She loves me not - Cassey.

☆ ☆ ☆
{  she loves me not }
crédit/ tumblr ☆ w/@Luis Santiago  

Nuit sans étoiles,
nuit-cauchemar.
À l’épilogue d’une nuit blanche, teintée de mirages beaucoup trop obscurs, le réveil lui paraît bien trop matinal. La tête encore imprégnée de tous les maux infligés par celui qu’elle ne veut plus voir, l’astre solaire émerge tant bien que mal. À peine levée, les bouts de tissus vite retirés, la princesse laisse la chaleur diluvienne terminer de la réveiller en douceur. Elle s’efforce de noyer dans les flots cathartiques  les songes nébuleux qui ont pris possession de son esprit autant que de son cœur. Nouvelle journée, loin des trahisons passées ; nouvelle journée, l’occasion de s’évader. Drapée d’un chemisier au blanc épuré, l’ange simulée contraste la tenue d’une jupe en cuir noir qui met en valeur ses jambes interminables. Elle masque les demi-lunes sous ses prunelles d’un anticernes efficace ; puis se charge de maquiller impeccablement son minois. La chevelure dorée laissée relâchée, elle se prépare une dose de caféine à emporter ; et enfin, la voilà partie pour une nouvelle journée.

Une journée loin de ses tracas,
loin de ses idées noires,
c’est ce qu’elle croit.

Elle défile comme toutes les autres. Les clients s’enchaînent, courtois, intéressés ; parfois désireux de la séduire mais c’est elle qui les ensorcelle. La sirène use de son charme pour mieux vendre ; pour mieux davantage les convaincre. Les heures se succèdent très vite, jusqu’à arriver à celle de la fermeture. Cassey, elle n’attend pas une seconde pour fermer la boutique. D’autant plus que, ce soir, l’attend une manucure. Elle a reçu cette invitation inattendue, une première séance offerte dans ce centre esthétique qui n’est pas le sien. La jolie blonde n’a pas hésité pour décider d’en profiter. À quelques mètres à peine de son magasin d’antiquités, elle s’y rend en quelques minutes à pied. Elle arrive enfin devant les lieux dont elle reconnaît le non. Les prunelles rivées sur l’enseigne, elle ne remarque au contraire absolument pas le serpent qui l’observe. Elle s’infiltre à l’intérieur, prête à sortir son bon d’invitation imprimé, mais elle se retrouve contrainte à un refus. La jeune employée lui explique que ce n’est pas dans les habitudes du centre, ne reconnaît pas davantage le mail de l’expéditeur. Cassey, elle ne comprend pas, elle est quelque peu agacée d’abord, mais c’est bientôt la honte qui la gagne. La gêne et l’embarras, devant l’image que, probablement, elle renvoie. Elles essaient toutes deux de comprendre ensemble mais, au bout du compte, le résultat est le même : elle s’est fait duper. C’est peut-être une arnaque, vous savez. Ou juste quelqu’un qui veut s’amuser. Des tordus, il y a en partout. Tordu… le mot se répète comme un écho dans son esprit malmené. Elle présente  une énième fois ses excuses avant de quitter enfin les lieux quelque peu hébétée, perdue aussi… et subitement, se retrouver face à lui. Lui. Un éclair d’illumination qui la foudroie, parce que ça, il n’y a que lui qui en est capable. « Ne me dis pas que c’est toi. » elle lance immédiatement sans lui laisser le temps de la saluer. Sans prendre la peine de le faire de son côté. Luis, cela fait des jours qu’il a décidé de la harceler. Juste, pour la rendre folle à lier.
Son pire cauchemar,
elle ne veut plus le voir,
pourtant il est toujours là,
toujours là,
quoi qu’elle fasse.

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crédit/ tumblr ☆ w/@Luis Santiago  

Elle ne sait pas,
elle ne comprend pas,
ce qu’il attend d’elle,
ce qu’il peut espérer d’elle,
en jouant comme il le fait,
sauf, peut-être,
la rendre folle à lier.

Il y a le choc premier qui la surprend, devant le visage du ténébreux envoûtant. Puis, tout qui s’éclaire, en elle, comme une évidence malsaine. Il a tout orchestré pour la voir, une rencontre qu’il a provoquée comme tant d’autres avant ce soir. Cassey, elle espérait tout, plutôt que lui. Plutôt que Luis. Heureuse à la perspective de se détendre dans ce salon de beauté, elle se retrouve à la place face à l’homme qui sait mieux que personne jouer avec les nerfs de la poupée. « Je ne peux pas le croire… » pourtant, si, elle devrait. Voilà des jours, des jours qu’il s’obstine à la retrouver ; il s’acharne sans se demander une seconde ce qu’elle, elle peut éprouver. Elle n’a pas encore digéré le coup de l’ascenseur qu’il a déjà eu le temps d’orchestrer cette nouvelle rencontre. La colère n’est pas retombée, depuis ce jour-là, alors qu’il l’a rendue prisonnière. Prise au piège avec le dernier homme qu’elle avait envie de voir sur terre.

Il n’y a pas que sa colère que tu n’as pas digéré,
il y a aussi ses confidences échappées,
cet attachement dévoilé,
ces sentiments que tu as refusé d’écouter.

Les confessions voilées de Luis l’ont touchée. Elles l’ont bouleversée, plus qu’elle ne l’avouerait. Elles ont réussi à s’immiscer dans le cœur trop fébrile de l’oiseau pourtant libre. Elles se sont insérées dans son esprit, aussi. Elle ne cesse d’y repenser, souvent, trop souvent. Mais la nymphe refuse d’y croire ; elle n’a plus en lui un quelconque espoir. Puis, même si elle osait croire à cet attachement impossible qu’il peut éprouver, rien ne changerait. Il l’a utilisée, il l’a manipulée. Peu importe s’il s’est attaché, s’il s’est pris à son propre piège en voulant la berner. Elle n’en sort pas davantage flattée, ou touchée, Cassey. Elle a juste l’amer sentiment que, en plus de la blesser, il a gâché quelque chose qui aurait pu être vrai. Qui aurait pu être beau, aussi. Loin de s’en préoccuper, le prédateur vient planter de nouveau ses crocs sur sa proie. Fier, visiblement, de la dernière idée qu’il a eue pour la mettre en rage. Comme si c’était un jeu, tout ça, comme si elle était encore un jeu elle-même. Une distraction, c’est ce qu’elle a la sensation d’être, dans les iris beaucoup trop scintillants du reptile. « Mais je me fiche de ce salon, c’est toi le souci ! » Toi qui t’acharnes, toi qui ne me lâches pas. Toi qui me rends un peu plus dingue à chaque fois. Elle saisit mal comment il peut songer qu’une telle malversation puisse avoir un effet positif. Non, il ne cherche rien de positif. Elle est convaincue, Cassey, il ne veut que lui nuire. Il a décidé de faire d’elle sa victime, sans raison apparente, hormis ce prétendu attachement. Elle, est persuadée, que c’est juste son égo qui le fait agir. Son refus de sortir de sa vie, tant qu’il ne l’aura pas lui-même choisi. « C’est quand que tu vas arrêter ? Hein ? C’est quand que tu vas me laisser tranquille ? » elle commence déjà à hausser le ton de sa voix. À attirer aussi les regards. Mais elle, elle ne voit plus que lui. C’est peut-être précisément ce dont il avait envie. C’est bien cela, en réalité le pire.

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crédit/ tumblr ☆ w/@Luis Santiago  

Peut-être devrait-elle se montrer plus ferme avec lui,
peut-être devrait-elle le contraindre à la laisser tranquille,
peut-être devrait-elle se révéler plus catégorique,
peut-être devrait-elle le sortir définitivement de sa vie.

Mais elle n’y arrive pas. La vérité, c’est qu’elle n’y arrive pas. Elle est capable de le fuir, capable de mettre fin à sa relation avec lui. Capable, même, de se dire que la rupture est définitive. Mais elle ne parvient pas à le repousser suffisamment loin pour tout arrêter. Comme si, un fragment d’elle inavoué appréciait de le voir s’acharner. De le voir, tenter de lui prouver, combien il est accroché. Peut-être, aussi, est-elle plus attachée à lui qu’elle ne le voudrait. Suffisamment pour le laisser poursuivre ce jeu avec elle, car c’est encore la seule manière, la seule qui leur reste, pour que leur relation ne disparaisse. Tout est parti en miettes, déjà, mais voir Luis tenter de ramasser les débris pour les recoller, malgré toute son obstination à les balancer à nouveau chaque fois qu’il les met entre ses doigts… oui, peut-être qu’une partie d’elle aime ça.

Mais elle ne l’avouera pas.

Les azurs d’ordinaire si cristallins se sont nettement assombris, depuis qu’elle a retrouvé Luis. Si elle est déjà furieuse de constater qu’il s’est joué d’elle avec cette invitation factice, il n’arrange pas son cas chaque mot qui sort de ses lippes. C’est un soupir qui s’échappe de celles de la poupée agacée alors qu’il fait tout, tout pour la provoquer. Elle le fusille de son regard assassin devant le compliment qui n’en est pas un. « Garde tes commentaires. » elle rétorque et, déjà, balance ses reproches. Elle ne lui laisse pas même le temps de répondre à ses questions, elles s’enchaînent avec virulence, laissant entrevoir combien elle est en colère. Combien, surtout, elle est à bout de nerfs. « Mais ça n’arrivera jamais, ça ! » Elle ne veut plus le voir. Plus du tout. Ça, Cassey, elle en est convaincue. Elle ne le veut plus ni dans son lit, ni dans sa vie. Loin d’être prêt pourtant à abandonner, le manipulateur aguerri lui balance de nouvelles paroles difficiles à encaisser.

Tu me manques.

Toi aussi, tu me manques.
Tu me manques quand j’ai besoin de me sentir vivante,
tu me manques quand j’ai envie de m’amuser,
quand je ressens ce besoin de légèreté,
tu me manques quand j’ai envie de toi,
et que tu n’es pas là.

Il lui manque. Pas tout le temps. Pas souvent. Mais quand elle se retrouve seule dans son lit, le soir, et que son visage apparaît dans son esprit. Toutes ces fois, aussi, où elle a seulement envie de savourer un peu la vie. Luis, il était entré dans son quotidien, dans ses habitudes, dans ses réflexes les plus anodins. L’appeler, le voir, c’est devenu comme une forme d’instinct. Et soudainement, devoir l’oublier, laisse dans sa vie un creux qu’elle n’a pas comblé. Mais elle ne lui dira jamais, tout ça, Cassey. Surtout pas quand elle voit ce petit sourire charmeur, quand elle entend cette voix de séducteur, quand elle le voit s’amuser, encore, comme dans le préféré de ses jeux. «Arrête de me prendre pour une conne, Luis. » elle enchaîne aussitôt, prête à lui balancer tous les mots, tous ceux encore si faible en comparaison de ses maux. « Tu sais ce que c’est ton problème, c’est que tu as tellement l’habitude d’être celui qui part que tu crois que t’as le choix. Tu crois que c’est toi qui dois décider si c’est fini ou non… mais c’est fini, je te le dis ! » Alors, qu’il arrête. Qu’il arrête ses sornettes. Qu’il arrête de faire croire à l’importance d’une relation qui n’a été qu’une chimère.

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crédit/ tumblr ☆ w/@Luis Santiago  

Le repousser n’est pas difficile. Il parvient si aisément à éveiller sa colère, Luis, qu’elle n’a aucun mal à y parvenir. Mais peut-être ne le fait-elle pas avec suffisamment de véhémence. Sa hargne contre lui la pousse à se montrer en colère ; sur les nerfs. Virulente, elle n’est pourtant suffisamment pas intransigeante, Cassey. Elle repousse ses avances une fois encore, les compliments qu’elle refuse d’entendre. Elle ignore s’il essaie réellement de la reconquérir mais, si c’est le cas, elle n’y croit pas. Elle a davantage le sentiment qu’il fait tout, absolument tout pour la rendre dingue. Ou bien, c’est qu’il ne sait absolument pas comment s’y prendre avec une femme. « Ce que je te reproche surtout, c’est de me harceler ! » elle continue de s’indigner, elle continue de s’insurger. Mais Luis, il est plus fort qu’elle. Elle lui dirait mille fois qu’il est trop tard pour leur relation, il s’opposerait toujours à elle avec la même détermination. Elle ne préfère pas même répondre à cette ultime provocation. Ce qu’elle devrait faire en réalité, Cassey, c’est tourner les talons et s’en aller. Repartir aussi vite qu’elle est arrivée sans lui donner une quelconque importance. Car plus elle lui en donnera, plus il s’imposera. Plus il croira, aussi, qu’il a ses chances.

Et c’est peut-être pour ça au fond,
que tu ne le fais pas complètement,
tu le laisses croire qu’il a une chance même infime,
de te séduire, de te reconquérir,

comme si tu ne voulais pas qu’il t’abandonne,
pas complètement.

C’est quand il évoque ce manque qu’elle refuse d’entendre que la poupée s’emporte. Il n’a aucun droit de prétexter des sentiments qu’il n’éprouve rien. Il n’a pas envie d’être avec elle, il n’en a encore moins besoin. Elle ne peut pas lui manquer, Cassey, elle était juste un jouet. Une maîtresse qu’il a dupé. Une marionnette qu’il a utilisée. Une idiote qu’il a mis dans son lit, mais qui a décidé de partir. Et c’est bien ça qui le pousse à la retenir. Son départ, il ne l’a pas choisi. Elle a tout découvert toute seule, comme elle a décidé de leur rupture toute seule. Si rupture il y avait dans une liaison qui n’avait rien d’une véritable relation. Même l’authenticité de leur légèreté, il l’a bousillée des sombres desseins qui ont tout enclenché. « Parce que tu m’agaces tellement que je ne peux pas m’en empêcher ! Je n’ai jamais connu un homme aussi énervant que toi ! » Non, elle ne peut pas rester indifférente. Mais cela ne change rien à ses sentiments. C’est la colère qui prédomine, aucunement une quelconque envie de retrouver Luis. Et il poursuit… il continue. Il ne s’arrête jamais et elle, peu à peu, perd toute résistance à ses côtés. Un soupir s’échappe des lèvres de la belle alors qu’il lui fait une proposition qu’elle n’a pas même envie d’entendre. « Mais pourquoi ? Pourquoi je ferais ça ? Je-ne-veux-plus-te-voir ! » elle articule chaque mot pour qu’il s’en imprègne, mais il n’en fait encore qu’à sa tête. «  Mais tu crois que je vais te suivre quelque part en plus ? Je… Il vaut mieux que je me barre. » elle affirme, juste avant de commencer à reculer, les opales toujours posées sur lui. Dans l’incapacité de partir. « Et c’est quoi ton idée ? » l’interrogation sonne, dans sa voix, comme une accusation. « Même si je te suivais, ça ne changerait absolument rien au fait que c’est fini nous deux. » et pourtant, elle est là. Elle reste là.

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crédit/ tumblr ☆ w/@Luis Santiago  

En proie à tes contradictions,
le cœur en suspension,
l’esprit toujours en indécision,
l’âme tout entière en perdition,
Cassey, victime consentante de tes tourments.

Peut-être qu’il y a quelque chose qui cloche chez elle,
peut-être que tout ne tourne pas normalement en elle,
peut-être que c’est elle qui fait tout de travers.
Car une femme normale, elle ne serait pas là. Elle l’aurait repoussé, déjà. Elle serait partie sans attendre une seconde. Elle aurait peut-être même crié au harcèlement, pas auprès de lui, mais de la police. Elle l’aurait menacé, suffisamment fort, suffisamment convaincante, pour le pousser à fuir.

Cassey, elle joue au chat et à la souris,

elle s’enfuit,
mais peut-être qu’elle attend qu’il la suive.

Pour autant, c’est l’agacement qui brille dans ses iris, quand il affirme qu’elle le fascine. Elle abhorre tous les mots doux qui pourraient venir de lui. Tout ce qu’il lui dit, elle le rejette obstinément, sans prendre de gants. Mais toujours pas suffisamment. « Peut-être que c’est ce que je vais finir par faire si tu m’y obliges, Luis. » les prunelles ancrées dans les siennes, elle ne cille pas, comme pour qu’il comprenne bien. Elle serait prête à le faire, Cassey, juste pour le faire taire. Juste pour effacer ce sourire beaucoup trop charmeur de ses lèvres. Loin de croire qu’il soit réellement fasciné par elle, l’astre solaire est encore moins persuadée de pouvoir lui manquer. Il se fiche d’elle, il s’est toujours fichu d’elle. Même quand elle lui affirme combien il est terrible, il continue de s’en réjouir. « Je t’aurais déjà oublié si tu n’étais pas en permanence sur mon chemin. » Pas totalement vrai, cette fois-ci, Cassey, elle n’oublie jamais. Elle se détache, simplement, comme un papillon qui recommence à virevolter. Mais non, elle n’oublie pas. Et Luis, elle ne l’oubliera pas. Seulement elle préférerait se dire qu’il n’a jamais existé ; elle préférerait carrément l’effacer. « Mais je m’en tape de ce que tu es, c’est terminé ! » elle continue, elle ne s’arrêtera jamais de le dire. Pourtant, elle est toujours là, auprès de lui.
Jusqu’à ce qu’il parvienne à captiver sa curiosité.
Et, naturellement, son intérêt.
Les azurs plantés dans les siens, elle le contemple sans un mot. « Si tu crois que je vais être emballée à l’idée d’être sur un terrain de boxe, ou je ne sais quoi… » c’est qu’il ne la connaît vraiment pas, la princesse. Toujours quelque peu réticente, elle approche d’un pas, en silence. Elle est presque rassurée de l’entendre confirmer que leur liaison est bel et bien finie. « Je t’accorde une heure. » elle consent enfin, avant de s’immiscer dans la voiture. Elle ne sait pas ce qui lui prend, elle le regrette presque instantanément. Mais le véhicule ne met pas de temps à redémarrer. Et elle, à s’interroger. À se demander, ce qu’il peut bien avoir comme idée. « J’espère que tu sais qu’il est hors de question qu’il se passe quoi que ce soit entre toi et moi. » elle préfère le préciser, avant qu’il s’imagine des choses qui n’arriveront jamais. Ou peut-être, juste, qu’elle a besoin de se le rappeler. Le dire à haute voix pour ne pas l’oublier.
Nous deux, c’est terminé.