You are the strength that keeps me walking - Ainswell

Assise sur ce fauteuil d’hôpital, elle réalise à quel point sa vie a changé ces derniers mois, Kristina. Et jamais elle n’a imaginé qu’elle puisse se transformer de cette façon. Sa rencontre avec Katheryn, leur rapprochement, cela a été tellement inattendu. Et elle a dû faire face à un bon nombre de difficultés, aussi bien dans sa vie que dans son couple. Mais elle avait trouvé le bonheur, avec elle. Elle avait commencé à imaginer son avenir auprès de la quadragénaire. Seulement, sa vie a été bouleversée, une nouvelle fois, lorsque Katheryn l’a quitté. Depuis, elle a le cœur en miettes, Kristina. Elle n’a jamais eu aussi mal. Mais désormais, elle comprend. Katheryn a un cancer. Elle le sait depuis plusieurs jours. Plusieurs jours qui ont été un véritable calvaire. Parce qu’elle retrouve la femme qu’elle aime, peu à peu, mais dans des circonstances atroces. La jolie rousse ne parvient pas à encaisser la nouvelle, elle ne parvient pas à imaginer que Katheryn va faiblir, encore et encore. Et même si elles ne sont plus ensemble, elle veut être auprès d’elle, toujours. Elle veut être auprès d’elle à chaque instant. Elle veut lui tenir la main pour affronter chaque difficulté. La relever à chaque fois qu’elle en aura besoin. Elle l’aime, elle l’aime toujours, c’est indéniable. Elle fond toujours à chacun de ses sourires, elle craque toujours à chaque fois qu’elle voit sa petite tête fatiguée. Et leur relation est maintenant tellement particulière, tellement délicate, parce qu’elles ne sont plus un couple, mais depuis quelques jours, depuis qu’elle sait, elle se rend tous les jours chez elle pour la voir. Elle s’y rend tous les jours pour s’assurer que tout va bien pour elle, qu’elle ne manque de rien. Et pour le moment, elle n’a pas vu Katheryn au plus mal, et c’est une idée qui l’effraie. Aujourd’hui et pour la première fois, elle a décidé de l’accompagner à sa séance de chimiothérapie. Elle appréhende, elle appréhende énormément mais elle doit être forte pour elle. Et elle reste là, assise à côté d’elle en lui tenant la main. Son regard se pose sur les personnes autour d’elles, malades elles aussi, et pourtant il y a tellement de personnes seules. Tellement de personnes qui n’ont pas une main dans la leur. Et l’idée même d’imaginer Katheryn dans la même situation la bouleverse. Alors sans s’en rendre compte, elle serre un peu sa main dans la sienne, juste avant d’entendre ses paroles. - J’ai tout mon temps pour toi. Un petit sourire s’immisce sur son visage. A les voir comme cela, toutes les deux, personne ne pourrait imaginer qu’elles sont des anciennes petites-amies. Elles ont l’air de tout sauf de s’en vouloir, de se détester. Pourtant, elles sont certainement toujours meurtries par ce qui s’est passé, et Kristina a beaucoup de mal à l’oublier, mais rien n’est plus important que Katheryn. Kristina commence alors à caresser doucement sa main, puis son bras, pour la détendre un peu et lui faire oublier cette perfusion. Elle imagine à quel point cela doit être désagréable, à quel point cela doit être douloureux. - Tu étais toute seule...les autres fois ? Elle ne détache pas son regard du sien. Elle ne veut plus jamais arrêter de la regarder. Elle a déjà peur alors qu’elle sait pourtant que le pire reste à venir.  

Indéniablement, elles sont liées. Il y a quelque chose de fort, bien trop fort entre elles. Et Kristina se souvient encore de la première fois qu’elle a posé les yeux sur elle, dans cette salle de classe. Cela a été le coup de foudre immédiat. Leurs regards se sont croisés et ce fût comme si, à cet instant précis, la jolie rousse s’était retrouvée transportée dans un autre monde. Une autre galaxie. Seule avec Katheryn. Malgré tout, malgré les souffrances, malgré le déchirement qu’a provoqué leur histoire, elle ne regrette rien, Kristina. Elle ne regrette pas une seule seconde d’avoir laissé une chance à leur amour, parce que ce qu’elle a ressenti à ses côtés est la plus belle chose jamais ressentie. Elle regrette simplement la manière dont s’est terminée leur histoire. Elle regrette que Katheryn n’ait pas trouvé le courage d’affronter ce cancer avec elle. Malgré tout ce qu’elle lui a donné, Kristina. Malgré tout l’amour qu’elle lui a offert. Cela n’a pas suffi. Et c’est ce qui lui fait le plus mal, au fond. Parce que lorsqu’elle se tient là, assise à côté de la femme qu’elle aime, tenant sa main pendant qu’elle subit sa dialyse, elle réalise qu’elle l’aime et l’aimera toute sa vie. Katheryn lui a arraché le cœur, et pourtant, il bat toujours pour elle. Il battra toujours pour elle, qu’il soit dans sa poitrine ou non. - Je ne me sens pas obligée. C’est ma place, Katheryn. Dit-elle, un doux sourire sur les lèvres. Parce qu’elle le pense vraiment, Kristina. Elle reste la personne qui aime certainement Katheryn le plus au monde, et qui d’autre qu’elle pourrait en prendre soin aussi bien ? Et puis quoi qu’elle en dise, Katheryn a besoin d’elle. Kristina l’a senti, l’autre soir, lorsqu’elle se serrait dans ses bras. Alors qu’elle se raccrochait à elle comme à sa propre vie. Mais Kristina est heureuse d’entendre qu’elle n’a pas été seule, qu’elle n’a pas été seule à chaque fois. Que son amie infirmière a su veiller sur elle lorsqu’il le fallait, lorsqu’elle n’était pas là. - Tu la remercieras de ma part. Elle continue à caresser sa main, son bras, de tout son cœur. Tout son amour. Mais au fond, cela lui fait mal. Parce que Katheryn la tenue à l’écart de sa vie alors qu’elle a su en parler avec d’autres. Et puis elle entend parler de cette Astrid, la fameuse, la femme avec qui elle l’a surprise la dernière fois. Détournant un peu le regard, elle reprend alors la parole. - Et… C’est qui, cette Astrid ? Elle a besoin de savoir. Elle a besoin de savoir si oui ou non, elle a eu une aventure avec cette femme. Si elle l’a remplacé aussi vite qu’elle ne le pense.

Katheryn a une difficulté monstrueuse à accepter que quelqu’un la soutienne. Que quelqu’un soit là pour elle, coûte que coûte. Que quelqu’un l’aime au point de ne jamais l’abandonner. De ne jamais s’en aller. Katheryn a du mal à accepter l’amour, en réalité, et c’est ce qui a mis fin à leur couple. Si seulement elle était capable de le comprendre, si seulement elle était capable de réaliser qu’elle avait juste sous ses yeux quelqu’un capable de l’aimer pour le reste de sa vie. Et ce n’est pas ce cancer qui aurait changé quoi que ce soit. Ce n’est pas ce cancer qui changera quoi que ce soit. L’amour de Kristina est bien plus puissant que n’importe quoi. Peut-être parce que c’est la première fois qu’elle aime, qu’elle aime réellement, qu’elle est amoureuse, mais elle est prête à combattre le monde entier pour Katheryn. Elle aurait pu tout lui donner, elle lui a tout donné. Et même maintenant, elle ne s’imagine pas une seule seconde se lever et quitter cette pièce. Elle ne s’imagine pas la laisser ici, avec cette perfusion dans le bras. Elle se contente de lui offrir un léger sourire, un sourire qui veut dire je ne bougerai pas d’ici. Et puis, elles en viennent enfin à parler d’Astrid. De cette femme que Kristina pensait être sa nouvelle compagne. Mais finalement, il n’en est rien. C’est une vieille amie du lycée, qu’elle ne voit pas souvent, ce qui explique que la jolie rousse n’ait jamais eu à en entendre parler. Kristina baisse alors le regard quelques instants. Elle se sent stupide de lui avoir fait cette scène en pleine rue. Elle se sent stupide aussi vis-à-vis d’Astrid qui n’a fait que prendre soin de Katheryn lorsqu’elle en avait besoin. - Oh… Après un instant seulement, elle ose la regarder de nouveau, serrant légèrement sa main dans la sienne. - Je suis désolée pour l’autre jour. J’étais malheureuse à cause de…notre séparation. Et ça m’a fait disjoncter. Elle s’en veut de lui avoir hurlé dessus en pleine rue alors qu’elle est malade. Alors qu’elle a retrouvé son ancienne petite-amie emmitouflée dans le pull qu’elle a laissé à l’appartement, quelques jours plus tôt. S’approchant un peu plus d’elle, Kristina remonte doucement sa main jusqu’à son épaule, elle la recouvre de sa tendresse, comme elle l’a toujours fait. - Et le garçon avec qui tu m’as vu à l’université, je ne suis pas avec lui. Elle ne veut plus lui faire croire quoi que ce soit. Elle ne veut pas lui faire de mal en lui laissant penser qu’elle l’a remplacé, qu’elle est heureuse avec quelqu’un d’autre. Katheryn souffre déjà bien assez, et cela crève les yeux qu’elles s’aiment toujours.

Katheryn semble réaliser à quel point elle a fait des erreurs, à quel point elle s’est trompée. Et même si Kristina est heureuse d’entendre qu’elle regrette ce qui s’est passé entre elles, ce n’est pas non plus ce qu’elle souhaite. Elle ne veut pas voir la femme qu’elle aime se tourmenter pour tout cela, pas alors que la seule chose importante est sa guérison. Evidemment elle lui a fait du mal, beaucoup, mais elles sont là aujourd’hui, l’une près de l’autre, et c’est tout ce qui compte. Il n’y a rien de plus important que cette force qu’elles ont à deux. Rien de plus important. Parce qu’elle a bien compris, Kristina. Elle a bien compris que Katheryn n’a jamais voulu lui faire le moindre mal. Qu’elle n’a jamais voulu la blesser. Il faut simplement croire qu’elle n’est pas très douée lorsqu’elle cherche à la protéger. Pourtant, pour une fois, avec cette phrase elle tombe juste. Elle ne peut pas la remplacer et elle ne veut pas le faire. Le cœur de la jolie rousse se serre instantanément. Elle a tellement souffert en imaginant que Katheryn puisse avoir tourné la page. Elle a tellement souffert en l’imaginant dans les bras d’une autre. Au fond, elle n’aurait jamais pu s’en remettre de la savoir de nouveau en couple, sans elle. - Tu aurais dû, oui. Elle aurait dû lui laisser le choix. - Mais n’y pense plus, d’accord. Je sais tout maintenant et il faut que tu essaie de prendre les bonnes décisions pour guérir. Un petit sourire s’installe sur son visage, son regard sur elle se fait beaucoup plus tendre. L’amour transpire de ses yeux, et qu’elle le veuille ou non, elle ne peut pas l’effacer, Kristina. Et vraisemblablement, c’est la même chose pour Katheryn qui vient poser sa main sur la sienne, cherchant son contact. Lui avouant que, la voir avec cet homme lui a fait beaucoup de mal. Elle cherchait surtout à l’oublier, Kristina. Et lorsqu’elle l’a vu, elle lui a laissé croire qu’il était son petit-ami pour la blesser. C’est ridicule, elle en est parfaitement consciente, mais l’amour fait parfois faire des choses stupides. - Je n’ai pas envie de me remettre avec quelqu’un. Affirme-t-elle comme pour la rassurer, juste avant de reprendre la parole. - J’ai essayé de t’oublier parce que… Parce que j’en pouvais plus de penser à toi. Elle n’en pouvait plus d’avoir le cœur arraché. Elle n’en pouvait plus de souffrir. De se sentir mourir à chaque instant. - Mais je n’ai jamais voulu me remettre en couple sérieusement avec quelqu’un. C’était idiot de te laisser croire le contraire.  Idiot alors qu’au fond, elles s’aiment plus que tout. Mais la question suivante de la quadragénaire est beaucoup plus délicate. Beaucoup plus difficile à gérer. Non, elle ne va pas bien. Mais comment lui expliquer cela. Alors elle se contente d’hausser les épaules, sans grande conviction. - Ce n’est pas facile non plus… Je vis chez Isa pour le moment. Elle dort chez elle, lorsqu’elle n’est pas trop occupée à boire jusqu’à tomber ivre morte en soirée, chez des amis, en boîte de nuit.

Elle aimerait pouvoir changer le passé. Pouvoir revenir en arrière et laisser une chance à Katheryn de prendre une autre décision. Mais elle n’a rien contrôlé, Kristina. Elle n’a rien pu faire. Et les mauvais choix de Katheryn ont eu raison de leur histoire, de leur couple. La quadragénaire semble le réaliser mieux que personne, elle regrette de l’avoir blessé, elle souhaitait la protéger et Kristina l’entend. Elle l’écoute. Plus encore, elle le comprend. Mais malheureusement, les regrets ne pourront pas tout effacer entre elles. Le passé ne peut pas être changé, il n’y a plus que l’avenir. Et l’avenir, pour qu’il soit heureux, il faut que Katheryn guérisse. C’est pour cette raison que Kristina est là, aujourd’hui. Elle prendra soin d’elle le temps qu’il faut. Elle lui tiendra la main jusqu’à ce qu’elle sorte de cette maladie. La jolie rousse n’a aucune envie de l’accabler encore davantage avec des reproches, avec des cris, de la colère. Comme Katheryn le dit si bien, elles ont déjà bien assez souffert toutes les deux, et il est hors de question qu’elles se déchirent plus encore. Elles doivent faire front, toutes les deux, pour combattre le cancer. Et Kristina ne tournera jamais le dos à la femme qu’elle aime, elle en est persuadée. - Tu sais, ça n’excuse rien mais… Tu as paniqué et… Je sais que tu voulais m’épargner, me protéger de ta maladie… Cela n’excuse rien, car Katheryn n’a visiblement toujours pas compris qu’un couple affronte les choses ensemble, et ce même après des mois de couple avec elle. Mais en revanche, cela se justifie. Et elle comprend bien la peur de son ancienne petite-amie. Katheryn a dû penser qu’à vingt et un ans on est bien trop jeune pour affronter un cancer. Et elle n’a peut-être pas tort, mais devoir dire adieu à la femme qu’on aime, c’est bien pire encore. Abandonner la femme qu’elle aime, d’autant plus en la sachant malade, c’est juste insurmontable, pour Kristina. Et s’il était arrivé quoi que ce soit à Katheryn, sans qu’elle ne soit là pour l’aider, elle n’aurait jamais pu s’en remettre. Elle ne répond rien aux secondes paroles de la belle, elles ne s’en veulent pas, ni l’une ni l’autre, et c’est une évidence. Il n’y a rien à ajouter à ce sujet. En revanche, la question de Katheryn serre le cœur de Kristina. Est-ce qu’elle pourra lui pardonner ses erreurs ? Oh, elle en a pardonné tellement déjà, Kristina. Leur début de relation n’a été qu’erreurs sur erreurs. Et elle a tout oublié lorsque Katheryn a su reconquérir son cœur. Un faible sourire s’installe sur son visage, la jolie rousse est bouleversée, totalement bouleversée. Elle dépose un baiser contre la main de Katheryn en reprenant la parole. - Bien sûr, bien sûr que je pourrais te pardonner… C’est juste que… J’aurai aimé que cela ne se finisse pas de cette façon entre nous… Elle baisse les yeux, un bref instant. Elle n’a aucune envie de la détester, alors son pardon, elle peut lui offrir. Mais cela ne change pas le fait qu’aujourd’hui elles ne sont plus ensemble, et c’est ce qui est le plus douloureux pour elle.