end game (narek)

la nuit avait pris un tournant inattendu. c'était le constat qu'elle s'en faisait, amusée, alors qu'elle déambulait à travers ce qui ressemblait vaguement à une cuisine. secouée par les traits semblables à un fantôme de son passé, ce que son ex était devenu. en si peu de temps. elle en était là, aux côtés d'un type qu'elle ne connaissait pas. ne possédant qu'un prénom et l'instinct lui soufflant qu'elle n'aurait pas mieux fait ailleurs. les excès de folie tirent les ficelles, mènent la danse de minuit dont ils se joueront. les règles du jeu sont avancées par un partenaire qui gagne de plus en plus de points, à mesure que les minutes s'écoulent. l'âme d'enfant jamais réellement éteinte s'anime d'un feu nouveau, ravie par la proposition. par les plans qui se dessinent pour les prochaines heures. elle ne laisse pas davantage de place à l'attente. s'empare elle-même de la première place, lance déjà les hostilités. consciente qu'elle naviguait désormais en terrain conquis, sur son terrain à lui. elle avait donc tout intérêt à saisir chaque opportunité qui pourrait jouer en sa faveur. hé ! c'était mon idée. le zèle dont elle fait preuve ne semble pas être du goût du jeune homme. tant pis, elle avait été plus rapide que lui sur ce coup-là, à charge de revanche. les yeux rieurs, le sourire malicieux peignant ses lèvres, elle hausse négligemment les épaules. tel est pris qui croyait prendre, comme on dit. et dans sa première analyse, elle cherche à savoir si elle est la seule ex-copine hystérique que le queens ait pu porter. investiguant déjà, prête à se mesurer à des adversaires de taille. si c'était bien elle qui avait été prise d'un accès de fureur, elle brûle de savoir à qui il pensait faire face quand elle aurait exposé son visage. personne en particulier. petit joueur, complice plus que moyen. la réponse ne satisfait pas une curiosité presque malsaine. à l'image de l'intérêt qu'elle lui portait. l'air, un tantinet déçu, barre ses traits. elle s'attendait à des révélations juteuses, à des confidences tonitruantes. elle imaginait des intrigues à la hauteur des plus grands psychodrames défilant sur les écrans géants des cinéma du coin. la dernière fille en date qui pourrait se plaindre de l'oubli d'un coup de téléphone de ma part, c'est ma banquière. moi qui m'attendais à ce que tu m'tiennes en haleine... t'as simplement des dettes en retard. la moue un brin boudeuse dont elle se pare pour signifier qu'elle n'était pas contenté de si soft aveux. rien de bien palpitant à se mettre sous la dent. tristement. j'ai répondu, tu dois boire. elle lui arrache un rire sa remarque. retrouvant bien là, la meilleure partie de l'activité. sans blague. le regard de défi qu'elle affiche lui dit combien il boira au moins autant qu'elle. pas très bonne joueuse, même plutôt mauvaise, elle se refusait déjà à imaginer un tour d'où elle ressortirait malheureuse perdante. attends, j'vais t'aider. le verre en plastique qu'elle aperçoit volant déjà de ses mains. le liquide qui disparaît presque aussi rapidement entre les lèvres de narek. elle aurait pu s'en offusquer, mais elle ne pense qu'à la suite. la vodka remplace l'alcool précédent avant qu'elle ne reprenne possession de son bien. faisant tourner la solution alcoolisée dans son contenant, elle se décide finalement à vider le contenu d'une traite. tenant à se montrer partenaire idéale, ne rechignant jamais devant un obstacle à plus ou moins grande ampleur. toi, à qui tu t'attendais en me tombant dessus ? de sa question pourtant si innocente, il affole toutes les aiguilles de son horloge interne. mécanisme incapable de se remettre au diapason. du moins pas pour l'instant. ça ravive des blessures n'ayant pas cicatrisées à la vitesse dont elle l'aurait espéré. ça réveille des sentiments latents qui ne demandaient qu'à exploser de nouveau pour refaire gonfler un coeur vidé malgré lui. tu le vois, combien il est attentif. pendu à tes paroles, à la moindre parcelle de toi que tu voudras bien offrir. que tu choisiras de dévoiler. le regard d'abord fuyant quand la contenance lui manquait. quand elle se devait de retrouver la face, pour contourner des évènements qui avaient bleuis sa peau, autant que ce qui se trouvait en-dessous. l'assurance toute composée dont elle se rhabille, pour donner le change. l'impression qu'elle ne plie pas. je t'ai pris pour mon ex, je te l'ai dit tout à l'heure. prête à surenchérir. t'étais pas sûr de ma réponse ou c'est les détails que tu veux ? intouchable, elle expose celle qui n'est pas heurtée. se montre forte quand elle n'était que poupée de chiffon. soumise à des émotions qui la dépassaient. s'il faut que j'en rajoute pour que t'avales ton verre, j'peux le faire. pas encore certaine de ce qu'elle voudra bien laisser filer de son histoire d'amour. ou de ce qu'il en restait. les ruines qu'elle n'avait pas su rabibocher, qu'elle avait laissé se fissurer encore davantage, à mesure que les jours filaient. les pupilles qui s'accrochent aux siennes. les pas qui se font rôdeurs, peut-être dans le simple but de véritablement s'implanter quelque part. et y puiser la force de se relever des épreuves qui l'avaient construites autant qu'elles l'avaient détruites. à cet instant, t'as vraiment besoin d'un verre. t'as jamais eu tant envie d'un truc que de sa réponse. parce que tu veux choper ton tour, ne pas lui donner d'autres choix que de répondre. et enfin, tu pourras te noyer un peu plus dans un océan d'illusions.

il en profite, de ce jeu qui touche bien trop à l'intimité. de ces lancés de dés qui dévoilent ce, qu'à coups sûrs, ils auraient préféré garder caché. il saisit la perche, ne rate jamais le coche et la place au pied du mur. réduite à appuyer sur des détails qu'elle aurait volontiers passés sous silence. si elle n'avait pas déjà trop bu, si elle n'avait pas déjà trop fumé. si sa langue n'était pas souvent trop pendue, se soumettant elle-même à n'être que le jouet d'une machination beaucoup plus grande qu'elle. toujours initiée par quelqu'un d'autre, de plus fort qu'elle. celui qu'elle avait cru deviner à travers des traits si similaires revient à nouveau sur le devant de la scène. ce qu'il restait d'une histoire ayant marqué son épiderme autant que son palpitant, se devra d'être abordé. face à un inconnu, face à n'importe qui. la brèche qu'elle a ouverte de son propre chef, les blessures déjà à découvert sur lesquelles elle se devra de mettre des mots. plus ou moins parlants, plus ou moins violents. inévitablement, la biche finira tête la première dans la gueule du loup. y laissera des plumes, vestiges de son passage et de sa chute. des détails ouais, mais si t'as pas envie d'en donner... vague haussement d'épaules. pour signifier combien la tâche ne lui paraît pas si insurmontable. sans doute qu'elle ne reverra jamais ce type. sans doute qu'il ne trouvera personne à qui rapporter ses peines de coeur. personne qui ne la connaissait vraiment, personne qui s'y intéresserait véritablement. voguant à travers la pièce, ce sont ses pas qui la raccrochent à une réalité qui ne lui convient pourtant pas. ce sont ses pas qui l'ancrent au sol, qui l'aident à garder la face. et l'organe de la parole se délie, quand le sien se noie dans la boisson. sûr, qu'elle aurait aimé en faire de même, pour se pousser à se livrer. elle le fera sans aide aucune, par besoin quasi-viscéral de s'en débarrasser. d'apprivoiser le mal en l'exfiltrant dans l'engouement d'une soirée. j'ai failli devenir mère. le noeud du problème est largué au pied de narek. un éclat de rire moqueur la prend alors qu'elle se perd déjà dans des souvenirs dont elle voudrait se débarrasser une bonne fois pour toute. pour avancer sans plus regarder en arrière. ironique hein ? quand on voit combien j'suis un modèle de vertu. tant de fois, elle se l'était répété. les contre, davantage que les pour. puisqu'il n'existait aucun espace temporel dans lequel elle aurait fait une maman acceptable. elle en avait zappé tous les codes, emporté dans le tourbillon de la jeunesse et de ses excès. notre relation était facile, presque trop. y'avait pas de cris, pas de larmes, pas de jalousie, ni de reproches. c'était évident en fait. autant que l'avortement, pour mille raisons. les épaules qu'elle hausse à nouveau, parce qu'elle est toujours incapable de mettre des véritables explications sur tout ça. même aujourd'hui, elle ne comprend pas à quel moment ça a vrillé, à quel moment ils se sont perdus. jusqu'à laisser pourrir leur relation. et puis j'sais pas... même si c'était le meilleur choix à faire, ça nous a éloigné jusqu'à nous séparer définitivement. c'est ce que tu t'es imaginé, c'est ce que t'as compris aux signaux qui naviguaient autour de toi. parce que la rupture n'a jamais réellement été formulée. la fêlure s'est chargée de faire les conclusions qui s'imposaient. le regard fort de la comédienne en plein jeu, le sourire forcé de celle qui n'est pas atteinte. qui ne l'est plus. la menteuse avérée. la marche qui ne se stoppe jamais, la panthère toujours en quête de sa proie. et ses esprits qu'elle tente de reprendre face à autre chose. tu as posé une question et j'y ai répondu. pas exactement de la façon dont elle l'espérait, mais soit. un verre qu'elle avale, pour la peine. pour éponger le trop plein de sentiments qui l'assaillaient. mais j'me sens généreux ce soir... le regard interrogateur, elle est pendue à ses lèvres. dans l'attente d'une suite qu'elle devinait déjà. la bouteille qui déverse son liquide dans son verre, prêt à affronter le prochain round. c'est ton tour de poser une question. la malice qui reprend place sur ses lèvres. tant pis pour toi. t'auras un coup d'avance brandy et tu ne passeras pas ton tour. les généreux sont toujours ceux qui perdent à la fin, non ? ses pieds qui se balancent, avancent. la rapprochent de lui, autant que du verre en plastique. et le regard qui reprend ses pétillements avant que la question ne soit sifflée. t'as déjà été infidèle ? le gobelet qu'elle attrape presque, et enferme dans sa main. persuadée qu'il parlera. et qu'il joindra les détails qu'elle n'avait pas tut. les traits rieurs et la curiosité malsaine au bord des lippes. tu sais pas bien ce qu'il te fait ce mec-là. il t'amuse sans contrefaçon. il te pique et t'intrigue plus que de raison. il dérange ta mécanique, habituellement si bien huilée. pourtant, tu fuis pas, tu bouges pas. t'es bel et bien là.