Je suis ton père | Ft. Arya

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{ you wreck me }
crédit/ tumblr ☾ w/@owen swaguer

Elle est à fleur de peau, depuis qu’elle sait. Elle a mal, bien plus encore, depuis qu’elle sait. Depuis qu’elle sait qu’il est revenu, lui, son géniteur. Ce père qu’elle n’a pas eu. Ce père qui n’a jamais voulu d’elle. L’origine du mal qui la ronge, l’origine de ses souffrances. Celui qui a initié cette peur, la peur de l’abandon. La cause de son mal-être. Et il n’est pas le seul, non. Il n’a été que le premier à lui procurer cette sensation. Et ce n’est pas le moment qu’il revienne, pas alors qu’elle est au plus mal. Pas alors que sa relation avec Cassey est encore fragile. Pas alors que t’es tombée dans cette foutue boulimie, Arya. Pas alors que t’es là, à essayer de te brûler, un peu plus chaque jour. Mais elle fait bonne figure. Elle fait semblant. Semblant que cela ne la touche pas. Semblant que cela ne lui fait rien. Semblant de pouvoir continuer sa vie, comme si de rien n’était. Comme si il n’existait pas. Elle tente par tous les moyens d’oublier. Elle sort, encore bien plus qu’avant. Elle oublie ses souffrances en engendrant d’autres, voguant entre chez Nikolaï et chez Cassey. Cassey chez qui elle vit en ce moment durant les vacances de son oncle. Et aujourd’hui, sa mère n’est pas là. Elle profite donc de la solitude, jusqu’à ce quelqu’un sonne à la porte. Mais alors qu’elle se dirige vers la porte, pour aller ouvrir, elle tombe nez à nez avec lui. Owen. Elle le reconnait, avec la photo que lui a montré sa mère. Elle le reconnait immédiatement et elle n’a aucune envie qu’il soit là, surtout sans Cassey. - Oh c’est pas vrai… Elle se braque, encore une fois. Elle se braque alors qu’au fond son cœur est complètement serré. Le souffle coupé. Elle est là, face à lui. Elle est là, et elle a mal, terriblement mal, mais elle ne veut surtout pas craquer devant celui qui lui a fait de tant mal.

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Elle n’a pas envie. Elle n’a pas envie de se retrouver confronter à lui. Elle n’a pas envie de le voir, de l’entendre, et encore moins de lui parler. Il ne mérité pas un seul des mots qu’elle pourrait lui offrir, Arya. Et pourtant elle sait. Elle sait que, peu importe avec quelle force elle essaiera, elle ne pourra pas rester silencieuse. Pas après des années passées à contenir ses mots, ses sentiments, ses doutes. Parce que l’absence d’Owen a grandement contribué à faire d’elle la jeune femme brisée qu’elle est. Beaucoup plus fragile qu’elle n’en a l’air, derrière cette carapace, cette fierté, qu’elle place entre elle et le monde. Entre elle, et son père, pour aujourd’hui. Sa respiration se coupe de la façon la plus net qui soit, alors qu’elle se retrouve face à lui. Tu te sens mal, Arya, plus que jamais. Mais tu ne dois rien laisser paraître, rien. Et il ne bouge pourtant pas, en voyant que c’est elle, et non Cassey. Il ne bouge pas, se contentant de lui lancer un vulgaire « salut ». Salut. C’est tout ce qu’il trouve à dire. C’est de cette façon qu’il compte entamer une conversation. Et le cœur de la blonde se gonfle immédiatement. Elle sent la colère monter en elle, la colère, et peut-être un brin de déception. Un brin de ce quelque chose, qu’elle préfèrerait balayer du revers de la main. Elle ne devrait rien attendre de lui, elle le sait, Arya. Après tout, il n’a jamais été là, il n’a jamais rien fait, alors pourquoi est-ce que cela changerait aujourd’hui ? Pourquoi est-ce que la situation serait différente. Elle se contente alors de répondre, d’un ton sec. - Ma mère n’est pas là, tu peux repasser plus tard. Ou jamais, même. Il n’y a pas de place pour lui dans sa vie, et elle aimerait qu’il ne fasse pas non plus partie de celle de Cassey. Parce qu’elles ne font qu’une, toutes les deux, et c’est simplement inenvisageable. Elle aimerait qu’il disparaisse aussi rapidement qu’il est apparu. Du moins, c’est ce dont elle tente de se convaincre, Arya. Parce qu’il y a ce mal être, cette douleur, qui reste au plus profond d’elle. Celle qui ne disparaît pas, quoi qu’elle fasse. Tentant de se détruire par tous les moyens pour y parvenir.

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Elle se referme. Elle se referme comme une huitre à sa simple présence. Elle se referme pour mieux se protéger, pour ne pas le laisser gagner du terrain. Parce qu’il lui a fait mal une fois, parce qu’il lui a fait mal vingt ans, et il n’y a aucune raison pour qu’il ne recommence pas. Aucune garantie. Et elle ne pourrait pas s’en remettre, s’il la blessait une deuxième fois. Elle le sait. Elle a déjà bien trop souffert à cause de lui, à cause des autres. Elle a écouté, Arya. Elle a écouté les paroles de sa mère. Elle sait pourquoi Owen a pris la fuite, elle connait désormais sa raison. Mais si elle peut pardonner l’erreur, elle n’est pas certaine de pouvoir pardonner le silence radio de ces vingt dernières années. Elle n’est pas certaine de pouvoir accepter qu’il ne soit jamais revenu, alors qu’elle avait besoin de lui. T’avais besoin de lui, Arya. C’est difficile à avouer, parce que t’as toujours su faire semblant. Mais c’est le cas. T’avais besoin de lui. Et au fond, elle souffre autant de sa présence qu’elle n’a pu souffrir de son absence. Quoi qu’il dise, cela n’y changera rien. Il n’a jamais été un père, et elle doute sincèrement de ses capacités à en être un. Il n’y a qu’à s’attarder sur la façon dont il se comporte, là, maintenant, pour le comprendre. - Qu’est-ce qu’on aurait à se dire ? Tu as vingt ans de retard. Elle est dure, une fois de plus. Elle est dure, pour se protéger elle. Pour cacher son mal être. Parce qu’à cet instant précis, il n’y a que cela qui compte. Se protéger. Lui ne compte pas. Et elle ne veut pas le laisser compter. Le rôle de père, c’est Nikolaï qui l’a assumé durant toute son enfance. C’est beaucoup trop simple de débarquer maintenant, de vouloir la connaître, et ce surtout parce qu’il est tombé par hasard sur Cassey. T’aurais juste voulu qu’il veuille te connaître, toi, vraiment, Arya. Et non suite à une coïncidence.

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Elle est braquée. Plus que jamais. Elle préfèrerait être n’importe où ailleurs plutôt que face à lui. N’importe où ailleurs plutôt que face à celui qui l’a brisé. Une partie d’elle a même du mal à réaliser qu’il est là, sous ses yeux. Elle détaille son visage comme si elle souhaitait être certaine que c’était lui. Owen. Son père. Mais une autre partie d’elle fait tout pour nier l’évidence. Tout pour se dire qu’il n’est rien. Qu’il a beau être ici, aujourd’hui, mais que cela ne signifie pas qu’il gagnera une quelconque place dans sa vie. Dans leurs vies. Déjà bien assez chaotiques comme cela pour rajouter un problème supplémentaire. Mais les paroles d’Owen viennent bourdonner dans sa tête blonde. Et tu vrilles, Arya. Tu te demandes comme il peut avoir un tel aplomb. Comment il peut oser débarquer chez vous et faire preuve d’une telle arrogance. C’est presque sans réfléchir qu’elle répond, immédiatement. - Ah oui ? Et bien tente de nouveau ta chance dans dix ans alors ! Elle a la sensation qu’elle risque d’exploser. D’un instant à l’autre. Elle a la sensation qu’elle risque de craquer d’une seconde à l’autre. Colère comme seule manière de cacher sa peine. Colère comme seule façon de balayer sa souffrance. La vérité, c’est qu’il la touche bien plus qu’elle ne le voudrait. La vérité, c’est qu’il l’impact, bien plus qu’elle ne le voudrait. - Je n’ai pas besoin d’entendre tes explications, j’ai déjà eu droit à une partie et ça me suffit amplement. Le laisser parler, c’est lui laisser une chance de retourner son esprit. Le laisser parler, c’est lui donner une chance de s’immiscer dans sa vie, dans son cœur, et ce n’est pas envisageable. T’as plus d’amour à donner, Arya. T’as plus de place dans ta vie, et encore moins pour ton bourreau. - Si t’es venu pour ma mère, tu auras qu’à repasser. Et elle prend déjà sur elle, énormément, pour cette simple phrase. Parce que s’il s’agissait d’elle, elle ne voudrait même aucun contact entre eux.

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Il devrait faire profil bas. Il devrait s’en aller. Ou au moins se taire. Parce que le seul fautif, c’est lui. Si elles se sont retrouvées seules toutes les deux, sa mère et elle, c’est de la faute d’Owen. Alors il devrait se taire, oui. Mais à la place, il se contente d’ironiser la situation. N’imaginant pas à quel point il peut se montrer blessant. Et au fond, la seule chose qui traverse l’esprit d’Arya, à cet instant précis, c’est cette question. Question fatale. Comment Cassey a pu tomber amoureuse d’un pauvre type comme lui ? Sa mère mérite mieux. Bien mieux qu’un lâche. Bien mieux qu’un homme qui ne prend rien au sérieux. Bien mieux que quelqu’un pour qui rien n’a la moindre importance. Et toi aussi, Arya. Toi aussi tu mérites mieux. Tu n’as jamais eu de père et tu peux très bien continuer à vivre de cette façon. Parce que c’est beaucoup mieux que d’être déçue à nouveau. Parce que c’est beaucoup mieux que de souffrir à nouveau. Et avec Owen, elle ne pourra que souffrir. C’est une évidence qui lui saute aux yeux. Elle souffrira, comme Cassey a souffert par le passé. Et pourtant, c’est maintenant qu’il semble décidé à lui parler. Maintenant qu’il semble décidé à dire quelque chose de sensé. Malheureusement trop tard pour lui. Malheureusement trop tard pour elle. Parce qu’elle est déjà braquée, Arya. Il ne suffit que d’une petite allumette pour faire brûler le torchon. Il ne suffit que d’une seconde pour verrouiller son cœur et son âme à triple tour. A partir de ce moment, tout ce qui sort de la bouche de cet homme n’a aucune valeur à ses yeux. Aucune valeur dans son cœur. - Peur qu’un homme prenne ta place ? Mais c’est tout ce que tu mérites. Elle veut appuyer là où cela fait mal. Elle a besoin d’appuyer là où cela fait mal. Parce qu’elle a besoin qu’il soit blessé au moins la moitié de ce qu’elle, elle a pu l’être. Elle veut lui faire mal comme il a pu leur faire du mal. En brisant cette famille qu’ils auraient pu être. En brisant cette famille qu’ils n’ont jamais été. - Tu es lâche. Et je ne vois pas pourquoi on mangerait ensemble. Il n’y a plus rien à sauver. Cela aurait peut-être été différent, s’il était revenu. Même quatre, cinq ans plus tôt, alors qu’elle avait désespérément besoin d’un père. Cela aurait pu être différent, si son retour dans leurs vies n’était pas simplement lié au hasard. Parce qu’il aura beau dire ce qu’il veut, lui chanter de longue sérénade, au fond, s’il est là aujourd’hui, c’est uniquement parce qu’il a recroisé Cassey un jour. Par hasard. Et non pas par envie de les retrouver. Et non pas par besoin de les retrouver. Toute la différence est là. Parce que t’es pas une fille qu’on choisit par hasard, Arya. T’es pas une fille qui se contente de si peu. A tort. A raison.