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| Sujet: Elle pleut. Mer 20 Nov - 23:57 |
| elio /(et)/ kaja.
Le fantôme irakien déambule dans les rues après avoir quitté sa protégée. La soirée s'est étiolée, elle est presque arrivée à se débarrasser de son air désabusé et doucement révolté pendant quelques heures, lui donnant l'impression d'être une autre. Les bras croisés contre son corps lutte contre le froid que même les bulles de champagne mondaines n'arrivent pas à endiguer dans son organisme. Sa chevelure fouette son visage, agitée par le vent et rentrer chez elle devient une mission de la plus haute importante malgré son sens de l'orientation inexistant. L'enfant file devant la menuiserie de son erratique, elle percute. La lumière est allumée, filtrant à travers la partie vitrée du lieu, il lui semble. Elle oscille une seconde, prise d'une hésitation plus profonde qu'à son habitude, se sentant encore plus illégitime qu'avant. Il faut dire qu'elle a toujours su où son atelier se trouvait sans jamais s'y être arrêtée. Kaja pallie donc à ce non-manque ce soir en se plantant devant la porte d'entrée, se contentant de se faire entendre délicatement. L'esprit moins lucide qu'à l'accoutumée, elle se contente d'être dans l'attente tout en se disant qu'elle a fini par fuir la dernière fois, sans répondre à sa question parce qu'elle n'arrivait pas à statuer sur son envie volatile. La gosse ne sait pas ce qu'elle veut, alors l'ignorance est plus douce. Kaja s'est contentée d'esquiver en toute sérénité son regard trop pensant. La porte tarde à s'ouvrir et finalement ses traits sont emprunts d'une surprise non feinte. Ses opales le sondent en quelques secondes. « Tu ne t'arrêtes jamais ? » elle souffle en froissant un instant ses sourcils tandis que l'heure tardive s'affiche en rouge clignotant dans sa boite crânienne. Vingt-deux heures, ou un peu plus. « C'est une chance pour moi » elle glisse néanmoins, placide, en haussant les épaules dans une nonchalance naturelle, y a rien qui dépasse ce soir, contrairement à la dernière fois, au café. « Tu travailles sur quoi ? » elle l'interroge d'une voix claire en confrontant ses opales, sans s'imposer physiquement. Elle se contente d'être là, devant lui, c'est déjà bien. |
| | | Erkan Dickenson;
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| Sujet: Re: Elle pleut. Jeu 21 Nov - 22:10 |
| Les chiffres qui s’entremêlent, s’usent contre sa cervelle, éreintent les parois de son crâne. Chiffres de bonne augure, qui murmurent que l’économie est encore prospère, la mémoire de feu son père, pérenne. Des nuits aux promesses immortelles, à ne faire mourir ce qu’il ne peut exister que dans le coeur, laisser vivre les étincelles. Les rayons crèmes de cette lampe posée sur le bureau qui s’irradient faiblement ailleurs, là où les ombres siègent le sentier est escarpé pour la lumière à traverser. À ruminer sa comptabilité, il estime que les fracas assenés contre la porte de la boutique peuvent attendre que les chiffres, que les nombres s’achèvent sur le papier. Finalement, Elio promène son squelette dans la brume obscure, entre les meubles exposés jusqu’à cette silhouette coutumière. Kaja, alors c’était l’ombre qui t’avait emportée en pleine journée? Il zieute cette montre qui a perdu l’heure, comme Kaja pour qui le temps file sans qu’il ne soit nécessaire de l’interpeller. Elio est à peine soufflé de la voir exister en cette heure, en ces lieux, sous ses yeux. La porte laisse la môme la percer de ses palabres, franchir ce pas d’un naturel qui, lui, surprend quelque peu le garçon qui s’en accoutume avec célérité. Il a les sourcils froncés à l’entendre psalmodier avec une étrange légèreté. « Je termine la comptabilité de la boutique ». Il s’écarte de l’embrasure pour que la porte s’ouvre un peu plus « entre », il lui impose car elle le lui doit bien, la volatilisée. « Qu’est-ce que tu fais là? », il s’enquiert sobrement, sans verve aucune. La question est néanmoins surprenante parce qu’elle n’avait jamais été posée, comme s’il était nécessaire d’ignorer avec allégresse les raisons qui vous amènent quelque part, là où il y a quelqu’un. Kaja l’insoumise, tu laisses les questions suspendues dans le vaste rien, pour faire exister quelque chose dans le vide, n'est-ce pas? |
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| Sujet: Re: Elle pleut. Dim 24 Nov - 11:36 |
| Ses sourcils se froissent face à l’image d’un Elio occupé à des tâches ordinaires, quotidiennes, penché sur les chiffres de sa boutique. Sa matière grise refuse le concept parce qu’il flotte entre deux niveaux du néant dans son esprit. Elle s'était toujours demandée avec sa curiosité d'enfant comment il pouvait remplir ses journées. Parce que les siennes, sont longues en tant que spectatrice des autres. Kaja préfère fuir le tableau. Ses opales d’animal vaguement déviant/méfiant le contemplent un instant avant qu’elle ne se courbe docilement sous son « entre ». Un pas illégitime après l'autre. La poupée s'accommode avant que son minois, offert, ne se tourne vers Elio et sa question suspendue dans les airs. Elle s'octroie paresseusement quelques secondes de réflexion, se contentant de soutenir le regard de l'italien. « J’ai fuis, je m'ennuyais ce soir » elle énonce comme s’il se trouvait sous sa boîte crânienne et pouvait tout comprendre, Elio, l’omniscient. La vérité est qu’elle s'est échappée d’une soirée qui ne lui correspondait pas, comme souvent. Peut être qu’elle s’essaie trop souvent, Kaja, en soulignant involontairement sa différence avec le monde. Elle a accepté de nager dans la futilité pour se fondre dans la masse le temps de quelques heures, feignant de s'émerveiller le temps d'un acte ou deux avant de décider que la pièce était trop longue, et soudainement plus à son goût. Son errance l'a mené jusqu'ici. « Et je me suis juste arrêtée là » Elle conclut dans une réponse insatisfaisante et imparfaite. « Je ne te cherchais pas » Elle glisse de son léger soprano teinté d’un accent se devine trop facilement, lui présentant une vérité facile à accepter. Visage faussement impassible, prunelles curieuses. « Ne t’inquiète pas » L’enfant complète dans un haussement d’épaule. Elle a compris qu'elle n'aurait pas accès à Icare et qu'il fallait de se contenter de leurs habitudes erratiques. « Je te dérange ? » finit par relever l'irakienne pour compenser son intrusion avant d'esquisser quelques pas, colonisateurs, dans la pièce. |
| | | Erkan Dickenson;
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| Sujet: Re: Elle pleut. Dim 24 Nov - 23:29 |
| Elle est éclairée, Kaja, comme la boutique, de la lumière blanche des réverbères du dehors. Et ils demeurent ainsi, dans l’espace indécis, entre ténèbres et ruissellement lumineux. Elio observe, devine dans l’obscurité, la rigidité de son visage. Il imagine les yeux mutins dans lesquels il ne lirait rien s’il pouvait les voir, la bouche qui s’applique à ne pas laisser l’âme traverser, portrait de décrépitude étouffée. Ça te plairait de savoir que je ne peux pas te voir, là. « Tu devrais pas en faire une habitude. Fuir c’est toujours renoncer » mots tapis dans l’ombre eux aussi, il les souffle sans qu’ils recèlent la moindre aspérité. Une vérité insondable; avec lui aussi, elle a fui. Un pas vers cette armure léthargique pour y entrevoir la brise qui effleure sa mine, l’émeut? En lieu de cette proximité réduite, l’éclat y est différent et permet à l’éphèbe de distinguer des sentinelles écharpées accrochées aux siennes. Il a ce sourire, formé avec flegme, de la confusion qui chapeaute leur échange. Il croit qu’elle ne peut pas le voir. « Trois grands coups contre cette porte, et tu n’espérais pas m’y trouver? », mauvaise joueuse. Il la veut dans son piège, ce soir un peu plus près, demain sans doute un peu moins, mais elle en a accepté les douloureuses règles n’est-ce pas? Il la maintient entre ses iris scintillantes d’une curiosité frappée. « Je ne m’inquiète pas de savoir que tu me cherches, Kaja » car c’est une danse où il se fait maître, quand bien même il est certain qu’il souhaite lui en apprendre la mesure. Sitôt que tu risquerais de te brûler, j’irai me plonger dans des mers glacées. Je te laisserai t’immoler si tel est ton souhait, le bout des doigts et rien d’autre. Finalement, il brise l’étau de leur regard, s’écarte pour s’enfuir vers l’arrière-salle veillant à ce que le pas de la gamine feutre le sien: « non, j’ai terminé. Tu veux monter boire un verre, ou peut-être préfères-tu t’évaporer? ». Gamin caustique, gamine cosmique, iraient bien créer le tison d’un semblant cette nuit. |
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| Sujet: Re: Elle pleut. Lun 25 Nov - 21:19 |
| Elle cille avec grâce, accusant ses mots qui trouvent un trop grand écho dans sa petite coquille. La belle se fait pensive un instant, les traits tendus, le regard faussement neutre comme pour s'empêcher de dérailler. Si cela suffisait. Elle est incapable d'y croire. « Renoncer, c'est avoir essayé » Elle répond sur le même temps dans une vérité biaisée, elle le sait. « Certains ne se donnent même pas cette peine » Kaja souffle, opales aux lueurs insolentes, comme autrefois, dans une autre vie, plantées dans les siennes. Haussement d'épaule en prime. C'est dans l'échec que transparait la volonté de l'irakienne qui ne peut s'empêcher d'afficher un léger rictus sans pour autant lui répondre. Kaja sait qu'elle peut perdre au jeu de la rhétorique, surtout face à lui. « Tu devrais » l'enfant souligne, parce qu'elle, elle s'inquiéterait si Elio se mettait à la chercher. L'enfant se dirait qu'ils ont dévié du contrat tacite qu'ils ont signé tous les deux. Consentement vicié pour Kaja, mais elle a renoncé à faire valoir ses droits. Elle l'observe une seconde, les bras vaguement croisés. « Un verre avec toi » Elle sélectionne avant que son minois ne se colore d'un sourire aussi fugace que moqueur. Kaja attend, sans savoir sur quel tempo avancer avec lui. « Tu es au courant de ce qu'il se passe en Irak ? » Elle l'interroge en le suivant, sans réfléchir. La pulpe de ses doigts frôle involontairement les murs, les objets sur son passage pour y laisser ses empruntes souillées de révolte. Ses prunelles se braquent sur la nuque d'Elio quelques secondes de trop. Elle lève le voile de l'ignorance. Parce qu'elle a beau avoir suspendu leur joli vide dans les airs, en se subtilisant à lui la dernière fois, elle ne peut pas oublier leurs fondations déjà décimées. « Ils appellent ça la désobéissance civile » Elle complète, l'épiderme déjà électrisé à l'idée. Elle a les opales folles et sans fond, Kaja, ce soir, rien qu'à évoquer ce soulèvement. La chute du régime. Elle se fait exaltée en interne et menace d'imploser sous la pression. L'attitude un peu plus nerveuse. |
| | | Erkan Dickenson;
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| Sujet: Re: Elle pleut. Mar 26 Nov - 15:59 |
| À la lueur de l’obscur, Elio songe que ces accusations ne lui sont pas adressées. Il n’a pas de peine à donner à l’essai. Aussi, Kaja fait erreur car elle-même, dans la douce mesure des événements, n’a pas daigné essayer non plus. Elle a renoncé avant même de pouvoir récuser une tentative, mais il ne s’y attarde pas parce que la mesure, elle, était d’une justesse inégalable. Alors, il ne lui reprocherait pas de ne pas s’être jetée dans le vide. Malgré l’admonition enjointe par l’irakienne, le rejeton objecte « on dirait que c’est toi que l’idée inquiète davantage ; de te savoir capable de me chercher », une vérité qu’il réhabilite, atone. Il ne nie pas que, partout, il cherche son errance, la futilité terne de sa présence, comme il n’a pas nié non plus, l’autre jour au café, que si elle le souhaitait, il ne la chercherait plus. À son tour, ce mouvement d’épaules pour marquer son indifférence. Peu importe que tu admettes, je te vois. En ces lieux, elle fait le choix de rester, promet d’y demeurer le temps que le débit de son verre lui accorde. Et ce sourire éclair qu’elle déploie, ce nectar qu’il se permet de goûter en de rares occasions sans trop braver la limite. « Tu es au courant de ce qu’il se passe en Irak? », la ligne du front qui se plisse sous l’assertion subite, à chacune de leur rencontre, une enfant qui n’a de cesse de ressasser sa nation perdue, sa nation volée. Derrière lui, il l’entend gravir à pas feutrés les escaliers jusqu’à sa dépendance. Le faciès qui se tourne pour lui répondre et l’évidence inéluctable que la princesse tâche le décor. « Ils appellent ça la désobéissance civile » là, plus que les prémices d’une obsession qu’il décèle justement, il a l’attention captée de ce que pourrait bien lui servir son inconnue. Il se souvient qu’elle ne sait rien de ses manigances de l’ombre, que lui-même ne lui connait pas de révolte. Elio feint un intérêt mesuré, retenu, car là où la politique se mêle, une débâcle peut bien s’amorcer et les relations ne peuvent s’en trouver sans heurt. Précautionneusement, sa pensée déroge à l’instant, il ressasse ce qu’il sait des échauffourées qui embrasent Bagdad et le reste du pays, sa contribution aux informations déployées pour que le chaos s’irradie de toute part. Le gamin est sur un siège éjectable, il saisit la névrose dans les prunelles de son homologue, mais ne saurait la risquer au danger dans lequel il s’est immiscé. Il brouille les pistes de son monde sur écoute: « j’en ai vaguement entendu parler ». D’entre les placards, il sort deux verres qu’il dispose sur la table, qu’il remplit d’un vin à peine entamé, s’attable aux côtés de la jeune femme. Ses océans braquées dans le vide, il échappe quelques certitudes : « ce régime ne restera pas impuni, ils tomberont tous, coglioni* » sa voix tombe dans un murmure, bien trop conscient que sa rancoeur est celle de quelqu’un qui en sait davantage.
* enfoirés |
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| Sujet: Re: Elle pleut. Mar 26 Nov - 20:52 |
| Touché. Elle le regarde, sans le voir, ses traits se tordant en un air indéchiffrable. « Tu as raison » elle expulse, elle concède d'entre ses pulpeuses sans plus de cérémonie. Ça l'inquiète parce que cela ne lui ressemble pas. Sous son allure paisible en surface, elle s'alarme du moindre remous inattendu. Elio, si on ne s'arrête pas dessus, il peut être incolore/indolore sauf que l'enfant, fasciné, ne cesser d'appuyer sur l'aiguille dans l'attente de ce qu'il pourra se passer, pour essayer. Kaja ne peut s'empêcher de lui parler de l'Irak, de ses souvenirs de Najaf, surement parce qu'elle aimerait qu'il comprenne, lui plus qu'un autre. Le couperet tombe, elle aurait préféré être en dessous. « Tu as vaguement entendu parler de ça ? » Elle répète alors que ses opales se troublent d'un voile de déception face à sa mesure, sa prudence. Dans une autre réalité, elle aurait posé ses mains sur ses épaules pour le secouer, exiger de lui qu'il se réveille. Parce qu'elle, elle hurle mais personne ne l'entend. A la place, Kaja se rappelle façon mantra que ce n'est pas son combat. « Même la mort ne semble pas ébranler les Puissants » elle souffle alors que son sang bouillonne l'injustice. Le rouge vermeil colonise l'Irak, la tâche ne cesse de se répandre depuis des semaines. « J'espère que notre place Tahrir sera aussi forte que celle d'Egypte » énonce l'enfant, pensive ou rêveuse, en faisant référence aux révolutions de 2011 qui avaient le même but, mettre fin à la corruption et à un schéma dysfonctionnel des pouvoirs publics. Ses opales s'accrochent au verre devant elle, façon offrande, avant qu'une de ses mains n'ose s'en emparer. Kaja se concentre sur Elio, tentant de mettre ses pensées politiques en arrière plan du moment. Elle met en lumière le seul sujet de cette scène, pivotant sensiblement dans sa direction. « Qu'est ce qui te donne l'envie de te lever chaque matin ? » L'enfant lui demande, braquant ses opales inquisitrices sur son visage dans l'attente d'une réponse. Parce que la poupée se demande ce qui peut l'ébranler lui, l'éternel impassible. « Qu'est ce qui t'anime ? » réitère Kaja, obstinée, tâtant de la pulpe de ses doigts la surface lisse à la recherche de la moindre fissure qu'elle pourrait aggraver. Elle gratte, à mains nues. |
| | | Erkan Dickenson;
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| Sujet: Re: Elle pleut. Mar 26 Nov - 22:14 |
| Il hume la déception de la môme quelque peu soulagé de la voir trépigner sur sa réponse. Il n’en doutait pas, pleinement conscient que l’ignorance est un mime qu’il est aisé d’accomplir. L’Irak, pays de l’or noir, en était à présent le berceau, de cette ignorance, de ceux qui portent allègrement leurs oeillères pour ne voir qu’un feu d’artifice dans les flammes qui se propagent de part et d’autre du pays. Ce voeux solennel des cols d’or qui choisissent de ne pas voir, choisissent de se blottir aux confins de l’ignorance. Dans sa cuisine, dans une autre parcelle du monde qui ne s’enflamme pas encore, il écoute son fiel rendu amer, les portions d’élucubrations qu’elle s’adresse à elle-même. Ailleurs. Peut-être là-bas parmi le feu. Il l’écoute, observe son visage, perdue à l’intérieur d’elle-même. Un recul sur ce portrait de révolte, d’indignation, ce portrait courroucé duquel on entrevoit l’ombre du soldat. Il commence à comprendre, alignant les fragments de leurs rencontres, les débris de sa pensée ; poupée est ici inerte, frappée de mélancolie, d’une frustration dévorante, parce qu’elle n’est pas là où elle devrait être. « Pourquoi tu as quitté l’Irak? », car ce n’est ni la peur des retombées, ni le faisceau de balles, ni la marre pourpre dans laquelle tu pourrais gésir. Kaja assène le premier coup, impose la suspicion. L’italien se demande si tout à coup son armure d’opacité s’est désagrégée, en même temps qu’il avait manifesté sa rancoeur. Si désormais, Kaja pouvait voir au travers et s’évertuait à le faire admettre. À la paranoïa il est aisé aussi de succomber, mais Elio était averti. La minute qui s’écoule, cet échange qu’il soutient. Un peu plus près, n’est-ce pas? « L’univers entier est flingué, et Kaja, y a pas un putain de levé du jour où j’me dis pas que j’serai celui à le réduire au néant » mots dégueulés, maxime violente déposée avec une étrange accalmie, une étrange plénitude au centre de la table. Il boit le liquide rougeâtre, petit apôtre qui boit le vermeil du cosmos qu’il menace ouvertement. Il boit, les iris incandescentes fixées à celles de l’épineuse, jauge la cendre qui crépite encore. « C’est ça qui me tient éveillé : le désir de tout foutre en l’air, l’état des choses qui riment à rien. On naît, on se leurre, puis on meurt. Au milieu, un ramassis de connerie ». Des idées noires balancées à la colombe, encore cette étrange plénitude; ce sont des nuits d’insomnie à calculer le véritable enjeu de l’existence qu’il exulte d’entre ses lèvres. Le vide n’existe pas seulement qu’entre toi et moi, il est partout. |
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| Sujet: Re: Elle pleut. Mar 26 Nov - 23:27 |
| Kaja accuse la question, trie ses pensées erratiques qui s'entrechoquent sous la boîte crânienne. Sa poitrine se soulève un instant. « J'ai quitté l'Irak par amour » elle souffle, elle souffre. Parce qu'elle se sentait osciller entre la haine et le reste, pour ses proches, alors elle a choisi de garder des souvenirs et de s'éloigner un moment. Y a toujours eu une histoire d'émotions troublées derrière ses décisions. « Je me sentais noyée par mes responsabilités » Kaja complète. Parce que le nom Massoum/Masum n'est pas lambda en Irak, issue d'une famille politique et politisée, Kaja ne s'entendait plus penser là bas. Ceux qui ont l'habitude des raccourcis faciles seraient ravis de lui apposer la jolie étiquette "crise identitaire" sur son front. Là-bas, elle sera toujours la petite fille de X, l'enfant qui s'est occupé d'une mère qui arrêtait ses anxiolytiques comme s'il s'agit d'un fumeux traitement homéopathique, la copine infirmière de Y. Elle ne voulait plus se définir ainsi, sans pour autant tout rejeter, ingrate, alors elle s'est barrée, juste pour respirer. Kaja s'est éloignée de toutes ses variables, histoire de voir ce qu'il pouvait rester d'elle après. Pas grand chose. « Tout ce que je voyais là bas était trop coloré » l'enfant expire, dans une intensité infinie qui lui faisait tourner la tête. Ses opales toisent l'italien. Elio, elle le pousse ce soir, sans trop savoir quand elle trouvera le point de rupture. Ce n'est pas forcément l'idée du siècle, mais elle s'en contente. L'irakienne se fait soudainement attentive, ses opales fébriles s'accrochent aux siennes. « Et ça te suffit ? » elle éclate, les prunelles trop brillantes. Sauf qu'il n'a pas fini d'assener. Les sourcils de la poupée se froisse sous ses maux, une légère amertume au bord des lèvres. C'est ce genre d'affirmation qui lui donne envie d'y retourner là bas, se perdre. « Y a aucune once d'espoir dans ton chaos » relève l'enfant, vaguement courroucé par cette description sans nuance de l'univers.« Tu comptes faire quoi ? » Kaja relance en redressant la tête, parce qu'elle n'entend que de l'inaction qui lui retourne les entrailles. « Regarder ?» elle s'expulse douloureusement d'entre ses pulpeuses déjà écorchées rien qu'à l'idée. |
| | | Erkan Dickenson;
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boran kuzum. kiddsressources. 345 981 31
| Sujet: Re: Elle pleut. Mer 27 Nov - 21:03 |
| L’allure désinvolte se fracasse, s’ébrèche à mesure qu’il l’oblige à instituer une mémoire fugitive dans ce présent qui ne l’est pas. Il ne se laisse pas désarçonné par ces nouveaux élans que la princesse d’Irak laisse entrevoir, car malgré les palpitations qui semblent agiter légèrement ses aspects, elle conserve son air grave, glacial. Elio comprend que les couleurs qu’elle évoque sont celles des émotions, des remous qui ont remué cette vie, lointaine. Qu’ici dans le Queens, elle a réchappé à ces démons qu’elle s’est façonnée, qu’ici dans le Queens, ni émotions, ni remous, seule la tranquillité d’une existence fuyante. « Et maintenant, que dis-tu de ta vie ici? », il entonne un léger rire, emprunt de déception, du sarcasme, reprend le cynisme abandonné : « comment t’as pu croire un jour que t’étais faite pour cet état de pesanteur? Cet ennui paisible de la monotonie? ». La réplique est acérée, tranchante. « J’avais raison, l’autre jour au café, il n’y a rien pour toi ici » il rehausse ses opales sur les traits taciturnes de l’enfant. Il manque de l’ébranler. Alors qu’est-ce que tu fous encore là, Kaja? « Mais t’as fait le choix de te terrer dans un confort qui n’te ressemble pas, en restant vaguement spectatrice de l’incendie qui se propage, et j’commence à croire que c’est parce que, là encore, t’as renoncé », là où la politique se mêle, la débâcle s’est amorcée. Le calme de sa tonalité irrigue ses propos d’une condescendance fortuite. Cette conversation révélait les facettes autrefois invisibles de son inconnue, et bien destiné à lui soutirer davantage que le feu de sa révolte, il tentait ici dans le Queens d’instiller un semblant de couleurs au fond de ce coeur placide. Un sourire, encore, qui peint son visage alors qu’elle a l’arrogance sans équivoque, qu’il sent ses globes lumineuses qui le sondent. Il est capable de sentir cette houle de supputations qui font frétiller ses entrailles. « Ce que je fais déjà. Je crée des implosions çà et là, et j’attends que l’âtre se disperse » il ignore quelque instant le regard qu’elle lui porte, car il devine que sa réponse ne la satisfait pas. De gauche à droite, il balance sa tête, aride « ne parlons plus de ça ». Il est formel, froid comme la glace. C’est un ordre, car c'est là ce qu'il faut pour égarer la jeune femme, brouiller les pistes. |
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| Sujet: Re: Elle pleut. |
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