le pensionnat devait t'être bénéfique. te rappeler les règles à respecter, celles que tu n'étais pas en mesure de bafouer. le pensionnat devait te redresser. te montrer qu'à tes parents, tu n'avais pas le droit de t'adresser le ton élevé. tant de devoirs, contre lesquels tu ne pouvais rien, t'avaient été rabâché. pourtant, ils étaient entré dans ton cerveau, aussi vite qu'ils en étaient ressortis. ils avaient perdu patience avant toi, là-bas. eux, les détenteurs de l'autorité. eux, censées vous faire rentrer dans le rang et ramper. sauf qu'il n'existait personne pour gueuler plus fort que toi. pour exiger quoique ce soit devant toi. le petit merdeux sans foi, ni loi. persuadé que chaque être humain était destiné à se plier en quatre pour accomplir tes moindres désirs. selon toi, elle était bien là la seule richesse de ton statut.
pour ta soirée qui s'annonçait bien morne, il semblerait que ton programme ait été revu à la hausse par ta partenaire de crime. et toi qui, d'ordinaire, détestais t'entendre imposer le moindre de tes faits et gestes, tu capitulais étrangement facilement. parce que les lubies de rosa sonnaient comme des invitations à ton oreille, plutôt que comme des ordres qui t'auraient fait courir en sens inverse. l'adrénaline étant votre moteur principal, vous vous faisiez souverains d'un royaume qui n'était pas le vôtre.
pas encore, que vous vous plaisiez à répéter.
rosa n'est pas celle qui annihilera le feu qui t'anime. rosa n'est pas celle qui te soufflera de reculer quand la folie te poussait à avancer. rosa est celle qui te suivra dans des parties de poker perdues d'avance, quand elle n'était pas tout simplement celle qui t'y guidait la première. t'aimes son esprit aussi aventureux que curieux. les sensations et les frissons que vous procurent vos nombreux délits au parfum victorieux.
tu te pointes avec l'agilité d'un chat. et derrière elle, t'approches tout en discrétion. tu ne prononces, pas même, le moindre mot. tu sais qu'elle te reconnaîtra, de ta démarche à ta silhouette. vous passiez tant de temps à décortiquer celles des autres que vous en étiez devenus indétrônables à ce jeu-là. encore un de vos trop nombreux talents. appris sur le tas, sans avoir eu besoin d'aller soudoyer qui que ce soit. ça te fait doucement sourire d'être l'ombre au tableau de cette soirée aux allures de mascarade. deux vils corbeaux aux desseins machiavéliques, affichant deux visages d'ange à qui l'on donnerait le bon dieu sans confession. image à double-face.
tu vois le cinquantenaire là-bas ? combien vaut sa baraque à ton avis ? tu te fais déjà voleur quand tu t'appropries le tube que tu glisses à ton tour entre tes lippes. avant d'expirer la fumée du bonheur dans un sourire lourd de sous-entendus.
j'ai beau additionner nos deux fortunes respectives, je crois qu'on est encore loin du compte. et t'es prêt à pousser le vice jusqu'au bout. à te mouiller dans les emmerdes jusqu'au cou, si ça pouvait te promettre l'excitation précédant un saut dans le vide. flirter avec le danger était de loin ce qui te faisait sentir le plus vivant. et t'étais prêt à parier qu'il en allait de même pour rosa. les deux pieds dans votre monde, à l'endroit exact où vous deviez être, vous vous apprêtiez à faire sauter la banque et à vous faire la malle aux frais de la princesse.
tu te sens à la hauteur ? tu lâches en la toisant de bas en haut. te forçant à te faire une idée de ce qu'elle pourrait inspirer à un homme dans son habit de scène. l'habitué en toi, en avait une vague idée. qui suffisait à faire s'étirer tes lèvres face à la partie d'échec qui s'annonçait.