Poppy ⊹ j'ai des mensonges, des mensonges qui rendraient la vérité jalouse.

1/ Ca n’a jamais été bien compliqué de comprendre que la seule et unique raison pour laquelle on l’avait mis au monde, c’était dans le but de sauver son frère. Pour quelle autre raison des personnes incapable d’amour voudrait un deuxième enfant quand le premier né, est un garçon à qui ils construiront des épaules assez larges pour endosser la responsabilité qui vient avec le nom d’un Boleyn. A s’en rendre malade pour concevoir ce premier enfant, cet héritier à la couronne bien trop lourde pour une si petite tête. La déception et l’humiliation de se rendre compte que deux êtres aussi parfaits pouvaient enfanter un être aussi défaillant. L’héritier prodigue qui crèverait sans nul doute sans les dons précieux d’une petite sœur. Une petite fleur aussi transparente qu’une seringue.  

2/ C’est dans son ombre qu’elle a grandi. Dans ses pas qu’elle a marché sans jamais pouvoir égaler sa taille. Eclipsée derrière sa lumière, ses parents n’ont jamais su la voir. Dans le privé des écoles prestigieuses qu’elle fréquentait, de sa classe, elle avait beau être première. Derrière l’immaculé perfection du parcours scolaire de son frère, elle faisait toujours tâche. Elle se refugiait dans son monde qui était le sien. Portée par le rythme d’un instrument bien trop grand pour elle. Cachée derrière son violoncelle, elle pouvait être elle-même. Perfectionniste, depuis la nuit des temps. Des exigences élevées qui n’acceptaient aucun faux pas. Elle a compris très tôt que pour y complaire, elle ne pouvait compter que sur elle-même pour se dépasser.

3/Maniaque du contrôle. Le genre à faire des longues listes pour un tout ou pour un rien. Le genre à classer ses affaires par codes couleurs ou alphabétiques. Dans son dressing, tout est également rangé par couleurs, si ce n’est parfois par matières. Elle ne supporte pas le désordre. De ce fait, c’est une personne très ordonnée, organisée. Quand par malheur, elle n’a pas le contrôle sur une situation, ça a tendance à la déstabiliser. C’est pourquoi, elle aime être meneuse de jeu. Elle a une aisance naturelle au leadership. Ca n’a étonné personne qu’elle soit déléguée de sa classe tout le long de sa scolarité. Qu’elle soit même par la suite présidente du conseil étudiant.

4/ Pourtant, elle n’a pas la liberté d’avoir tant de contrôle que ça dans sa vie. Ses parents ont toujours pris les décisions pour elle. Le choix de ses études, sa carrière future. Les gens qu’elle pouvait fréquenter et également le genre idéal de la personne qui partagera sa vie, un jour. Poppy est leur fille modèle, celle dont ils se vantent devant leurs amis même s’ils n’ont jamais su lui dire à quel point est-ce qu’elle pouvait ou non les rendre fiers. Parce que ces mots, ils les ont usés sur son frère. Un frère qui a fini avec le temps par devenir leur plus grosse et grande déception. Lui ressembler, être à la hauteur de splendeur, c’est ce qu’elle a toujours désiré. Mais ces épaules qu’on lui a construites ne fut jamais assez large. Le voir choir de son piédestal aurait pu être un soulagement, une source de jubilation. Mais son frère, c’est sa moitié, c’est sa famille. La seule personne qui l’a toujours aimé. Le voir se bousiller dans le but de provoquer leurs parents, ça la tue.

5/ Alors, il lui fallu briller. Plus fort encore qu’elle n’a jamais pu. Pour éclipser son frère du regard dégouté de leurs parents. S’ils veulent la perfection, c’est ce qu’elle leur donnerait. Et parfaite, c’est ce qu’elle est. En apparence. Même si rien ne semble jamais à la hauteur de la grandeur qu’ils espèrent. Cette pression qu’on lui met, celle qu’elle se met à elle-même. Ce besoin de contrôle. Cette nécessité de faire ce pourquoi on l’a mis au monde, sauver son frère. C’est ce qui l’a poussé vers l’anorexie. Réguler sa nourriture est une des seules libertés qu’elle considère acquises. Quand elle avait 17 ans, elle a fait un séjour en institution. Bien loin de s’en inquiéter, ses parents ont été couvert de honte par son comportement de ce qui s’apparentait pour eux, de celui d’une petite princesse pourrie gâtée. Ils n’ont pas su voir l’incident comme un signal d’alarme. Ce qu’ils voyaient, c’était un autre de leur enfant qui allait faire d’eux la risée de leur cercle de privilégiés. Alors Poppy, en apparence, elle a été mieux. Mais le problème était là qu’ils acceptent de le voir ou non.

6/ Mais les apparences sont parfois trompeuses. Poppy a une double vie. Poppy est loin, très loin d’être la petite fille parfaite qu’elle tend à montrer. Derrière les paupières closes de ses parents, elle jouit d’une vie débauchée. Dans ses veines pulsent ces droguent qu’elle s’infiltre pour garder ses paupières à elle, ouvertes. Elle ondule aux grés des flammes, au rythme d’une musique underground. Elle réchauffe son cœur de glace d’étreintes d’hommes et de femmes qu’elle ne comment aimer. Un parasite qui s’accroche à ce qu’elle peut pour insuffler en elle la vie. Un déchet maquillé, perché sur ses talons aiguilles. Voguant automate à ses obligations mondaines, caritatives, scolaires. Au petit matin, la seule preuve qui persiste de cette vie double est ce bijou qui orne son téton.

7/ Prononcer un mensonge comme une formule magique, sous l’apparence de cette sorcière blanche. Découvrir que pour avoir la lune, il n’y avait parfois, seulement qu’à demander. Sans remord, aucun. Pas quand elle est récompensée par le fruit désiré. Elle baratine son monde, manipule son entourage. Avec une facilité qui peut faire froid dans le dos. Mais le seul dos dont elle se préoccupe, c’est le sien. Couvrir ses arrières alors que dans la pénombre, elle s’enfonce. Devant son publique, un sourire, le plus beau. Aveuglé par sa brillance. Une diversion scintillante qui reflète seulement devant son miroir cette quête de perfection qui l’a pourrie jusqu'à la moelle.

8/ L’amour, celui avec le grand A. Elle a du mal à croire qu’il existe. Simple et bonne raison, parce qu’elle ne croit seulement ce qu’elle voit. Mais fut un temps où il lui arriva de ressentir une chose de l’idée qu’elle s’en fait. Une fantaisie, une frénésie, selon sa mère. Cette fille, elle ne sait pas où est-ce qu’elle se trouve aujourd’hui. Elle ne sait pas non plus ce qu’elle a pu devenir. Un délire de vacances, quelques baisers, quelques caresses. Et sa mère l’en éloignait l’écœurement déformant ses traits. Une fois de plus, on lui arrachait ses ailes. Leçon apprise à la dure, avec le déchirement d’un cœur endeuillé de savoir qu’aimer, il ne pourra jamais.