Young and Beautiful [Julius & Ada]

- T'es con, Julius.

C'est ce qu'elle a dit voix haute en bas de son immeuble. Ce n'était pas agressif loin de là, plutôt taquin même si la fatigue se faisait ressentir à travers une pointe d'impatience. Il faut vraiment qu'elle le prie pour qu'il vienne partager son lit, une belle plante comme elle, jeune et un peu trop sexy entre sa tenue et les tonalités rauques de sa voix ? Une belle plante présentement dans son pire état possible, ok... L'hésitation se tient.

Elle le regarde remettre une mèche de cheveux, encore, finir sa course en redessinant sa mâchoire. Calcul de personne ivre : ça doit faire au moins la... trente sixième fois qu'il fait ça. C'est louche. Elle hausse les épaules, le contente d'un " si tu veux " puis tape le code qui ouvre la porte du bas. Elle se plante une première fois, puis une deuxième histoire de laisser un peu de suspens et de le laisser se dire qu'elle s'est plantée de porte - involontairement bien sûr. Mais jamais deux sans trois et c'est avec un sourire satisfait qu'elle tape le bon code, simplement en se concentrant un peu mieux sur la destination de ses doigts. La porte cochère s'ouvre, elle le tire derrière elle, enlève ses chaussures, puis l'emmène dans les escaliers. Un étage, puis un autre, puis deux autres. Il y a bien un ascenseur mais l'instinct de survie d'une personne bourrée la conduit "toujours" vers la voie la plus sûre. L'éthanol grimpe avec eux, loin d'être sur la pente descendante.

Sur le perron du quatrième étage elle inspecte chaque porte avec suspicion avant de faire subitement demi-tour. " Sans commentaire. " Et elle éclate de rire avant de redescendre péniblement les marches, tout en lui faisant signe de se taire avec son doigt sur la bouche alors que c'est elle qui fait un boucan pas possible. Cette fois ils sont devant la bonne porte, elle a juste à venir chercher ses clefs dans son sac pour que la porte s'ouvre devant eux.

D'un coup, l'attitude de la brunette a changé, depuis qu'elle a passé le pas de la porte de l'immeuble très exactement. L'exaltation d'être rentrée ? Ada se retourne vers son jules du soir, également revigorée par cette montée de marches, et c'est bien d'un air lascif qu'elle le dévisage. Avec ses cheveux en vrac, sa mine affreuse, son mascara qui dégouline et son goût amer sur la langue. Elle semble avoir déjà oublié tout ça, alors que pourtant la nausée est toujours là, bien menaçante. Elle recule un peu, lui jette un regard plus que suggestif, sa main toujours dans la sienne. De son autre main, elle repousse une bretelle de sa robe.

- Alors ? Tu viens ? Mon frère n'est pas là, il est à l'hosto.

Confession trop sincère, trop poussée même pour l'instant pseudo charmant. Mascarade d'ivresse, venin de nymphe dans le sang. Alcoolisme lunatique. La fièvre dans la tête. Allumette. Sourire hypocrite. Spectacle presque pathétique. Des rouages un peu trop habitués à fonctionner ainsi  sans doute. Qu'est-ce qui t'anime là exactement, Ada ? A quoi tu joues ? T'es clairement pas en état pour quoi que ce soit, et surtout pour prendre des décisions toi-même.

(c) calaveras.

Il rigole. Et un silence bref, s’installe. Julius laisse ses envies prendre le dessus et en vient à caresser une fois de plus, les cheveux puis le visage d’Ada. Il se bat contre l’envie de capturer ses lèvres, et de la faire éventuellement sienne... Au moins, pour la nuit. Et aussi celle d’après, peut-être. Il se mord la lèvre. Tente de se remémorer son état, lorsqu’elle est tombée dans ses bras. Alors, qu’elle tendre d’entrer. Et la suit, finalement à l’intérieur, lorsqu’elle parvient à ouvrir.

Étape sinueuse, une fois de plus. Il imite chacun de ses pas. Il s’en rapproche, venant pratiquement appuyé son torse contre le dos d’Ada, lorsqu’il la sent faiblir dans les escaliers. La peur qu’elle se blesse, et l’envie de retrouver la chaleur de son corps. Un sourire amusé, lorsqu’il la voit se questionner, chercher. « J’ai rien dit... » qu’il lui confirme, alors qu’elle se met à rire. Et lorsqu’elle lui fait signe de se taire, Julius trace un verrou sur ses lèvres, bien qu’il ne soit pas le plus bruyant des deux.

Une fois devant la porte, qu’il espère être la bonne, Julius retrouve sa place près d’elle. Son souffle chaud dans son cou, son menton velu contre son épaule. Les mains autour de sa taille, qu’il tient fermement. « Tu veux que je t’aide ? Que j’t’éclaire, peut-être ? » Une question ignorée de plus. Ada choisi ce moment pour se retourner, et planté son regard dans le sien. Jules suppose qu’elle a trouvé, qu’elle a déverrouillé la serrure. Se demande s’il doit tirer sa révérence, ou non.

En guise de réponse, Ada le fixe, puis se recule. Elle le scrute de la tête au pied. A ce regard, qui vient le chercher. Sa main, qui serre la sienne. Jules suit l’autre du regard, jusqu’à son épaule qu’elle dénude partiellement. Sa respiration s’accélère légèrement, à mesure qu’il l’entraine vers elle, qu’elle l’invite. « Alors ? Tu viens ? Mon frère n'est pas là, il est à l'hosto. » Il baisse les yeux, Jules. Il mordille sa lèvre. Et inspire, puis expire. Une pause. Il ne devrait peut-être pas, mais... Il vaut mieux ne pas la laisser seule, n’est-ce pas ? « Seulement si t’arrête d’faire ça... » Sa main libre la désigne, elle, toute entière. Simplement elle. Ses regards, ses gestes provocateurs, ses sous-entendus. Son physique bien trop avantageux. « J’suis gentil, Ada... Mais, PAS SI GENTIL !» qu’il insiste. Il n’est pas en bois, encore moins un saint. Il a besoin de sa collaboration, Jules. Il a besoin qu’elle laisse certaines parties de son anatomie dormir, tranquillement...

Il dépose tout de même la main sur l’épaule nue, glisse ses doigts sous la bretelle mince de son haut, caressant sa peau au passage. Jules dégluti difficilement. Il ne comprend pas pourquoi, ni ce qu’elle lui a fait, exactement. Quel genre de sort, elle lui a jeté... Il se racle la gorge. Et comprend qu’elle accepte d’être sage, ou au moins d’essayer, si seulement elle le peut, alors qu’elle continue son chemin, l’emmenant avec elle. Les battements de son coeur s’accélère, sur le chemin qui mène à ce qu’il croit être sa chambre à coucher. Parce qu’il doit être bien sage, mais qu’il ignore encore s’il aura la force de l’être, si elle s’entête...

Le latino retire son manteau, lorsqu’elle fini par lâcher sa main. Il le pose là où il peut. Il parcours ensuite timidement la chambre à coucher. D’abord, immobile, simplement du regard. « C’est ici, alors, que t’emmène tes victimes ou j’suis privilégié ? » qu’il demande, un sourire aux lèvres, les mains dans les poches avant de son jean. Puis, il lui fait dos et se penche vers l’avant. Il attrape un petit cadre. Une photographie d’Adama et d’un jeune homme. « C’est ton frère ? » Il évite pour l’instant de la questionne d’avantage sur la raison de son absence, malgré la curiosité. Et puis, si ça se trouve, ce n’est pas lui qui pose au côté de la brune.

(c) calaveras.

Elle a les cils qui papillonnent et son regard planté sur lui, Ada. Une chose en tête, toujours une seule chose. L’individu dans son ivresse est uniquement monotâche. Pour ça qu’elle ne sait plus répondre alors qu’elle est concentrée sur sa clef. Pour ça qu’elle peut être complètement excitée, la libido exacerbée et l’instant d’après dormir profondément, ou juste passer à autre chose, une autre activité, une autre envie. Il lui demande d’arrêter, mais elle n’a qu’ça en tête, l’impétueuse provocatrice. Des envies au bord des lèvres. Elle aime comme sa peau crépite sous ses doigts. Elle dit « J’aime pas les gars gentils. » Provocant toujours plus, clairement pas décidée à rester sage. À aucun moment elle n’avait décidé d’être sage, Ada, et toute cette soirée d’ailleurs n’avait tourné qu’autour de ce but-là. Le moment était donc venu de conclure non ? Elle est sur le point de se jeter sur ses lèvres quand un sale goût sur sa langue la rappelle brutalement à la réalité. Terre ferme à Adama, tu n’as pas envie de lui laisser un souvenir amer. Elle ne sait pas pourquoi, mais il n’y a rien qui ressemble à d’habitude ce soir-là, et même si elle est torchon-carpette, son instinct lui fait savoir qu’elle aimerait le revoir, ce Jules. T’as pas envie de le faire fuir pour toujours. Et puis soyons honnêtes, t’as pas envie d’embrasser qui que ce soit, là, en fait, avec la bouche pâteuse et l'haleine que tu te payes.

Alors elle obtempère, reprend une distance raisonnable, calme ses ardeurs. Une nouvelle idée la remplace bien vite, celle de se laver les dents. Elle l’emmène juste dans sa chambre avant, une jolie pièce assez sobre et principalement décorée par des photos et des pièces en verre soufflé de différentes tailles. Des toutes petites, certainement destinées à devenir des bijoux, d’autres plus importantes, des essais divers et variés.

- T’es plutôt un privilégié. Parce qu’elle préfère dormir chez les autres afin de s’éclipser au petit matin. Il n’y a rien de plus chiant que de devoir mettre quelqu’un dehors.

Il y un arbre avec ses bijoux sur lequel elle vient balancer ses boucles d’oreilles. Un petit fauteuil où elle jette de façon anarchique son manteau, puis ses collants sans se soucier de lui. Elle le laisse faire comme chez lui, sans le lui indiquer explicitement mais elle n’est plus très causante à cette heure tardive. Elle revient seulement vers lui lorsqu’il lui parle de son frère.

-Oui, c’est bien lui, Balthazar. Il est beau hein ? Ils avaient quelques années de moins sur cette photo, même s’il a le temps pâle quelque soit la photo. Il a la ménopause. Témoin qu’elle est bel et bien bourrée. Elle pouffe de rire, c’est vraiment sortie comme ça, pourtant elle est un peu jeune pour s’inquiéter de son système hormonale. Pfff, qu’est-ce que j’dis, la mononuc… La mucoviscidose, j’vais y arriver ! Elle rit toujours, prenant le temps de s’esclaffer sur son besoin urgent de sommeil avant de l’abandonner quelques minutes pour la salle de bain. Il pourrait clairement faire un braquage et se barrer, comme ça. Il aurait pu profiter d’elle un paquet de fois ce soir, il ne l’a pas fait, pourquoi le ferait-il maintenant ?

Dans la salle de bain, elle reste quelques minutes au-dessus des chiottes à se demander si ça va sortir à nouveau, mais puisque rien ne vient elle se lave enfin les dents, se débarbouille, passe aux toilettes. Elle a envisagé de se doucher, mais ça attendra le lendemain, elle a vraiment la flemme. C’est dans un T-shirt trop grand pour elle et en culotte qu’elle retourne dans la chambre, enfin prête à retrouver sa couette, son lit et ses bras.

- Hé, c’est que ça tangue moins ! Tu vois on était sur ton bateau, dit-elle une fois allongée, la voix profonde de celle qui relâche tout, les paupières déjàs closes.

(c) calaveras.

Elle bat des cils, réplique qu’elle préfère les vilains garçons... Si seulement, elle savait, Ada, que c’est tout ce qu’il a toujours été, Julius. Un marin frauduleux, illicite, ancien dealer puis junkie, champion des combats clandestins. Il n’a toujours navigué que sur ces eaux là. Même en amour. Il est l’amant d’un soir, ou deux. Il est celui qui disparait au petit matin. Pas celui d’une vie. Il l’aurait prise dans le parc, Jules. Et ses caresses auraient été différentes, dans le taxi, s’il avait bu aussi. Ou si elle ne l’avait pas fait. S’ils étaient dans le même état... Mais, il est resté sage. Ses mains dans ses cheveux, puis sur sa joue, plutôt qu’entre ses cuisses. Une collation et de l’eau, plutôt qu’un dernier...

Elle lui complique la vie, par son apparence plus que parfaite. Par sa démarche féline, bien que zigzaguante, et son attitude. Pourtant, elle accepte. Et Jules la suit jusqu’à sa chambre. Ils ne s’y seraient pas rendu, dans d’autres circonstances. Il l’aurait plaquée contre un de ces murs, en l’absence de ce frère, et même s’il y était, endormi ailleurs, parce qu’elle ne le sait pas, Ada. Mais, Julius est un vilain garçon. Ils s’y sont toutefois rendus. Le latino est debout, les mains dans les poches. Il la questionne sur ses habitudes, pourtant évidentes. Elle ne s’en est pas cachée. « T’es plutôt un privilégié. » Il hoche la tête, en guise de réponse, avant de s’attarder sur un cadre photo. Adama revient vers lui, lui confirme que c’est son frère. Balthazar. « C’est plutôt, elle, qui attire mon regard... » Adama. Au côté de son frère. « Il a l’air sympa. » Plus sage, aussi. Il a un visage doux. Une jolie bouche, semblable à celle d’Adama. Y a pas de doute. Jules, il a passé des heures, à la détailler, avec cette envie de les goûter.

Malgré sa condition, il rigole un peu. Secoue la tête de haut en bas, comme il a compris. Elle s’entête tout de même et parvient à y arriver. « C’est pour ça, qu’il est pas là, ce soir ? Pour ça qu’il est à l’hôpital ? » qu’il demande, inquiet pour le jeune homme et pour Adama, qui y est visiblement très attaché. Avant qu’elle l’abandonne, un moment. Le trentenaire en profite pour prendre le temps d’étudier les oeuvres en verre. Les siennes, peut-être ? Est-ce qu’elle aime seulement, ou pratique aussi cet art ? Celui dont elle lui à parlé, plus tôt et dont il ne connaît rien.

Il se retourne au son de sa voix. Il sourit, rigole un peu, puis la rejoins. « Ça devait tanguer bien plus qu’à bord d’mon bateau ! » qu’il blague, au bord du lit. Adama fait déjà l’étoile, elle semble mieux. Elle semble bien. Elle n’a plus besoin de lui. Mais, Jules, n’a plus envie de partir. Alors, il s’entête. Il retire son haut, qu’il lance par terre, un peu plus loin, près des collants qu’elle a retirée tout à l’heure. Pour le confort, et parce qu’il a l’impression que leurs vêtements a imbibé l’odeur prononcée de l’huile, puis du gras de leur en-cas du soir. Il se retrouve alors torse nu devant la belle au bois dormant qui est allongée là, en diagonale. « Tu me fais une petite place ? » Elle a l’allure d’un ange, a présent, les yeux fermés. Son haut large, mais trop court. Il couvre à peine ses cuisses, nue. Julius l’avait prévenue. Il n’est pas si gentil, il n’est pas un saint. Il n’est qu’un homme qui ne peut s’empêcher de la regarder... Jusqu’à ce qu’il revienne à lui, et se décide à la couvrir de sa couette fraiche. Il s’assoit près d’elle. Le dos contre le mur. Et la guette.

(c) calaveras.

Peut-être qu’ils sont fait de la même veine ces deux-là, et c’est pour ça qu’ils s’entendent bien. Même s’ils n’ont pas du tout la même histoire de vie. Il ne peut pas le nier Jules, y’a une petite étincelle entre eux. Ada, elle, elle a le privilège de l’ivresse et les œillères qui vont avec, alors elle peut prétendre que ça vient de là. Elle se dit qu’elle verra bien demain matin, s’il lui plait encore dans sa sobriété. Elle n’est pas le genre à faire des plans sur la comète, ni à se sentir obligée de quoi que ce soit. Elle vit dans le présent, surtout parce que l’avenir est un miroir d’angoisses dans lequel elle ne veut pas regarder, un gouffre prêt à l’avaler entièrement. S’engager avec quelqu’un c’est penser à l’avenir et c’est sans doute pour ça qu’elle a toujours refusé de se mettre en couple, en relation ou n’importe quoi qui s’en rapproche. Elle a brisé deux, trois cœurs sur la route comme ça, dont le sien quand c’était réciproque mais qu’elle ne pouvait pas, ne voulait pas. Puis elle a trouvé Arthur et ils ont su trouvé un accord qui leur convenait à tous les deux. Il est bien pratique sur bien des plans, Arthur, toujours utile pour faire fuir les opportuns. Julius il n’a pas fuit lui. Julius, c’est un privilégié, il est différent. Et Ada, elle n’a pas envie de faire comme la dernière fois. Elle a envie de le laisser entrer dans sa vie et voir ce que ça donne, dans son petit cœur d'incorrigible fêtarde.

Avant de filer pour la salle de bain, elle lui a répondu que son frère y était assez souvent, assez souvent pour que ce ne soit pas une source d’inquiétude plus importante que d’habitude. Sa maladie, elle est pour la vie et elle l’a toujours connu avec. Ça fait partie de lui, même si elle ne supporterait pas de le perdre, c’est sans doute pour ça qu’elle a fait comme lui, elle a fait une croix sur l’avenir. Il est la personne la plus importante de sa vie. Elle revient un bon quart d’heure plus tard, nettement plus fraiche et s’étale directement dans le lit. Elle trouve quelque part une petite force en elle pour aligner quelques mots, ou encore se décaler pour lui faire de la place, juste avant de s’endormir.

« C’est sûr, c’est pour ça que je voulais aller sur ton bateau. »

Le sommeil sera venu très vite, mais l’aura abandonné tout aussi vite. À peine entre les bras de Morphée, l’alcool réveille sa paranoïa latente, celle du traumatisme. Elle se réveille en sursaut, en nage, en criant, trouve la main réconfortante du grand brun et baragouine quelques phrases sans contextualisation. « La porte d’entrée, elle est fermée ? Pourquoi t’es comme ça Balt ? » A comprendre, pourquoi tu n’es pas allongé avec moi. Elle n’est pas bien réveillée, elle croit que c’est son frère et c’est tant mieux parce qu’elle aurait pu prendre peur aussi dans cet état post-cauchemar mi-inconsciente, mi-ivre, et ne pas se souvenir qu’elle est rentrée avec quelqu’un, tout simplement. Cet état ne dure que quelques secondes avant qu’elle ne retrouve un peu de lucidité. Elle susurre un « Faut dormir, Jules ! »  Puis elle le regarde en contre-bas, allongée à côté de lui, le visage contre sa hanche, un peu perdue entre les émotions du mauvais rêve, l’alcool, lui. Le cœur battant. Elle l’observe comme si elle le découvrait pour la première fois, détaille chaque courbe de son visage. Allez Ada, tu t’souviendras de qui il est au réveil, promis.

C’est juste le temps de retrouver son calme, avant de se rendormir…

(c) calaveras.

Julius n’a pas posé plus de question, quant à l’état de Balthazar, son frère. Une seule. Elle peut ainsi lui dévoiler ce qu’elle souhaite, Ada. Elle élabore alors, un minimum, mais, suffisamment pour qu’il se fasse une idée de la situation. Juste ce qu’il faut, pour qu’il comprenne, qu’il fasse le lien entre sa propre histoire. C’est qu’il a vécu, lui aussi, avec un frère à la santé fragile. Un frère qui lui a été repris, trop tôt... Mais, Jules n’en parle pas. Jules ne parle pas du tout. Il lève seulement les yeux vers elle, la regarde, l’écoute attentivement et lui sourit, avant qu’elle ne sorte de la chambre. Un sourire compatissant, réconfortant. Un sourire qu’elle comprendra peut-être, un jour.

De longues minutes passent. Et le latino partage ce temps entre ses souvenirs, et les oeuvres qui décorent la pièce. Cela en attendant la jeune femme, disparue momentanément. Seulement, à son retour, elle s’étend sur le lit. Petit rappel verbal de sa demande initiale. Alors, qu’elle souhaitait être menée chez lui. Julius sourit, amusé. Se retourne et moque légèrement de son état, et de ses nausées. « C’est sûr, c’est pour ça que je voulais aller sur ton bateau. » Bien sûr, une évidence.

Elle fini par se déplacer, et le laisser s’installer près d’elle. Sans un mot de plus. Il penche la tête, le dos contre le mur et ferme les yeux. Adama est déjà ailleurs. Et lui aussi, y sombre lentement. Jusqu’à ce qu’elle fasse le saut, et qu’il en fasse de même. Il ouvre les yeux, penche la tête vers cette main qui s’empare de la sienne. Baille. Puis, la porte à ses lèvres et y dépose un baiser. « Ça va, Ada. Tu peux te rendormir... » Évidemment, Julius n’a rien compris. Il reste là, la tête d’Adama contre lui, appuyée confortablement contre ses cuisses. Sa main toujours dans la sienne, de nouveau contre le matelas. Il ferme les yeux, jusqu’à ce qu’elle reprenne la parole. Elle l’encourage à dormir, Jules marmonne. Somnole. Trace de long trait de son doigt, sur le bras d’Adama, pour qu’elle se rendorme aussi.

Les heures passent. Lorsqu’il ouvre les yeux, le trentenaire est un peu plus allongé. Le visage d’Adama contre son torse. Son bras contre lui, contre sa hanche. Il inspire, baille une nouvelle fois, cherche l’heure. Et constate que le sommeil les a rattrapés. Il tente de se rendormir, en vain. Les rayons du soleil se faisant bien trop insistant entre les rideaux, il choisi de se lever. Jules retire aussi délicatement que possible le bras de la brune, de son corps et le dépose à même le matelas. Il s’assoit ensuite, sur le rebord du matelas. Se questionne. Sent une main, dans son dos. Et lui, sourit en se retournant.

« Bonjour ... »

(c) calaveras.

Elle s’est rendormie bien vite, a poursuivi sa nuit dans un sommeil clairement agité, rempli de rêves bizarres ou glauques ou les deux, mais sans refaire de cauchemar. Elle a pris possession de l’espace constitué par son lit, et de lui aussi, ne lui laissant qu’une petite place. Et passant de contre lui à carrément la tête et le bras sur son torse. Elle a plutôt bien dormi, et longtemps. Elle aurait d’ailleurs continué à dormir sans soucis jusqu’au milieu de la journée voire de l’après-midi s’il n’avait pas bougé. S’il ne l’avait pas bougé. Même si le soleil lui chatouillait les paupières à elle aussi.

Les yeux encore clos, elle tend le bras dans un geste réflexe, plus pour attirer l’attention de ce qu’elle vient de perdre que par tendresse. Sur le coup, elle ne sait plus qui il est, ni où elle est. Elle ouvre les paupières difficilement sur cette nouvelle journée, la bouche pâteuse, les yeux gonflés et surtout un terrible mal de crâne. Elle baragouine quelque chose qui aurait dû être “qui a allumé le soleil” mais qui ressemble plutôt à « kialué l’soil » alors qu’elle le regarde d’un seul oeil, puis de l’autre. Cette luminosité est violente. Elle gémit et porte la main à ses yeux tout en se retournant sur le dos et en se redressant légèrement contre un coussin. Lorsqu’elle retire sa main, elle a les deux yeux entrouverts et l’usage retrouvé de sa langue. Elle l’étudie de la tête au pied, réfléchit. Il a son pantalon, elle n’est pas nue.

« On n’a pas couché ensemble ? » Question rhétorique car la réponse est évidente. Sourcils froncés. Pourquoi il est là lui, alors ? D’ailleurs elle réalise qu’elle a une jambe sur la couette, exposée jusqu’à la lisière de la culotte. Elle la range aussitôt sous les draps, comme s’il n’en avait pas vu beaucoup plus durant la nuit. Mais c’est plus la même Ada, inconsciente et sans gêne, bien qu’elle ne soit pas d’une grande pudeur. Elle reprend le temps de réfléchir. Clairement, elle ne souvient pas de toute sa nuit… Elle était en boîte avec une bande qu’elle n’apprécie pas plus que ça, ils ont fait des jeux de boisson avant d’y aller et elle a bu encore une fois là-bas. Ensuite… Concentre-toi Ada… Ensuite, elle a voulu prendre l’air. Et puis elle ne sait plus. Jusqu’à la barquette de frites, ou plutôt la galette. Tout n’est pas clair quand même sur cette partie là et elle ne se souvient pas avoir ouvert un bas, ni l’appartement. Elle passe une main dans ses cheveux, les remet derrière sa tête.

« Bonjour… Jules.. »

Elle se met en tailleur dans son lit, relève son dos, se frotte les yeux. « Putain j’ai mal au crâne... » Une évidence. Et puis personne ne lui a fait boire un litre et demi d’eau, de grès ou de force. Et y’a pas que la tête qui pose soucis, elle a clairement mal au cœur. Ça sent la bonne journée à être malade. Ah oui, tiens, la fac, les cours… aux oubliettes. Elle hausse les épaules pour elle-même puis reporte son attention sur lui.

« T’étais en train de partir ? » Elle demande simplement, le dévisageant avec son air bougon. Une petit partie d’elle voudrait qu’il dise oui, juste pour qu’elle puisse passer la journée affalée à se morfondre sur son état. Une autre compte bien l’insulter si c’est le cas.

(c) calaveras.

Ada et Julius n’ont pas mis bien longtemps, avant de s’endormir. Un sommeil léger, pour Julius. Et particulièrement agité, pour Adama. Loin d’être récupérateur, selon le trentenaire. Il faut dire que la belle au bois dormant, l’a fait sursauté quelques fois, lui a sans doute causé quelques ecchymoses, même. Il a manqué de couverture et d’espace, aussi. Pourtant, sans qu’il ne sache véritablement pourquoi, il n’aurait voulu être nulle part ailleurs. Et à peine les yeux ouverts, il retire la paume de sa main de son torse et s’assoit sur le bord du lit.  

Il s’arrête toutefois rapidement, s’immobilise. Ada bouge pour deux, elle cherche son corps. Alors, Jules se retourne vers elle. Il sourit. Ne comprend rien à ce qu’elle vient de dire, mais est attendri, amusé. Il est patient. Il reste là. Lui laisse le temps de se réveiller. La brune en profite pour s’étirer. Et puis, elle se redresse, s’assoit en indien. « On n’a pas couché ensemble ? » Il secoue la tête. « J’suis un peu vexé que tu puisse croire, qu’il soit possible d’oublier une nuit avec moi... même dans cet état... » Certains parleraient de vantardise. Julius, lui, parleraient de vérité. Et d’humour.

La jeune femme le salue, enfin. Elle utilise même son prénom, son diminutif. Il devine qu’elle a probablement eu besoin de tout ce temps, pour retrouver cette information. « J’y suis pour rien, j’te promet... T’es débarquée dans cet état. J’ignore ce que t’as consommé... » qu’il se défend. « Tu t’en souviens ? » Elle hausse les épaules. Le contraire l’aurait étonné. Elle change rapidement de sujet, pour le questionner sur ses intentions.

« Absolument ! » qu’il lance, le plus sérieusement du monde. Il a ensuite ce sourire en coin, qui étire ses lèvres, charmé par la moue qu’elle affiche. « Mais, non. J’allais seulement à la salle de bain et te chercher un peu d’eau... et peut-être aussi des comprimés, si je peux en trouver... j’crois qu’ils seraient pas de trop... » C’est réellement ce qu’il s’apprêtait à faire. Pourtant, il n’est plus certain qu’il s’agit de la chose à faire. Adama semble regretter son invité. « Tu veux que je ferme un peu le rideau ? » Une main dans ses bouclettes puis contre sa mâchoire velue. « Tu veux que je m’en aille ? » qu’il ose, finalement.  

(c) calaveras.

« J’suis un peu vexé que tu puisse croire, qu’il soit possible d’oublier une nuit avec moi... même dans cet état... »
Il arrive à lui arracher un sourire, ce qui est assez inespéré avec une Adama soumise à une magnifique gueule de bois. Il a cet humour qui colle bien avec son caractère.

Le réveil, le vrai, comme le confort est particulièrement dur à trouver ce matin. Et elle sait bien qu'il n'est pour rien dans ses malheurs.

« Pas vraiment... J'ai un gros trou sur le milieu de la nuit... et un peu la fin. Va falloir me rafraichir la mémoire. Et j'm'excuse de toutes les conneries que j'ai pu raconter, doit y en avoir un paquet.»

Il fait le pince-sans-rire et elle est crédule, l'incitant ainsi à faire encore plus la tête. Elle lui balance un coussin sur la tête aussitôt que la supercherie est révélée, mais finit par sourire elle aussi. Juste un peu. « Balt il a une véritable pharmacie dans la salle de bain, il doit bien y avoir de l'aspirine. Fouille, fais comme chez toi, j'ai pas de cadavre dans mes placards. Et j'veux bien un litre d'eau... steup.» Puis elle le voit hésiter alors qu'il s'apprêtait à repartir jouer les chevaliers servants. Peut-être que c'est sa tête mal lunée, peut-être que c'est la façon dont elle a tourné sa phrase. Elle hoche la tête négativement pour les rideaux, c'est bien comme c'est maintenant, c'est en se couchant qu'ils auraient dû fermer les volets. Puis répond un simple « non » quand il lui demande si elle veut qu'il parte. Elle ne sait pas pourquoi, et elle n'a pas envie de s'expliquer, alors une telle réponse lui parait suffisante. Puisque c'est ce dont elle a envie. « Mais je ne te force pas à rester, y'a sans doute plus amusant qu'une meuf un lendemain de cuite. »

A la fin de leurs échanges, il part faire ce dont il avait parlé et Ada se réinstalle dans le lit, se décalant pour lui laisser plus de place, elle reprend une position plus allongée, le dos légèrement relevée par un coussin. Les mains sur le ventre, elle ferme les yeux et se laisse aller ainsi, sans se rendormir. Elle ne les rouvre qu'à son retour, émergeant délicatement, elle prend l'eau et le médoc, qui sont plus que bienvenus, elle ingurgite un bon quart de la bouteille.

« Tu dois avoir faim. Le frigo est bien rempli, fais-toi plaisir. J'peux même faire l'effort de sortir de ce lit pour te regarder cuisiner torse-nu. » Taquine, elle lui sourit, alors qu'elle remet en place ce petit jeu de séduction, malgré-elle. Son regard le parcourt des pieds à la tête. Il te plait Ada, et l'étincelle de cette nuit, elle est toujours là, même si toi tu la découvres à peine.

(c) calaveras.

Elle sourit, enfin. Réchauffant la pièce toute entière. Lui signifiant ensuite qu’elle n’a pas oublié son prénom. Un miracle. D’autant plus qu’Ada confirme ensuite, ce qu’il a supposé. Une partie de la nuit, est disparue de sa mémoire. Malheureusement pour la belle ivrogne, Julius n’est pas celui qui pourra la lui remémorer. Pas entièrement. Il n’a jamais su d’où elle venait, ni ce qu’elle a fait, avant de le rejoindre à Central Park. « Tu te souviens de t’être jetée dans mes bras ? » qu’il prend plaisir à la taquiner. « Et de ne plus avoir voulu les quitter, ensuite ? » Un ajout, un sourire mutin, avant de reprendre son sérieux. « Non, t’inquiète pas, tu n’as pas à t’excuser. » Il n’y a rien qui ne lui semble déplacé ou regrettable. Peut-être juste cette histoire de fuckfriend et d’amant d’un soir, qu’elle a lancé. Ça ne l’embête pas, Jules. Elle est bien trop belle, pour être seule. Mais, peut-être en serait-elle gênée ? Est-elle toujours aussi franche ? Il est impatient de le découvrir. De la découvrir, elle. Adama.

Julius réagi à sa question. Choisi de se moquer, une fois de plus. Il évite de lui mentionner qu’il n’a jamais eu l’intention de la quitter, préfère lui faire croire le contraire un court instant. Adama boude, un peu plus. Et le marin fait une petite moue à son tour, attendrie. Charmé. Amusé. Il rigole, lorsqu’elle lui lance un coussin. Et ils sourient. Lui, un peu plus. Il hoche la tête, alors qu’elle reprend. Qu’elle l’invite à faire comme chez lui. « Ok, te sauve pas ! » qu’il ne peut s’empêcher d’ajouter. Moqueur, juste une dernière fois. Avant que les doutes ne le prenne... Il la questionne sur ses réelles envies. Monosyllabique, avant d’ajouter « Mais je ne te force pas à rester, y'a sans doute plus amusant qu'une meuf un lendemain de cuite. » Jules hoche la tête et sort, finalement de la chambre.

Il erre un peu dans l’appartement, cherche où aller. La salle de bain, d’abord. Il fait couler l’eau. Elle est froide et rafraîchissante. Il prend une gorgée en se penchant simplement vers l’avant. Il se gargarise, recrache. Et prend une nouvelle gorgée. Ses mains à nouveau sous l’eau, il rince son visage ensuite. Passe une main dans ses cheveux, soupire. Le réveil n’est pas simple, pour lui non plus. Il manque de sommeil, ne se sent pas le bienvenue, malgré ses dires. Malaise évident. Au moins, de sa part. Jules fouille l’armoire, à la recherche des comprimés pour Ada. Se traine les pieds jusqu’à la cuisine, où il trouve une grande bouteille.

Et frappe doucement à la porte de la chambre. Adama s’est réinstallée au lit, attrape rapidement l’acétaminophène. Elle les gobent, cale pratiquement la bouteille d’eau. Julius sourit. « Non, merci, Ada. Je mange rarement directement en me levant le matin... » Un grand café. Il lui faut un peu de temps, ensuite, avant de pouvoir ingurgiter un réel petit-déjeuner. Rigole, un peu, lorsqu’elle continue. « Mais, j’me débrouille, en cuisine. Tu veux que j’te prépare quelque chose ? J’peux te faire une omelette et des rôties sans mettre le feu chez toi » qu’il lance en reprenant place près d’elle. Silencieux. Il ne la quitte plus des yeux.

« T’es encore plus belle, à la lumière du jour.... »

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