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 Sauf les fleurs

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Orphée Lessing;

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Orphée Lessing



Moya Palk
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Messaline, Grisha, Virgil, Céleste, Eleusis
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Elle vogue, libre et sereine. Dans le coeur, elle a tissé le garçon aux cheveux de lin et aux orbes protectrices.
Elle reprend les cours de fac, reconversion, elle bifurque et rejoint les livres de contes et d'histoire.

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Message Sujet: Sauf les fleurs   Sauf les fleurs Empty Jeu 1 Avr - 6:34

[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]
sauf les fleurs
Un songe au goût d'alcool. Un songe lourd de sang ; d'un sang  épais comme une boue. Alors le gisant attend que se délie ce songe, que s'allège et se calme son sang, et que le ciel et la terre coordonnent à nouveau leurs mouvements.
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  Les pensées mugissaient, une tempête s’échouant sur les rivages de sa raison ; ses émotions fracassées sur les roches de ses traumatismes, son âme se transformait en mer déchaînée des révélations qui surgissaient dans ses rêves. Elle dormait peu, terrorisée à l’idée de découvrir encore de nouveaux détails, car les souvenirs réapparaissaient dès son réveil léthargique. Elle subissait les jours mornes d’une dépression bien ancrée dans le corps, son corps qui ne cessait de s’amollir par le poids d’un viol dont, maintenant, elle se souvenait. Assise sur le tabouret de bar jouxtant le salon ouvert aux larges lumières de printemps, Orphée contemplant l’horizon, souhaitant certainement se noyer dans le bleu éthéré des cieux, peut-être, peut-être que là-haut la simplicité soignerait ses plaies. L’oubli comme solution. Mais son envie de vivre jaillissait, des flots ravivant sa volonté de goûter aux choses merveilleuses de l’existence. La résilience ne se laissait pas éroder par l’acide de son passé. Néanmoins, elle sombrait, peu à peu, dans la douleur de la solitude. Elle n’était pas soutenue puisque ses proches périssaient dans leur tombeau. Alors, elle s’inventait les paroles d’Ainsley, toujours belles, toujours auréolées de joie et d’humour quand il s’agissait de contrer les malheurs. Tu sais Orphée, dans chaque drame se trouve son lot de positif, c’est cliché ce que je dis mais chaque expérience nous démontre bien que c’est vrai. A ce discours elle rétorquait que ce n’était pas objectif, que l’on donnait du sens puisque le monde n’en avait pas, que c’était nous, être humain, qui faisions rutiler les événements lourds de sanglots afin de se dire qu’on avait beaucoup appris. Que tout échappait à la raison si nous ne donnions pas de sens puisque l’on vivait dans un monde absurde où l’inégalité pesait son ventre de plus en plus proéminent du côté des privilégiés. Tu lis trop Nietzsche, l’aurait-il taquiné en lui ébouriffant les cheveux. Elle a essuyé un début de sanglot bien coincé dans sa gorge avant de faire fonctionner les robinets de sa salle de bain, s’absorbant dans les flots qui coulent et coulent, débordent de la baignoire. Elle n’a pas stoppé l’eau, l’eau a arrosé le sol, la gosse s’est endormie, son corps nu trempé. Toute à l’heure, dans la panique, l’effroi et la tristesse, la petite a appelé, comme une urgence, celui pour lequel le coeur bat encore. C’est vers lui, toujours, qu’elle s’adresse lorsqu’elle doute, lorsqu’elle trépigne de joie, lorsqu’elle se meurt.

Elle se réveille, mouillée des sueurs nocturnes, de quelques minutes de sommeil sagement méritées, la porte cogne des poings de l’amant écartelé attendant certainement impatiemment qu’elle vienne lui ouvrir, inquiet dans son désir de la protéger des vents et des monts, du mal et des dangers. Orphée ne s’habille pas, vêtue simplement de ses sous vêtements et de sa chemise qu’elle lui a volé. Encore martyrisée par le sommeil qui peine à se dégager de ses pupilles – elle sait toutefois qu’elle ne dormira plus – elle tourne les serrures, maladroite. Et, quand elle le voit, elle éclate. Les vagues de ses larmes ardemment maîtrisées l’après midi ont fini par s’échouer sur les traits tirés de son expression, ravagée. Orphée s’est glissée, faufilée, lovée dans ses bras, l’étreignant fortement comme si sa vie en dépendait, elle a serré ce phare toujours puissant de lumière et de ferveur, d’amour et de tendresse, son torse pareil à une colonne ne ployant jamais sous les catastrophes. Et cette force, et ce courage, et cette autorité naturelle, Orphée en a besoin, elle s’en repaît. Elle n’a pas parlé, elle n’a pas bougé, figée sur le terrible événement cristallisé par les propos du garçon. Nous irons porter plainte ensemble. Elle ne le souhaite pas, la paralysie glaçant ses actes, il lui ferait encore plus de mal si jamais… et puis ils la croiraient pas, elle n’a pas de preuve, elle même n’y croit pas, elle s’invente des excuses, aborde des suppositions pour rendre le choc moins lourds, moins cruel. Ton père il… Ton père. Elle aime le fils qui, jamais, ne se permettrait sur les filles une once du crime du patriarche. En dedans, ça bouillonne l’incompréhension et la pulsion de culpabilité envers elle. Alors elle s’est tue, elle n’a pas proféré d’accueil ni de colère, juste le silence qui assomme car il dit tout.


(c) corvidae

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vent d'est, vent d'ouest
Si la solitude sépare, elle tranche bien des liens qu'on ne coupe qu'à regret, mais elle permet de plonger des racines dans ce qui est essentiel. Delacroix
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Message Sujet: Re: Sauf les fleurs   Sauf les fleurs Empty Jeu 8 Avr - 22:01

sauf les fleurs
Orphée & Misha

« I take the blue ones every time, Walk me down your broken line. All you have to do is cry »

”Grisha. C’est Grisha.” Il avait fallu d’un seul appel au milieu de la nuit, fracassant les houles de ses habitus nocturnes, l’extirpant de la musique sourde, et des corps agglutinés, et des rires rompus sous les néons pour que Misha ne la rejoigne. Il avait fallu de quelques minutes pour qu’il ne comprenne l’étendue des dégâts, de ce combien le père avait engendré comme souffrances dès lors qu’Orphée s’était vaguement rappelée de cette nuit des géhennes. Elle n’en était pas sûre, qu’elle avait soufflé à travers le combiné. Mais moi je le suis, avait susurré Misha. Et ça lui avait bien empoigné la gorge, comme un étau, entre la colère et le dépit, que de ne pas pouvoir lui avouer les crimes du daron, de cracher ce goût d’amertume qu’il avait sur la langue. Misha se sent complice et pour cela, il s’en veut. S’est empressé de parquer Phèdre dans un taxi “fais gaffe et rentre bien” ; quelques mots de bienséance, dans le pourtour de l’inquiétude à la-va-vite, alors qu’il s’engouffrait déjà dans son Aston afin de rejoindre Orphée. L’amante n’avait pas accepté sa ligne de fuite, avait interpellé la dérobade à grand renfort de textos l’accusant subrepticement d’infidélité. “Mes cuisses seront fermées quand tu daigneras te pointer”, la menace de l’abstinence, bien ensevelie sous le courroux auquel Misha n’avait plus daigné répondre. D’un soupir las, s’était contenté de ranger son téléphone et de faire vrombir le moteur, la tête pleine de la détresse saline d’Orphée et peut-être, sans doute, faut-il l’avouer, quelque peu de remords de laisser Phèdre sur le banc de touche. Encore. Mais y avait plus la place pour les questionnements et la moralité imputable à la bonne tenue en société ; Misha avait tracé sa route, le pied trop lourd sur la pédale. A force de s’improviser roi des asphaltes par la puissance mécanique de son fiacre, il a déployé le savoir-faire, l’audace et la crétinerie des apprentis pilotes automobiles, autodidactes au cerveau creux. Misha, ce qui l’animait, c’était soit l’adrénaline de l’urgence, soit le badinage poussif avec la mort qui se déployait de trop dans ses veines ces derniers temps.

Il lui a fallu bien plus de temps pour se remettre des confessions d’Orphée que pour arriver devant sa porte. Misha a la pensée absente, rien n’a l’air solide, tout demeure flou. La main a pourtant trouvé la sonnette comme dans une chimère fantôme, de ces moments évasifs qui nous cueillent entre le sommeil et le réveil. Puis elle a ouvert la porte, s’est jetée dans ses bras et y a déversé les flots de larmes. Misha l’a serrée puissamment dans ses bras, il a contracturé les muscles râblés tout autour de ses hanches, un peu trop fort. Soutenu par la prescience pas si conne que s’il venait à la lâcher, Orphée s’écroulerait sous son poids de mésange. La faute à ces jambes tremblantes, ce corps suffocant et ces souvenirs parasites. Noyés dans le mutisme des plaintes, ils se foutent du silence qui les étreignent. Sans doute sont-ils restés dans les bras de l’autre deux minutes, cinq, peut-être dix, qu’importe. Le temps a suspendu son vol, s’est glissé sous les paupières d’Orphée et a cristallisé ses larmes. Comme ils n’ont guère besoin de grandes palabres ni de belles effusions pour se comprendre, et comme il a saisi qu’Orphée a en l’instant, d’avantage le besoin d’une présence silencieuse et rassurante plutôt qu’un psy. Surtout pas un psy.

« Viens. » Misha a fini par souffler l’invitation de passer le seuil de la porte, l’enjoignant à s’asseoir sur le canapé du salon. Il a senti paradoxalement la force intense jaillissant d’elle, comme une résilience naturelle à encaisser les coups sans discontinuation et, toujours, bien lever la tête. Mais bien sûr qu’il a gardé un oeil sur la jeune fille tandis qu’il s’affaire dans la cuisine à chercher une casserole qu’il ferait frémir sur le feu et quelques sachets de thé ; Misha s’est foutrement évertué à ne jamais la lâcher du regard, ce qui a nettement ralenti son entreprise. Alors il a tenté à quelques reprises de lui parler, s’est contenté pourtant d’ouvrir les lèvres sans qu’un foutu son ne parvienne à rouler sous la langue. C’est qu’il sait bien, que le viol taille dans le vif de ses victimes ; c’est purement initiatique. La façon qu’ils ont de prendre les femmes - lui y compris - c’est jamais par hasard. Une fois ouvertes par effraction, elles ne referment jamais les plaies, et y a pas bien moyen de leur parler comme il faut puisque le cerveau, d’une certaine manière, s’est barré ailleurs. Concrètement, Misha ne sait que lui dire.

Lorsqu’il revient avec deux tasses fumantes qu’il pose sur la table basse, Misha s’acharne pourtant à lui parler. Pas trop maladroitement, il l’espère. « Est-ce que… Tu veux m’en parler ? »
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Message Sujet: Re: Sauf les fleurs   Sauf les fleurs Empty Jeu 15 Avr - 7:43

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Un songe au goût d'alcool. Un songe lourd de sang ; d'un sang  épais comme une boue. Alors le gisant attend que se délie ce songe, que s'allège et se calme son sang, et que le ciel et la terre coordonnent à nouveau leurs mouvements.
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   Il fait froid, dans mon corps, il gèle dans mon âme, Misha, pourquoi, pourquoi m’a-t-il fait ça ?

 Orphée s’est laissée guider par les mouvements masculins, il l’a dirigé vers le salon, l’a assise sur le canapé, elle n’a rien vu, rien entendu, ses spasmes de larmes éteintes, taries pas les heures passées à s’inventer des excuses, elle souhaitait briser les révélations funestes, elles en amenaient d’autres plus radicales, des questionnements, des angoisses, des accusations. Quand il lui avait sauvé la vie, quand il lui avait sauvé l’âme, là, abandonnée dans cet entrepôt désaffecté, sur le sol sale, il avait pris soin d’elle comme l’on manierait soigneusement, tendrement, un vase de cristal ou de porcelaine. Elle avait mis du temps avant de sortir de sa chambre, protection illusoire quand ses rêves la ramenaient vers des contrées étranges, lorsqu’elle était partie, le cœur rebondit sous le coup d’un soulagement, elle avait pensé qu’elle se débarrassait des intentions de père d’un homme qu’elle ne connaissait pas, Grisha Orlov la terrorisait, représentait le loup des contes qu’elle demandait le soir, beau rituel sensé apaiser les enfants et les endormir jusqu’au lendemain. Recroquevillée, tassée, son menton sur ses genoux pliés, ses cheveux lâchés, ses boucles coulant sur ses épaules, sur son dos musclé de ballerine. Les lendemains auront le goût amer de la survie, un incessant combat contre les baobabs, contre les mauvaises herbes, contre les pulsions d’une mort détestée, enviée. Parfois, elle se réveille de ses transes les pieds sur les rails, sort de la maison pour tenter le danger, titiller Thanatos. Mademoiselle aime vivre mais considère aujourd’hui que la vie la refuse à la joie. Un souffle, les yeux fermés, l’esprit léthargique, elle balaie la force du traumatisme à coup de silence et de blocage ; quand les souvenirs pénètrent le sang, les sanglots se fracassent dans la gorge de la mésange.

 Et le bruit, soudain, le bruit de la marée haute, le bruit des pleurs et de la détresse, un appel d’outre-tombe, une catastrophe. Le cri emplit les cloisons fragiles de la maison de paille et de verre, inquiète les ombres animales gesticulant pour consoler la captive des entrailles de l’impuissance, de l’incompréhension. L’enfant, pour une fois, a repoussé Mercure, loin d’elle. Que vais-je faire maintenant ? Non. Ce n’est pas une question utile, efficace, c’est une question obscène car la nuit passée s’abreuve de mon futur en pièce.

 La voix du fils la raccroche à la réalité, Misha a posé un plateau où deux tasses fumantes se dessinent dans ses yeux brouillés de larme, elle l’aurait rejeté aussi, loin d’elle, parce qu’en dedans, ce sentiment exécrable, cette sensation de saleté, et la gorge brûlante ne laisse rien passer. Par deux fois l’avait-on utilisé comme poupée de chiffon, on lui avait ouvert la bouche car ils fantasmaient sur l’ouverture béante d’une langue, d’une cavité chaude, douce. Si je pouvais, je me l’arracherais ma gorge, je les sens toujours, ces dards qui m’ont piqué le corps, qui m’ont piqué l’âme. Et peut-être ont-ils jugé de sa beauté, l’ont-ils convoité. Ils lui avaient montré la violence, l’avaient rabaissé, l’avaient forcé. C’est ma faute. J’aurai dû me défendre… On dit cela sans percevoir le trouble et la douleur, la sidération, cette incapacité à se mouvoir lorsque le danger sature les élans de fuite, il n’y avait pas de fuite. Il avait bien fermé la porte à clé lorsqu’il s’était avancé vers elle, n’est-ce pas ? Elle ne sait que répondre. « Il… est-ce que tu penses qu’il a fait ça à d’autres personnes ? » Un désir de se savoir moins seule aux dépends de malheur de l’autre, si je ne suis pas la seule alors je pourrais survivre comme elles ont survécu, pense-t-elle si fort. La résilience se niche dans le calme de sa dépression, un calme nettoyant les débris de son intérieur, il avait tout cassé dedans, tout saccagé, ne restait que l’incertitude et la peur, la frayeur lorsque la sonnette retentissait, lorsque les hommes s’approchaient, lorsque le bruit résonnait trop fort. « Je crois que maintenant, je suis en sécurité. Il viendra plus me voir. J’ai dit à ma psy que j’avais… que je pensais, avoir été abusée par un de ses collègues. Elle est féministe, militante aussi, elle m’a donné plein de documentation. Elle m’oblige à rien, je veux dire qu’elle m’apaise beaucoup. Je me sens confiante dans son bureau. Avec Grisha c’était… c’était… » La peur. Toujours cette pétrification dès qu’elle rentrait, à reculons, dans son fief.      



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Message Sujet: Re: Sauf les fleurs   Sauf les fleurs Empty Jeu 15 Avr - 21:28

sauf les fleurs
Orphée & Misha

« I take the blue ones every time, Walk me down your broken line. All you have to do is cry »

L’interrogation est tranchante, quoique légitime. Misha a dégluti difficilement, la salive rare et la bouche pâteuse comme il a gratté le gosier d’autant de réponses qu’il aurait aimé lui souffler. Comme il aurait souhaité se draper des belles vertus et rouler sous la langue des monceaux de vérités et de dogmes, lui admettre d’un ton sentencieux ce qu’elle recherche. Un peu de véracité dans la brume de son esprit. Oui, Orphée, il a fait ça à d’autres. Et moi aussi tu sais, mais j’dois bien avouer que le monstre en moi a des relents de je m’en foutiste lorsqu’il s’agit de catins. Les putes, reléguées dans cet autre monde, cet univers analogue dans lequel ni toi ni mes amantes, ni les pans sans aspérités de ma vie du quotidien, ne faites partie. Alors sa mâchoire se crispe et se contrit des sales mensonges comme il dégaine ; « Je sais pas bien Orphée, s’il a fait ça à d’autres. » Ca lui a gratté la gorge tels des débris de glace pilée lorsqu’il s’est embourbé dans son simulacre, ces faux mirages sans fard. Mais c’était bien pour elle qu’il le faisait, pour lui également, sans doute. Qu’elle n’apprenne pas que la vermine se transmet de père en fils, comme un dogme universel, et c’est pas bien une question d’hérédité mais que l’éducation fait foutrement l’affaire.

Lorsque Orphée lui a évoqué une certaine ataraxie de l’âme, comme un semblant de sécurité, Misha a senti ses épaules s’affaisser sous la détente. La nuque a recouvré une certaine souplesse dès lors que le soulagement lui a saisi les entrailles. La savoir sereine a quelque chose de lénitif, de comment ça l’apaise en dedans, décontracte ses muscles distendus,  émousse sa culpabilité à la savoir seule. Elle a trouvé une psy, dit-elle, et une sacrément bien, en qui elle a confiance. Qui l’accompagne et qui l’apaise. Carte de visite ; militante féministe, de celles que le patriarcat qualifie de névrosées, et d’hystériques. De mal-baisées, mais la faute à qui. Ce militantisme appelant à la sororité vivace pue les ennuis à l’encontre de Grisha, néanmoins son fils ne peut taire la clameur mouillée dans les yeux d’Orphée. Et comme il ne peut se résoudre à soutenir le père, pas cette fois. Il n’aura pas cette lâcheté à l’instar de son silence lorsque Grisha amorça une descente chez Amour, fusillant ainsi ses maigres espoirs de coeur, la savoir auprès de lui. Tuer le père, métaphoriquement, demeure une solution envisageable. « Avec Grisha c’était… c’était… » « Tu l’verras plus Orphée, c’est promis. J’lui ai dit de rester loin de toi. » Les propos ont dépassé la trachée, plus véloce que sa volonté de se taire. Car par ces quelques mots Misha confirme qu’il savait, que le coupable lui était offert à sa vue, sans dérobade. Ainsi se résout-il à parler sous le regard confus de la jeune fille. « Tu te rappelles, le soir où j’t’ai dit que je partais une semaine. T’avais déjà des doutes, mais sans avoir les mots. J’ai compris ce soir là. » Pause volontaire sous des lèvres pincées par la culpabilité. C’est qu’il aurait aimé s’en rendre compte bien avant. « Alors j’suis allé voir mon père pour le confronter. Et j’sais pas… Quand je suis revenu, et que t’étais là à m’attendre, j’ai eu la trouille pour toi. J’ai préféré t’éloigner de cette baraque. C’était pas la décision la plus simple que j’ai eue à prendre mais ça se voit, que t’as besoin de te reconstruire. » Et peut-être bien que je parle en ton nom, mais qu’importe, si j’ai eu raison de le faire.

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Message Sujet: Re: Sauf les fleurs   Sauf les fleurs Empty Mer 5 Mai - 13:58

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   Terribles objets que les souvenirs, ces brins d’images, d’odeur, de sons et de toucher, résonnant dans le cerveau, réveillant l’angoisse, apportant les misères, car l’on garde plus souvent l’emprunte de l’inquiétude, les relents du malheur, plus que le malheur, s’ensuit les questionnements redoutables, est-ce que c’est de ma faute, pourquoi, pourquoi moi, les réponses ne viendront jamais, c’est à vous de vous créer votre sens, sa psy lui a-t-elle dit, de sa voix calme, tempérée afin d’adoucir les larmes dans le cabinet illuminé. Le silence, c’était son arme qui détruisait son esprit. Elle développait des tics, regardait toujours derrière elle quand elle se promenait, se déplaçait des trottoirs quand elle entrevoyait les garçons, ces troupeaux de masculinité. Je crois que j’ai peur d’eux, des hommes, des vieux, des jeunes, c’est pour ça que je ne sors pas de chez moi, je ne peux pas, dès que je touche la poignée de ma porte, juste pour aller faire des courses, c’est comme s’il était là, derrière moi. Et la nuit, la nuit je tremble, je ressens son odeur, son souffle, le pire c’est le bruit qui survient, ses grognements de plaisir et il me disait des mots, des mots que je ne saurai vous dire, comme Pazuzu dans l’exorciste, il me disait que j’étais jolie, il m’appelait sa poupée, ma jolie Orphée, comme si je n’étais rien qu’un objet et pas un sujet, pas un être humain, juste une femme, une fleur de plaisir. Elle avait pleuré, un déluge sur ses joues. Sur le canapé, ses genoux resserrés contre sa poitrine, la fatigue sous ses paupières, elle écoute les révélations de son compagnon.

Elle l’avait dit, l’avait avoué, ce soir-là, quand il l’avait prise dans ses bras, quand ils s’étaient enlacés, s’était aimé, cette légère brouille lui avait dissipé l’esprit, avait réveillé les flots cachés de sa psyché, un « je ne veux pas être gardée » abimé dans sa fierté d’enfant puis la peur incompréhensible, rester avec un homme autre que Misha, elle se souvient de l’angoisse de l’imaginaire, de l’anticipation, de ce sentiment, un coup de pressoir sur le cœur à la pensée qu’Aleks puisse envahir sa chambre qu’elle ne considérait pas comme la sienne. Misha, lui aussi, en cet instant, confesse qu’il avait deviné rapidement, sans lui révéler pour autant. Pour cela elle le remercie, comprend qu’il n’est pas fin de dire pour l’autre ce que l’autre a vécu, imagine, on emploie des mots que toi-même tu refoulais, des mots précis englobant tout le stress, toute l’angoisse, la mort dans un mot, fellation, sodomie, viol. Orphée est figée sur le canapé, les yeux grands ouverts pour échapper au flux des voix d’antan, une mémoire dont elle préserve la joie, avec Misha, tout n’était que joie. « C’est la cause de notre rupture. Il m’aura aussi enlevé mes quelques élans de bonheur. S’abreuver de mon corps ne lui suffisait pas. » Quelle tragédie. Des quelques monceaux d’or lui ayant permis de guérir il n’en reste qu’un lambeau de solitude, néanmoins, sa nature optimiste guide l’espoir près de l’esprit, un bourgeon planté dans l’arbre de ses tristesses, il croitra, illuminera l’avenir. « Tu as eu raison, tu sais. De m’inciter à partir loin de cette maison. Je ne me sentais en sécurité que lorsque tu étais là, même Aleksandr me faisait peur. Grisha me terrorise, je ne veux pas porter plainte contre lui, on le croira lui, mais pas moi. C’est toujours comme ça que ça se passe. Les filles elles disent toujours oui même si elles hurlent non… c’est toujours oui. » La culpabilité creuse un nid, l’information s’empare des synapses, c’est qu’elle avait bu ce soir-là, non, elle n’avait pas bu, mais elle n’était pas elle, dépossédée de son libre arbitre, nageant dans une mer de ouate ou de glue. « Et puis, j’étais… comme si j’étais saoule mais je me souviens très bien que j’avais pas bu, juste un verre d’eau ! Je sais pas ce qui s’est passé, il y a juste son souffle sur moi, agenouillée. C’est comme si c’était un cauchemar. Ça se trouve, ce sont des faux souvenirs et ce moment n’a jamais existé. » On ne peut s’ouvrir à la dureté d’un événement criminel, on favorisera la croyance du mensonge, on minimisera les révélations, tout, plutôt que d’accepter ce crime. Pour les hommes, ce n’est rien qu’une relation sexuelle, pour les femmes c’est une violence, une zone grise, un crime, une douleur, dont il faudra composer avec toute la vie.



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