(ellia) stardust

01/ le coeur ancré dans un rien, laissé à l’abandon à la première respiration. un coeur qui bat sans savoir pourquoi. une enfant laissée à périr dans les bras de ceux qui deviennent parents - le sang qui a coulé traverse ses veines, lui rappelle tout ce dont elle ne peut se souvenir, tout ce qu’elle tente d’oublier pour autant. vivre sous le fardeau d’un amour fabriqué, sincère d’un côté, faux de l’autre. années passées à grappiller le moindre geste, le moindre sourire d’un père qui a feint un jour vouloir être le sien. 02/ recueil d’une âme juvénile, innocente, prête à tout apprendre, le bonheur, l’amour mais les cris, les pleurs. deux mains filtres du bruit à protéger les oreilles qui ne voulaient pas entendre les disputes. rien d’alarmant; l’amour, c’est compliqué. l’amour, c’est beau mais c’est houleux. tout va bien ou tout va mal. témoin d’un semblant et d’une atmosphère aussi froide que son lait du matin. ellia s’est toujours tu face aux yeux rougis de sa mère, face aux traits durs de son père. ellia s’est toujours tu, à faire semblant que tout allait bien. parce que tout allait bien. 03/ vagabonde, les yeux noirs se lèvent sur les autres pour jouer, manipuler, faire de son image brisée une arme aiguisée. habituée aux semblants, les sourires contrôlés captivent et si l’amour propre disparaît, il se remplace par l’amour illusoire et éphémère de celles et ceux qui arrivent à l’admirer. tête haute, à faire croire, toujours, sans un seul faux pas. allures de princesse inaccessible dont le piédestal est fait d’illusions auxquelles elle ne croit même pas. mais c’est beau, ça fait du bien. puissante, intouchable, envoûtante. pour laisser les larmes contre les draps. 04/ mais el a peur, el est terrifiée. tremblante entre les murs solitaires, à ne plus pouvoir croiser un miroir. el a la terreur qui lui bousille les entrailles, qui domine ses choix ou le court de sa vie. el a peur, constamment, sous le regard de poupée, rempli d’obscurité. vivre avec n’est plus douloureux, devenue seconde peau, lui allant à ravir. elle lui dessine sous les yeux le poids d’une émotion transformée en force, qui lui relève le menton, lime ses paroles pour se protéger. el a la peur qui suffoque, qui s’affole, qui se cache. à jamais peur que tout lui échappe encore. 05/ les couleurs se dérobent entre ses doigts, les pinceaux qui caressent les peaux, concentration sur un art salvateur - bulle protectrice, el s’échappe, s’envole, transforme. les palettes s’appliquent sur les paupières, les traits fins se dessinent, les cils noirs, la bouche rouge. el maquille pour le spectacle, chaque soir avant de servir ceux qui regarderont son prodige. et parfois, el se prépare derrière, elle aussi. les mouvements de son corps en parfait accord avec les lumières ou la mélodie. el s’est créé un monde dans lequel elle peut en être la reine.