’être seule ne serait-ce que quelques minutes.

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C’est loin d’être agréable comme situation. En vérité, c’est même blessant pour la jeune femme. Elle se sent prise entre deux eaux, piégée entre d’un côté son amour pour Nikolaï, cette envie d’être avec lui, librement... Et, de l’autre, cette peur que tout finisse mal entre les deux hommes. Elle redoute cette intervention, elle redoute plus que tout qu’elle finisse en altercation. Mais elle n’a pas le choix. Elle n’a pas d’autre choix que d’accepter la décision de l’homme qu’elle aime. Car, non, il ne lui laisse aucun autre choix. Elle se sent impuissante, inutile. Tout ce qu’elle déteste, Isa. Tout ce qu’elle ne connaît pas, mais qu’il lui impose, malgré elle. Elle ne s’oppose pas, pourtant, pas une fois. Elle encaisse le coup, elle veut juste savoir où aura lieu ce fameux rendez-vous. Comme pour garder l’illusion d’un semblant de contrôle sur la situation, sur Luke, sur Nikolaï. Ce dernier paraît hésitant, comme s’il craignait de lui donner cette information. Ce qu’il confirme en lui répondant de manière beaucoup trop vague. - D’accord. dit-elle simplement comme si elle n’avait pas besoin de plus. Et c’est le cas, elle n’a pas besoin d’autres informations parce qu’elle devine parfaitement de quelle boîte de nuit il lui parle. Luke a eu bon nombre de rendez-vous d’affaires dans ces lieux, il y a même organisé quelques soirées privées. Mais elle garde ses réflexions pour elle alors qu’il essaie toujours davantage de la rassurer. Ce qu’il ne comprend pas, c’est qu’il n’y arrivera pas. C’est une angoissée de nature, Isa. Alors, dans une telle situation, comment pourrait-elle ne plus l’être ? Non, elle ne sera pas tranquille, pas tant que cette soirée ne sera pas terminée. Tout autant qu’elle ne peut pas oublier si vite cette conversation et passer à autre chose. Elle est plus distante, soudainement, sans vraiment le vouloir. Elle ne prolonge même pas son baiser, elle se contente de s’éloigner. Elle est, comme, refroidie. Elle préfère prendre ses distances, en vérité, plutôt que laisser ses sentiments la guider vers une dispute. Mais Nikolaï ne le voit pas ainsi. Il semble vouloir se justifier alors qu’elle ne lui a pas fait l’ombre d’un reproche. Alors qu’elle s’est contentée d’accepter de poursuivre leur rangement, comme il l’a lui-même demandé. Elle ne comprend pas, Isa. - Je le sais. répond-elle simplement, la voix plus calme que l’esprit. Mais il insiste encore. Il est en train de mettre sa patience à rude épreuve, Nikolaï. Elle sent cette sensation malheureusement trop familière qui l’envahit, cette boule d’angoisse qui enveloppe tout son être, jusqu’à l’oppresser, malgré elle. - Je ne fais pas la tête, Nikolaï. affirme-t-elle, passablement irritée par son insistance. Instinctivement, elle se rapproche de son sac à main posé sur le canapé pour en sortir une boîte d’anxiolytiques. Elle se saisit d’un cachet pour l’avaler rapidement avant de la ranger à sa place. - Je ne voudrais pas continuer de t’aider à emménager si je faisais la tête. ajoute-t-elle comme si rien ne s’était passé. Elle a du mal à tout encaisser, c’est certain, mais il n’arrange rien en restant campé sur ce sujet. Elle veut juste passer à autre chose, Isa.