Because the night belongs to lovers. (Warston)

♛ Because the night belongs to lovers.

Nikolaï est beaucoup trop dur avec lui-même. Il paraît convaincu d’être difficile à vivre, trop difficile pour elle. Pourtant, il la connaît un minimum. Il sait qu’elle est capable de faire preuve de beaucoup de patience et d’indulgence. Mais peut-être qu’il a raison, peut-être qu’ils sont trop différents pour pouvoir vivre ensemble. Ce n’est pas si important en vérité, il n’est pas question pour eux d’emménager ensemble. Pourtant, c’est le jeune homme lui-même qui ajoute qu’il serait curieux de découvrir comment elle vit au quotidien. Un petit sourire en coin, à peine perceptible, apparaît sur les lèvres d’Isabella. – Je me réveille très tôt mais je me couche aussi assez tard. Je suis une accro au café, et quand je n’en ai pas, je peux vite devenir insupportable. J’ai du mal à tenir en place, sauf quand je suis plongée dans un livre. Je ne regarde presque jamais la télévision mais, quand je le fais, je dois absolument grignoter en même temps. J’allume souvent des bougies parfumées, en ce moment c’est vanille épicée. Voilà, tu sais tout. Si c’était si simple. Mais elle n’a jamais autant parlé d’elle à la suite, même pour des détails aussi anodins. Elle n’est pas la personne la plus compliquée à vivre, Isa. Elle n’embête pas son monde. Peut-être que c’est ce qu’on pourrait lui reprocher, elle paraît toujours un peu inaccessible. Mais il peut avoir eu un aperçu de son quotidien, comme ça. Un quotidien dans lequel il a su trouvé sa place au fil du temps. Pourtant, il a raison, ce n’était pas gagné. Elle a maintenu pendant un bon bout de temps une distance bien claire entre eux. Entre lui et sa vie. Mais c’est extrêmement différent. Elle ne serait pas là ce soir, sinon. – Je n’y aurais pas cru, moi, mais… Je suis heureuse que ce soit le cas. Outre un amant exceptionnel, elle a trouvé en lui un soutien sans faille, une présence rassurante. Un homme auquel elle se raccroche de plus en plus. Se blottissant justement contre lui, Isabella lui propose de manger quelque chose, ou bien de prendre un bain. La première option ne l’inspire guère, elle peut le comprendre même si cela ne la rassure pas beaucoup. Toutefois, il accepte sa deuxième proposition à condition qu’elle l’accompagne. – Mais je ne pensais pas faire autrement. lui assure-t-elle d’une voix aguicheuse avant de se redresser soudainement. – Je m’en occupe ! Sans plus attendre, elle part en direction de la salle de bains où trône une immense baignoire. Elle s’occupe de la remplir et, pendant ce temps, elle cherche de quoi faire mousser le bain. Elle parvient même à trouver quelques bougies justement qu’elle allume et dispose là où elle peut. Puis elle retrouve son amant dans la chambre. – Si monsieur veut bien se donner la peine… Elle saisit ses mains pour l’attirer dans la salle de bains. Elle attrape son tee-shirt pour l’en débarrasser, elle fait de même avec son pantalon sans le quitter des yeux. Elle sent cette électricité particulière flotter dans l’air, comme à chaque fois qu’elle se retrouve si proche de lui. L’ambiance romantique et sensuelle dans la pièce ne l’aide pas à garder la tête froide. Mais elle garde le contrôle parce que, là tout de suite, elle veut juste être là pour lui. Elle lui retire le dernier bout de tissu qu’il porte et en fait de même avec ses propres vêtements, un peu trop lentement car elle se perd dans son regard. Et elle l’entraîne enfin dans la baignoire alors qu’elle s’installe en face de lui. – Ça va, tu as tout ce qu’il te faut ? demande-t-elle d’une voix douce. Elle compte bien prendre soin de lui comme il le mérite. Même si, à cet instant, elle s’habitue surtout à cette intimité nouvelle entre eux. Elle n’a plus vraiment l’impression d’être avec un amant, là, mais plutôt avec l’homme qui partagerait sa vie.  

♛ Because the night belongs to lovers.

Un sourire amusé grandit sur les lèvres d’Isabella quand elle entend le jeune homme énumérer à son tour les informations qu’elle lui donne. Comme s’il voulait à tout prix les garder en tête, les retenir en mémoire, pour mieux la connaître et la comprendre. Le pire étant qu’elle a conscience que c’est ce qu’il est en train de faire. C’est bien ce qu’il s’évertue à faire depuis le début en réalité, mais c’est de plus en plus facile pour elle de l’y aider. – Et toi ? De ton quotidien, je sais juste que tu travailles énormément, que tu t’occupes parfois de ta nièce, que tu aimes te retrouver seul en pleine nature et que tu apprécies la bière, c’est vraiment peu. dit-elle avec une petite moue. Elle aussi, elle sent la curiosité l’envahir, plus qu’auparavant. Elle n’a jamais été curieuse, Isa. Elle est tellement secrète, elle-même, qu’elle n’est pas du genre à s’immiscer dans la vie privée des autres. Mais, avec Nikolaï c’est différent car, peu à peu, ils apprennent à les partager peu à peu. Ils dépassent une nouvelle frontière ce soir au sein de cette intimité avec ce bain qu’ils s’apprêtent à prendre tous les deux. Ce n’est pas quelque chose qu’elle ferait avec n’importe qui, ou bien même qu’elle aurait fait avec lui dès le début. Non pas vraiment par pudeur car il connaît son corps par cœur depuis un petit bout de temps maintenant. En réalité, c’est simplement qu’elle trouve un tel moment très intimiste, très profond, très… Symbolique. Durant des ébats, la nudité est là, les barrières disparaissent, sans aucun doute. Mais ils sont, comme, dans une sorte de bulle à part, loin de la réalité. Elle a l’impression d’être transportée dans un autre monde dans ces moments, celle d’être une autre. Alors que, dans ce bain, leurs regards plongés l’un dans l’autre, elle a tout à fait conscience de ce qu’elle fait. Elle est entièrement elle-même. Et c’est presque plus intimidant, finalement, que se retrouver au lit avec un homme pour la première fois. Souriant aux baisers successifs de son amant, la belle prolonge le dernier un peu plus longuement qu’elle ne le devrait. C’est difficile de garder ses distances avec lui alors qu’ils sont si proches l’un de l’autre. Mais elle recule sagement son visage alors qu’il la remercie subitement. – Tu n’as pas à me remercier. Pour le bain, pour cette nuit. Elle aurait été incapable de rester à l’écart, pas ce soir. Gardant le silence quelques secondes, elle profite des effets relaxants du bain alors que quelques pensées envahissent son cerveau. Elle ne sait pas si elle devrait les formuler à voix haute, elle ne veut pas gâcher ce moment. Mais elle finit par croiser le regard océan de Nikolaï qui lui donne le courage de parler. – Dis… De quoi est-ce que tu parlais tout à l’heure quand tu as dit que ce n’était pas la première fois ? demande-t-elle, la voix douce, avec précaution, alors que, du bout des doigts, sa main vient caresser instinctivement le bras du jeune homme.  

♛ Because the night belongs to lovers.

Le regard plongé dans celui de son amant, Isabella écoute avec attention les petits détails de sa vie qu’il veut bien lui raconter. Il y a des choses qu’elle sait déjà, d’autres dont elle a eu un très bref aperçu, mais elle retient surtout toutes les informations qu’elle ignorait. Elle sourit quand il affirme supporter l’équipe des Yankees. Comme son petit frère le faisait. Elle n’est pas surprise qu’il apprécie la moto, elle connaît son besoin criant d’adrénaline. Mais elle garde cette précision en tête, comme toutes les autres alors qu’il termine finalement son discours. Elle aurait pu l’écouter encore longtemps. – Et ton dessert favori ? demande-t-elle avec une pointe de malice dans la voix. C’est la seule question qui lui vient à l’esprit, oui, elle peut s’avérer imprévisible. Elle réalise surtout que, malgré le fait qu’ils ne se côtoient pas au quotidien, elle a l’impression de connaître déjà l’homme qu’il décrit. Ce ne sont que de petits détails, en apparence sans importance, mais qui reflètent la personne qu’il est. Elle n’a pourtant pas fini d’en apprendre, Isa.

Allongée dans ce bain moussant, juste en face de Nikolaï, elle sent les tensions de la journée s’évaporer progressivement. Elle a le sentiment que cela lui fait du bien, à lui aussi, même si ce n’est sûrement pas un bain qui va le pousser à accepter ce qui s’est passé plus tôt dans la journée. Mais cela l’aide peut-être un petit peu parce que, sans qu’elle ne s’y attende, il la remercie. Il n’a aucune raison de le faire. Si elle est là, auprès de lui, c’est de bon cœur. Mais il y tient tout de même. Elle a la sensation qu’il ne doit pas souvent se laisser approcher quand il va mal. Sinon, il n’insisterait pas autant pour la remercier, il ne lui serait pas si reconnaissant. La Latina lui adresse le plus beau des sourires comme pour effacer toutes ses craintes. – J’en ai envie Nikolaï. C’est peut-être la chose la plus précieuse dans leur relation. Ils ne se doivent rien, ils ne se promettent rien. Mais ils sont là, toujours, l’un pour l’autre. Elle sait qu’à chaque fois que Nick est présent pour elle, c’est parce qu’il en a sincèrement envie. Il n’y a ni obligation, ni apparences qui comptent. Seulement leur envie d’être ensemble. C’est sans doute l’une des choses qu’elle aime le plus dans ce lien qui les unit.

Mais plus ils partagent de moments tous les deux, plus ils se rapprochent des sujets douloureux. Elle n’accepte pas facilement d’aborder ses anciennes cicatrices, Isa. En règle générale, elle fuit ces conversations. Cependant, cette fois, c’est elle qui en engendre une. Ce n’est pas elle qui est concernée mais Nikolaï, lui et ce qu’il lui a confié un peu plus tôt. Elle n’a pas oublié. Silencieuse, elle garde les yeux posés sur son amant alors qu’il détourne son regard quant à lui. Elle pense qu’il va dévier le sujet, ou peut-être lui dire qu’il ne veut pas en parler. Elle est tant habituée à maintenir ce mur entre son passé et son présent qu’elle oublie parfois que tout le monde n’est pas comme elle. Certains sont plus courageux. Mais elle n’imaginait pas à quel point lui, il peut l’être. Isabella est sincèrement sous le choc de ce qu’elle apprend. Elle n’aurait jamais cru qu’il avait vécu quelque chose d’aussi terrible. Il a l’air tellement… Fort. Mais c’est peut-être pour cela, justement, qu’il lui paraît si fort. Il a affronté des mois de torture, sans aucun doute, mais il s’en est remis. Elle ne sait pas si elle doit être horrifiée, désolée pour lui ou… Admirative. Elle ne trouve pas les mots. – Wow, je… Je ne m’en serais jamais doutée. murmure-t-elle finalement au bout de plusieurs secondes. Elle se mord la lèvre, hésitante, avant de reprendre enfin la parole d’une voix un peu plus claire. – Ça a dû être tellement… Horrible… Je suis désolée. Ses mots lui paraissent faibles, trop faibles à côté de l’aveu qu’il vient de lui faire. Finalement, elle ne réfléchit plus, et part se blottir contre lui. La baignoire est suffisamment grande pour qu’elle puisse trouver sa place. – Je trouve que, toi aussi, tu es un héros d’avoir affronté tout ça et t’être relevé.
 

♛ Because the night belongs to lovers.

Un éclat de rire s’échappe de ses lèvres quand elle entend la réponse de Nikolaï à sa question. Un rire franc, parce qu’elle ne s’y attendait pas du tout, alors qu’elle aurait pu le prévoir. Elle ne devrait même pas être surprise. Elle le regarde, une moue hésitante sur le visage, sans savoir si elle devrait se contenter ou non de cette réponse. – Je parlais d’un vrai dessert ! dit-elle en secouant la tête, l’air faussement outré. Mais c’est un peu trop tard, il a vu sa réaction première. Rire un peu ne leur fait pas de mal. Pourtant, quelques instants plus tard seulement, leur sujet de conversation devient beaucoup plus sérieux. Elle s’en veut, un peu, Isabella. Elle remue des plaies qui ne sont pas encore tout à fait cicatrisées, elle le voit bien. Elle se rend compte, aussi, combien elle déteste voir son amant mal en point. Il a cette lueur triste, lointaine, dans le regard. Elle voudrait à tout prix la faire disparaître, mais ce n’est pas de son ressort. Alors elle se contente d’être là, juste auprès de lui, à écouter ses confessions. – Je le sais mais… Tu as l’air d’un roc. avoue-t-elle, les yeux posés sur lui. Son regard n’a pas changé, elle le voit toujours comme tel. Elle comprend simplement qu’il est encore plus fort qu’il n’en a l’air. C’est facile de paraître intouchable quand rien ne nous a jamais blessé. Mais le fait de l’avoir été, et de s’en être relevé, c’est d’autant plus impressionnant pour Isabella. Elle a vécu ses propres drames, elle aussi, mais contrairement à lui, elle ne s’en est pas du tout remise. C’est toujours là, ancré en elle, influençant le moindre de ses mots, le moindre de ses gestes. Toutefois, elle ne veut pas remuer davantage le couteau dans la plaie pour Nikolaï. Même s’il a appris à vivre avec ces souvenirs, elle refuse de le torturer avec. – Je ne peux pas imaginer…. Je ne voulais pas remuer d’anciennes blessures, excuse-moi. A la place, elle préfère se rapprocher de lui. Elle se blottit dans ses bras, elle s’y sent bien, elle sait que lui aussi. Elle ferme les yeux à son baiser, savourant uniquement ce contact avec le corps du jeune homme contre le sien. C’est étrangement réconfortant. La belle garde le silence en l’écoutant, en profitant aussi de ses caresses. Je survis. Elle se reconnaît dans ces mots-là. Elle a l’impression d’avoir passé toute sa vie à survivre. C’est épuisant. – Tu souffrais, c’est normal… Et tu as raison, c’est terminé maintenant. Elle relève la tête pour ancrer son regard dans le sien. Elle l’enveloppe par sa tendresse. – Bon, et que dirais-tu si je te proposais un massage ? demande-t-elle avec un doux sourire sur les lèvres. Tout ce qu’elle veut, c’est qu’il se sente bien, autant que c’est possible.  

♛ Because the night belongs to lovers.

La légèreté laisse place à une conversation bien plus douloureuse mais aussi bien plus sincère entre les deux amants. Elle en apprend davantage sur Nikolaï, bien davantage que tout ce qu’elle aurait imaginé. Elle n’aurait jamais cru qu’ils soient si proches un jour, blottis dans les bras l’un de l’autre, à parler à cœur ouvert. Il le fait plus qu’elle qui reste en retrait. Mais elle réalise, peu à peu, la confiance qu’il a en elle. La confiance qu’il la pousse à avoir, elle aussi, de plus en plus, en lui. Il y a encore beaucoup de choses qu’ils ignorent l’un sur l’autre mais, ce soir, elle se sent plus proche de lui que jamais. Elle a la sensation qu’il a levé le voile sur une partie de sa vie, pas la plus facile, juste pour elle. Elle en est profondément touchée, Isa. Mais elle ne veut pas lui faire davantage de mal. La journée a déjà été bien trop rude pour lui. D’autant plus qu’elle se rend compte en l’écoutant qu’il n’a pas tout à fait guéri. Il a tourné la page, mais elle reste là, ancrée dans son esprit. Il fait juste tout ce qui est en son pouvoir pour aller de l’avant. Comme elle. – Je sais que c’est difficile de faire autrement. Mais sache que tu n’es pas obligé de toujours donner le change. Pas avec moi. déclare-t-elle en toute sincérité. Elle sait que c’est facile, pour elle, de lui dire une chose pareille alors qu’elle a tant de mal à montrer sa fragilité. Mais, pour la première fois, elle envisage la possibilité de lui parler un jour. Lui parler comme il l’a fait ce soir avec elle. Toutefois, elle cesse de le torturer et lui présente même ses excuses pour avoir réveillé d’anciennes blessures. Bien sûr, au fond, il doit certainement apprendre à en parler. Comme elle, elle aurait dû le faire. Mais, dans l’esprit trop tortueux d’Isabella, en parler est loin d’être une manière de guérir. Il la serre contre lui, comme pour chercher sa présence, et elle en fait de même en se blottissant plus encore contre lui. – C’est comme ça, ce n’est pas toi. Quand on souffre, on essaye de survivre, chacun à sa manière… Même si on ne choisit pas toujours la meilleure méthode. dit-elle, l’esprit un peu lointain. C’est à ce moment qu’elle croise le regard de Nikolaï. Et elle essaye d’oublier ses pensées sombres pour se concentrer sur lui. – N’est-ce pas ? confirme-t-elle avec un petit sourire alors qu’il assure être gâté. Elle penche son visage vers lui pour capturer ses lèvres dans un doux baiser qu’elle prolonge jusqu’à ce que le souffle commence à lui manquer. Elle pense qu’il va accepter sa proposition, mais non. Il veut juste l’avoir dans ses bras. Elle lui adresse un sourire un peu plus franc à cette parole. – On risque d’avoir froid au bout d’un moment. Mais elle le taquine. Ici, dans le lit, peu importe. Elle repose à nouveau sa tête contre son torse, tout près de son cou. Elle aussi, elle pourrait rester des heures ainsi, plongée dans son odeur, dans ses bras. – Tout ce que tu veux.