beautiful things never last that's why fireflies flash. (a&c)

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{ beautiful things never last
That's why fireflies flash }
crédit/ tumblr ☾ w/ Alejandro & Camille

Il y a le manque qui se ressent,
irrémédiablement.

Elle a l’habitude de les retrouver, chaque fois que l’envie vient la submerger. L’habitude d’aller traîner dans cette maison devenue aussi la sienne, l’habitude  d’embêter Alejandro avant d’aller trouver refuge auprès de Camille, l’habitude de partager un bout de leur vie. Mais elle n’y a plus mis les pieds depuis que le flic est sorti du coma. À l’instant où elle devrait être la plus présente possible pour celui qu’elle considère comme son père, Ella, elle n’est pas là. Fierté mal-placée Souffrance trop vite soupçonnée. T’as le cœur à la dérive, Ella, depuis que tu sais qu’il ne se souvient plus de toi. Elle a la sensation d’avoir, simplement, été effacée, comme un grain de poussière peut s’envoler.

Effacée,
écartée,
oubliée,

comme un souvenir qui n’a jamais compté.

Lorsque Camille était dans le coma, elle souffrait du poids de son absence. Elle espérait, chaque jour le voir revenir l’illuminer de sa présence. Elle avait mal, elle avait le manque. Mais, quelque part, elle savait qu’il était là. Elle était si heureuse à l’idée de le revoir. Si heureuse de le retrouver.

Jusqu’à ce que tu apprennes la vérité,
et que ton cœur ait lâché.

Les émotions trop vives, l’âme en perdition n’a pas su les contenir. Elle n’a pas su comment réagir. Le choc de découvrir que son père de cœur l’avait oubliée était violent, trop violent pour qu’elle sache l’encaisser. Alors c’est la colère qui a parlé. La colère d’avoir été bernée. Qu’ils aient pu lui mentir, eux, alors qu’elle leur avait accordé toute sa confiance, lui a donné une terrible sensation de trahison. Une trahison qu’elle a choisi, au bout du compte, à l’abandon. Car il lui est sûrement plus aisé de leur en vouloir à mort, plutôt que d’admettre combien cette amnésie lui brise le cœur. Combien la douleur la ronge de l’intérieur.

Car c’est bien ton pire poison,
l’abandon.

Elle s’est réfugiée dans cette colère, cette rage. Tout ce mal, au fond d’elle, qui la dévorait déjà. Plus facile de détester le monde entier, comme toujours, plutôt que d’affronter la réalité. Plus facile de se dire qu’elle hait Alejandro et Camille, plutôt que d’être confrontée à cette putain d’amnésie. Plus facile de te dire que tu ne veux plus les voir, plutôt que de t’avouer que tu as peur de les voir. Peur de te retrouver devant ce père sans mémoire. Alors elle les fuit, depuis plusieurs jours. Elle les fuyait, en tout cas, jusqu’à aujourd’hui. Elle a ses affaires à récupérer. Non, Ella, elle ne fait pas les choses à moitié. Elle utilise sa clé pour entrer, comme si c’était chez elle, parce que quelque part ça a toujours été chez elle. Elle ne perd pas de temps pour rejoindre sa chambre, sans même signifier sa présence. Elle se réfugie à l’intérieur et commence à emballer ses affaires pour repartir. Repartir aussi vite qu’elle est arrivée.

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crédit/ tumblr ☾ w/ Alejandro & Camille

Comme un tourbillon, la tempête s’abat violemment. Les vêtements laissés, ici et là, éparpillés comme si elle habitait encore dans cet endroit. Elle n’est jamais vraiment partie, Ella. Même quand elle a pris son appartement, même quand elle a déménagé maints et maintes fois. Une partie de ses affaires reste toujours dans le coin, comme elle y laisse une partie de son cœur. Comme elle y laissait, une partie de ce cœur, désormais éclatée en milliers de morceaux amers. La tourmentée a tout juste eu le temps de ranger quelques affaires quand la voix grave d’Alejandro vient la sortir de son agitation. Il a ce ton calme, qu’elle lui connaît trop bien, cette assurance inébranlable de l’homme que rien n’atteint. Il a assisté à beaucoup de ses crises, beaucoup de ses instants de furie. Mais ils étaient rarement dirigés contre lui. Contre eux. Il ne paraît même pas offusqué, comme s’il savait qu’elle allait se calmer. Parce qu’il a toujours su, la calmer. L’apaiser.

Mais pas cette fois.

C’est le silence qui répond aux paroles de ce père bien meilleur pour elle que ne l’a jamais été son propre paternel. C’est le silence et l’indifférence alors qu’elle continue d’emballer ses affaires. Mais la froideur apparente ne cache que la colère qui menace à tout instant de te submerger. Et le frapper, sans qu’il s’y attende, de plein fouet. À fleur de peau, plus encore que d’ordinaire, t’es bien prête à exploser. Mais c’est la distance qu’elle garde, pour le moment, comme seul rempart. – J’suis sure que tu peux trouver tout seul. elle balance, le ton glacial, avant qu’il n’évoque ses addictions. C’est tellement facile de croire que c’est la drogue. Tellement facile de croire que c’est elle, le problème, toujours elle. Mais elle n’a pas même le temps de rétorquer. La voix de Camille se fait entendre, les mots aussi qu’il balance, les mots qui la frappent avec une telle violence.

Une camée,
c’est comme ça qu’il t’a appelée,
une camée,
c’est ce que t’es,

mais la vérité es encore moins cruelle,
que l’entendre de la part de ton père.

Si son cœur n’était pas déjà bousillé, il l’aurait arraché. Mais elle réagit à peine, Ella, cette noirceur contenue dans ses prunelles, alors qu’elle les garde obstinément posées sur ses affaires. Elle n’arrive pas à le regarder. Elle sait, la gamine, qu’elle ne saura pas contenir ses émotions longtemps. Incapable de garder en elle toute la colère qu’elle ressent. Et il suffit d’une brèche, une malheureuse étincelle ravivée par Camille, pour allumer l’incendie. Qu’il lui dise qu’elle a fait bien pire. – T’es sérieux là ?! Tu compares ce que JE fais de MA vie au fait que tu te sois foutu de moi et de ce que je ressens ?! T’as voulu me faire croire que tu te souviens de moi, t’as joué avec mes sentiments… et toi aussi ! lâche-t-elle en se tournant enfin en direction d’Alejandro. Elle ne soutient pas son regard longtemps, ses opales se détournent déjà pour reprendre son occupation. Elle ne fait même pas attention aux explications données par celui qui était son père de substitution. – Vous inquiétez pas, la camée se barre dès qu’elle a fini. Et, accessoirement, ils peuvent tout aussi bien sortir de cette chambre et la laisser enfin tranquille.

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crédit/ tumblr ☾ w/ Alejandro & Camille

Bombe à retardements, bombe proche de l’explosion. Il parvient en quelques mots, Camille, à la faire partir en vrille. Atroce ironie quand on sait combien, en réalité, il sait mieux que personne éveiller la douceur de l’âme torturée. C’est peut-être justement parce que, d’ordinaire, il lui fait tant de bien qu’il parvient à lui faire tant de mal. Trop de mal. Même Alejandro n’arrive pas à la calmer, quand il vient à s’excuser. Alors qu’elle sait combien cela peut lui coûter, elle sait qu’il ne le fait jamais. Mais elle, elle n’accorde jamais sa confiance. Il y a peu de personnes qui l’ont, totalement, aveuglément. Il y a Elio, et eux. Seulement eux. Ils sont ceux à qui elle confierait sa vie… ceux qui, au fond, la maintiennent encore en vie. Mais, tout de suite, ses deux pères ne font que briser un cœur déjà trop détruit. – J’m’en fous. elle balance, sans le penser, en arrachant ses mains de celles de ce père tant aimé. Et, à cet instant, elle ne sait même pas ce qu’elle espère, Ella. Qu’il insiste encore davantage ou bien qu’il la laisse s’effondrer un peu plus dans ses ténèbres.

Mais Alejandro ne t’abandonne pas.

Il ne l’a jamais fait,
ce n’est pas aujourd’hui qu’il va commencer.

Et, après avoir déjà pris sa défense face à son fiancé, il le met à la porte uniquement pour lui parler. Le cœur noué, l’âme en perdition ne daigne toujours pas le regarder. Ce serait laisser entrevoir la faiblesse dans son ébène tourmenté. Elle fait toujours mine de ranger ses affaires alors qu’il s’installe sur le lit pour commencer à se confier. La gamine sent sa gorge se serrer sans un bruit. Elle ne pose toujours pas un regard sur lui, mais ses gestes se sont ralentis. C’est quand il affirme qu’il n’a jamais été le plus doué entre ses deux pères qu’elle sent ses dernières barrières s’effondrer. Peut-être car elle sent le manque de Camille instantanément s’intensifier. Peut-être aussi car elle devine, à travers ses mots, combien il peut à lui aussi manquer… Elle finit par se retourner vers son père de cœur, les prunelles noires de douleur.

Et si ça ne s’arrangeait pas, Alejandro,
s’il ne retrouvait jamais ses souvenirs,
on deviendra quoi, nous, sans lui ?

Passant la main dans sa tignasse indisciplinée, la gamine se laisse aller lentement à se livrer. – J’sais pas… j’sais pas si je peux y arriver. elle avoue, la voix serrée, alors qu’elle laisse tomber son sac au sol. Désormais tournée vers Alejandro, elle reprend difficilement la parole. – Il m’a rencontrée alors que tout allait bien dans sa vie, que… qu’il avait le temps, tu vois ? Pour gérer une ado en crise… il en avait envie. Alors que maintenant… maintenant, c’est de lui-même qu’il doit s’occuper et… et il n’a pas besoin que je vienne tout compliquer. Et ses mots, ils lui font plus mal que tout ce qui a pu être dit. Car elle sait, Ella, qu’elle ne fait toujours que tout détruire. Mais cette fois, ce n’est pas à elle qu’ils doivent penser, seulement à Camille. – T’aurais dû me le dire, t’aurais dû… me préparer à ça… elle lui en veut, oui. Parce que c’est plus facile d’en vouloir au père qui se souvient encore d’elle, celui qui l’aime… que celui qui l’a effacée de ses souvenirs.

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crédit/ tumblr ☾ w/ Alejandro & Camille

Plus que la douleur de la trahison, elle souffre de l’absence de son père de substitution. Elle souffre de ce manque, depuis des mois déjà, alors qu’il était encore dans le coma. Elle espérait tellement le voir se réveiller, retrouver cette lueur de tendresse dans ses prunelles tant de fois imaginées. Mais rien ne s’est passé comme prévu… il était là, à ses côtés, mais elle a eu plus encore la sensation de l’avoir perdu. Elle n’a pas pu supporter de n’être, pour lui, plus qu’une inconnue. Comme elle n’est pas sûre, Ella, de pouvoir se faire à une telle situation. Comment pourrait-elle, comment est-elle censée accepter que celui qu’elle considère comme son père… n’a plus le moindre souvenir d’elle. Il est l’un de ses plus grands piliers, l’un de ses seuls piliers.

Mais peut-être que, cette fois, c’est à toi de devenir un pilier,
peut-être que, pour une fois, c’est à toi d’être présente pour un être aimé.

Seulement, si Alejandro paraît persuadé qu’elle est capable d’y arriver, rien n’est moins sûr pour l’âme tourmentée. Peu convaincue, elle secoue la tête négativement, la gamine est trop perdue. – Y’a que toi qui penses ça Al… j’suis pas comme lui. elle répète, elle s’entête. Car Camille est de ces anges qui avancent sans ailes, quand elle est seulement une âme en détresse. Le cœur brisé en milliers de morceaux, l’obscurité qui accompagne le moindre de ses gestes. Mais, parce qu’elle le connaît, elle sait qu’il n’en démordra pas. Il la voit plus belle qu’elle ne l’est, Al. Il la voit comme une lumière branlante quand elle n’est que ténèbres. Blottie dans ses bras, l’enfant paumée se laisse faire. Elle le laisse l’envelopper de son étreinte, protégée par sa tendresse. Elle garde le silence alors qu’il essaie encore de la rassurer, elle tente comme elle peut de se calmer. Dans la voix de son père de cœur, elle sent le poids qu’il porte sur ses épaules. Il a les épaules solides, Alejandro, mais elle sait son cœur plus fragile. Elle s’en veut presque, à cet instant, d’imaginer qu’il a pu endurer toute cette situation tout seul. Se reculant lentement pour le regarder, les opales encore brillantes accrochées aux siennes, elle lui adresse pour la première fois un doux sourire. – T’es mieux qu’un philosophe… Un philosophe n’arriverait sûrement pas à l’apaiser. Mais Alejandro, pourtant, a bien réussi à la calmer. Le cœur toujours serré, mais un peu moins terrorisée, l’écorchée vive est prête à essayer. Elle se rend bien compte qu’Alejandro s’en veut. Qu’à la souffrance qui lui est propre, s’ajoute la culpabilité. La peur d’échouer, la peur de se tromper, la peur de mal aimer.

Alors qu’il est, de tous, celui qui n’a jamais cessé de t’aimer,
celui qui sera toujours là pour toi peu importe combien tu pourrais le malmener,
peu importe tout ce que tu serais capable de gâcher,

Al’, il le reconstruirait.

– Je suis désolée que t’aies affronté ça seul… ça doit pas être facile pour toi non plus… L’homme dont il est fou amoureux, l’homme qu’il aime depuis toujours… ne se souvient presque plus du tout… de lui, de leur couple, de leur amour. Ce doit être tellement difficile à vivre… mais le père et la fille sont soudain interrompus par un vacarme qui ne peut que les faire réagir. Elle échange un regard surpris avec Alej’ avant d’ouvrir la porte pour quitter la chambre… Il est là, Camille, assis au milieu des marches de l’escalier. Elle ne voit pas tout de suite la valise, ce n’est qu’en approchant de lui. Et, instinctivement, elle presse le pas pour arriver jusqu’à Camille. – Camille, qu’est-ce qui se passe… Elle passe devant lui pour se retrouver face à son regard tourmenté. Accroupie, elle le contemple du sien, inquiet. Désemparé. Totalement chamboulé. – Tu fais quoi, tu veux partir… tu dois pas… encore moins à cause de moi. Et elle pense tout de suite qu’elle est responsable. Qu’elle est, Ella, la seule coupable. Mais il est hors de question qu’ils le laissent faire… et, devant le désarroi de celui qu’elle considère comme un père, c’est naturellement que revient sa tendresse. Sa main glissant contre la sienne, elle l’enveloppe de sa délicatesse. – Tu sais que t’as besoin de rester chez toi pour te souvenir… Et Al’ a besoin de toi lui aussi. Et elle aussi, elle a besoin de lui. Ils sont, tous les trois, une famille.