(tw: sexe) Behind the window was a reflection that only instilled fear

On va pouvoir manger une pizza ensemble.

L'affirmation se répète en boucle, jusqu'à ce qu'on soit certain qu'elle touche le cœur de Dusan, recouvert par toutes ces strates d'autres choses. Ces strates de raisonnable.
Visiblement troublé par les paroles de Selena qui s'imbriquent aux plans qui étaient prévus ce soir, ses lèvres se décollent, cherchent à contester, sans qu'aucun mot, aucune preuve de mécontentement ne parvienne à s'échapper.
C'est peut-être parce qu'il ne sait pas quoi dire. Comment. Ni s'il faut le dire.
Alors son corps se rétracte sur lui-même, comme une eau qui se serait rendue compte qu'elle avait trop débordé de son lit.
Il est nu. La nudité ne le dérange pas vraiment, cependant.
Ses genoux reviennent contre son torse.
Et puis, non finalement, ils se relâchent, s'enfouissent sous l'édredon.
Il ne sait pas non plus quelle posture adopter.

-- Je dois...

Je dois.
Il récite, Je dois, comme si c'était le début de la leçon, et qu'il se souviendrait naturellement de la suite après. Comme une formule magique. Je dois.

-- Mes vêtements...

Il cherche du regard, mais dans ses yeux on voit qu'il n'y a pas la force de pousser entre les draps, d'aller voir ce qui se passe au pied du lit, là où repose le monticule échoué de ses habits.
Alors il rougit, bien gêné, la main qui remonte à sa joue, supportant la ligne de la mâchoire. Il gratte, alors que sa peau ne le démange pas.

-- Sinon je... je leur dis que c'est pas possible...?

Il demande.
Il demande... comme pour que quelqu'un d'autre que lui le pousse à prendre la décision qu'il faut.
Pour que quelqu'un d'autre prenne la décision à sa place.
Il ne sait vraiment pas comment faire, Dusan.
Il n'a jamais eu deux rendez-vous enchâssés l'un dans l'autre.

Il pouvait bien remettre ses vêtements, ce n’était pas moi qui allait l’encourager, car c’était synonyme de départ.
Il faisait naître malgré lui, une tension. Une tension de sans cesse avoir peur qu’il s’en aille.
Alors c’était à se demander s’il me fuyait ou s’il ne pouvait vraiment pas se passer de ses activités.
Je remarque rapidement qu’il n’a pas vraiment l’air motiver pour partir.

Il proposait même de Leur dire que ce n’est pas possible.
Leur.
Pas possible.
Ces déclarations semblaient d’ordre générale, comme si que ce n’était plus possible.
Je sautais sur l’occasion.
« Oui, tu peux leur dire que c’est plus possible. »

Tendrement, je m’approche de lui pour venir l’embrasser.
Un baiser appuyé.
Et puis un chuchotement qui tentait d’être complice.
« Maintenant que tu m’as rencontré… ça va plus être possible pendant un moment… »

C’est vrai ça.
Notre moment tous les deux ne l’avait-il pas motivée à ce que ça se reproduise.
C’était aussi le moment de voir s’il ressentait quelque chose pour moi, ou si mon attirance pour lui était réciproque…
Une manière de savoir s’il allait rester, et revenir…

On ne sait pas vraiment ce qui se passe dans la tête de Dusan à ce moment-là.
Il dévie le regard, semble réfléchir, et puis non, il la regarde à nouveau.
Un élan soudain le fait se lever, sortir des draps comme si c'était son ancienne peau. Debout, face à Selena habillée. Lui, nu, tignasse chahutée, des restes de sommeil, de chagrin et de joie tout à la fois, collés à son visage.
Il poursuit simplement le baiser qui a été entamé, ses grandes mains entourant le visage à Selena, comme pour y représenter la force du geste.
On entend juste les sons de cet échange, muqueuses humides qui se cherchent, s'apprivoisent.
Vient le moment de la rupture.
Secret, il murmure.

-- Je leur dirai.

Un sourire microscopique, à peine décelable si on n'y fait pas attention, vient poindre au bord de ses lèvres.

-- Merci pour tout à l'heure. J'ai adoré jouir avec toi.

Puis, ses yeux descendent, frôlent un décolleté naissant sous les coutures du peignoir. À cette vision suggestive, invitante, son sourire s'accentue.

-- Je devrais m'habiller aussi, non ? À moins que tu ne préfères que je passe la fin de la soirée nu ?

Ce fût un élan de satisfaction quand il confirma l’annulation de ses rendez-vous pour ce soir.
Nous échangeons un moment complice par des sourires réciproques. Il me demandait s’il devait s’habiller et je tendais à croire qu’il fallait toujours lui répondre par le fait qu’il avait le choix.
« Tu fais comme tu as envie. Si tu as envie qu’on sorte ce soir, je me rhabillerai aussi. »

Je me relevais du lit après lui avoir caressé le visage.
« Je te laisse si tu as des coups de fil à passer, ou même ses SMS et si tu veux te changer. Tu peux prendre une douche, tu connais l’appartement maintenant. Je t’attends dans le salon, je vais découper la pizza... »

Un baiser déposé sur les lèvres.
« Je ne suis pas loin, d’accord ?... »
Comment ne pas remarquer mon regard amoureux ?
J’allais vaquer à mes occupations afin de lui laisser un peu de liberté.

Pourquoi est-il déçu ?
"Tu fais comme tu as envie."
Peut-être parce qu'il espérait éveiller chez elle de l'amusement, un air de défi.
Pas simplement "fais ce que tu veux".
Son sourire s'étiole petit à petit, il acquiesce sans ajouter quoi que ce soit.
Rappelé à ses vêtements grâce à la manche de pantalon qui lui chatouille les malléoles, Dusan plie des genoux et attrape ses affaires du bout des mains.
Selena s'en va.
Direction la salle de bain, alors. Il appellera après.
En sortant de la chambre, il lui faut quelques instants pour se souvenir de la configuration des lieux. Il trouve le chemin et disparaît derrière la porte, en silence.
Bien sûr, ce qui le frappe en premier, c'est la propreté et la taille de la pièce. Propre... Si propre qu'on n'a pas envie d'abimer ce tableau en s'y lavant.
Il dépose ses effets sur la chaise en osier, avant de faire couler l'eau.
La cascade s'abat soudain, l'éclabousse d'eau froide, avant de chauffer, de chauffer et de couler dans un nuage de fumée. Dusan s'engouffre à l'intérieur, sous cette pluie brûlante qui martèle les épaules, pliant la nuque pour recevoir le châtiment de plein fouet. Les yeux fermés, il reste ainsi un temps infini, les muscles qui se détendent, qui se détendent encore, lui font pousser un soupir de bien-être, ses doigts qui glissent dans sa crinière aux boucles plaquées.
Dieu vit dans la pluie.
Il observe les sillons trempés rouler à l'infini sur sa peau, transparents et vifs. Des gouttelettes se suspendent à ses cils, donnent l'impression que des diamants y scintillent.
Sous ce torrent salvateur, Dusan pense à la fois à énormément de choses, et à rien du tout. C'est comme si un instant se répétait en boucle autour de lui, une portion du Temps qui tournerait sur elle-même, indéfiniment. Un berceau doux, chaud et ouaté, dans lequel il baigne, serein, loin de tous les problèmes, loin de l'humanité.
Il attrape du shampoing et de quoi faire mousser sa peau, les paumes qui passent distraitement sur chaque région de son corps.
L'écume ruissèle le long de ses tibias, de ses coudes, de son menton, avant de disparaître, avalée par le siphon.
C'est comme si les problèmes se matérialisaient physiquement pour se détacher de sa chair et tomber dans l'oubli.
On dirait bien qu'il s'attarde plusieurs éternités à l'intérieur de cette cabine hors du temps, la peau délicieusement frappée d'une fournaise liquide.

Couper la pizza.
Disposer des bougies sur la table basse du salon.
Mettre des couverts propres. J’évitais de sortir ceux en argent, l’idée n’était pas non plus d’impressionner Dusan.
J’étais aux petits soins pour lui donner bonnes impressions.

J’entendis rapidement les gouttelettes qui retombaient dans le baquet de la douche.
De quoi me faire sourire et me donner des idées, alors timidement j’allais observer mon amant dans l’entrebâillement de la porte. Il semblait être en train de se savonner lorsque mon regard s’éternisait sur les courbes de son corps.

Mon Loup…

Je prenais cette douche comme un appel alors sans réfléchir je pendais mon peignoir au crochet prévu à cet effet.
La chair de poule, j’ouvris doucement la porte de la douche pour rejoindre Dusan.
Mes mains le cherchent et viennent découvrir la peau de son dos. Je viens d’ailleurs m’engouffrer dans ses bras sous cette eau si chaude.
Mes cheveux longs commencent à s’humidifier. Même si j’avais déjà pris une douche avant, rien n’allait m’empêcher de le rejoindre.
Alors que mes lèvres se glissent lentement dans son cou, les griffes cherchent les lignes de son dos.
Mon nez trace un sillon jusqu'à l'oreille pour retrouver les détails de sa jugulaire.
Comment ne pas être apaisée en sentant ce contact direct entre nos corps...

Il sent des mains se hisser à son dos.
Au premier contact, tous ses sens se mettent en alerte, prêts à le faire réagir, à contrecarrer l'attaque. Comme si on avait interrompu l'animal pendant sa sieste, ce moment intime qui le rend fragile et vulnérable.
Mais c'est le visage de Selena qui apparaît dans son champ de vision, faisant s'essouffler ses instincts de défense.
Parce qu'il ne sert à rien d'être sur la défensive avec elle, c'est ça ?
Ce n'est pas si facile.
Un souffle à peine perceptible sous le flux aqueux se dresse à la courbe de sa mâchoire.
Il entoure sa taille de ses mains, la tempe qui se laisse doucement tomber vers elle, cherchant réconfort.
Une poitrine se compresse à son torse. Ses yeux descendent pour observer ce qui se passe. Pour découvrir l'eau qui s'accumule entre eux.
Les caresses glissent presque toutes seules, et peut-être même qu'on ne les sent pas.
Il voit ces cheveux blonds qui s'imprègnent, s'alourdissent, changent de couleur. Ces yeux bleus dans lesquels il glisse, cherche après un message.
Une fièvre progressive s'insinue au creux de ses chairs, lui fait déposer une suite de baisers sur le front, sur le nez, puis sur les lèvres.
Ses paumes ont chuté jusqu'à la hauteur du bassin, massant les monticules tendrement.

Je ne me rendais pas compte que je venais de le surprendre. C’est vrai que j’aurais dû peut-être m’attendre à ce que l’effet de surprise ne lui convienne pas. Nous nous connaissions depuis si peu de temps finalement.
Nous échangeâmes un contact doux et tendre. Je me demandais s’il avait ce luxe là où il vivait, de pouvoir se laver à la bonne température et ce tous les jours. L’eau chaude de la douche émanait lentement une buée qui s’acoquinait au miroir près de l’évier. J’étais à l’affût de sa respiration et de ses gestes. La chaleur de l’eau amenait un trouble dans la pièce, invitant progressivement à l’exploitation de nos sens. Il sentait agréablement bon. Mes mains étaient curieuses et appréciaient de caresser le creux de ses reins pour descendre à ses fesses. Ses fesses bien dessinées et fermes. Il faut avouer que j’aimais ce contact de nos corps. La poitrine contre le torse, sa virilité qui s’impose contre ma féminité.
Un moment sensuel.
Sentant ses baisers qui dessinaient lentement de jolies arabesques sur mon corps, je laissais échapper de longs soupirs, éprise par ces innombrables frissons.
Je me sentais si fragile face à lui, comme si que ma nature de Cygne était revenue l’intérieur de moi. Je me sentais poids plume, comme si qu’il pouvait faire tout ce qu’il voulait de moi. Je le voyais comme la bête, si puissante et grande.
Alors, comme pour l’encourager à l’étreinte, une de mes mains caressait lentement ses cheveux mouillés. Le savon finissait doucement de s’écouler sur son corps…
Murmures...
" J'espère que tu te sens bien ici... Mon Loup... "

Le regard de Dusan reste longtemps dans celui de Selena
sans que l'on ne sache quelles sont ses pensées en cet instant.
Plus bas, son anatomie se réveille, appuyée contre le bassin féminin. Aveu qu'il ne saurait cacher aux yeux de son aînée.
Son buste se détache lentement, alors qu'il observe les seins reprendre leur forme d'origine. Figures dont ses mains s'emparent, sous-pèsent, harcèlent doucement l'auréole pigmentée entre pouce et index.
Il la dirige lentement à la rencontre de la mosaïque au mur, pour que ses omoplates épousent la surface blanche.
Au creux de l'oreille, son souffle se dépose, lobe capturé entre ses lèvres.

-- Ici, maintenant...?

La couleur de ses yeux voilée par l'ombre, Dusan attend. Il attend la certitude, le vœu du cygne, de la louve, de la femme. Peu importe sous quelle peau elle désire se présenter ; il la prendra telle qu'elle est.

En pensant à la vie que j’avais avant, en étant mariée, aucun souvenir ne me ramenait à cette scène. Prendre une douche avec un homme, je me demandais même si je l’avais déjà fait. Je commençais à innover avec Dusan. Je remarquais en lui une certaine endurance, me rappelant que c’était ça être avec un jeune.
Ces moments ensembles, consumés, consommés, étaient riches en émotions.
Je n’avais jamais vécu ça avant lui.
En plus de me découvrir femme douce et patiente.
Il pouvait peut-être me prendre pour quelqu'un de gourmande, mais finalement je n'avais pas à rougir. J'étais ouverte sur cette question et j'aimais ça. C'était sans doute une bonne raison aussi pour lui, de ne pas aller voir ailleurs. Dans tous les cas, c'était un plaisir de pouvoir le satisfaire...

La mosaïque au mur était froide, de quoi me faire sursauter. Mais tout cela était vite oublié après la proposition de Dusan. Nous avions des idées communes, bien que lui était plus facile à cerner dans ce genre de moment.
Que se disait-il au fond de lui ?
Prenait-il conscience de ce qui se passait entre nous ?

Ici ?
Maintenant ?
Pourquoi pas ?

Depuis que nous nous connaissions, la notion animale prenait peut-être son sens ici, au moment où je me tournais pour me retrouver dos à lui. Prête à connaître une nouvelle fois une étreinte. Cette position purement animale, vue d’une dimension humaine parce que nous allions rester debout.
Quelque chose d’exquis.
« Vas y... »
Prête à l’accueillir, j’avais posé mes mains sur la mosaïque bleue et blanche de la douche. Mes longs cheveux blonds s’étaient logés entre mes omoplates, jusqu’au creux de mes reins.
J’allais découvrir l’amour sous la douche.
Il faut dire qu'il en fallait peu pour faire monter la fièvre...
J’imaginais que je n’étais pas la première pour lui, parce qu’inévitablement il a sans doute dû à un moment donné offrir ce service à quelqu’un.
Mais dans ce genre de moment je n’y pensais pas. Je me disais qu’il était là, avec moi, et que s’il le faisait c’est qu’il le désirait.

J’attendais qu’il s’approche de moi afin de poser une main contre sa hanche, descendre un peu pour l’encourager. Je me rappelais de ce moment que nous avions vécu au lit, où nous avions mis tous les deux des caresses sur sa motivation. Un moment réitéré ici. Je l’attendais sagement, impatiente de repartager un nouveau moment sensuel…
Après tout, nous avions tout notre temps...

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