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 On and on (Louison)

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Malik Al Tahir;

-- rocketman --
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Malik Al Tahir



Adil Ali Noor
Strange Hell & Siren Charms
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Célibataire méfiant et défiant. Allergique à la mièvrerie et vacciné contre toute forme d'engagement. L'art de la démerde étant en soi un full-time job, il n'a absolument pas le temps pour ces marivaudages. Ni pour se poser les bonnes questions quant à ses nouvelles appétences et attirances, qu'il tente de refouler en bloc.
Etudiant en cinquième année d'Astrophysique, qui s'improvise ouvreur la nuit au D-Light, quand il ne la passe pas le nez en l'air à lorgner sous les jupons scintillants de ses amantes astrales.
Un modique appartement partagé en colocation dans le magma consumériste du Queens Commercial.


"I'm gonna reach for the stars. Although they look pretty far"

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Message Sujet: On and on (Louison)   On and on (Louison) Empty Lun 26 Avr - 12:00



"On and on"


IRRESISTIBLE OR SO OVERRATED ?


"Je ne serai pas éternel, criança*. Un jour ou l’autre, il faudra que tu reprennes le flambeau. Je sais bien que cela te semble colossal et impossible. Alors, autant commencer à appréhender la chose maintenant. Tu ne crois pas ? Ainsi, lorsque le moment sera venu, ce qui te paraissait hier être une montage infranchissable, sera alors qu’une toute petite colline."

Voilà. Tels furent les mots de "Monsieur Zagallo", avant qu’il ne s’envole pour une semaine sous les latitudes de Belo Horizonte, afin de rendre visite à sa ribambelle de cousins, cousines, neveux et nièces, restés au pays. Des paroles horrifiantes de lucidité et de bon sens. Enoncées par un homme arrivé à l’automne de ses jours, et bien conscient d’avoir déjà fait plus que son temps professionnellement parlant. Des paroles que Spyros peine encore à entendre et assimiler. Lui qui ne peut concevoir une vie, vide de ce père qui en a tout sauf le nom. Cet ange salvateur à qui il doit tant. Qui lui a tout appris. Tout offert. Et dont une vie entière, ne saurait suffire pour lui exprimer toute la reconnaissance et la gratitude qu’il lui voue. Mais il faut se rendre à l’évidence : l’avisé lusitanien a comme toujours raison. Ce qui fait notre bonheur aujourd’hui, ne peut hélas perdurer ad vitam æternam. Ca, l’apathique hoplite de pacotille ne le sait que trop bien et mieux que quiconque.

Il ne sait pas. S’il en sera digne et à la hauteur. Jamais personne auparavant, ne s’était risqué à lester ses larges épaules d’espoirs si conséquents. D’aucuns n’avaient été jusqu’alors assez fou, pour lui remettre leur confiance pleine et entière. Un confiance frisant l’aveuglement. Seule certitude inébranlable : le Docteur des moteurs a à cœur de bien faire et n’a nullement l’intention de décevoir – de quelque façon que ce soit – celui qui s’en est pour ainsi dire remis à lui. Du moins, et une fois encore, sur le pan professionnel. L’humble réputation du commerce, la satisfaction de la clientèle, l’expertise, l’efficacité, la productivité … . Tant de choses si labiles qui sont en jeu. Et désormais au creux de ses pattes d’ours mal léché.

Car oui, le moment est venu pour notre personnification du Kratos de God Of War, de se retrouver catapulté dans l’immensité du grand bain. Sans brassards, ni bouée, gilet de sauvetage ou ceinture de flottaison. Et ce, le temps d’une semaine, qui risque fort et à n’en pas douter, de lui paraître une éternité. Aujourd’hui marque le jour 1, de son évolution au sein de Zagallo’S Garage sans les petites roues. Fini le temps béni et insouciant, où seules – ou tout du moins majoritairement – les tâches en rapport avec le cœur du métier lui incombaient. Désormais, le chypriote se doit d’œuvrer en solitaire sur tout les fronts. Y compris ceux, se rattachant à toute la partie back-office. Ces multiples champs totalement invisibles aux yeux de la clientèle, mais qui n’en demeurent pas moins fondamentaux pour garantir le bon fonctionnement et la pérennité de l’établissement. Le banlieusard se doit à présent de dresser les devis. Commander les pièces manquantes. Gérer l’approvisionnement des stocks, afin d’éviter rupture et pénurie bien malvenues. Assurer la réception des livraisons. Lutter et s’échiner, avec la pléiade d’intermédiaires et fournisseurs - têtus et obtus - ne souhaitant traiter qu’avec le gérant. S’acquitter de la bonne créance des factures. Faire les comptes et s’occuper de tout le volet administratif. Un chantier titanesque, qui ferait presque passer les Douze Travaux d’Hercules pour une promenade de santé. Plongé au plus fort de la réalité depuis tout juste quelques heures, Spyros en vient déjà à se demander, comment diable "Monsieur Zagallo" fait pour jongler avec toute cette myriade d’impératifs.

La matinée touche à sa fin, et l’astre solaire est en passe d’en terminer avec l’avènement de son apogée, dans l’azur du baldaquin céleste. Matinée au cours de laquelle l’ombrageux natif de Keryneia, a l’enrageante impression d’avoir perdu son temps. Un peu de plus, et il affirmerait avoir frôlé les crêtes de l’oisiveté. Dans les faits, il n’en est rien. Cependant, et de son point de vue, c’est tout comme. Après avoir passé des heures durant pendu au téléphone, à se perdre en palabres et pourparlers avec des fabricants, n’ayant pas leurs pareils pour susciter chez lui une fulgurante migraine alliée à de furieuses envies de meurtre ; le placide enfant de la rue peut enfin s’en retourner jouer avec ses outils. Allongé sur une espèce de planche à roulettes sous les roues d’une Mustang du début de la dernière décennie, le taiseux aux prises avec l’installation du nouveau pot d’échappement multiplie les ahans d’effort, dignes d’un bûcheron. Sourcils froncés, et traits de la trogne crispés comme ce n’est pas permis. Dans un équilibre précaire, la visqueuse goutte sombre accrochée au métal finit par dégringoler. Le zonard assagi a juste le temps d’incliner la tête sur la gauche et de cadenasser ses paupières, avant que l’impure perle ne vienne s’écraser sur sa pommette dorée.

"P’tain, fait chier !", râle-t-il, tel un tigre poussant un feulement atrabilaire. Contorsionnant son avant-bras et son poignet de manière improbable pour maintenir le système d’évacuation en place, le badass de naguère – qui en a néanmoins gardé quelques traits – s’attelle enfin, et non sans mal, à son arrimage.

Soudain, et déchirant le silence, un cliquetis régulier – et ressemblant à s’y méprendre à celui d’une paire de talons aiguilles - bat la mesure sur le ciment. Une nouvelle petite inclinaison du chef, permet au mécano de confirmer son pressentiment. Il s’agit bel et bien d’une paire de stilettos, qui vont et viennent en faisant les cent pas. D’excellente facture et à un prix exorbitant, d’après l’arrière écarlate des semelles. Flambant neufs – ou presque – à en juger par l’éclat du vernis et l’absence d’usure. Une créature de la upper class qui vient pousser ses pointes jusqu’ici ? Encore une chose qu’il n’aurait jamais crû sans le voir. Un peu plus, et Spyros serait prêt à jurer que ce garage – et à une plus large échelle cette portion du Queens - est entrain de devenir hype et branché ! Le comble … . A moins que cette paire de piques choux soit une vulgaire contrefaçon, acquise aux puces pour la modique somme de trois dollars cinquante. De qui s’agit-il ? Difficile à dire, compte tenu de la position dans laquelle il se trouve.

"J’suis à vous dans une minute.", déclare-t-il en focalisant de nouveau son attention sur sa besogne, et en administrant hâtivement les derniers tours de clé, afin de ne pas trop faire attendre et languir la cliente – ou visiteuse, tout du moins.

Fort du travail accompli, le patron par intérim agrippe le poitrail du véhicule et applique une traction de ses bras robustes. La planche sur laquelle repose son échine glisse alors sur le sol. Exhumé de sous les décombres, le soleil de midi fond tel un rapace sur son visage et carbonise ses iris pralinés. Faciès tordu en une grimace d’inconfort, l’homme aux cheveux de crin plisse les yeux et appose son avant-bras sur les arcades sourcilières. Rétines accoutumées à ce contraste de luminosité pour le moins violent, le gaillard se relève pour faire face à son hôte.

"Bonjour, Madame.", dit-il d’une voix pouvant – nettement - mieux faire en terme de chaleur commerçante. L’intonation un tantinet hésitante et traînante, quand vient la prononciation du titre. Une chance qu’il se soit souvenu in extremis, que le qualificatif de Mademoiselle n’est plus aussi bien vu qu’autrefois et tend à tomber en désuétude.

Une femme très clairement dans la vingtaine. Look casuall chic, élégant et passe-partout. Avec beaucoup de charisme et de prestance. Probablement une danseuse, ou une personne ayant au minimum reçu des leçons de maintien. Ses orbes émeraude et sa chevelure aussi flamboyante que les blés au plus fort de l’été, fleurent bon les embruns scandinaves. Mais ses pommettes saillantes et les traits poupins de sa frimousse toute en rondeur, sont quant à eux davantage caractéristiques des individus originaires de pays d’Europe Occidentale. Ou des Balkans, qui sait.

"En quoi puis-je vous aider ?", s’enquit-il dans la foulée, en haussant légèrement le coude, pour essuyer sa joue crasseuse dans la manche de son T-shirt blanc – enfin, un blanc qui tire sérieusement sur le jaune, à force de lessives foireuses.

Aussi curieux cela puisse-t-il paraître, le trentenaire a … comme une impression de déjà vu. Non pas qu’il ait déjà croisé cette fille d’Aphrodite par le passé, mais … plutôt qu’il ait déjà rencontré, dans un passé des plus récents, une femme dans la même trempe, que celle qui se tient devant lui, avec un port de tête altier à faire pâlir les plus sérénissimes reines. Quoi que, non. Réflexion faite ; pas une femme, mais plutôt des femmes. Qui que soit cette mystérieuse inconnue, quelque chose lui dit qu’elle ne vient certainement pas pour une révision des cinquante-mille … .

Code by Sleepy



* : "Gamin" en portugais.



_________________
- - L'ange au leurre.
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Louison Maillard;

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Louison Maillard



scarlett leithold
celticaddiction (ava)
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26
les corps qu’elle sillonne, affamée, estomac battant. volage et errante car l’amour est liberticide
mourir sur scène à la sisyphe, encore et encore

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Message Sujet: Re: On and on (Louison)   On and on (Louison) Empty Mar 4 Mai - 22:29



Parfois, il arrivait à Louison d’échapper aux saveurs romanesques de l’instant, de laisser filer à travers ses longs doigts la poétique d’un temps fixé, arrêté sauvagement dans son élan gracile. De laisser pousser contre son dos, la résonance grave et éthérée des mouvements de la réalité à laquelle elle s’était volontairement soustraite. La môme vivait ces moments sans grand enthousiasme, avec un peu d’aigreur même lorsqu’au milieu d’une allée, de l’euphorie d’une piste de danse ou d’un café, les filles péroraient sur le même homme, et tous les singuliers mystères qui entouraient les rejets qu’il leurs avaient présentés, à chacune d’elle, tour à tour. Bien des fois néanmoins, son esprit était prié de vivoter parmi ses semblables ; lorsque Alba débutait son pamphlet sur les traits apollonesques du garagiste, ou que Phoebe voyait ses rêves de chevalerie s’effondrer au détour d’effusions sentimentales à sens unique, ou encore que Nell s’offusquait vulgairement de l’attitude rigide de leur homologue.

Louison observait sur les feuilles de son script, la trace d’un demi-cercle de café tamponné dans un coin de papier par le dessous négligé d’une tasse. Sur ce rectangle blanc et écorné, elle avait étalé quelques bouts de son imaginaire comme l’obsession d’écrire sa propre pièce avait soudain fourmillé dans sa caboche. Elle grattait des mondes, des univers, des impossibles et des existences tragi-comiques. Son héroïne déblatérant sur les beautés d’un naufrage auquel rien n’a survécu, pas même elle et encore moins le monde. L’héroïne parle, parle longuement. Que reste-t-il des personnes qui s’en sont allées? La splendeur intacte d’un horizon couvert de leur dépouille. À la fois le silence et tous les échos des bruits qu’il contient. Le jour qui demeure et la nuit qui le chasse. Les saisons qui s’écoulent sans jamais se rencontrer. Elle réfléchissait, se torturait, doutait sur les dimensions qui se créaient dans l’espace clos de son crâne avant qu'elle ne se réveille. Son papier se froissait sous les coudes cagneux de Phoebe qui s’était brutalement affalée sur la table signifiant ainsi son abattement, et ça a suffi à faire tempêter l’amertume qu’elle taisait jusque-là. « Y en a une de vous qui se souvient de sa dignité? La mer est remplie de poissons, vous savez », elle a projeté son dos sur la banquette en vinyle, exsudé sa lassitude. « Oh va t’faire mettre Lou, si tu l’voyais toi aussi tu te damnerais », ses globes ont roulé derrière ses paupières, se sont projetés loin derrière la baie-vitrée « c’est ça le truc, je fais pas vraiment dans la damnation ». La cueillette enjôleuse dans une forêt mâle, la fée se repaît en sensualité et, cependant, quitte le bois, froide et impassible. Jamais conquise, sa fascination butait sur le paradigme affreusement familier du masculin. Elle n’était pas la seule en s’en dégoûter, autrefois, ses amies aussi. La môme obtempèrait d’un soupir « mais j’imagine que j’peux essayer », gratter les sédiments de l’indifférence martiale, en faire jaillir l’émotion atrophiée, recroquevillée sur elle-même. Elle pourrait essayer un peu de cette damnation, s’en humecter les lèvres et la raison.

À force de mendicité intermittente, le chérubin s’était lassé des coquetteries qui assurent la joliesse. Désormais, depuis qu’elle s’était enfuie de la parentalité tyrannique, sa beauté se résumait à l’afféterie d’un bon bain ou d’une courte douche, parfois sublimée par quelques heures de sommeil. Une modeste existence qui ne l’empêchait pas de posséder une paire d’escarpin outrageusement bon marché, qu’elle portait en un uniforme obligatoire pour ses auditions, le corps en vitrine de son talent à jouer Antigone, Bérénice ou Ondine. Elle revenait de la pénombre du théâtre, la démarche franche et hoquetante des femmes aux milles vies. C’était un jour de beauté comme il s’en écumait rarement, choisi avec grand soin pour troubler correctement la crasse du cambouis et les effluves d’essence. Ses souliers l’annoncèrent avant qu’elle n’ouvre elle-même la bouche, une voix d’outre-bagnole confirmait sa présence, et l’instant d’après, la bête motorisée dégueulait l’objet de convoitise. À l’homme qui se déroulait sous ses yeux clairs, la môme comprenait toute la détresse de ses amies, car derrière la surface grossière et noircie, se distinguait ce charme froid, captivant. « J’ai besoin que vous répariez quelque chose », elle éludait les politesses par la franchise qui se distillait dans son sourire guilleret. « J’ai dans mes poches l’égo de trois amies que vous avez abîmé de votre indélicatesse, et je doute qu’un coup de clés  à douille puisse faire l’affaire car vous avez semé une sacrée pagaille », Louison se mettait à tourner autour de l’endroit, flânant autour du véhicule, les yeux happant chaque objet jusqu’à la chaise sur laquelle elle s’assit en soulageant ses pieds des immenses échasses. « Pourquoi dire non à Alba? Son corps est divin, et cette fille est une drôle de petite chose. Vous n’aimez pas rire? », elle massait ses pieds, les tournait dans un sens puis dans l’ordre pour chasser la douleur sans s’enquérir de l’assentiment du propriétaire.

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Message Sujet: Re: On and on (Louison)   On and on (Louison) Empty Mer 5 Mai - 16:28



"On and on"


IRRESISTIBLE OR SO OVERRATED ?


Ne jamais se fier aux apparences, ni juger un livre à sa couverture. Il est tellement facile de céder aux sirènes des préjugés, des idées reçues et des opinions préconçues. Bon nombre de quidams malavisés, auraient été tentés de croire que la détentrice d’une paire de chaussures, valant – au bas mot - à elles seules le double du salaire mensuel d’un ouvrier, serait très portée sur l’immédiateté. Certains auraient même très probablement commis l’aberration, de formuler – haut et fort, ou en leur for intérieur – des jugements à l’emporte-pièce, aussi vaseux que nauséabonds. Faisant fi du recul, pour être convaincus que cette élégante n’est rien d’autre qu’une âme infatuée, suffisante et imbue de sa personne. Une engeance doublée d’une inflexible Dame de fer, toisant ses semblables et les traitant sans respect, égard, ni considération. L’archétype du despote en jupon, montée sur des échasses, reflétant toute sa superficialité. Tel aurait été l’acerbe constat, hâtivement dressé par les adeptes des amalgames, sans même se donner la peine de laisser sa chance au produit.

Fort heureusement, le musculeux playboy qui s’ignore, n’est absolument pas fait de ce bois là.  Spyros est en effet ce que l’on appelle un contemplatif. Et comme tout bon contemplatif qui se respecte, il a au préalable besoin de laisser du temps au temps, pour se forger un avis. Cependant, l’athée au dernier degré mentirait, s’il affirmait ne pas être à minima interloqué par la complaisance de cette femme arpentant lentement le béton. Sans pousser de soupir affligé. Sans se fendre d’un raclement de gorge agacé. Ou illustrer son impatience, en martelant du pied le sol au rythme du balancier d’une horloge. De facto, rares sont aujourd’hui les individus à même de conserver leur équanimité, alors que les précieux sables du temps poursuivent leur inexorable écoulement, et les aiguilles leur course effrénée autour du cadran. Néanmoins, et ne tenant pas à entamer, ni abuser du capital patience de la chalande ; le digne représentant du prolétariat s’active et met les bouchées doubles, afin de pouvoir lui accorder l’intégralité de son attention. Attention qu’elle est plus qu’en droit de recevoir. Car ne dit-on pas que le client est roi ?

S’il n’y a pas cinq minutes, l’étonnement n’a que sobrement effleuré l’as de la vidange, la vision de sa locutrice – digne d’un chérubin  majestueusement descendue des cieux – le fait quant à elle grimper en flèche de manière fulgurante. Tant de raffinement, de coquetterie, de style dans un endroit aussi banal, trivial et insignifiant … dire que cela surprend serait l’euphémisme du siècle ! Comme si Anna Wintour arpentait les plébéiennes allées d’un magasin H&M. Quand l’absurde prend corps dans la réalité. Imaginez : une bouton d’or éclos au beau milieu d’un champ d’orties. Ah ça pour sûr, cela change considérablement de la cohorte de gros durs – pourvus de gueules aux allures d’avis de recherche – à la dégaine passablement louche, qui viennent amener leurs caisses brinquebalantes dans cette humble échoppe !

Quelques pas latéraux réalisés, l’électron gravitant naguère autour de l’atome Maleun essuie ses empans, à l’aide d’une chiffe en tissu pendue à un crochet sur le pilier en ciment à bâbord. N’étant absolument pas d’une nature curieuse et fouinarde, le chypriote ne dit mot et laisse le silence s’enraciner. Et à la demoiselle le loisir de décliner son identité, si elle le désire. Après tout, l’une des plus belles qualités d’un commerçant, n’est-elle pas sa discrétion, vis-à-vis de sa clientèle ? L’adonis au derme doré oblique légèrement la tête, qui s’articule mollement et de façon positive. Les commissures flemmardes, s’étirent en un famélique sourire, atteignant péniblement la mention "peut mieux faire". Se voulant initialement avenant et déférent, comme il est de bon ton de l’être dans le secteur tertiaire. Fiasco sonnant et retentissant. Même si loué et salué soit l’effort. Aussi vain fut-il.

"Bien sûr. De quoi s’agit-il ?", rétorque-t-il de sa voix rauque, dans une intonation dépourvue de toute inflexion interrogative. Vide d’âme. Orpheline de chaleur. Désincarnée. Machinale et digne d’un automate, programmé par ce sempiternel fond apathique, qu’il traîne comme un bagnard lesté de son boulet. Le tout agrémenté d’un haussement débonnaire de ses trapèzes bien découplés.

Finalement, peut-être que le pressentiment ayant étreint un peu plus tôt l’impavide gaillard, s’avère inexact et erroné. Il se pourrait, contre toute attente, que l’angelot à la frimousse dotée de traits défiant l’emprise du temps, soit aux prises avec un problème d’ordre mécanique nécessitant son talent, ses compétences et son expertise. Aussi infortunée soit cette éventualité pour la jeune fille en fleur ; elle ne manquerait toutefois pas de ravir et d’accommoder le chantre de la débrouillardise. Au terme d’une matinée passée à se sentir plus inutile qu’une fichue amibe, Spyros ne bouderait pas son bon plaisir en s’adonnant à quelques tâches, qui lui permettraient de cueillir les fruits de la productivité, de l’efficacité et la satisfaction du devoir accompli. Aller savoir pourquoi, mais il se plaît à imaginer la pimpante valkyrie au volant d’un modèle sport. A la pointe de l’innovation, ergonomique et doté d’un vaste coffre. A moins que son intuition originelle soit fondée.

Le cœur du souci ouvre ses ventricules. Un trio d’égo féminins que son emblématique indifférence a malencontreusement froissée. Autant dire que l’on est bien loin, d’un problème de courroie de distribution qui aurait lâchée. Inutile de préciser que le contraire l’aurait étonné … . D’un autre côté, le fait qu’il n’y ait pas l’ombre d’une voiture, un tant soit peu haut-de-gamme, parquée aux abords de l’atelier, avait déjà sensiblement mis la puce à l’oreille de l’artisan. Nous y voilà donc. La lumière se fait et dissipe le brouillard planant sur le pourquoi du comment. Navré de n’être sollicité pour son savoir-faire professionnel, le loubard affranchi voit ses narines frémir sous le poids d’une expiration plus soutenue et appuyée. Unique manifestation, trahissant ce qu’il pense être de la déception. Incrédule et déconcerté – contrairement à ce que pourrait laisser à penser sa trogne verrouillée en une expression stoïque – l’accusé pointe alors un index en direction de son faciès.

"Moi ? ‘Doit y avoir un malentendu. J’n’ai jamais offensé personne ici. En particulier une femme. Du moins, pas verbalement. Et si tel est malheureusement le cas, ça n’était sûrement pas intentionnel et voulu.", explique-t-il d’une voix sépulcrale, gréée à un ton olympien glaçant de calme. Les traits de la trombine rissolée figés, et aussi animés qu’un masque mortuaire.

N’en déplaise a ses abords quelque peu rustres, bourrus et maussades, l’insulaire ne se révèle pas moins gentleman et gentilhomme qu’un autre pour autant. Bien que ses propensions en matière de galanterie, font indéniablement pâle figure comparées à celles des plus éminents séducteurs et dandys en tout genre. Nonobstant, et depuis qu’il s’est extirpé du marasme de l’illégalité, le flegmatique hellène a acquis au fil des saisons venant et s’en allant, quelques vagues notions de savoir-vivre, de politesse, de civisme et de bonnes manières. Certes, guère suffisamment poussées pour siéger à la table de Nadine de Rothschild, sans susciter l’indignation générale ; mais quoi qu’il en soit amplement acceptables, dans la vie de tous les jours auprès des quidams.

De là à dire que le Spyros 2.0 est un mec bien … il n’y a qu’un pas, qu’il serait déraisonnable de franchir précipitamment. Cependant, et eu égard à la version de base, force est de constater que l’embellie et la bonification sont pour le moins significatives et admirables. Il y a vingt ans de cela, l’Hercule des bas-fonds ne se serait pas encombré de scrupules, et n’aurait eu cure de fouler au pied l’amour-propre d’une jouvencelle. Quand bien même il prend désormais grand soin de ne vexer quiconque, le mécano n’exclue pas catégoriquement la possibilité d’avoir, par inadvertance, fait preuve de muflerie. Le naturel pouvant si aisément s’en revenir au galop.

"Mon patron n’apprécie pas que j’côtoie trop familièrement les clients. En tout cas, tant qu’ils ont un véhicule en réparation. Puis franchement, j’aurais eu l’air de quoi en me jetant comme un crevard sur … ses avances ?", argumente-t-il posément, en veillant à ce que son propos demeure un tant soit peu clair, structuré et organisé. Le phrasé ralentissant et devenant plus incertain à l’approche de la conclusion.

Pas certain d’employer le qualificatif idoine, pour dépeindre et faire état de l’intérêt qui lui a témoigné, l’amie de l’inquisitrice aux orbes smaragdins. Des orbes qui houspillent le malappris, avec la férocité d’un duo de maelstroms couleur tempête. La créature du beau sexe sonne soudain le glas de son immobilisme. D’une manière parcimonieusement affectée, au point de laisser croire au spectateur que c’est là le fruit de la spontanéité dans son nu le plus blême : elle déambule. La démarche chaloupée et féline. Le geste nonchalant. Presque lascif. L’attitude mi-raffinée, mi-aguicheuse. Imperturbable, l’immigré se contente de suivre de ses amandes goudronneuses, l’actrice de la pavane se jouant dans un semi huis-clos. Dans une certaine emphase et théâtralité, elle abandonne sa pochette sur le capot rutilant de la Mustang. Un arsenal déployé qui aurait depuis longtemps suffi pour mettre les sens de moult individus, disposant d’un chromosome Y et d’un instinct guerrier, en effervescence. Malheureusement, auprès de l’amateur de belles cylindrées, l’efficience de ce numéro bien rôdé s’avère aussi probante que l'apport d’une goutte d’eau pour aboutir à l’extinction d’un torrent de flammes.

Assise sur la chaise défraîchie jouxtant le comptoir où sommeille notamment la caisse enregistreuse, la gracile magistrate croise ses jambes fuselées et procède à l’énonciation des chefs d’inculpation. Circonspect, le méditerranéen sonde alors les tréfonds de sa mémoire. Les membres de la gent féminine qui franchissent le seuil de "Zegallo’S Garage" ne sont pas légion. L’enfant Kyrenia croit se souvenir avoir croisé le nom d’une certaine Alba, dans le registre des facturations du mois dernier. Hélas, il se remémore davantage le moyen de locomotion souffreteux que sa propriétaire. Une citadine bleue ciel quatre places au pare-choc amoché. Poings indolemment fourrés dans les poches, sa tête dodeline de droite à gauche, avant qu’il n’honore la question lui étant posée d’une réponse. Réponse qui ne ravira sans doute pas totalement la demandeuse.

"Si, j’apprécie à l’occasion. J’suis vraiment désolé, si j’ai blessé ton amie par … mon manque de réceptivité à son égard. Tu peux néanmoins la rassurer : son charme ne souffre d’aucun vice de fabrication. Là-d’ssus, elle peut dormir ses ses deux oreilles. J’pense que j’n’étais simplement pas dans les meilleures dispositions pour … lui offrir satisfaction et lui être agréable.", rétorque-t-il, avec ces mêmes accents d’hésitation, tapis au fond de la voix. Craignant de ne pas avoir suffisamment arrondi les angles. Tant sur le fond que sur la forme.

Le solennel vouvoiement – ne faisant qu’accroître l’impression d’être un croulant en si jeune compagnie – est renvoyé sur le banc de touche, au profit du convivial tutoiement. Le motif de la venue de l’angélique damoiselle, rendant les formalités commerciales bien inutiles et superflues. Alba ou une autre ; le fait est que l’alchimie ne prend pas. Le charme refuse d’opérer. Mais cela, Spyros se garde bien de l’exprimer de vive voix. Constater de visu de l’insuccès doit déjà être suffisamment frustrant comme ça. Le poisson n’est de toute évidence point enclin à mordre à l’hameçon et se laisser ferrer. Quand bien même l’appât se révèle des plus délicieux. Du moins, le suppose-t-il. Ne pouvant se baser sur une quelconque once de concupiscence et d’excitation, pour en attester de manière claire, ferme et catégorique. Les bras croisés sous les pectoraux bombés, et les phalanges calées sous les aisselles - accusant une repousse du poil de trois semaines au compteur. Ses gemmes d’hématite soutenant sans ciller, les yeux de biche le jaugeant et le jugeant. Désormais dans l’expectative de la fatidique sentence.

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