Taby ♦ Soirée masquée

Toby avait reçu le costume pour la soirée mondaine à laquelle il devait se rendre en compagnie d'Amy. Il n'avait jamais cru faire cela un jour, mais c'était obligatoire, il avait accepté l'argent et devait tenir sa parole, même s'il ne se sentait guère à l'aise. Le costume avait été cousu sur-mesure, mais il n'avait pas l'impression d'être dans une bonne position, ni même à l'aise. C'était comme s'il était trop serré, qu'il étouffait. Ce n'était pourtant pas la taille de ses vêtements le soucis, juste l'idée de porter quelque chose de si cher, de se sentir obligé de faire quelque chose, de se vendre. Une lettre accompagnait les habits, sur la façon dont il devait se coiffer et sur le lieu où il devait se rendre. Il devait d'abord passer à la demeure des Steele, une voiture viendrait le chercher, pour se rendre ensuite ensemble à l'endroit de l'événement, au bras de l'héritière. L'idée d'être exhibé tel un trophée ne lui plaisait guère, mais il devait cacher son ressenti, pour faire son devoir. Il devait simplement tenir sa parole, rendre ce service contre la somme allouée par sa nouvelle connaissance. Ce service parmi d'autres.

Toby avait eu quelques cours dedanse depuis l'entrevue chez Amy, et il s'était bien amélioré, malgré sa maladresse légendaire et son manque de talent constant. S'il y avait bien une chose qu'il savait depuis le plus jeune âge, c'était justement le fait qu'il n'était doué d'aucun talent particulier. Il se regarda une dernière fois dans le miroir de la salle de bains. Il ne s'était jamais vu de la sorte: costume de luxe, chaussures cirées et coiffure impeccable. Il avait l'impression d'être un autre. Il hocha la tête et grimaça, alors que l'on frappait à la porte. C'était le chauffeur. Décidément, ce n'était réellement pas, mais vraiment pas son monde.

Il monta à l'arrière d'une belle voiture, qui prit la direction de la demeure d'Amy. Arrivé sur place, la portière s'ouvrit, laissant place à l'héritière, si apprêtée, classe, élégante. Elle envoyait une image de puissance et de beauté mêlées qui ne laissa pas notre homme indifférent. Cependant, il n'en dit rien, afficha un simple sourire, tout en se montrant lui-même de la tête au pied, d'un signe de la main. "Bonsoir Madame Steele... Vous êtes ravissante. L'effet escompté est-il atteint?" demanda-t-il finalement à propos de sa propre tenue, alors qu'il sortait son loup de sa poche, pour le mettre en place sur son visage.

Amy avait tout organisé. Enfin... veillé à l'organisation de cette soirée, qu'elle voulait parfaite, évidemment. Elle avait tout supervisé, tout comme elle avait fait en sorte de garder un œil sur le prêtre qui avait, à sa grande satisfaction, fait de bons progrès en danse. Amy avait donc décidé de continuer à prendre ces cours privés et de lui apprendre ainsi différentes danses. Elle pourrait, en parallèle, profiter de sa présence et, selon les danses, de sa proximité, ce qui n'était pas pour lui déplaire, évidemment. Elle avait fait livrer au prêtre, également, de quoi se vêtir pour ce soir, ainsi que quelques instructions qu'il suivrait à la lettre, elle en était certaine.

La brune n'eut pas longtemps à attendre avant de noter l'approche de sa voiture, une fois un pied posé en dehors de chez elle. Le chauffeur quitta son habitacle pour lui ouvrir la porte. Elle le remercia d'un sourire avant de prendre place à l'intérieur, y retrouvant le prêtre à côté duquel elle s'assit. Elle lui sourit, après l'avoir détaillé des pieds à la tête. Voilà qui était beaucoup mieux que ses loques habituelles. La brune remercia le prêtre d'un sourire. Ravissante. C'était charmant, comme compliment. Elle avait choisi de s'habiller avec une jeune styliste, pleine de talent, en qui elle avait investi une certaine somme également. Sa robe, pour ne pas changer, était noire et mettait en valeur ses longues jambes, tout comme son décolleté. Ses cheveux avaient été coiffés en chignon, plus élaboré qu'habituellement, mais restaient dans sa sobriété habituelle. « Vous êtes très élégant, Toby. Ce costume vous va à la perfection ». De fait, il avait été fait à sa mesure. Juste pour lui. Aux frais de la jeune femme, évidemment.

« Vous êtes prêt pour ce soir ? Je me demandais... Comme vous souhaitez rester le plus discret possible... Souhaitez-vous porter un autre prénom ? » demanda la brune en observant le jeune prêtre dont le regard s'était intensifié à travers le loup. Décidément, elle avait eu une bonne idée, de penser à cette soirée costumée.

Toby se contenta de sourire face à la remarque de son interlocutrice, heureux d'avoir répondu aux attentes d'Amy. Mais pourquoi, en vérité? Qu'est-ce que cela pouvait bien lui faire, après tout, qu'elle le trouve séduisant dans son costume ou non? Il haussa mentalement les épaules. "C'est vous qui l'avez choisi, et vous êtes l'élégance-même." répondit-il naturellement, avant d'enfiler son loup et de se caler dans le siège du véhicule, pour prendre ses aises. Il ne se sentait toujours pas à l'aise, mais depuis qu'Amy était présente, il se sentait déjà mieux. Sans doute la révélation qu'il n'y allait pas seul, que ce n'était qu'une soirée, et qu'il n'y avait rien de terrible à se tenir au bras d'une femme et afficher des sourires de façade. C'était juste que ce n'était vraiment pas son truc... Il était quelqu'un de spontané, plutôt impulsif, et devoir veiller à tout ce qu'il va dire ou faire, c'était compliqué à son échelle.

Lorsqu'elle lui demanda s'il voulait un autre prénom pour être le plus discret possible, notre trentenaire hocha la tête, avec véhémence. "J'allais justement vous demander si c'était possible..." déclara-t-il en souriant. A y songer, c'était amusant, car c'était les gigolos qui se donnaient des noms d'emprunt, ou les escort girls... Mais puisque, justement, il se sentait comme un autre, dans ce costume, qui lui semblait un déguisement tant ce n'était pas son style, ni sa façon d'être, autant se donner une autre identité. "Je vous laisse me baptiser. J'aimerais bien voir quel prénom vous me donneriez..." indiqua-t-il. D'autant, qu'avouons-le, Toby était un nom de chien... Vraiment.

L'élégance même. Amy sourit. Elle appréciait le compliment. Davantage en sachant que le prêtre ne lui mentait pas. Elle voyait qu'il n'était pas totalement à l'aise, et le contraire l'aurait évidemment surprise. Mais il restait souriant, comme toujours, ce sourire solaire qui la perturbait autant que la fascinait. Ce prêtre... La brune ne put s'empêcher de rire doucement en voyant Toby hocher la tête avec grande conviction à sa proposition. Clairement, utiliser un prénom d'emprunt lui semblait presque indispensable. Par contre, il fallait trouver un prénom à lui donner, l'homme lui laissait « l'honneur » de choisir ce fameux prénom... Elle hésitait entre deux prénoms. Un qui lui plaisait, à sa consonance. Un autre, qui avait plus de signification. Les deux, toutefois, tiraient leur origine de la bible, ce qui ne manquerait pas d'échapper au prêtre. « Hmmm... Que diriez-vous de David ? » finit par dire la millionnaire, avec un petit sourire en coin. David. Le célèbre David. David et Goliath, mais pas uniquement.

Elle jeta un regard vers la vitre, avant de se pencher pour atteindre son loup sur le siège devant elle. Elle le plaça sur son visage à son tour, tout en essayant de ne pas abîmer sa coiffure, puis se tourna vers le prêtre. « Il est bien placé? Mes cheveux restent présentables ? » demanda-t-elle avait sérieux. Comme toujours, elle voulait bien présenter. Être impeccable. Une allure et une soirée sans fausse note. Elle comptait aussi sur Toby/David pour cela aussi. « Vous avez eu le temps de vous entraîner à danser, hors des heures de cours ? Les travaux de l'église avancent bien ? » D'après ses informations, ils avaient déjà commencé. C'était une bonne chose.

C'était une bonne idée de garder l'anonymat, car sa place n'était pas à des soirées mondaines et encore moins au bras d'une femme. Il ne voulait pas que cela remonte aux oreilles de personnes qui pourraient lui nuire. Autrefois, il n'en avait que faire des racontars, mais depuis tous ses tracas, il se devait de faire plus attention. D'autant qu'il n'était plus le même homme, il n'était plus aussi blanc qu'avant. D'ailleurs, il songea ce que Cassey ou Isa pourraient penser de cet échange de bons procédés qu'il avait contracté avec Amy.
Il hocha la tête lorsque, enfin, son interlocutrice le prénomma. "David. Ca me plait bien." indiqua-t-il simplement, laissant paraître un petit sourire sincère. Pourquoi pas, au fond? Dans tous les cas, c'était assez éloigné de Toby pour ne pas attiré des soupçons.

L'héritière enfila son masque, avant de se tourner vers lui. "Attendez..." souffla-t-il, tendant la main, qu'il passa sur le front de la demoiselle pour remettre des mèches rebelles en place, la caressant au passage sans le vouloir. "Voilà qui est parfait." ajouta-t-il ensuite. Toby savait pertinemment qu'elle voulait une coiffure complètement parfaite, sans un cheveux qui dépasse. C'était son image d'élégance qu'elle ne devait pas remettre en doute dans la société. Il se rendit alors compte qu'il s'était approché trop prêt, et reprit place sur son siège, où il attacha sa ceinture. "Oui, j'ai essayé... j'espère être à la hauteur. On ne s'improvise pas danseur modèle quand on a deux pieds gauches." indiqua-t-il en rougissant. "Et oui, ils viennent de commencer. Je pense que ça ira très vite." répondit-il à la question sur l'édifice. "Comment devrais-je me comporter exactement?" demanda-t-il ensuite. Devrait-il être formel ? Familier? Tendre? Plus bourru? Devait-il charmer ou se tenir à l'écart?

David donc. C'était décidé. Amy esquissa un petit sourire en retour, satisfaite de l'entendre approuver son choix. Caleb lui aurait bien été, mais le prénom David avait une douceur qui correspondait bien au caractère du prêtre. Et sa signification lui plaisait beaucoup aussi, à la brune. Cette dernière fut toutefois surprise par le geste de son voisin de banquette, elle s'immobilisa, telle une statue, lorsqu'il tendit la main vers elle, remplaçant une mèche de cheveux en place. Elle frémit à son contact, et dire qu'il ne touchait que son front ! Seigneur, mais que lui avait donc fait cet homme ? Cette réaction la perturbait et l'énervait à la fois. Elle détestait ne pas être en contrôle de ses émotions, et lui, en un seul geste, la troublait. Etait-ce la douceur dans son geste ? Cette attention toute innocente ? Qu'importe. C'était stupide. Complètement stupide. Amy fronça les sourcils lorsque le prêtre s'éloigna. Aussi soulagée soudainement, que déçue. Bon dieu, elle perdait la tête. Heureusement, elle détourna la conversation sur autre chose.

« Je suis sûre que vous ferez bonne impression ce soir. Nous ne danserons pas trop, même si c'est en forgeant qu'on devient forgeron ». Plus ils danseraient, plus il s'améliorerait, c'était ainsi que cela fonctionnait. Pour la danse et pour le reste. L'héritière hocha la tête, en effet, les travaux iraient vite. Les artisans choisis étaient compétents et surtout, bien payés. Quant à savoir comment le prêtre devait se comporter ce soir, exactement... « Vous resterez à proximité, pour cette fois. Le temps de vous familiariser à ce genre de soirée. » C'était bien mieux pour lui, tout comme pour elle, qui pourrait le tenir à l'oeil, de cette manière, éviter les incidents et lui permettre aussi de s'habituer un peu à l'ambiance, très particulière de ce genre de soirée.

« Soyez poli avec mes invités. Souriant. Attentionné. En fait, soyez vous-même, » rajouta la brune avec un sourire amusé. Cela le décrivait bien, en effet. « Vous êtes mon cavalier. Nous danserons ensemble. Je serai à votre bras. Essayez d'en avoir l'air fier. Vous pensez que ce sera possible ? »

Toby ne remarqua absolument rien du trouble dont il avait imbibé la demoiselle par son seul contact. Souriant, simplement lui-même, il se cala de nouveau dans le siège du véhicule. Il angoissait un peu, ne sachant pas ce qu'il en serait, mais déjà rassuré d'avoir une autre identité. C'était étrange car, d'un côté, cela l'excitait... C'était comme dans un film d'espionnage, alors que cela n'avait absolument rien à voir. C'était terrifiant et amusant à la fois. Il ne savait plus trop comment se placer moralement vis-à-vis de cette histoire.

Il acquiesça suite aux demandes de la brune. Rester près d'elle et être lui-même. "Très bien. Je pense que je pourrais faire ça, oui." répondit-il, tout sourire, laissant échapper un soupire. Il devrait mettre de côté ses doutes et ses craintes et jouer le jeu du jeune homme fière de sa compagne. "En effet, je trouverais cela rassurant, j'aimerais éviter les questions indiscrètes." indiqua-t-il. "D'ailleurs, est-ce que... Vous avez des réponses types? Je veux dire, je déteste mentir... Qu'est-ce que je fais si on me demande quelque chose?" Il espérait que, comme elle serait toujours près de lui, qu'elle se contenterait de toujours prendre la parole à sa place, si question gênante se présentait. Et c'était certain, dans ce lieu de prédilection des rumeurs, qu'il y en aurait.

Le véhicule s'arrêta subitement et le chauffeur se retourna pour indiquer qu'ils étaient arrivés. Les deux comparses sortirent de la voiture, se regardèrent, alors que Toby présentait son bras pour que la demoiselle puisse s'y accrocher. Et il tenta de garder fière allure, comme demandé alors qu'ils entraient dans la salle où se tenait la soirée, déjà pleine de monde.

Bien entendu qu'il pourrait faire ça. Être lui-même, rester auprès d'elle, ce n'était pas trop compliqué ni même trop demandé. Quant à éviter les questions indiscrètes... « C'est compliqué d'éviter les questions indiscrètes. Cela dit, il y a des réponses génériques que vous pouvez utiliser. Vous pouvez dire que nous sommes amis. Il n'y a pas d'autres précisions à donner. Restez vague, de toute manière. Un sourire peut également détourner l'attention, ou une autre question. » Technique qu'elle utilisait elle-même beaucoup. Elle lui servait encore énormément. Amis... C'était un petit mensonge. Qu'étaient-ils ? Probablement pas amis. Collègues. Plutôt. Mais ami serait plus « passe-partout », comme réponse. « Et si vous avez besoin de soutien, serrez-moi la main. » Elle saurait quand intervenir.

Amy observa leur destination se profiler à sa gauche. Ils étaient finalement arrivés. La brune s'extirpa de la voiture puis sourit à Toby, avant de posa sa main sur son bras offert. « Allons-y David » murmura Amy avant de faire le premier pas vers la salle où leur arrivée ne passa pas inaperçue. Les regards se posèrent sur elle, sur eux. « J'aurais peut-être dû vous prévenir que cela fait presque dix ans que je ne me suis pas rendue à une soirée mondaine au bras d'un homme. ». C'était même la première fois qu'elle s'y rendait au bras d'un homme, la première fois depuis Jéricho, bien sûr, même si ce dernier n'avait jamais été friand de ce genre de soirée. Il s'y était plié avec un amusement qui lui correspondait bien. Il était moqueur, son Jéricho. En toute discrétion. Il cachait toujours son amusement derrière un masque de sérieux, il lui gardait ses sourires malicieux pour l'intimité, et ça lui avait toujours convenu ainsi, à Amy, car elle agissait elle aussi de cette manière.

La brune dirigea leur duo vers les invités les plus proches, un petit crash test, et les salua avec un sourire. Celui qu'elle réservait à ce genre de soirée, à la société, un sourire bien différent que celui franc et naturel qu'on pourrait lui connaître dans le privé. Elle présenta Toby comme « David, son ami ». Les gens n'avaient pas besoin d'en savoir plus, même s'ils chercheraient certainement à creuser. Amy était capable de faire barrage et de dévier les questions, comme elle le fit d'ailleurs lorsqu'on interrogea le prêtre sur son activité professionnelle. Elle détourna subtilement la question avec une autre question, ponctuée d'un sourire. Elle s'éloigna ensuite, entraînant toujours le prêtre à son bras, jusqu'à la piste de danse, saluant sur le chemin d'autres couples résidant dans le Queens huppé. « Vous vous débrouillez très bien jusqu'ici David. Il est temps de me montrer vos progrès, » ajouta la brune avec un petit regard malicieux. « Aussi, je pense qu'il serait bon qu'on se tutoie. » Un ami qu'on vouvoyait, c'était limite, quand même.

"Ah, amis? Et nous le sommes?" demanda-t-il de faon malicieuse. Bien évidemment qu'ils ne l'étaient pas. Leur relation était basée sur l'argent et sur la menace. Et pourtant, au fil de leurs échanges, il semblait à notre jeune prêtre qu'il la connaissait un peu mieux. Il décelait que, sous ses airs froids et distants, se cachait quelque chose de plus doux, de plus sympathique, de plus chaleureux. Finalement, cela n'avait pas été une mauvaise idée d'accepter car il pourrait creuser cette piste... Et si elle voulait le comprendre, lui aussi aurait l'occasion de comprendre le mystère Amy Steele.

Lorsqu'ils entrèrent dans la salle de réception, Amy à son bras, tous les regards se tournèrent vers eux. Les yeux rivés dans leur direction, des messes basses se firent entendre, ainsi que des regards exagérés, lourds se firent voir. Toby était extrêmement mal à l'aise. Il fit de son mieux pour éviter de le montrer, que ses joues ne rougissent pas et ne trahissent pas ses sentiments et son envie de se terrer. "Ah, cela explique pourquoi tout le monde nous regarde ainsi... j'ai l'impression d'être détaillé comme un animal au zoo...Dîtes-moi, est-ce que vous avez ici plutôt des ennemis ou des amis?" souffla-t-il doucement à l'oreille d'Amy, de façon à ce que personne n'entende, et gardant un sourire sur le visage pour faire croire qu'il était en train de partager quelque chose d'amusant avec la demoiselle. Comme le ferait un ami... ou même un petit-ami.

Ils échangèrent quelques mots avec des personnes présentes. C'était rapide, et Amy semblait être une professionnel dans le jeu des sous-entendus et des certitudes. Elle faisait exactement ses investissements, tout en ayant l'air de discuter normalement. Toby était sidéré et très curieux de cette aptitude. Il était loin de l'homme politique, et très loin de la manipulation. Tout ce monde ne lui ressemblait guère. Pourtant, notre trentenaire souriait, répondait. Bref, il faisait le beau au bras d'Amy, qui le préservait de toute question indiscrète.
Finalement, sa partenaire l'emmena sur la piste de danse. "Très bien." répondit-il à la demoiselle, alors qu'un nouvel air de musique commençait et qu'il entreprenait de mettre en oeuvre ce qu'il avait appris. "Alors, Amy, qu'en penses-tu?" demanda-t-il, alors qu'il la tenait par la taille et la guidait dans la danse. "J'espère juste que personne d'autre ne me demandera pour une danse.." indiqua-t-il en riant. Il serait fort gêné de se retrouver séparer de la jolie brune. Ce serait un moment dangereux... D'autant qu'une jeune femme avait déjà tenté plus tôt d'entrer dans une conversation plus intime avec lui.

Etaient-ils amis ? Même si Amy connaissait la réponse, la question du prêtre la prit au dépourvu. Elle ne répondit donc rien. Non, ils n'étaient pas ami, en effet. Peut-être ne la considérerait-il jamais comme telle. Cela ne la gênait pas, c'était sans doute ainsi que cela devait être. De plus, des amis, moins elle en avait, mieux elle se portait. Avoir des amis, c'était risquer de les perdre. Et c'était un risque qui effrayait bien trop la quadragénaire pour qu'elle s'aventure sur cette voie, trop meurtrie par les pertes passées.

Et évidemment, ils ne passaient pas inaperçus. Amy Steele au bras d'un homme. Voilà une première depuis presque dix ans. Cela ne l'impressionnait pas, elle, mais elle savait que ça pourrait être une épreuve pour Toby. Elle était à ses côtés, toutefois, et ne comptait pas le laisser s'éloigner. Lorsqu'il se pencha pour souffler à son oreille, elle frissonna brutalement avant de se reprendre et lui répondre, offrant son sourire mondain à l'attention de ceux qui les observaient. « Vous devez vous douter que je n'ai pas beaucoup d'amis, non ? Et j'ai certainement plus d'ennemis. Néanmoins, j'évite de les inviter à mes soirées. Sauf lorsque j'ai une raison professionnelle de le faire. » Elle ne perdait jamais de vue son objectif, ami, ni son travail. Alors oui, il lui arrivait d'endurer des individus qu'elle ne pourrait voir en peinture, juste pour un gala de charité, afin de les délester de quelques centaines de milliers de dollars. « Ce soir, je dirais qu'il y a un peu de tout. Ne vous en faites pas, vous vous en sortez très bien, » le rassura-t-elle sur le même ton que lui, tout en gardant son sourire de façade pour la galerie.

Une fois sur la piste danse, la brune put attester de l'évolution de Toby pour la danse. Il s'était entrainé, même s'il n'en avait pas eu beaucoup le temps, elle pouvait sentir le changement. Il avait un pas plus assuré, maintenant, il savait ce qu'il avait à faire. Il savait aussi qu'elle suivrait son pas, comme la cavalière chevronnée qu'elle était. Et là, ce fut encore plus aisé pour elle de se laisser guider, maintenant qu'il endossait vraiment le rôle de celui qui devait guider leur duo. « Les leçons ont porté leur fruits, tu as du potentiel, je suis sûre que tu pourrais exceller dans ce domaine, avec un peu d'entraînement », répondit la brune. Cela confirmait ce qu'elle souhaitait faire, justement. Continuer les cours, apprendre de nouvelles danses. Elle aimait encore plus cette idée en l'imaginant danser un tango avec le prêtre. Leurs corps collés l'un à l'autre, entraînés dans une danse où les mouvements étaient harmonieux et à la fois intenses, tellement intenses... Oh, Seigneur, elle avait un coup de chaud, rien qu'à y penser...

Les paroles du prêtre la sortirent de sa rapide rêverie. Elle ne put s'empêcher de rire lorsqu'il partagea son inquiétude de se voir invité par une autre. Si on la connaissait un minimum, il n'y avait aucune chance que ça arrive. On ne touchait pas à ce qui appartenait à Amy Steele. Jamais. Bien sûr, il y avait toujours des aventureuses ou des ignorantes qui s'y risquaient, à leurs dépends. « Tu es mon cavalier David. Si quelqu'un te demande une danse, tu déclines poliment. » C'était aussi à lui à refuser, même si elle pouvait concevoir que ce n'était pas facile pour quelqu'un comme lui. « Et pour t'éviter ce genre d'inquiétude... » La brune laissa sa phrase en suspend. Elle cessa de danser et posa ses mains autour du visage du prêtre, se haussa légèrement sur la pointe des pieds et déposa avec douceur ses lèvres sur celle de Toby. Elle frissonna à nouveau, retint un gémissement. Ce contact l'électrisa complètement, tant que ses mains s'aventurèrent dans la chevelure de son cavalier, l'attirant davantage à elle. Son baiser se fit plus qu'une simple caresse de lèvres, plus fougueux, passionné, encore plus s'il répondait à son initiative. Elle s'y perdrait complètement, s'abandonnerait le temps de quelques instants, avant de reprendre le contrôle. Toujours reprendre le contrôle. Et de s'écarter pour lancer un regard malicieux au prêtre. « Maintenant, tu n'as plus à t'inquiéter », annonça-t-elle avec un petit sourire mutin. Elle venait de noter « Amy Steele » en majuscule et en gras sur le front du trentenaire.

» Shall we dance ? {Taby}
» Taby ♦ Lève toi et marche !
» Taby ♦ Petits mouchoirs
» Soirée entre ami
» Cette soirée ( Levi & Dax )