we might as well be strangers (finn)

elle ne sait pas à quoi s'attendre gaia. elle en est même à penser que tout est arrivé à cause d'elle. il était évident qu'elle avait quelque chose à se reprocher pour qu'il préfère prendre la première porte de sortie qui s'offrirait à lui. sans même juger utile de l'en informer correctement. elle s'en est imaginé des tas de scénarios, sans jamais en trouver un seul suffisamment acceptable. quand enfin il ose en venir aux faits, la pillule se heurte à sa trachée, pas franchement décidée à passer la barrière. elle est d'abord sonnée gaia. avant de reprendre ses esprits et d'assimiler les aveux que finn venait de prononcer. ceux qui lui font l'effet d'une abominable douche froide. sans plus attendre, elle lui reproche de rejeter toute la faute sur elle. parce qu'elle n'avait jamais parlé de quoique ce soit gaia. elle n'avait jamais évoqué ce que pourrait être leur futur. elle se complaisait pas mal dans ce qu'ils étaient déjà. et elle pensait peut-être à tort que ça lui suffisait. seulement, elle estimait aussi à juste titre que de telles décisions qui impactaient deux adultes, leur couple et leur vie future, devaient être abordées ensemble avant de prendre une issue si radicale. ce qui l'ennuie le plus, c'est l'impression de n'avoir même pas été consultée sur son propre sort. elle s'emporte sûrement un peu trop, mais c'est la réaction sans filtre qu'elle lui offre. celle qui venait naturellement après des mois à tenter d'oublier tout d'eux. arrête gaia, j'essaye pas de rejeter la faute sur toi. si je n'avais pas pris la décision, tu aurais fini par le faire. tu aurais supporté combien de temps qu'on vive comme ça tous les deux ? que je ne te donne rien de ce que tu veuilles vraiment ? elle hausse les épaules. qu'en savait-il de ce qu'elle voulait vraiment ? avaient-ils même déjà abordé le sujet tous les deux ? il ne lui semblait pas. sinon, il n'aurait pas eu à faire ce choix. elle n'apprécie pas tellement qu'il ait tiré des conclusions hâtives sur ses aspirations. j'suis quelle genre de femmes selon toi finn ? le genre mariée, femme au foyer avec quinze bambins flanqués au train ? ce dont elle a absolument besoin dans l'instant, c'est de comprendre ce qu'il voyait vraiment à travers elle. il semblait la connaître tellement mieux qu'elle se connaissait elle-même. pourtant, elle était sûre qu'elle se serait assise sur pas mal de choses pour que ça continue de marcher. elle tente de se radoucir gaia, parce que c'est pas elle ces coups d'éclats. parce qu'elle n'a jamais un mot plus haut que l'autre en temps normal. et elle comprend aussi qu'elle n'a même pas le droit d'élever la voix avec lui. peu importe ce qu'il avait fait, peu importe comment leur histoire s'était terminée. elle avait sûrement des torts quelque part alors inutile de se redistribuer les échecs à tour de bras. elle est tellement blessée qu'elle estime que leurs échanges s'arrêteront là. parfois, il fallait savoir dire stop avant que ça ne dégénère complètement. et vu l'état de la situation, rien de bon ne semblait vouloir en ressortir à cet instant. la vérité, c'est que j'ai fais une connerie gaia... elle ne sait pas vraiment de quelle connerie il parle mais si c'est de son départ silencieux dont il est question, elle ne le contredira pas. et j'en suis désolé, même si ça change pas grand chose et que tu es passée à autre chose. elle hoche la tête simplement. est-ce qu'elle avait vraiment l'air d'avoir avancé gaia ? il n'y avait qu'à regarder où elle en était aujourd'hui pour comprendre combien elle s'était juste efforcé de noyer le problème, sans jamais vraiment rien régler. sauf que la vie était ainsi faite et elle serait bien obligé d'apprendre à vivre avec. tu veux que je parte ? alors qu'elle ne le quitte pas des yeux, sa question lui fait l'effet d'un électrochoc. parce qu'elle comprend que si il part vraiment, tout de suite, elle ne le reverra plus. et que cette fois, ce sera fini pour de bon. est-ce qu'elle se sentait réellement prête à le laisser partir ? pourtant, ses yeux l'implorent déjà de ne pas la quitter une deuxième fois. parce qu'elle ne veut pas d'une vie dont il ne fait pas partie, et ce, peu importe la place qu'il veut y prendre. excuse-moi. elle tente d'une petite voix pas très assurée, sans savoir si c'est ce qu'elle devait dire. si ça suffira à le retenir. si seulement il en aura envie. pars pas... s'il te plait. elle avait perdu sa boussole depuis déjà un bon moment l'infirmière, il ne lui restait plus qu'à avancer sans filets, en priant très fort pour que ça fonctionne.

le visage de l'infirmière s'était teinté d'incompréhension. mais jamais finn ne laisserait transparaître ainsi ses propres émotions. il se glissait adroitement pour éviter les embûches. attention, à aucun moment il ne se sentait en contrôle de la situation, bien au contraire. le trentenaire n'avait jamais eu ce genre de prétentions, toujours trop peureux pour prendre ses responsabilités. il avait toujours craint qu'on lui demande de choisir, qu'on lui demande de prendre n'importe quel genre de décisions dans ses relations avec les autres humains. c'est pour cela que la solution de la fuite avait toujours été la voie empruntée. laisser mourir les choses plutôt que d'y mettre fin lui-même. c'était quelque chose d'assez facilement concevable dans sa routine. seulement, finn était beaucoup moins imperméable qu'il ne voulait bien le concéder. son air qui donnait constamment l'impression qu'il était sur une autre planète, sa gentillesse mesurée, sa sociabilité mesurée, il avait fini par se convaincre qu'il était tout à fait comme ça. il avait toujours eu beaucoup de mal à concevoir que plusieurs finn pouvait coexister en un seul. ainsi, quand l'égoïste, le manipulateur faisait surface, il remettait systématiquement la faute sur les autres. quand le sentimental, le vivait faisait à son tour son apparition, il arrivait avec beaucoup de talent à le contrôler. mais face à gaia, tous se battaient, une collision d'intérêts bousculer finn et son indifférence habituelle. faire taire l'amoureux, le sensible qui voulait tout déballer, donner raison à la jeune femme, mettre les choses à plat et son cœur à découvert. l'autre le faisait taire. reconnaître avoir fait une erreur? les autres diraient que si la vie de finn manquait cruellement de passion c'est parce qu'il ne faisait pas d'erreurs. et puis il y avait un peu de pitié devant les prunelles luisantes de gaia. comment pouvait-il doublement lui briser le coeur en si peu de temps? mais comme on n'efface jamais sa véritable nature, il avait su renverser les rôles et c'est elle qui presque s'excusait d'avoir - pourtant à raison - pu remettre en doute les mots de finn. pourtant s'en trouvait-il pour autant dans une situation plus confortable? il fut d'abord soulagé de voir la brune battre en retraite et bafouiller des excuses. elle l'implora de ne pas partir et c'était désormais à lui de répondre. implicitement, il lui avait demandé de rester, mais maintenant il savait qu'il devait lui donner une raison de le faire. et il ne pouvait plus partir, plus d'échappatoire. voilà les recommandations qu'il se faisait à lui-même en sachant pertinemment qu'il manquerait à ses propres promesses. il cherchait dans son regard des indices sur ce qu'elle attendait de lui. comme s'il n'était pas l'auteur de la trahison qui avait brisé la promesse tacite qui les avait liés pendant quelques mois. pourquoi hésitait-il autant? elle ne lui demandait rien, sinon de ne pas disparaître. qu'est-ce qu'il craignait? qu'est-ce qu'il faisait de sa liberté de toute manière? l'esprit en vrac, il n'avait pas vu un finn qui ne laissait pas souvent sortir choisir l'issue en offrant un sourire sincère à gaia. je pars pas. s'entendit-il répondre trop spontanément. pour reprendre sa contenance il se leva de ce tabouret où il s'engourdissait pour jeter leurs cafés froids. en revenant, son regard se posèrent sur les épaules encore tendues de la jeune femme. qu'est ce qui n'avait pas marché? il ne savait pas ce qu'il attendait de ça, mais au fond il reconnaissait son erreur et il avait du mal à imaginer se séparer de celle qui lui avait procuré de longs mois de bonheur. il prépara mentalement un dernier petit discours puis finalement, il n'avait jamais su bien parler. il s'approcha simplement pour prendre doucement son visage entre ses mains et poser ses lèvres sur le front de la brune. il relâcha doucement son étreinte. je te laisse décider de la suite, on peut faire quelque chose tous les deux un jour. ce sera ta décision, les cartes sont dans tes mains. rien n'était guéri, ni pour l'une ni pour l'autre, alors il préférait effacer ses propres attentes, sa conception toujours trop normative de tout, pour la laisser avoir son mot à dire.

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