je veux juste une dernière danse. (aly)

traits de caractère / aly est douce, peut-être bien trop. c'est l'genre de fille qui ne se rend pas compte que certaines personnes peuvent être méchante parce qu'elle voit le bien partout là où elle passe. aly, c'est l'genre de fille qui, quand elle réalise des choses importantes, peut s'enfermer dans un mutisme complet. elle fume, mais elle boit pas, elle s'drogue pas. quand elle est brusquée, quand elle fait quelque chose contre gré, c'est difficile. mais elle arrive pas à dire non, elle arrive pas à repousser, à lever la voix. et si elle gueule ; c'est parce qu'elle a confiance en la personne, c'est parce qu'elle veut pas l'perdre mais c'est qu'c'est aussi son seul moyen pour communiquer quand elle a la sensation de couler. mais aly, c'est simplement la douceur, la fille trop généreuse.

mais j'veux pas le faire... la rousse de douze ans panique presque. sa voix tremble. elle regarde son père, elle est morte de peur. et lui, il change pas. il pose sa main sur l'épaule de son unique fille, lui fait le plus beau sourire qu'il a en stock. c'est rien ma puce. c'est pour faire plaisir à papa. tu veux pas qu'il te gronde ? tu veux pas qu'il s'énerve ? elle secoue la tête. non, elle veut pas. parce qu'il lui fait peur quand il s'énerve. parce qu'elle oublie pas la douleur sur sa joue, sur son corps, quand il frappe trop fort. j't'assure que c'est rien. tu vas aimer. tu sais faire, je t'ai déjà montré. justement. elle avait pas aimé. mais elle avait pas oser dire non parce que le bleu qu'elle avait sur son corps à ce moment là, il était trop douloureux. elle veut pas le revivre. c'est comme ton oncle, tu le connais bien david. il serait triste, tu sais. elle hoche la tête. c'est vrai qu'il est gentil, c'type là. il lui fait toujours des cadeaux quand lui et sa femme viennent à la maison. puis quand il vient chercher aly au collège, il l'emmène toujours acheter des bonbons. oui, il est gentil. alors, elle veut pas qu'il soit en colère contre elle. tu n'oublies pas aly, surtout pas les dents. elle hoche la tête, l'corps tremblant. il t'attend dans ta chambre. me déçoit pas. elle se rend pas compte aly, quand elle monte les escaliers, à quel point c'qu'elle s'apprête à faire c'est mal. il lui a tellement répété que c'était normal, mais qu'il ne fallait surtout pas en parler. il lui a tellement rentré des choses dans la tête qu'elle s'rendait pas compte du danger de la chose. alors elle monte, elle fait c'qu'on lui a demandé, se retient d'pas grimacer quand elle sent les mains dans ses cheveux, s'retient de pas vomir quand l'affaire est finie. elle passe sa main sur ses lèvres pour enlever cette humidité qu'elle n'aime pas. et y'a son père, qui a simplement observé toute la scène, qui embrasse son front. j'suis fière de toi, alyzée. elle s'rend vraiment pas compte de ce danger, elle s'contente simplement de sourire, heureuse qu'papa soit fier d'elle.

le premier qu'elle a rencontré, c'est phil. phil, il était son voisin de table. l'genre de type que tout le monde remarque, parce que c'est un peu monsieur tout le monde. celui qui plaît, celui qui charme. elles étaient nombreuses à s'adresser à lui, à faire des propositions assez déplacés. pourtant, il s'en est foutu des autres, parce qu'il voyait déjà qu'par aly. peut-être que c'qu'il a aimé en premier, c'est son innocence. et pourtant, il pensait pas qu'une fille allait être capable de le faire changer. puis y'a eu rasmus. lui, et son sourire. lui, et cette gentillesse. sa façon d'montrer à quel point elle pouvait être importante pour lui, sans jamais le lui dire vraiment. cette façon d'être loin d'elle, mais l'être physiquement. y'a eu ce contraste, qu'elle a aimé. et à eux trois, ça en devenait impossible de choisir. au lieu d'en aimer qu'un, elle en a aimé deux. au lieu qu'choisir, elle a préféré s'mettre avec eux deux. et peut-être que c'est bizarre aux yeux des autres, mais pour elle ... aly s'est jamais senti autant en sécurité que depuis qu'elle est avec eux. (...) mais c'est mal aly ! c'est phil qui parle. phil qui crève d'envie d'foutre son poing dans la gueule de quelqu'un. parce qu'aly lui a naturellement dit c'que son père lui faisait faire. parce qu'elle pensait qu'c'était normal. il m'a dit que ça l'était pas, il m'aurait pas menti. elle assure, la voix ferme, alors qu'son corps frêle se met à trembler. non, son père ne lui aurait pas menti. la jeune femme de dix huit ans ne sait plus quoi penser. et y'a rasmus, qui disait rien d'puis le début, qui s'énerve à son tour. mais ouvre les yeux bordel. t'étais d'accord de faire tout ça ? elle dit rien. puis, elle fini par secouer la tête. non, elle a jamais été d'accord. si t'es pas d'accord, c'est qu'c'est mal ! c'est te forcer à faire quelque chose contre ton gré ! bordel mais aly arrête d'être aussi naïf ! et l'truc, c'est qu'elle revoit tout c'qu'elle a dû faire. alors elle s'rend juste compte aly. et elle s'met à pleurer. littéralement. (...) vous avez autre chose à nous dire, mademoiselle ? elle secoue la tête. elle est ici depuis bien trop longtemps. elle voulait pas y aller, parce que pour elle, à quoi ça peut bien servir ? elle n'a pas revu son père depuis bien trop longtemps, est même persuadé qu'il est retourné en russie. elle voulait pas l'faire putain. mais ils lui ont pas laissé le choix. alors elle a dit tout c'qu'il y a eu. l'problème, c'est que plus elle parle, plus elle se rend compte à quel point c'était mal, malsain. elle réalise vraiment qu'elle a été vraiment trop conne de pas voir l'danger. je veux juste rentrer. l'agent de police hoche la tête. elle peut comprendre, ça fait bientôt trois heures qu'elle est là. et elle n'a plus beaucoup de voix, parce que la veille, elle s'est disputée très fort avec les garçons. oui, elle veut partir. alors elle se lève, aly suit le mouvement. automatiquement, elle serre sa main avec la sienne, a beaucoup trop mal au ventre que ça en est désagréable. elle regarde même pas les garçons, elle sort dehors sans les attendre. c'est le temps d'une seconde. une seconde pour qu'elle se penche en avant, une seconde pour qu'elle vide son estomac. y'a une main dans son dos, une autre sur son épaule. elle est écœuré, presque apeuré. mais c'est dans le lit, le soir, quand ils ont commencé à prendre soin d'elle, qu'elle a senti qu'ils avaient envie de faire l'amour qu'elle a paniqué. elle peut pas, c'est trop tôt.

la clope à la bouche, les étoiles qui scintillent. y'a phil qui bosse tard ce soir. c'est juste elle, c'est juste rasmus le temps d'une soirée. elle parle pas beaucoup. p't'être qu'elle est encore trop choquée. p't'être qu'elle réalise à peine le danger d'la chose. elle a subit l'abus d'son père pendant plus de quatre ans. on lui a fait faire des choses qu'aujourd'hui, elle regrette bien trop. y'a ras qui rejoint aly. une assiette dans les mains. elle le regarde pas forcément, elle tire simplement sur sa clope en regardent l'horizon. j'ai juste besoin d'vous. j'veux pas qu'vous partiez. parce qu'aujourd'hui, elle est plus fragile.

et si elle savait,
qu'phil, en sortant du boulot,
a r'vu la voiture d'son père.
si elle savait, qu'il était d'retour.