Vérité.

Cigarette à la bouche à moitié consumée. Mains dans les poches. Dos appuyé contre le mur. Tu attends patiemment qu'Ella arrive. C'est elle qui t'as contactée. Non pas pour s'excuser de ce qu'il s'est passé la dernière fois. De toute façon, Ella ne voit en toi que son simple dealeur et un mec qui a voulu la baiser. Tout ça à cause de ce baiser que tu lui as offert, elle ne semblait pourtant pas contre ce baiser lorsque tu lui as offert. Vexé, humilié, tu pensais ne jamais la revoir jusqu'à ce soir. Jusqu'à ce qu'elle t'envoie ce message juste pour avoir sa dose hebdomadaire. Dernier sachet à la main, tu l'attends. Le rendez-vous était fixé à minuit, pas à minuit quarante-cinq. La dernière fois, c'est elle qui t'as enguirlandé suite à ton retard, tu ne vas pas la rater lorsqu'elle arrivera. Si elle arrive, ren est moins sûr. Si ça se trouve, Ella ne viendra pas. Si ça se trouve, elle va te laisser tomber comme tout le monde avant elle. Ses pensées ne cessent d'habiter tes pensées. T'essaie de la détester, de la hair. Ça sera plus facile de taire tout ces sentiments qui naissent en toi. Ella ne cesse d'habiter tes pensées. Nuit et jour, tu penses à elle. Tu ne comprends pas, tu t'es toujours abstenu de t'attacher à qui que ce soit. Tu n'es pas un homme bien. Personne ne devrait s'intéresser à toi. Tout le monde devrait te laisser crever dans un coin. De toute façon, t'es seul. Tu vis seul et tu crèveras seul. Tu n'es plus ce petit garçon d'autrefois. Tu ne souris plus, tu te contente simplement de vivre ou d'essayer de vivre du moins. Dans ton cas, ça sera plutôt survivre. Les yeux embués par les larmes, t'attends patiemment Ella. Tu ne sais pas si elle va finir par arriver ou pas, cependant tu l'attendstu attends que la jeune femme arrive. La revoir fait apparaitre un sourire idiot sur ton visage. Tu ne sais pas comment ces retrouvailles vont se passer. Ce baiser, tu ne le regrettes pas. T'en avais envie et tu sais qu'elle aussi. Ton coeur s'emballe lorsque t'es près d'elle. Ton coeur bat la chamade, tes mains deviennent moites et ta respiration devient sacadée. Elle te manque. Tu crèves d'envie de la prendre dans tes bras, de l'embrasser et qu'elle devienne tienne pour le restant de ton existence. Ella arrive. Ses cheveux qui volent derrière elle, tu es totalement subjugué par son charme et sa beauté. Toutefois, tu ne laisses rien transparaitre. Les sourcils froncés, tu dégaine ton cellulaire. "Putain trois quart d'heures de retard ! Préviens la prochaine fois !" Tu lui lances son sachet de poudre et tend la main pour récupérer l'argent. "C'est bon ? T'as ta drogue, j'ai mon fric. Salut Ella !" Dis-tu en commençant à tourner les talons.

☾ ☾ ☾
{ moment of truth }
crédit/ tumblr ☆ w/@Thomas Farrel

Les pieds qui la guident plutôt que sa tête. Ella, elle a peut-être un peu trop fait la fête. L'esprit empreint de toute la vodka consommée, elle essaie pourtant de se dépêcher. Elle a rendez-vous. Rendez-vous avec son dealer. Rendez-vous avec Thomas. Dix jours qu'elle ne l'a pas vu, dix jours comme à leur habitude. Mais, la dernière fois, leur rencontre n'a rien eu d'habituelle. Pas dans son assiette, la jeune femme a commencé à se confier à lui. À se livrer à lui. À s'ouvrir à lui. Ce ne serait sans doute rien pour le commun des mortels. Ce n'était visiblement rien pour lui. Car il n'a rien trouvé de mieux à faire que l'embrasser. Le baiser était agréable, là n'est pas la question. Mais elle ne se laisse pas aller si facilement, Ella. Elle ne le fait même jamais. Encore moins avec les hommes. Elle a eu le sentiment qu'il a juste voulu en profiter. Pourtant, elle ne lui en a pas tenu compte. Elle l'a simplement rappelé à l'ordre. Et puis, elle est partie. Elle ne pensait pas s'étendre plus longuement sur le sujet. Des mecs qui ont voulu la sauter sans y arriver, il y en a plein. Elle a les mœurs légères, Ella, mais c'est toujours elle qui choisit. Toujours elle qui décide.

C'est peut-être ce qui t'a fait fuir,
Avec lui, t'as rien vu venir.

Il l'a prise au dépourvu, Thomas. Car elle ne l'a jamais envisagé de cette manière. Elle n'a jamais imaginé en lui un amant potentiel. Non pas qu'il ne soit pas attirant, mais il est son dealer. Peut-être la seule relation avec un homme qui fonctionne sur la durée. Alors, non, elle n'était pas prête à un tel moment à ses côtés. Elle a sans doute été excessive. Elle l'a compris à ses messages, à la façon froide avec laquelle il lui répondait.

Peut-être que tu l'as touché,
Peut-être que tu l'as blessé,
Mais tu peux pas t'empêcher de penser,
Que c'est seulement sa putain de fierté.

C'est une question d'égo, c'est certain. Cela ne peut pas être autre chose. Elle n'est rien pour lui, il n'est rien pour elle. Elle n'a pas le pouvoir d'atteindre son cœur. Pourtant, plus elle s'approche de leur lieu de rendez-vous de toujours, plus elle commence à le redouter. À se demander comment cela va se passer. Son retard ne va pas arranger la situation mais, tellement prise dans la soirée qu'elle vient de quitter, elle ne s'est pas rendu compte que l'heure défilait. Il va pourtant vite le lui faire comprendre. Exactement comme elle l'a fait, dix jours auparavant. La violence avec laquelle il lâche ses premiers mots la ferait presque sursauter, si elle n'était pas tant habituée. Pas avec lui, mais avec eux. Tous les hommes qu'elle a entendu exploser, depuis celui qui l'a conçue. – Ohh, on se calme. C'est toujours deux heures d'avance par rapport à toi. Qu'elle lâche, la voix un peu plus aigue qu'à son habitude sous l'effet de l'alcool. Elle n'est pas pour autant énervée, contrairement à son interlocuteur. Il lui lance le sachet de poudre dessus sans cérémonie. Elle le range dans son sac avec la même désinvolture, puis lui tend nonchalamment les quelques billets demandés. – Tu m'en veux à ce point ? Qu'elle lui lance, sans comprendre. Sans rien comprendre.

Parce que t'es comme ça,
Tu fais du mal autour de toi,
Et tu t'en aperçois même pas,
Pourtant, tu l'avais prévenu, Thomas.

L'esprit qui divague, l'esprit qui se perd ici et là. Ça fait trois quart d'heures que tu attends qu'Ella veuille bien enfin arriver. C'est elle qui a fixé ce rendez-vous et c'est elle qui est en retard. Attends qu'elle arrive, tu te feras un plaisir de lui en faire la remarque. Vos derniers échanges par messages ne s'est pastrès bien passés. Des cris, des hurlements. Tu t'es énervé suite à votre précédement rendez-vous. Ella a une mauvaise image de toi et ça t'énerve vraiment. Ça ne devrait pas mais c'est plus fort que toi. Tu l'aime cette femme, tu es épris d'elle. Depuis des années, tu as toujours fait très attention à ne jamais t'attacher à qui que ce soit. Depuis ton installation à New-York tu es seul. Entièrement seul et ne cesses de repenser à ce qui t'es arrivé à San Francisco dans cette maison où tu te pensais en sécurité. Personne ne le sait, même pas ta mère. Elle continue de vivre, comme si de rien était, avec cet homme qui t'as détruit, brisé. Il a pris ton âme. Cette âme est restée là-bas, dans son ancienne chambre chez ta mère. Depuis tu te contentes désespéremment de vivre comme tu peux. Les premiers instants, les premiers jours ont été les pires de tous. Tu n'avais plus goût à rien. Vivre était devenu insupportable pour toi, t'as même été tenté de mettre fin à tes jours. Tu ne supportais plus, tu n'aimais plus ton corps. Tu n'as jamais été très gros mais tu te trouvais énorme. Tu ne mangeaix plus, ou quasiment plus. Une tomate, un concombre et deux pruneaux c'est tout ce que tu t'uatorisais à ingurgiter. Tu trainais le plus longtemps après l'école, ne rentrant que lorsqu'il commençait à faire nuit. Tu ne voulais pas croiser cet homme qui agissait comme si de rien était. Un soir, alors que tu sortais de ta douche, lame de rasoir à la main, tu as voulu en finir et ne plus jamais ressentir ce genre de douleur. Alors que tu as commencé à poser la lame sur ton bras et à te taillader le bras, ton visage s'est posé sur ton reflet dans le miroir en face de toi. Tu ne pouvais pas faire ça. Ne serait-ce que pour ta mère, qui s'est toujours battue pour toi, ou pour tes rares amis. En quittant le secondaire, ton cercle d'amis s'est considérablement restreint et tu n'as gardé que les meilleurs à tes côtés. Ceux que tu jugeaient digne de faire partis de tes amis. Alors tu as posé la lame, tu t'es habillé et est allé manger un de ses plats que ta mère t'avais apporté il y a quelques heures plus tôt dans ta chambre vu que tu refusais de manger à la même table que ton beau-père. Vivre avec lui était devenu un véritable enfer, tu as donc pris tes affaires que tu as enfourné dans un sac à dos et tu as quitté San Francisco. Te voici dans la capitale américaine. Loin de ta famille, tes amis et loin de lui surtout. Personne ne te connait ici. Personne ne connait ton passé et ce que tu as vécu. Tu peux donc être celui que tu veux sans problème. Ella est la première à te rendre comme ça : faible, prêt à baisser les armes. Elle arrive enfin, trois quart d'heure de retard. Tu ne répond pas à ces attaques, te contentant de lui lancer son sachet de poudre blanche en échange des billets qu'elle te doit. Tu tourne les talons, évitant au maximum de croiser son regard. Tu sais que si tu viens plonger ton regard dans le sien, tu perdras la face. "Je ne t'en veux pas Ella. Tu ne me dois rien. Je t'ai embrassé, tu veux pas voilà. Fin de l'histoire !" Tu hausses les épaules. C'est trop tard, ton regard a croisé le sien. Tu es hypnotisé par la demoiselle, incapable de bouger.

 

☾ ☾ ☾
{ moment of truth }
crédit/ tumblr ☆ w/@Thomas Farrel

La rancœur dans le regard de Thomas, elle la voit, elle la connaît. Elle la reconnaît. Elle l’a décelée si souvent dans le regard des autres. Elle fait du mal autour d’elle, Ella, partout où elle passe. Mais elle ne comprend pas quel mal elle a pu lui faire, à lui. Car tout ce qu’elle a fait, c’est le repousser. Tout ce qu’elle a fait, c’est rejeter ce baiser auquel elle n’était pas préparée. Ce serait à elle de lui en vouloir. Ce serait à elle de se dire qu’il aura suffi d’un si bref moment de faiblesse de sa part pour qu’il essaie d’en profiter. Ce serait à elle de se sentir blessée. Si seulement, elle pouvait encore être blessée par les agissements des hommes autour d’elle. Mais elle est, comme, immunisée. Elle a trop souffert, vraiment souffert, pour se laisser atteindre par une simple histoire de baiser volé. Elle était prête à tourner la page. Elle l’a prouvé avec ce message. Elle ne serait pas revenue vers son dealer si elle lui en voulait. Mais, visiblement, il en a décidé autrement. Après les messages, voilà qu’il s’emporte en face à face. Il lui balance le sachet de drogue comme pour s’en débarrasser. Se débarrasser d’elle. Le plus vite possible.

Peut-être que tu devrais t’en réjouir,
Peut-être que tu devrais seulement partir,
Mais tu restes là, plantée devant lui,
Tu restes là, à tenter un pas vers lui.

Elle essaie au moins de comprendre. Cela fait longtemps qu’elle n’a pas cherché à comprendre qui que ce soit. Ou, juste, pour arriver à ses fins. Juste pour obtenir ce dont elle a besoin. C’est différent cette fois. Elle n’attend rien de Thomas, si ce n’est peut-être qu’il se montre un peu moins glacial avec elle. Peu importe cette histoire de baiser, peu importe si elle n’essaie plus de se confier, ils peuvent au moins retrouver un semblant de normalité. Autant que c’est possible entre un dealer et sa cliente. Le corps qui fait volte-face, le jeune homme se tourne à nouveau vers elle, les yeux qui croisent les siens. Il ne lui en veut pas. Elle ne lui doit rien. Je t’ai embrassée, tu veux pas voilà. Elle garde le visage impassible. Le regard toujours fixement posé droit vers lui.

C’est bien ce que tu pensais,
Juste sa putain de fierté.

– T’as une drôle de manière de n’pas m’en vouloir. commente-t-elle, la voix plate. Elle devrait peut-être laisser couler. Comme elle l’a si souvent fait. Mais, en réalité, c’est blessant de le voir aussi distant alors que, celle qui devrait être rancunière, c’est elle. La jeune femme se mordille fébrilement la lèvre inférieure avant de reprendre. – Ça va être comme ça entre nous à chaque fois maintenant ? qu’elle lui demande, une pointe d’amertume dans la voix. Parce que c’est peut-être lui qui a été repoussé. Mais, là tout de suite, c’est elle qui sent ce rejet. Et c’est injuste car elle n’a rien demandé, Ella.

Tu ne sais pas ce qu'il se passe. Depuis des années, tu t'es toujours efforcé de ne pas pas t'attacher, à personne. On dirait que ta rencontre avec Ella a tout chamboulée en toi. Ton coeur s'emballe lorsque tu es près d'elle. Ton coeur bat la chamade, ton souffle s'accélère. Son parfum t'ennivre complètement. Chaque fois que ton regard se pose sur elle, ton coeur fait un bond dans ta poitrine. Tu ne vois qu'elle, tu ne veux qu'elle. Ce baiser, tu ne le regrette mais on dirait qu'elle si. Ella, tu ne la connais pas. Tu ne sais rien d'elle, tu n'as pas connaissance de son passé tout comme elle ne sait rien sur toi. Ni d'où tu viens, ni ce qu'il t'es arrivé. Elle te prendrait certainement en pitié, tu ne supporte pas les gens comme ça. Tu ne veux pas de la pitié des gens. Oui ton beau père t'as détruit te rendant certainement insociable. Ce qui ne te tue pas, te rend plus fort. Tu le déteste cet homme, t'aimerais être plus fort que ça et prouver aux autres que tu peux passer au-dessus de ça. Ce n'est pas vrai, tu n'es pas fort. Toutes les nuits, chaque fois que tu fermes les yeux, tu le revois venir dans ta chambre et abuser de toi. Tu le revois faire cette horreur, tu te réveilles en larmes et en sueur. Tu trembles, t'as peur. Peur qu'il te retrouver, peur qu'il recommence. T'as beau être à l'opposé de lui, cette peur t'envahis à chaque instant de la journée. Il t'arrive même de te retourner dans la rue, te sentant suivis. Tu as constamment peur et ça ne s'arrêtera pas de si tôt. Tu pensais avoir trouver quelqu'un de confiance en la personne de Ella, tu t'es trompé apparemment. La jeune femme est face à toi. Tu lui lance son sachet de poudre, attrape ses billets. T'évite de croiser son regard, tu sais que si tu le croises, tu ne pourras plus t'en aller. "Je ne suis pas un mec bien Ella, tu devrais m'éviter. Voire même te trouver un autre dealeur." Tu ne veux pas qu'elle te lâche, c'est ton seul moyen de la voir mais la croiser au moins une fois par semaine pour lui fournir sa dose et n'être que son dealeur, est au-dessus de tes forces. Ella, tu l'aime. Tu l'aime à en crever. Tout tes sens sont en alerte lorsqu'elle est près de toi. Ton regard vient de croiser le sien, c'est foutu. Tu ne pourra pas te détacher d'elle. Ton coeur s'emballe, il cogne fort dans ta poitrine. Tes mains deviennes moites, tu a envie de t'approcher d'elle et de l'embrasser. La dernière fois, elle s'est énervée et t'as repoussé. Tu ne veux pas subir un second échec, tu ne le supporteras. "je ne te connais pas Ella. Tu ne me connais pas non plus. Je n'avais aucun droit de t'embrasser. Je pense que ça sera trop bizarre maintenant entre nous.. tu ferais mieux de te fournir ailleurs.." Ton coeur vient se briser lorsque tu prononce ces mots. Tes jambes te rapprochent d'elle, ta main caresse sa joue. Tu es incapable de la laisser, c'est impossible. "je ne suis pas un mec bien .." Répètes-tu comme pour essayer de la faire fuir.

 

☾ ☾ ☾
{ moment of truth }
crédit/ tumblr ☆ w/@Thomas Farrel

Les cheveux qui virevoltent au vent, elle sent la brise de la fin de l’été, comme un retour à la réalité. Les effets de l’alcool commencent à se dissiper, sa fausse bonne humeur à s’estomper. Elle ne sait pas si ce sont les minutes qui volent, son corps qui se rafraichît, ou peut-être juste la voix trop sérieuse de Thomas. Elle n’a aucune idée de ce qu’il cherche, ce qu’il attend d’elle. Ce n’est pas comme si elle avait l’habitude que quiconque attende quoi que ce soit de sa part, Ella. Elle ignore comment interpréter cette soudaine distance, si elle doit simplement s’en complaire, ou essayer de la comprendre. Essayer de le comprendre. Tout ce qu’elle entend, là tout de suite, c’est qu’il est en train de gentiment la congédier. – Ok, donc t’es en train de me jeter là. qu’elle rétorque, loin d’être ravie de son constat. Il ne s’est rien passé pour en arriver à de telles extrémités. Rien d’autre que ce putain de baiser. Est-ce vraiment la peine de tout arrêter pour quelques secondes déjà envolées ? Elle n’a aucune envie de changer de dealer. Elle apprécie ce qu’il lui vend, trop pour aller acheter n’importe quoi auprès de n’importe qui. Puis, surtout, elle a confiance en Thomas. Elle met trop de temps à accorder sa confiance pour avoir envie d’en perdre à nouveau avec un inconnu. Mais il continue d’insister, il lui reparle de ce foutu baiser. Un soupir s’échappe des lèvres de la sulfureuse alors qu’il répète, une nouvelle fois, qu’elle devrait aller se fournir ailleurs. – Mais je comprends pas, tout ça pour un baiser ? On n’est pas à l’école primaire, c’est pas la fin du monde. Elle rejette la séparation. Refuse de le laisser partir à cause d’une histoire aussi futile. D’autant plus qu’il n’a pas envie de la laisser filer, elle le voit bien, Ella. Il s’est rapproché d’elle, tellement que les pointes de la chevelure indomptable de la diablesse viennent effleurer son corps trop près du sien. Il lui caresse la joue dans un geste de douceur auquel elle n’est pas habituée. Auquel elle n’est plus habituée. Elle ne recule pas, pourtant, plonge ses prunelles droit dans les siennes. – Je croyais que t’étais différent des autres dealers… Que t’étais un « gentil » ? Et maintenant, tu me dis que t’es pas un mec bien ? Alors, ça aussi, c’était faux ? Tu voulais juste me choper ? Et comme ça a pas été le cas, tu ne veux plus me voir ? Est-ce que c’est ça, Thomas ? Ses mots sont peut-être brutaux, mais sa voix reste calme. Remplie d’incompréhension plus que d’irritation. Elle voudrait qu’il réalise combien ses paroles sont contradictoires. Ou, juste, qu’il oublie toute cette histoire. Car, de toute manière, elle se fiche qu’il soit quelqu’un de bien. Ce n’est pas ce qu’elle attend de son dealer. Ce n’est quelque chose qu’elle attend de personne. Car elle non plus, elle n’est pas quelqu’un de bien, Ella.   – T’as pas envie que je m’en aille Thomas. murmure-t-elle, son regard toujours ancré dans le sien, dans le besoin de capter son attention. Il n’en a pas envie, elle non plus. Alors pourquoi complique-t-il tout ?

Le coeur brisé, le coeur en miettes. Tu es en tran de repousser la belle Ella. C'est la première fois que tu ressens quelque chose d'aussi fort envers une fille. Tu n'as jamais été amoureux, jamais. Tu ne connais pas ce sentiment. À l'intérieur de ton corps, t'as des papillons dans le ventre, les mains qui deviennent moites. Tu as envie de la prendre dans tes bras, de l'embrasser. Tu n'as jamais su ce que ça faisait d'être amoureux. Avec Ella, t'es en train de l'apprendre ou du moins, c'est ce que tu crois. C'est nouveau pour toi, ça te fait peur. T'es effrayé à l'idée de t'attacher à elle. Du mieux que tu le peux, tu évites de croiser son regard. Hélas, ça ne fonctionne pas. C'est trop tard, ton regard a croisé celui de la jeune femme. Ses cheveux volent au vent, elle est encore plus belle comme ça. "C'est mieux ainsi. J'aurais jamais dû t'embrasser, ça va devenir trop bizarre entre nous maintenant .." Non, ce n'est pas mieux ainsi. Tu préfère souffrir en la voyant que de ne plus la voir du tout. Ella te manque quand elle n'est pas près de toi. Ella ne comprends pas ton comportement, toi non plus à vrai dire. Tu ne sais pas ce qu'il t'arrive, on dirait un enfant vexé que son amourette ne ressente pas la même chose que lui. "Ce n'est pas seulement pour le baiser, t'as cette fausse image de moi qui veut juste te sauter .. Tu m'connais pas Ella, tu ne sais pas qui je suis ni ce que j'ai vécu !" Cette fois, t'en as trop dit. Elle va te demander des explications supplémentaires, tu le sais. Elle va vouloir savoir pourquoi tu dis ça, quitte à ce qu'elle te demande de lui raconter ton passé. Ça, c'est impossible. Personne ne doit savoir, tu porte ce poids seul sur tes épaules depuis tes seize ans. Tu as appris à vivre avec cela même si tu en cauchemarde toutes les nuits. Ella ne t'écoute pas, elle refuse de te laisser et de partir loin de moi. Les mots, les paroles que la jeune femme prononce te font mal. Ils te transpercent le coeur. Ton souffle se fait court, ton coeur s'accélère. Tu as envie de hurler, de crier. Tu souhaite faire partir ces démons de ta tête, de ton corps. Chaque fois que tu penses toucher le bonheur du bout des doigts, il est là. Ton beau père réapparait devant ton regard remplis de larmes. Il te fait peur. Chaque fois que t'es seul dans la rue, tu as peur de sentir sa présence ou son odeur derrière toi. Chaque fois que tu es seul dans ton studio, lorsque la sonnette retentit, tu as peur de le voir derrière la porte. "Je n'veux pas te choper Ella, j'veux pas simplement te baiser. J'ai jamais ressentis ça pour personne. Tu d'vrais m'éviter. Jsuis pas quelqu'un de bien, j'apporte que du malheur et de la tristesse.." T'en as encore trop dit. Tout près d'elle, tes mains prennent son visage doucement et tes lèvres viennent entrer en contact avec les siennes. T'es incapable de la laisser. La seule chose que tu sais c'est que tu la veux. Tu veux qu'Ella soit tienne mais ça, c'est impossible. Elle est bien trop belle pour toi. Tu n'es qu'un mec lambda, un mec banal sans grand intérêt. "Non . Je n'veux pas .. je n'peux pas te laisser.." Tes mots se contredisent avec ta pensée. T'es perdu, Ella est certainement aussi perdue que toi.

 

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{ moment of truth }
crédit/ tumblr ☆ w/@Thomas Farrel

Il est tout un mystère à lui tout seul, Thomas. Trop réservé pour qu’elle puisse deviner ses pensées, trop envahi sans doute de tous ses secrets. Il laisse planer toutes ces questions qui flottent autour d’eux, entre eux, alors qu’il fait tout pour la repousser. Il ne le sait sans doute pas, mais ça a l’effet inverse sur Ella. Plus il essaiera de l’éloigner, plus elle aura envie de s’approcher. De le connaître. De le comprendre. Car c’est ce qui le différencie de tous les hommes qu’elle a l’habitude de côtoyer. Elle n’arrive pas à le cerner, n’arrive pas à savoir ce qui peut bien tant l’angoisser. Il arrive à éveiller ce que trop de monde ne sait plus capter en elle, sa curiosité. Son intérêt. Elle ne saisit pas ce qui l’inquiète autant mais, plus les secondes passent, plus elle a besoin qu’il soit franc. Elle insiste tant et si bien qu’il commence doucement à baisser les armes. Il laisse entrevoir qu’elle l’a blessé. À prétendre qu’il voulait juste la baiser. Il prétend encore que ce n’est pas le cas. Mais alors quoi ? Elle lui plaît… Peut-être qu’elle lui plaît. Cela fait tellement longtemps qu’elle n’a pas plu à un homme, Ella. Pas en cherchant à séduire, pas en tentant de charmer, juste en étant celle qu’elle est.

Juste pour de vrai,
Juste en toute authenticité.

Elle décèle aussi, dans ses propos, qu’il y a beaucoup de choses qu’elle ne sait pas. Des choses dont il ne semble pas vouloir parler. Les mots restent là, gravés dans son esprit, sans qu’elle n’ose pour autant rebondir. Elle ne peut pas le forcer à lui parler de lui, mais elle peut au moins le pousser à se confier sur ce qui se passe entre eux.   – J’voulais pas te blesser Thomas. laisse-t-elle échapper dans un murmure coupable. Comme une enfant prise en faute. Comme si, seulement à cet instant, elle en mesurait l’importance. Car tu ne sais pas faire, Ella. T’as jamais su. T’as tellement plus l’habitude de partager des moments de sincérité. Mais t’essaies. Tu sais même pas pourquoi t’essaies. Mais tu sais pour qui tu le fais. Pour lui. Elle va de plus en plus loin. Elle enchaîne les questions, elle essaie surtout d’obtenir une réaction. Elle veut qu’il lui dise enfin ce qu’il pense. Mais elle ne s’attend pas à ce qu’il ressent.

J’ai jamais ressenti ça pour personne.

Elle a les yeux qui s’arrondissent de surprise. Elle ne s’y attendait pas, non, pas un instant. Elle est si étonnée qu’elle ne bouge pas d’un cil alors qu’il glisse doucement ses mains contre son visage. Qu’il approche ses lèvres des siennes. Nouveau baiser volé, nouveau baiser partagé. Il l’embrasse avec une délicatesse qui la cloue sur place. La tendresse qu’elle ne connaît plus, elle n’ose pas prolonger son baiser. Ni l’arrêter. Elle est comme paralysée. C’est lui qui rompt le contact pour lui dire qu’il ne peut pas la laisser. Il a l’air paumé, Thomas. Mais elle est tout aussi chamboulée. Tout aussi déstabilisée. Les mots lui manquent. Une seconde. Cinq secondes. Dix secondes. Avant qu’elle n’ose à nouveau parler. – Et si j’ai pas envie de t’éviter ? qu’elle lui demande, finalement, un faible sourire sur les lèvres. Sa main qui vient pour la première fois se poser contre sa joue, gardant son regard bien ancré dans le sien. Elle caresse sa peau, tendrement, s’imprégnant de sa douceur qui glisse sous ses doigts. – Pourquoi tu dis que t’apportes que du malheur ? l’interroge-t-elle parce qu’elle a besoin de comprendre. Parce que t’as la sensation que c’est toi qui pourrais le blesser. Toi qui pourrais le briser. Car, Ella, toi, t’es déjà détruite.

Tout se bouscule dans ta tête. Plus rien a de sens. Tu ne sais pas ce que tu veux. Un jour, tu embrasse Ella et le lendemain, tu la repousses. Tu ne cesses de lui répéter que tu n'es pas un mec bien. En même temps, tu deales comment tu pourrais être un homme bien ?! Tu n'es pas un homme pour elle, ni pour aucune autre. T'es fait pour être seul. Vivre seul et mourir seul. Tant bien que mal, tu tentes d'éloigner Ella de toi mais plus tu essaie et plus la jeune femme reste à tes côtés. Tu ne la comprends pas. Elle aime réellement les cas désespérés ? Si c'est bel et bien le cas, Ella va être servie avec toi. Plus désespéré que toi, il n'y a pas. La jeune femme te prévient qu'elle ne voulait pas te faire de mal. Tu arque un sourcil puis hoche la tête en soupirant. "Le mal est fait .." Te contentes-tu de répondre à la jeune femme. Tu hausse les épaules, tu savais qu'à partir du moment où ton regard va croiser celui de la jeune femme, ça serait terminé. Tu ne pourrais plus jamais partir, t'en aller loin d'elle. Tes yeux se plongent dans ceux de la jeune femme. Envie de l'embrasser, de la prendre contre toi et lui dire que tout ira bien. Tu tremble. Tu n'as pas froid, juste peur. Terriblement peur de t'attacher à elle et de souffrir à la fin. Tu ne sais pas quoi faire, ni quoi dire. T'es perdu. Tu l'aime Ella, au fond de toi tu rêves d'être avec elle mais, hélas, c'est impossible. T'es un mec bien trop abimé pour pouvoir jouer le rôle du petit ami parfait avec elle, ou avec une autre d'ailleurs. Tu n'en veux pas une autre, c'est elle que tu veux, que tu convoites. La balle est dans son camp, c'est à elle de décider. Toi, t'es perdu. Complètement perdu, incapable de décider de ce qui est bien ou non pour toi. Ton coeur s'accélère, ton coeur s'emballe. Ton souffle est saccadé, tes mains sont moites. "t'es vraiment prête à t'attacher un cas désespéré ? Jdemande pas à être sauvé ou à être aimé Ella .. j'ai jamais rien attendu de personne tu sais .." Encore une fois, tu tente une manoeuvre pour la repousser, mais la tentative échouera. Tu le sais avant même que la jeune femme ne puisse ouvrir la bouche à nouveau. Au fond de toi, une petite voix te pousse à attraper la main qu'Ella te tend. Mais tu as peur de t'attacher, peur de souffrir ou de la perdre pour de bon. Tu préfère souffrir en la tenant à distance raisonnable de toi plutôt que de prendre le risque d'être avec elle. C'est idiot, n'est-ce pas ?! "Depuis ma conception, j'apporte du malheur. Mon père a abandonné ma mère, elle a dû m'élever seule et faire des choses illégales pour m'élever." T'es en train de te livrer à elle, de lui révéler ton passé. Tais toi Thomas ! Tais toi ! Tu ne dois lui dire trop même si tu refuses d'avoir le moindre secret pour toi. "Je suis maudit Ella .. Je suis maudit .." Te répètes-tu en sentant ton coeur battre si fort que la douleur t'empêche presque de respirer.

 

☾ ☾ ☾
{ moment of truth }
crédit/ tumblr ☆ w/@Thomas Farrel

Elle ne sait même pas ce qu’elle fout là. Ce qu’elle cherche encore en restant, ici, dans cette rue mal éclairée. Elle n’est pas d’ceux qui demandent pardon. Ni de ceux qui réfléchissent au mal qu’ils font. Elle les blesse constamment, les autres. Elle les manipule, elle leur ment, elle joue avec eux comme s’ils n’étaient que des jouets aussitôt remplacés. Mais ce n’est pas ce qu’elle a envie de faire, pas avec lui. Pas avec Thomas. Elle n’a jamais cherché tout ce qui est en train d’arriver. Elle a juste eu le malheur, une seule fois, de se confier. Laisser entrevoir sa vulnérabilité. Mais c’est lui, pourtant, qu’elle a blessé. Elle encaisse le coup sans rien dire. Il n’y a vraiment rien qu’elle pourrait ajouter. Tout ce qu’elle voudrait, ce serait comprendre. Comprendre ce qui le pousse tant à la fuir alors que, visiblement, il est attiré par elle. Il lui avoue même qu’il ressent des choses pour elle. Ce n’est pas le genre de phrases qu’elle entend souvent. Sûrement pas de ses amants. Au fond, c’est lui qui a raison. Elle devrait fuir sans demander son reste. Parce que c’est un gars à problèmes, Thomas. Elle n’a vraiment pas besoin d’un gars à problèmes. Elle en a suffisamment avec les siens qu’elle n’a jamais su régler, ses plaies qui n’ont jamais été pansées. Mais c’est là, le souci. Ce sont les mecs comme lui qui t’attirent, Ella. Les mecs abîmés. Ceux que tu tenteras de sauver, peut-être pour te sauver toi-même. Peut-être pour avoir le sentiment de compter.

Mais elle leur fait encore plus de mal,
Jusqu’à leur être fatale.

Et, Thomas, il ne sera pas une exception. Il sera une souffrance de plus infligée par le poison. Une cicatrice de plus qu’elle fait dans son propre cœur. Comme si elle ne savait partager rien d’autre, Ella, rien que cette douleur. C’est tellement flagrant. Tellement évident. Elle le saurait déjà, tout au fond d’elle, si elle savait le voir. Si elle avait envie de le voir. Elle le devinerait en l’entendant lui demandant si elle veut vraiment s’attacher. Si elle veut vraiment l’aimer. Alors qu’elle a le cœur trop cassé, trop bousillée pour aimer. – J’ai un faible pour les cas désespérés. qu’elle répond, presque avec nonchalance, presque comme si ça n’avait pas d’importance. C’est vrai, pourtant, ce qu’elle dit. Ce ne sont pas les hommes parfaits qui l’attirent, Ella. Ce sont ceux qui ont des failles, ceux qui ont des blessures, peut-être pires que les siennes. Mais elle ne devrait pas.

Lui promettre les étoiles,
Lui donner de l’espoir,
Alors que, dans ton cœur, tout est déjà noir.

Pourtant, ce n’est pas faute d’essayer. Pour la première fois depuis une éternité, elle essaie d’écouter. Pas seulement ses mots mais, surtout, ce qui se cache derrière. La souffrance qu’il ressent, celle qui l’étouffe. Avec attention, elle l’entend, elle apprend l’enfance difficile. Le père absent, la mère qui défaille. Elle l’entend, penser qu’il est maudit. – P’tain, tu dis de la merde Thomas. T’es pas maudit, t’as juste eu une vie merdique. T’es pas le seul, tu sais ? Non, elle pourrait en citer plein. Elle commencerait par son propre nom. Elle a les mots durs, Ella, mais la voix étonnamment douce. Parce qu’elle sait s’y prendre, quand elle veut, elle sait s’y prendre, avant de tout gâcher. Ses prunelles ancrées dans les siennes, de sa joue elle finit par glisser sa main contre sa nuque, avant de l’attirer contre elle. Pas habituée aux étreintes, Ella, plus habituée avec les hommes.

Ton corps pour la première fois contre le sien,
Juste parce que tu sens que c’est ce dont il a besoin.