when it falls

traits de caractère / Le regard éteint. Les murs recouverts de blanc, le plafond devenant oppressant, il y a une odeur déplaisante qui flotte autour de son chevet, personne à ses côtés, la solitude bien plus pesante lorsqu’elle se retrouve allongée, la douleur dans son dos la crispant, tandis que ses souvenirs floutés tentent de comprendre ce qu’il s’est passé. Pourquoi ? comment ? l’impression d’être inerte, la fatigue dans chaque parcelle de son corps, le besoin de se lever se retrouvant aussitôt assassiné par ses membres incapables d’effectuer ce simple geste. Musculature imposante mise à l’épreuve, l’impression d’avoir été écrasée par un bus, et le besoin de fermer les yeux, contrecarré par sa forte volonté. elle ne s’endort pas, elle ne grimace pas, elle ne se rend pas compte de l’endroit dans lequel elle est allongée, n’a pas l’impression de connaître la vue donnée par la fenêtre à sa gauche, se demande si elle est rentrée bourrée, chez une fille appétissante. La tête qui ose à peine se tourner, elle ne veut pas savoir qui elle a bien pu se faire, ne veut pas comprendre quelle amitié elle a bien pu détruire, cette fois, quel couple elle a peut-être endommagé, cette fois. Parce que ce n’est pas la première fois qu’elle met un terme à une relation dans laquelle elle n’est ni l’une ni l’autre des parts. Après tout, elle n’a toujours pensé qu’à elle, passant avant tout, avant toute forme d’amitié, avant toute forme d’attachement. Et lorsque la femme d’un prétendu ami s’est retrouvée dans le creux de ses bras, elle ne s’est pas arrêtée, a continué à apposer les baisers désirés, dans le cou, sur les épaules dénudées de cette dernière, pour venir caresser chaque partie de sa peau, de son corps, la chaleur qui montait, le besoin qui se faisait ressentir, tant par l’une que par l’autre. L’alliance au doigt de la belle oubliée par l’argentée, elle se retrouva chevauchant la relation d’un proche, pour la briser, égoïsme ne sachant se maîtriser. Possession ne pouvant retourner à son destinataire, elle laissa le septième ciel s’emporter avec grâce, et son regard devenu presque noir se faufila à l’oreille de la demoiselle, gazelle prise en otage par la lionne, tandis qu’elle lui promettait qu’avec elle, elle n’aurait plus rien à craindre, plus à se retrouver coincée derrière les barreaux d’un couple, d’un homme. possessivité et manipulation, elle recommença quelques fois avec la même, avant de l’abandonner sèchement, lorsque les sentiments vinrent s’en mêler. Et une vie s’en retrouva affectée. Et deux cœurs se retrouvèrent brisés. Par le sien, pas le sien.
Alors elle n’ose plus regarder, au réveil. Elle n’ose plus regarder, pour chasser la culpabilité, son cœur n’étant pas de pierre, même si l’impression est là, toujours. Elle n’ose plus bouger, et son regard se retrouve perdu dans le blanc menaçant de ce plafond qui menace de s’écraser à tout moment. Comme si son âme, aussi noire qu’il est clair, se retrouvait reflétée par cette peinture de plus en plus difficile à regarder.
Elle n’en peut plus. doit se lever. Doit affronter la fatigue. Doit affronter la douleur. Doit affronter la honte. Et ses mains s’accrochant au bord du lit, elle se hisse un moment pour comprendre qu’un problème plus grave l’attend. Parce que sous ce nouvel angle, elle peut comprendre que ce n’est pas un simple blanc, mais une chambre d’hôpital. Elle peut comprendre qu’elle n’appartient pas à ce milieu, qu’elle doit s’en aller au plus vite. Sportive de haut niveau ne rime pas avec cet édifice promettant la survie, synonyme cependant de blessure et de mort.
La frayeur qui la prend, un instant, et elle tente de sortir du lit, en vain. Elle n’est pas fatiguée, tout compte fait. Elle a un autre problème, celui qui la rend aussi livide que le plafond qui l’espionne. Ses jambes ne bougent pas. Ses jambes ne peuvent pas bouger. Elle s’affole, elle les touche, rien. rien. plus rien. à part cette douleur constante. Elle les touche, et elle ne sent pas les caresses d’une main sur ses cuisses, mais ses muscles qui crient au secours.
Et elle se souvient.
Les bruits incessants. La route vibrante. La couleur verte du feu. Et ses pas sur les bandes blanches, avant de ressentir le choc d’un véhicule.
Elle a l’impression d’avoir été percutée par un camion.
C’était une voiture.
La fin de sa vie.

avant
Tout un monde qui s’offrait à elle, toronto, comme une ville lumière, toronto, qui lui faisait du charme. Il ne suffit que d’un pied dans l’eau, pour tomber amoureuse. De cette sensation, la douceur du liquide qui venait la chatouiller, les rires enfantins qui berçaient les lieux, l’amour d’un père, l’affection d’une mère, et le regard aussi attentionné, de l’un, de l’autre, envers cette petite et ses brassards, qui se sentait comme un poisson dans l’eau. Une merveilleuse petite sirène, comme on l’appelait, qui riait aux éclats, lorsqu’elle se retrouvait immergée, qui jouait dans l’eau, dès qu’elle le pouvait, qui grandissait avec des branchies – on aurait dit – et qui nageait, laissait l’eau l’accompagner dans chacune de ses épreuves, de ses mouvements, qui la calmaient, qui la renforçaient, qu’elle ne savait plus oublier. Bien vite, l’obsession. Jamais elle ne pouvait se sentir bien, si elle n’avait pas au moins un pied dans l’eau. Bien vite, elle ne savait plus se retenir, et, enfant encore en âge de courir jusqu’à ses rêves, elle se dépêchait, à la sortie de la voiture, pour enfiler son maillot, pour apprendre de son coach, pour se laisser envahir par un élément qui n’appartenait qu’à elle, lorsqu’elle s’en retrouvait inondée. C’était comme si tout son monde coulait dans ses veines, que le sang était remplacé par de l’eau, que la piscine devenait son sanctuaire.
Une fois sous la surface, elle se sentait au calme.
Une fois à la surface, elle défiait chaque record, se frayait un chemin plus rapidement que n’importe qui, des mouvements qui s’affinaient avec les années, et un sport qui prenait de plus en plus de temps.
Nul ne fut surpris, lorsqu’elle fut recrutée par des équipes plus importantes, lorsqu’elle choisit d’en faire son métier, lorsqu’elle fut prise pour les jeux olympique. Il y eut des cris de joie, dans la famille, alors qu’à la télévision, on la voyait atteindre la seconde place. Il y eut des cris de joie, dans son cœur, lorsqu’elle le sentait battre à tout rompre, après une telle course. Renommée, fortune, elle ne devait tout ça qu’à sa meilleure amie, l’eau.
après
Le regard qui se perd, le fauteuil qui l’enracine dans un quotidien bien plus difficile qu’elle ne l’aurait cru, qu’elle ne voulait admettre. Elle se laisse prendre à la nostalgie, alors qu’elle a encore essayé de se lever, qu’elle a encore abîmé ses jambes mortes, qu’elle a encore hurlé de douleur, sans pour autant renoncer. Mais peine perdue, elle s’est écroulée, et les efforts pour remonter dans son fauteuil furent tels qu’elle ne bouge plus, amochée par la vie, fatigue prenant possession de chacun de ses membres, alors que ses rires n’existent plus, que les larmes perlent aux coins de ses yeux. La rage qui prend possession de son cœur, et la piscine recouverte qui lui fait de l’œil, ou remue le couteau dans la plaie, dehors. sa demeure lui parait oppressante, il n’y a pas d’autres mots. Elle a peur, elle a mal, elle n’en peut plus, veut retrouver la douceur de l’eau sur son visage, contre son corps. mais elle ne peut pas, une interdiction, une incapacité qui la détruit un peu plus chaque jour.
Qui la saccage de l’intérieur.
Alors qu’elle crie.
Alors qu’elle sanglote.
Qu’elle est piégée. Un corps sans plus rien, un regard vide, et la douleur qui s’empare à nouveau d’elle. les comprimés ne font pas effet, même la morphine ne savait réellement la calmer, lorsqu’elle était à l’hôpital.
Foutue vie.

avant
Les sourires sur les lèvres de ses parents l’enchantaient, les acclamations de ses amis la fascinaient. Elle il y avait l’aventure, partout où elle allait, et elle était accompagnée des meilleures personnes. Elle se sentait bien, s’amusait, avait quelques amies qui se retrouvaient bien souvent chez elle. et même si son caractère n’était pas des plus facile, elles s’appréciaient, s’aimaient. Peut-être un peu trop. Combien de fois a-t-elle demandé à sa mère si ashe pouvait venir à la maison, si bettany pouvait rester dormir, si elle pouvait aller chez marie, pour le week-end ? combien de fois s’était-elle retrouvée dans les bras de julie, ou avait-elle fait les plus belles bêtises avec jen ? des questions qu’il était inutile de se poser, les chiffres seraient bien trop volumineux. Et alors qu’elle sortait de ses entrainements, elle retrouvait systématiquement quelqu’un qui la faisait sourire. Y compris son amoureux. à l’époque, tout du moins. âgée d’à peine une dizaine d’années, elle et marvin s’étaient promis le grand amour, de se marier, d’avoir des enfants.
D’être heureux, tout simplement.
après
Il y a comme un goût de mort, à chaque fois qu’elle les voit. un père qui se perd dans l’alcool, une mère qui est partie depuis bien longtemps. la douleur qui la prend, personne ne la voit. son paternel l’a oubliée depuis quelques années, le divorce a été trop dur pour lui. sa mère ne lui parle pas, pourquoi le faire, alors qu’elle est avec un homme qui la berce d’illusions, et lui offre des richesses inimaginables ? pourtant, l’accident aurait pu les rassembler, si seulement silver le voulait bien. mais la haine dans son propre regard fait fuir les quelques proches qu’elle avait encore. Quant aux autres, elle les avait déjà tous trahis, avant que le choc ne vienne lui voler ses jambes. Dans les coucheries incessantes, la femme de marvin dans son lit, la tromperie avec julie, tandis que jen se lamentait. Que d’erreurs qui avait dominé sa vie d’adulte, alors que la célébrité lui était montée à la tête, que l’argent avait réussi à la corrompre.
Et désormais, qu’a-t-elle ?
Rien.
Elle est riche, et pourtant, elle n’a rien.

plus rien ne va. Plus rien n’a de sens.
Tout s’en va, tout recommence.
Les erreurs qui surgissent, les peines qui reviennent.
elles sont l’horreur, me tranchent les veines.
Si seulement leurs lames étaient assez aiguisées,
Si seulement je pouvais me reposer.
La mort n’est pas damnation.
Elle n’est que la solution…