-hot- somewhere out there. (ismaël)

Elle savait pas vraiment pourquoi elle avait accepté de le suivre à l'autre bout du monde. Lilith, sur un coup de tête, celle-ci à moitié plongée dans la cocaïne et ses effets, elle s'était pointée à l'aéroport pour attendre Ismaël afin qu'ils ne prennent tous les deux leur envol pour une destination inconnue. Elle avait jamais eu peur de lui, ni de personne, appréciant sentir l'adrénaline d'une décision prise de manière hâtive pour faire fleurir son palpitant fané dans ses battements anarchiques. Elle avait sourit Lilith en le voyant arriver, tentée de se jeter dans ses bras pour l'embrasser et l'envie de jouer sur la défensive pour simplement faire trembler cette tension déphasée, Ismaël s'en amusant, Lilith sombrant un peu plus pour sa beauté affligeante. La vue de leur suite était magnifique, donnant sur un lagon dont la couleur rappelait celui qui s'agitait dans les yeux d'Ismaël quand il la regardait, et Lilith, elle aimait ce qu'ils étaient loin des autres, dans une intimité qui mettait en suspension tous ses maux, qui les cloisonnait dans une complicité qui s'étendait, qui la perturbait, parce que la haine la quittait, laissant place à tout un autre panel de sentiments qui l'éloignait de sa détresse habituelle. Tous deux s'évertuaient à s'adonner à leur drogue, à l'alcool, à leur unité qui les perdrait surement quelque part dans ce jeu où elle n'y voyait plus vraiment clair et son prénom qu'elle aimait faire danser sur ses lèvres, sa peau qu'elle désirait quand elle s'endormait tous les soirs dans son lit bien trop grand, trop froid pour réchauffer son être qui brûlait pour le moindre de ses sourires. Elle aurait vraiment voulu continuer à le haïr, Lilith. Mais elle avait failli. La nuit venait de tomber sur l’île, et la nymphe sortit de la douche, ses cheveux de jais tombant sur ses courbes qu'elle avait habillé de manière sensuelle, tout ça pour lui, pour le rendre fou, trépassant la porte communicante pour se planter devant son physique attrayant.

- Tu me trouves comment pour ce soir ? J'suis à ta hauteur en guise de fausse petite amie ?

Un léger sourire sur le coin des lippes, Lilith, au fond, elle aimait faire comme s'ils pouvaient s'appartenir, juste pour tenir à distance toutes les autres qui voulaient s'accaparer le jeune homme.

L’Indonésie n’avait jamais été aussi belle que depuis qu’il se perdait dans le regard de Lilith.
Il avait acheté les billets sur une impulsion.
Sans réfléchir, sans savoir si elle dirait oui, ou non.
Il était comme ça Ismaël, imprévisible dans chacun de ses comportements, Changeant d’émotions d’une minute à l’autre, se laissant dévorer par tout ce qu’il pouvait ressentir. Il était là son problème, il vivait sa vie beaucoup trop fort. C’est ce qui l’avait envoyé en prison, c’est ce qui le tuerait sans le moindre doute.
Il mentirait, s’il disait que ce n’était pas pour se nourrir de son sourire qu’il l’avait emmené ici. Réservant une suite indécente, dans un hôtel de luxe accroché à l’océan. Ici, en seulement deux jours, ils avaient continué leur démesure habituelle. S’empoisonnant les veines, se mêlant à un nouveau monde de débauche. Ce qui changeait, c’était les regards qu’ils s’échangeaient, leurs sourires, et l’animosité certaine qui était restée aux portes de New-York. S’ils avaient échangé des baisers, cela n’avait été que pour faire fuir les potentiels perturbateurs d’un moment qu’ils voulaient garder précieusement à eux.
Tu me trouves comment pour ce soir ? J'suis à ta hauteur en guise de fausse petite amie ?
En train de boutonner les derniers boutons de sa chemise, le blond leva les yeux vers la femme, esquissant un sourire beaucoup trop doux pour lui appartenir. A vrai dire, il n’y voyait plus clair, se perdait dans la toile d’araignée qu’était leur jeu. Se retrouvait accrocher, bien trop souvent trop près d’elle. Il l’observa de haut en bas, appréciant son goût certains pour les tenues qu’elle choisissait.
T’as pris toute ta garde de robe, c’est pas possible.
Qu’il jeta en ricanant, se moquant de lui qui n’avait emporté que le strict de nécessaire. C’est-à-dire, pas grand-chose. En la voyant là, plantée devant lui, les plans qu’il avait imaginé pour la soirée étaient en train de changer. Il ne voulait plus la partager. Pas ce soir. Il s’approcha d’elle, saisissant son poignet pour que leurs corps se frôlent. Malgré toute la volonté du monde, il ne parvenait pas à rester loin d’elle plus d’une bonne heure. Passant son temps à chercher un contact qu’elle ne lui refusait que rarement.
On peut remettre la soirée à demain, non ?
Il souffla contre ses lèvres, avant de se détacher pour ne pas perdre le Nord qu’il venait à peine de retrouver après une douche froide essentielle. Il se jeta ensuite sur le lit, attrapa la télécommande de la télé, qu’il alluma pour un fond sonore qui ne l’interesserait pas. Puis c’est le menu du service en chambre qui attira son attention,
C’est un jeu débile qu’on faisait avec mon frère et ma sœur. On commandait tout ce qu’on pensait être capable de manger -c’est-à-dire toute la carte, généralement. il lui souriait à Lilith, avec son regard de gosse, Et celui qui n’arrivait plus à avaler quoi que ce soit en premier, avait un gage. sourcil arqué, il la défiait, J’suis sûr que t’y a jamais joué.

Elle le laissait entrer dans son univers, et sans même s'en rendre compte, Ismaël, il se frayait un chemin au travers de ses ténèbres pour y réfugier les parcelles de son être, Lilith se dévoilant sous un autre visage, plus agréable, plus joviale, l'insouciance perlant dans ses iris aux couleurs délavées par sa déchéance, Lilith qui retrouvait un semblant de vie dans leur escapade interdite, dans ce trou au milieu de l'espace temps qui la rendait libre, sa propre conscience se délestant de toute cette haine qui avait bien fini par pourrir son âme putride. Il n'y avait jamais eu que ça dans son être rongé par la peur, par la rancoeur invisible mais audible dans son ton qui se voulait toujours acerbe et agressif. Lilith, elle avait presque oublié qu'elle était plus que cette fille aux plaies invisibles, cette fille qui s'attachait plus à mourir qu'à vivre, et avec Ismaël, c'était comme si elle se redécouvrait, appréhendant les bordures de sa personnalité morcelée en évitant cette fois de s'y écorcher, appréciant ces sensations nouvelles qui la tenaient à distance de sa peine. Elle rit à sa remarque, roulant des yeux, l'amusement brillant dans leur creux.

- J'ai fait en sorte de prendre assez de robes pour attirer ton regard.

Parce qu'elle avait remarqué qu'elle l'attendait constamment, son attention, de manière malsaine, de manière passionnelle, elle qui aimait être au centre de son champ de vision pour occulter tous les autres êtres, pour devenir la seule perle qui brillait. Elle frémit en sentant la chaleur de sa paume autour de son poignet, Lilith tentait de canaliser les images abusives qui lui traversaient la tête, parce que si elle s'écoutait, elle passerait son temps contre lui, contre sa chair qu'elle se refusait, se délectant de ce fruit défendu qu'elle aurait pu dévorer sans retenue.

- Si tu veux. Ca me va de voir que toi, ce soir.

Ses yeux détaillaient ses traits, la respiration suffoquant presque contre ses lèvres qui dansaient trop près des siennes dans cette tension qui l'électrisait. Elle le laissa s'échapper jusqu'au lit, écoutant ses mots avec un sourire joueur avant de s'approcher de lui, s'asseyant à ses côtés pour jeter un coup d'oeil à la carte, piquée à vif dans sa prise d'initiative qui ressemblait à un défi.

- Y'a que des trucs que je pourrais passer des heures à manger sur la carte là. J'veux bien qu'on y joue. Juste histoire de savoir si tu tenais vraiment la route avec ton frère et ta soeur.

Un sourire au coin des lippes, elle réfléchissait aux gages qu'ils pouvaient s'offrir.

- Tous les coups sont permis niveau gages on est d'accord ? On a peur de rien toi et moi.

Elle savait qu'elle allait peut-être perdre. Et elle se rendait compte que tout ce qu'elle voulait au fond, c'était de ne pas perdre ce qu'ils avaient, ces petites choses dénuées de noms qui portaient pourtant toute sa dévotion, Lilith n'ayant envie de perdre que pour le retrouver dans leur jeu qui animaient ses émotions.

- J'te laisse tout commander bébé.

Elle lui envoya un clin d'oeil, son regard se voulant toujours séducteur.

C’est comme si Lilith apaisait le fauve.
Le lion se calmait sous son regard et ne montrait plus le crocs, quémandant toujours plus de caresses.
Il se laissait aller à une facette de sa personnalité qu’il connaissait très mal, se perdrait surement dans des gestes et des paroles maladroites. Il n’avait pas été conçu pour ça Ismaël, au fond de lui sommeillait un monstre sur lequel il n’avait aucun contrôle.
Un jour, il briserait tout.
Elle, lui, les autres.
Il dévorerait la moindre trace de vis sur son passage, se réjouirait du carnage qu’il laisserait derrière lui. Mais aujourd’hui, ici, maintenant, il n’y avait qu’eux.  Eux et une complicité qu’il se surprenait à apprécier. Une machine se mettait en marche dans le myocarde, un rythme qui ferait des dégâts monumentaux. Il le sait, qu’un jour il voudrait s’arracher le cœur plutôt que de se savoir lié à quiconque, il prend le risque. Malgré la haine en dents de scie, malgré leurs dernières altercations, malgré tous les maux qu’ils ont échangés. Il prend le risque. Et pour la première fois depuis longtemps, s’il sourit c’est parce qu’il se sent bien.
Elle vient s’asseoir à côté de lui, elle accepte son invitation à rester enfermés dans cette chambre. A jouer à ce jeu débile, à se découvrir l’un l’autre.
Evidemment que je tenais la route, qu’est-ce que tu crois, invaincu je dirai même.
Qu’il ricane en attrapant son regard,
Tous les coups sont permis niveau gages on est d'accord ? On a peur de rien toi et moi.
Il sourit de plus belle. Ils n’ont peur de rien, la preuve en image. Ils sont l’inconscience et la démesure même. Prêt à relever tout les défis, même le plus dur, celui de passer du temps l’un avec l’autre sans céder aux pulsions qui les animent.
Tout ce que tu veux, oui, j’ai peur de rien.
Il attrape le téléphone de la chambre, appelle-le room service en se laissant tomber contre les oreillers moelleux. Il commande tout, ou presque tout, s’assure qu’au moins deux voire trois bouteilles de champagnes seront emmenées avec les victuailles. Puis il jette le combiné un peu plus loin dans le lit. Une nouvelle fois, il réclame son attention, accroche sa main pour qu’elle le rejoigne contre les draps. Ses yeux bleus la sondent de longues secondes, le bien être est présent, mais les pensées maladives le rattrapent toujours. Trop vite. Il prononce des mots, les regrettent presque aussitôt parce que dans le fond, il s’en cogne, non ?
T’as couché avec, lui … ?
Et par lui, il parle bien de son « pote ».

Lilith, comme une louve affamée, son regard le dévorait comme le ferait des crocs acérés, happée par son charme qui l'avait depuis le départ subjugué bien qu'elle avait tout fait pour l'oublier, l'effacer de sa mémoire arrachée par toute la drogue qu'elle ne faisait que de s'envoyer, afin de faire de ses pensées des cendres provenant de son âme consumée. Ismaël, c'était un regret qu'elle se prenait à apprécier, c'était son sourire qui la rendait survoltée, au beau milieu de ces paysages féeriques qui la faisaient rêver. Il avait réussi à la combler, lui, l'homme qu'elle avait tenté de rejeter, de détester, de piquer jusqu'à le faire saigner. C'était en réalité ses propres sentiments qu'elle avait essayé de repousser, mais il était toujours là quelque part Ismaël, mettant à mal son faux désir de tourner la page. Il s'incrustait toujours dans ses pores, mettant à défaut ses remords qui n'existaient plus, quand elle se perdait dans le lagon de ses saphirs bruts. Lilith, elle appréciait ses efforts, elle s'attendrissait devant ce corps qui ne l'avait toujours pas touché malgré leur proximité, malgré le désir qui ne faisait que de s'embraser, lui qu'elle aimait trop embrasser.

- Peut être que toi aussi t'auras le droit à une première fois avec moi. Celle où tu vas perdre.

Elle arqua un sourcil malicieux, le jeu transparaissant sur ses traits allégés dans la bonne humeur, Lilith qui avait cette impression de redevenir cette gosse frivole et insouciante, l'enfance qu'on lui avait retiré cruellement. Elle voulait s'oublier avec lui, juste une fois, juste le temps d'une escapade qu'elle aurait fait durer une éternité si ça ne tenait qu'à elle, parce qu'ici elle était reine d'un monde où il n'y avait plus de peine, où elle devenait presque sienne. Elle se laissa attirer contre lui après qu'il ait appelé le room service, Lilith, elle devait bien trop tactile avec Ismaël, sa tête se plaçant sur son épaule tandis que sa main caressait doucement son torse, son trajet s'arrêtant net à ses mots. Elle soupira, accablée par la vérité qu'elle n'allait pas lui cacher.

- Ouais. J'ai couché avec lui.

Le palpitant à l'agonie sous la peur de le voir partir, elle se redressa vivement pour capter ses opales, les siennes se voulant percutante pour qu'il absorbe ses paroles.

- T'as payé ce soir là, pour que je te prouve que t'avais tort de jouer avec moi. Mais... Tu sais c'est quoi le pire dans tout ça ? Des mecs je m'en tape pleins. Mais y'avait que toi que je voyais.

Sa main chercha timidement la sienne, ses doigts valsant doucement sur les siens.

Il pourrait se laisser dévorer par son regard Ismaël.
Accepter qu’elle lise en lui comme dans un livre ouvert. Ouvrant son thorax pour fouiller au plus profond de tes entrailles, qu’elle en sorte tout ses organes, les inspecte un par un, jusqu’à tomber sur cette noirceur qui grandit au fond de lui. Il serait sans doute le plus heureux des hommes, si c’était elle qui le disséquait. Peut-être qu’il lui offrirait son dernier soupir.
Il tentait, lui aussi, de lire en elle.
Appréhendait chacune de ses mimiques qu’il n’avait jamais vu auparavant. Dans cette bulle qu’ils avaient construit de toutes pièces, elle n’était plus la même. Il appréciait ça, savourant sans retenue chacun des instants qu’ils passaient ensembles. Parce que dans le fond, il se disait, que ça ne pourrait pas durer. Que le retour à la réalité serait si féroce que leur ego respectif prendrait le dessus pour renier cette alchimie qui existait entre eux.
Ouais. J'ai couché avec lui.
Elle se redresse Lilith, cherche le regard d’Ismaël qui se fait fuyant.
T'as payé ce soir là, pour que je te prouve que t'avais tort de jouer avec moi. Mais... Tu sais c'est quoi le pire dans tout ça ? Des mecs je m'en tape pleins. Mais y'avait que toi que je voyais.
C’est son myocarde qui s’affole, ses sourcils qui se froncent alors que sa main vient trouver la sienne. Ce n’est pas un geste tendre qu’il mériterait, mais bien un coup de poing en pleine gueule. Pourtant, il enferma ses doigts dans les siens, dans une fermeté qu’il voulait rassurante. Parce que ce qu’il voyait dans les yeux de Lilith, c’était une peur qu’elle ne lui avait pas encore montré. Dans l’instant, il se sentait con Ismaël. La gorge nouée et les battements de son cœur survoltés.
Putain,
Il fermait les yeux maintenant, passant sa main libre contre son visage en s’enfonçant un peu plus dans le confort des oreillers.
J’suis qu’un connard, putain. il souffle ses mots, son regard planté dans le siens, Ca m’a rendu dingue, et j’ai juste fait ce que j’savais faire le mieux, sortir mon fric pour des conneries. il ricanait nerveusement le blond, mal à l’aise tout d’un coup, J’voulais pas, que tu couches avec ce mec. Comme j’voulais pas coucher avec ta collègue, d’ailleurs j’ai même pas réussis... comme s’il voulait détendre l’atmosphère maladroitement, en parlant de son incapacité à rester vigoureux assez longtemps. Je vois que toi, enfin, j’veux dire, j’y arrive pas, j’y arrive plus. Depuis un mois.
Il détournait les yeux une nouvelle fois, ses doigts toujours entremêlés aux siens. Depuis un mois, il ne désirait qu’elle. Un désir qui le submergeait, lui nouait le bide, lui brûler les reins. Comme si elle lui avait mis des putains d’œillères. C’est son épiderme à elle qu’il rêvait de goûter, c’est entre ses cuisses qu’il voulait perdre la raison. Qu’ils s’appartiennent, jusqu’aux aurores. Il se contentait de la saveur de ses lèvres depuis deux jours, se laissait lentement consumer par le désir qui les enveloppait.

Il avait réinvité les étoiles de son ciel noir, les faisant briller dans son désespoir qui disparaissait dans son regard, Lilith, elle perdait le Nord, sa boussole interne s'affolant à chaque contact qu'elle pouvait avoir avec son corps. C'était comme s'il avait brisé son masque d'amertume avec la douceur de ses paroles, avec la beauté de ses sourires auquel les siens lui répondaient, ses rires joignant trop souvent ceux d'Ismaël dans la même symphonie, comme si leur complicité avait éclot au milieu du vide, au milieu d'une terre malade qui ne donnait que des fruits pourris, et là, Lilith, elle avait l'impression de goûter à la meilleure gourmandise, cette ambiance légère et séductrice qui les conduisait tout droit vers leur précipice. Et Lilith, elle plongeait, elle sombrait pour lui.

Elle avait pas eu envie de s'envoyer en l'air avec son pote, d'ailleurs, elle avait tout fait pour accélérer leur échange qui s'était voulu bestial, loin de toute tendresse sous le coup des nerfs, ses pensées allant et venant vers Ismaël, l'être qu'elle aurait voulu avoir contre elle, la haine se chargeant de détruire le moindre bon sentiments qu'il aurait pu représenter à ce moment, à part son attirance, incisive, trop vive pour être altérer. Le regard de Lilith se chargea d'une certaine vulnérabilité, ses pupilles s'ouvrant pour briller dans la peur de sa perte, cette crainte délétère qu'elle n'avait jamais voulu éprouver, et pourtant, elle ne pouvait pas s'empêcher, sa peau caressant la sienne tendrement, sa peau cherchant un refuge chaleureux où étendre ses attentes déchues, le palpitant battant tout pleins de mots qui se confrontaient à contre courant sous l'effet des siens qui l'enveloppaient dans leur étau, ses yeux s'intéressant à leurs mains jointes.

- Ton pote est pas un bon coup tu sais. Ca a du durer même pas deux minutes.

Elle aimait savoir qu'il n'avait pas réussi avec sa collègue, de manière purement égoïste, parce qu'elle peinait elle aussi à s'envoyer dans l'extase quand son visage défilait dans son esprit.

- Faut croire que t'es le genre de connard qui m'attire un peu trop. Et quand on me touche, j'imagine très souvent que c'est toi...

Elle murmura, ses yeux détaillant ses traits, ses doigts venant dessiner le contour de ses lèvres qu'elle jugeait parfaites, juste au moment où quelqu'un toqua à leur porte, les invitant à rompre cet instant qu'elle aurait fait durer jusqu'à ancrer ses paroles sur son corps.

Le roi des connards et la reine des damnées.
Ismaël s’imprégnait du moment présent, laissait pour la première fois de sa vie des émotions bienveillantes l’envelopper. C’était un cadre parfait pour qu’ils tombent sous le charme l’un de l’autre, c’était un piège qui se refermait lentement sur eux. Un précipice duquel ils se rapprochaient sans éprouver la moindre crainte.
Deux minutes de trop, qu’il souffla en levant les yeux au ciel, deux minutes de trop par sa faute. Il prenait l’entière responsabilité de leur acte. C’était à son ego qu’il avait fait le plus de mal en agissant de la sorte, à son cœur qu’il infligeait une souffrance nouvelle. Lilith avait les mots rassurants, les caresses beaucoup trop douces. Elle redessinait ses lèvres de ses doigts, et tout ce qu’il désirait à l’instant c’était attraper les siennes pour un baiser enflammé. Il avait d’ailleurs rapproché son corps du siens, prêt à rompre la distance qui devenait douloureuse. Moment propice pour qu’on leur livre tout ce qu’il avait commandé. C’est contre sa peau qu’il grogna, Sauvé par le gong, hein.
Quelques minutes plus tard, la bouffe était déjà éparpillée aux quatre coins du lit. Des mets plus délicieux les uns que les autres. Lui commençât par tout ce qui était sucré, retrouvant dans le défi qu’il avait lancé des moments de son enfance oubliées. C’est qu’ils en avaient passé du temps seuls dans les chambres d’hôtels les triplets, trimballer d’un pays à l’autre au grès des envies indécentes de leurs parents. Livrés à eux-mêmes, commençant dès leurs plus jeunes âges à se livrer à des excès qui n’auraient pas dû appartenir à des gosses.
Il laissait tomber les barrières avec Lilith, ne se rendant pas compte qu’il la faisait pénétrer dans une intimité que seule sa famille connaissait. Un Ismaël beaucoup trop souriant, beaucoup trop insouciant, un peu trop joueur. Parce qu’il la cherchait sans cesse, entre deux bouchées, ou entre deux gorgées de champagne. Se ruant sur ses lèvres ou dans son cou, parce qu’il n’avait jamais su jouer fairplay.
A présent, il était allongé sur le dos, sa chemise tâchée, une cigarette au bord des lèvres. Dans son sang flottait les molécules de cocaïne qu’il s’était enfilé plus tôt. Il avait le regard qui ne cessait de s’accrocher à la silhouette de la brune, il malmenait sa lèvre inférieure tant des pensées indécentes lui vrillaient le crâne.
Comment tu fais pour ingurgiter tout ça ? … tu dois faire quoi, cinquante kilos, et t’es un gouffre sans fond. il tira sur sa clope, laissant la fumée néfaste s’échapper par son nez, Je crois que t’avais raison, c’est peut-être la première fois que je déclare forfait. silence, J’espère que t’as de bonnes idées de gages.

Bercée dans les flammes d'une passion réchauffée par son âme, Lilith, elle pensait plus à mal, elle avait juste les syllabes de son prénom qui dansaient dans les tréfonds de son crâne, annihilant la moindre haine qu'elle avait pu ressentir à son égard, consciente que cette bulle perdue dans le temps éclaterait en rentrant, condamnant ce rêve à prendre fin de la même manière que sa naissance : soudainement. Le retour à la réalité semblait déjà trop douloureux pour qu'elle n'y pense, préférant éteindre son appréhension dans la tendresse de sa paume qui cherchait la sienne, comme dans un besoin constant de l'avoir près d'elle. C'était mal. Elle le savait, elle le sentait, lui, le démon qui s'infiltrait déjà trop loin dans sa tête, consciente qu'il avait la capacité de détruire tous ses mécanismes défensifs si elle continuait à le laisser caresser ses plaies à découvert. Elle acquiesça, Lilith, prenant conscience quand on vint les interrompre qu'elle était déjà allée au delà de ses remparts, et pourtant, elle comprenait son air, sa colère quand il repensait à ce qu'il avait fait en payant le plaisir de son pote qu'elle n'avait que pu satisfaire parce qu'elle travaillait pour ça, parce qu'elle avait voulu lui faire aussi mal qu'il avait pu être détestable. Elle ne lui en voulait pas, ou plutôt plus, passant à autre chose dans ses bras qui maintenait son être effiloché en place.

Elle avala la nourriture qui s'éparpilla sous ses yeux joueurs, prenant son temps pour être capable d'en manger le plus possible, son regard valsant souvent vers son nouvel acolyte qui commençait à peiner, rigolant à son air qui se teintait parfois d'écoeurement, Lilith ayant choisi de miser sur le salé pour mieux tenir le rythme, son regard se teintant de cette lueur espiègle en acceptant le moindre de ses baisers qui venaient se loger sur sa peau, incapable de lui résister, happée par son charme qui la rendait faible, tentant de garder le cap pour ne pas se déconcentrer jusqu'à ce qu'elle le regarde abandonner. Elle vint s'allonger à ses côtés, le regard se perdant dans la plafond immense qui s'ouvrait à eux, ses mains retirant quelques miettes sur sa robe au passage avant de tourner la tête pour retrouver ses yeux.

- J'ai crevé de faim toute ma vie. C'est ça mon secret.

Elle rit légèrement, consciente que ce n'était pas tout à fait faux, sa mère qui n'avait assez d'argent que pour son remontant, son héroïne. Elle vint s'accaparer sa cigarette en tirant une latte dessus, réfléchissant à son gage.

- J'vais diviser le gage en deux temps.

Elle lui rendit sa cigarette, se plaçant sur le ventre pour mieux laisser son regard se confondre dans ses prunelles qu'elle admirait.

- Première partie du gage : embrasse-moi.

Elle s'approcha doucement de ses lèvres, les tentant de manière sensuelle.

- Deuxième partie du gage : déshabille moi. Fais moi oublier tous les autres.

Parce qu'elle voulait que son épiderme se fonde en elle, parce qu'elle voulait occulter toutes les autres empreintes pour simplement se vêtir de son ADN sur sa chair.

Clope subtilisée, il n’avait d’yeux que pour elle. Il avait mis un voile sur toutes les pensées qui émergeaient au creux de son esprit. Toutes ces alarmes qui s’étaient mis en route à l’instant même où elle avait franchi la porte de sa fragilité. Il ne les écoutait plus Ismaël, faisait la sourde oreille et n’attendait qu’une chose : qu’ils oublient le monde ensemble, qu’ils fassent taire leurs maux dans des échanges langoureux.
Pour son plus grand plaisir, il avait perdu le blond. L’avait-il fait exprès ? Inconsciemment peut-être, lui qui était un ogre, abandonné la bataille avec une bonne volonté qui aurait pu être louche. Le regard d’un enfant, il attendait qu’elle annonce la douce sentence, il était déjà fébrile quand sur le ventre et féline elle s’avançait jusqu’à lui. Il écoutait mais n’entendait pas grand-chose, hypnotisé par le brun d’ses yeux.
C’est un gage, ça … ?
Qu’il soufflait contre ses lippes, avant d’abandonner sa cigarette dans le cendrier posé sur la table basse. Sa main passa avec délicatesse dans la chevelure de la brune, avant qu’ils ne scellent leurs lèvres jusqu’à en perdre son souffle. Sa langue aguichant la sienne, ses mains trouvant bien vite son dos, s’attaquant à la fermeture de sa robe. Il s’était retenu, avait foutu un coup de pieds à ses pulsions et Lilith les ravivaient en une fraction de secondes. Il lui retira sa robe, sans mal, laissant ses pulpeuses accaparer son épiderme. Redécouvrant la douceur de sa peau, de sa gorge à sa poitrine, jusqu’à son ventre parfait. Il se redressa pour pouvoir admirer la pureté de son corps, sous sa chemise son palpitant cognait avec force, et il se débarrassait du tissu qu’il trouvait encombrant. Son être entier, ne réclamait que le sien, c’est avec hâte qu’il fit valser son pantalon, le sous-vêtement de la jeune femme ainsi que le sien. C’est le corps à corps qu’il recherchait, mais c’est le visage entre ses cuisses qu’il terminait sa course. Ses doigts agrippaient avec ferveur à ses cuisses alors qu’il lui offrait des caresses brûlantes, animant son propre désir. Il aurait pu la prendre, là tout de suite. Mais les flammes qui dansaient entre ses reins voulaient laisser leurs traces. La marquer au fer rouge comme il avait pu le faire il y a dix ans. Lui faire perdre les pédales comme elle lui faisait perdre la raison. Il voulait savourer l’instant Ismaël, de peur que toute cette attente ne l’ait transformé en un ado à peine pubère incapable de se retenir.
Dans ses gestes, il lui offrait un morceau de âme, le moins noirci, le plus intact.