le chant des mers.
Il était de ce que les histoires n’oubliaient pas, capitaine pirate autant qu’un sale rat.
Il était rentré au port proche de sa véritable dame sans pouvoir éviter l’drame mais conservant dans la bataille sa rame.
Quelques jours seulement et tu serais presque tenté d’avancer ton départ précipitamment,
si tu n’avais pas des choses à faire avant, des choses plus importantes que l’être qui te sert de femme et qui n’a rien de charmant.
T’as une guerre à gagner pour des papiers qu’elle sera la première à signer ; les genoux pliés, les larmes déversées et le cœur brisé.
Mais surtout la défaite assumée et l’corps bien baisé.
T’as un contrat en discussion, un nouveau contre un échange qui pourrait te rapporter bonbon.
Là est ta première raison de ton retour dans l’antre des démons.
De ce que vous avez toujours été avec Caliane, incapable de s’aimer sans se détruire.
T’as un bijou à récupérer, un pacte à finaliser, la voix du commanditaire dans l’oreille qui te promet ton oseille quand plus loin dans la demeure une porte claque, à entendre des pas qui n’ont rien d’aphrodisiaque.
Tu sais que ce n’est pas elle.
Caliane, tu la reconnaitrais entre milles, pour ton plus grand malheur, comme un poison dans la cervelle.
- Je te rappelle. La communication se coupe alors qu’tu la vois à l’entrée, la silhouette fantomatique,
dans ses habits chics
celle que tu n’as pas vu depuis des années
celle que tu n’as même pas vu grandir.
celle que tu n'as jamais voulu réellement chérir.Et tu pourrais presque en rire, d’un sourire en coin qui légèrement se relève dans l’coin de tes lèvres dans un instant malsain.
Y a rien d’sain
A observer la copie conforme de ta chère femme, la catin à faire cramer dans les flammes, dans sa plus tendre jeunesse.
Puis il disparaît, le croissant de lune à l’ombre de tes charnues pour la nouvelle venue.
Tu ne te lèves pas, sur le fauteuil tu demeures alors que plus lentement semble tourner l'heure.
A tes lèvres, tu portes le verre de consistance chère, plutôt ravie de cette arrivée pour te distraire.
- Et vous êtes ? D’une nonchalance feinte quand, dans ce même instant, c’est ton coeur qui suinte,
d’un étrange sentiment alors qu’les démons se font toujours garnement.
A entendre chacun de leurs ricanements.
Bonjour mon enfant, comme tu es grand.Tu ne pourrais mentir en disant que la surprise est présente, elle l’est, sans être menaçante.
Pour tes convictions, pour ce que tu es, après tout, tu ne pouvais y échapper en étant de retour à la maison.
Drôle de chanson.
Ironie à la con.
Alors qu’en foulant le parquet de la demeure pendant des heures,
Alors qu’en ayant l’cul posé sur un fauteuil aussi affreux que l’voeu de chasteté d’une idiote de bonne soeur,
Tu n’as pas cette impression.
Tu ne l’as presque jamais eu.
Homme des bétons de mers, le sol fixe te donne le mal de terre, plus encore de retour dans l’antre de la sorcière. Caliane, fille de Diane, salope courtisane qui a engendré l’enfant du démon.
c'est quc'était bon.
divinement bon.Et mille sentiments se mêlent en regardant celle que tu as de moitié créée par la finalité du désir accumulé proche de l’aine.
Et le côté plus fort se révèle en toi, indéchiffrable extérieurement sur ton visage en soit, en contemplant cet
être qui provoque tant de haine.
Entre sa mère et toi,
entre une reine et son roi,
quand la première a toujours clamé, voire même assumé, un
c’est ce que je voulais, moi.quand ce dernier a toujours assuré, voire même assumé, un
je ne veux pas de toi.
de vous.
nyc. 11/03/2021.
(retranscription audio d'une allocution brouillée, mémoires retrouvées sur un magnéto presque trop rouillé. on racontait qu'il s'agissait là des mots du pirate condamné. il l'était à la potence, prêt à laisser vaguer son âme noire dans l'eau salée avec errance. qui sait s'il aurait souhaité qu'il soit écouté et surtout analysé.*)
j’ai arrêté d’compter.
(grésillement.) de nombreuses choses en réalité.
des nombreuses fois où j’en avais rien à foutre. de toi.
de ces peu de fois où j’ai pensé à toi.
(long silence.) ils disent que j’devrais avoir honte.
(un rire rauque où pointe une lassitude avec peut-être une touche de dégoût.) qui sait ?
est-ce qu’ils savent c’que j’pense vraiment ?
ce jour-là, quand t’es apparue devant moi, comme un phare au milieu d’la tempête, j’avais arrêté d’compter.
ces jours passés sans pouvoir te contempler.
j’avais arrêté d’y penser, à m’demander à quoi tu pouvais ressembler.
est-ce que t’avais tout pris d’ta mère ?
est-ce que t’avais un peu d’moi dans tes airs ?
(un soupir. trente secondes passent, sans rien, seulement un bruit ambiant. indéchiffrable.) aujourd’hui, j’sais même pas si c’est important. y a rien d’plus chiant.
on aurait dit ta maman.
(un reniflement de dédain. fin.) * nb. qui sait s’il avait réellement envie de parler d’elle. de cet enfant. de son enfant. sa fille. là encore, il possédait cette rancune. cette rancoeur qui ne lui quittait le coeur.
alors qu’elle n’y était pour rien.
alors qu’il n’y pouvait rien.
- La pieuvre.
Le chant des mers
@ava caruso