did it all wrong (nika)

au final, tout commence à devenir pesant. tout, absolument tout. ce logement, toujours pas trouvé, toujours pauvre sans abris que je suis, à dormir un coup chez l'un, un coup chez l'autre, parfois même dans la voiture. à me faire engueuler par rose, et comme si ça ne suffisait pas, par marla constamment, quoi que je fasse.
évidemment, à tout ça s'ajouter une tension pesante, limite palpable entre nika et moi, tension que tout le groupe a dû finir par remarquer, à chaque fois qu'on se voit, au point d'à peine s'adresser la parole, sans réellement savoir pourquoi elle est encore présente, pourquoi elle l'est même depuis le départ.
putain, j'en ai marre de ça.
elle me manque nika, à force. nos conneries me manquent, nos fous-rires me manquent. tout me manque, me pèse, mes épaules me font atrocement souffrir à force de porter ce fardeau, et aujourd'hui, c'est la goutte de trop.
affalé sur un coin d'herbe, dans un parc, cul de joint posé entre les lèvres, une envie irrésistible de faire une connerie me vient en tête. ce genre de connerie qui nous ferait rire, à tous les deux, sans pour autant faire rire les autres. mais ce genre de connerie qui je sais, tenterait nika sans aucun doute, ce genre où elle me suivrait sans hésiter. et le simple fait de ne pas savoir comment ça se passerait si je l'appelais me renfrogne à vue d'oeil, me pèse, et me fait me décider.
me décider, ou pas? j'me suis levé, ça c'est certain, mais une fois arrivé à la voiture, j'hésite encore. comment ça va se passer, si je la confronte? j'ai pas envie que ça empire les choses, juste que ça les arrange. j'ai pas envie qu'on finisse par s'engueuler.
puis merde.
sans plus de réflexion, je roule jusqu'à chez elle. ouais, chez elle. ce quartier beaucoup trop luxueux, beaucoup trop propre et trop beau pour que tout soit normal. j'hausse un sourcil à partir du moment où j'arrive dans sa rue, et ce jusqu'à ce que je sois devant sa porte.
j'arrive pas à m'en remettre, non.
je cogne deux-trois fois, plutôt bruyamment.
c'est ça, sa vie de jeune mariée, alors? vivre dans le luxe, abandonner ses amis (du moins moi), changer du tout au tout? j'en sais rien, j'me fais peut-être des films, au fond, mais c'est bien l'impression que j'en ai, moi.
j'me dis que j'aurais peut-être dû embarquer rose avec moi pour faire ça, peut-être qu'elle aurait pu empêcher les choses de dégénérer si jamais ça devait en arriver jusque là. puis j'me dis qu'au final, rose se serait mise du côté de nika à coup sûr, et c'est entre nous que ça aurait pété, encore plus fort que si ça avait été avec nika.
mouais.

Toujours bien trop de chose à gérer. C’est parfois énervant de devoir gérer des choses que tu ne veux pas forcément faire. Comme  ce mariage, t’as beau t’entendre de plus en plus avec Ruben, apprendre à le connaitre, vaux mieux, vu que ça va faire un an que tu fais cela, ce n’est toujours pas facile, d’être prisonnière de cette prison dorée. T’as du mal, beaucoup trop à t’assemble à ce monde complétement horrible. Alors tu essayes de le faire, parfois tu renvoies le personnel de Ruben, ce n’est que trois personnes, mais c’est déjà trop. Beaucoup de temps à fuir cet appartement qui est à présent le lieu où tu es pourtant censée vivre, t’épanouir.  Tu souris, tu vas bien ? Rien n’est sûr, le manque des conseils de l’abuela se fait sentir, les conneries de ta Jules aussi. Elle manque, elle a laissé un gros trou dans ta vie.
Rien n’est simple, tu le savais pas forcément en disant oui à la seconde à sa demande. T’avais pas tout calculé, pas imaginé comme c’était dur de faire semblant. Toi, tu es une grande amoureuse de l’amour, pas du style à tomber amoureuse en un regard, il te faut tant de chose, une belle histoire, l’amour et la confiance. Tu n’as rien de tout ça, tu le sens que certain point de tout ce merdier t’échappe. Le monde n’est pas au courant, mais les personnes commençant à l’être c’est le cas. T’aimerais le dire à Mylan ou encore à Fin, mais tu ne peux pas, Rose le sait, t’as même gardé Emy loin de ce mensonge. Comprendront-ils ? Peut-être. C’est ça où toi qui ne foulera plus comme bon te semble le bitume de l’Amérique. Ce monde part en couille, pas juste le tien en vrai, celui de tout le monde.
Mentir, être fausse ce n’est pas toi et c’est dur de tenir ce rôle, surtout quand ton moral accumule les choses. Comme Fin, il t’en veut, c’est le froid, sauf quand vous avez absolument besoin de l’autre pour vivre, pour trouver un sens à ce monde fou justement. Car il est fin, car il est le bras gauche de ton corps, tu ne peux pas vivre sans lui, sans sa présence et cette folie qui se mélange à merveille à la tienne.
T’aimerais tout lui dire, vraiment. Mais tu le sais que ce n’est pas que ta vie qui est en jeu, celle de Ruben l’est aussi. Alors, tu t’accroches, tu supportes, puis quand tu es seule, tu laisses les larmes couler, tu laisses tout échapper, tout partir pour avoir un court moment de répit.
Tu entends frapper  à la porte alors que tu bosses sur l’un des dossiers que Jill t’as donné pour potasser dessus. Autant dire que tu n’avances pas, du tout même. Tu délaisses la table du salon pour rejoindre la porte ouverte par Marta. Puis c’est le visage de Fin qui accapare à cet instant tes opales.   «   Fin ?  »  Que tu dis, comme si ce pauvre ne connaissait pas son prénom. Il le connait, mais t’es étonnée de le voir.   «   On devait se voir ?  »  tu le sais, tu es plus que maladroite avec lui, mais c’est cette tension palpable entre vous qui te fais marcher sur des œufs et le résultat est clairement horrible.   «   Entre.  »  Que tu dis souriant à Marta qui s’écarte du chemin.   «   Vous savez vous pouviez rentrer, j’étais sérieuse quand je vous avais dit que je pouvais m’occuper du reste.  »  Que tu énonces à la femme, une femme qui pourrait être ta mère.  Mais tu en sais quoi toi, que Ruben a demandé aux employés de rester jusqu’à ce qu’il rentre quoi que dise sa femme.   «   Monsieur nous a dit de rester…  »  Du coup, tu souris juste la laissant reprendre ses travaux.   «   On pourrait aller dehors ?  »   Le regard qui supplie, car tu commences à suffoqué dans cet intérieur.

j'sais pas, putain, j'en suis encore à me demander ce que je fous là, au final. je sais très bien que ça risque de ne pas se passer au mieux, on risque de se choper, de s'engueuler, et ça m'fait un peu peur, j'dois bien l'avouer. mais je me dis aussi que si on n'arrange pas les choses, ça risque de s'empirer, de partir en couilles dans la bande, et ça serait avec des répercussions catastrophiques et sans possible retour en arrière. déjà que c'est pas franchement la joie quand on est tous réunis. sauf si une idée diabolique nous vient en tête à tous les deux, on bien qu'on décide de s'allumer un joint. mais le reste du temps, c'est pas franchement ça, c'est même lourd, comme atmosphère, tendu, pesant.
mais de là à me pointer chez elle? ouais, ou plutôt, chez son mari, n'est-ce pas. c'est pas chez elle, à nika. on n'a jamais fait partie de ces gamins qui vivent dans des palaces, dans ce genre de quartiers, dans le luxe.
j'imagine que c'est comme ça qu'elle vit, maintenant.
mais quand même. au point d'avoir quelqu'un qui ouvre la porte pour elle? j'en reviens pas. j'me dis, à ce moment-là, que j'la connais peut-être pas si bien que ça, nika. et ça m'fait mal au coeur. tellement mal au coeur que j'hésite quelques secondes à faire demi-tour, j'y pense très sérieusement. mais elle arrive, entre temps, et j'ai rien pu faire.
- ben, non, on devait pas, mais..
mais j'me suis dit que c'était une bonne idée. à quel moment c'en était une, d'ailleurs? à en voir le malaise qui s'est automatiquement installé dès que nos regards se sont croisés, j'crois que c'en était pas une, non.
je les écoute parler, les deux. nika, la désormais grande dame, et cette pauvre femme à son service. ah non, pardon, au service de son mari, visiblement. je lève les yeux au ciel et observe tout autour de moi, en même temps que j'entre.
tout est si grand, si tape-à-l'oeil, si clinquant, si.. tout est trop. c'est franchement trop. peut-être que c'est un brin de jalousie en moi qui parle, parce que moi, j'y ai jamais eu droit, à tout ça.
ouais, peut-être.
- eh ben.. on se refuse rien, hein..
légère pique désagréable. j'suis désolé nika, c'est sorti tout seul.
et puis je la regarde, elle, qui a l'air aussi mal à l'aise que moi, qui a l'air mal tout court.
- dehors où? sur ton balcon?
enfin, sur ta terrasse, j'imagine, plutôt? ça doit être une putain de terrasse avec vue sur tout le queens ça au moins, non? j'imagine bien le truc, ouais, salon de jardin qui vaut des milliers, cuisine d'extérieur, pelouse, et tout ce qui va avec.
mais j'devrais peut-être la ravaler mon amertume, et profiter de pouvoir la voir, et la retrouver, parce qu'à force, j'vais finir par tellement me faire avaler par ce manque d'amabilité, que j'vais en oublier pourquoi je lui en voulais, à la base.