Ça s'annonce être une grosse journée. Midi, t'es assise à ton poste, y'a un monde fou à l'expo, putaing de journée en famille et des enfants qui courent partout près des toiles qui valent plus cher que leur vie vaudront jamais. OH GOD. T'avais oublié la putain de journée familiale le samedi, trop longtemps que t'avais pas bossé les samedi. Arf. Tu sirotes ton café en grognant, commence à te taper le rush des clients alors qu’officiellement t'as même pas vraiment commencé ton quart. Trop serviable. Même si on ne te payera pas les deux dollars de boulot que tu fais plus tôt, pour gratis. Tu rush, te trouves un sourire et le porte même avec les clients les plus cons. La voix douce, un octave plus haut les sourcils levés pour faire sympa, tu fais des petites blagues de vieille tante que tu ricanes avec les vieilles dames. T'as l'air moche avec ta vieille couette mais au moins t'es souriante. À peine une heure de rush, les gens se sont calmés le cul. On compris qu'en deux clics ils peuvent avoir leurs billets pour l'expo plutôt que de te faire chier et attendre et tout.
Bref une heure en poste et voilà, tu t’emmerdes. T'essayes de tapocher du bout des doigts des histoires qui veulent pas sortir, parce que ton bureau est trop creux, dans un endroit où il manque de soleil et de vie. Pour ça que t'es aussi pâle. Tu jettes donc ton dévolu sur Youtube et Tumblr. Des histoires de dramas entre les gourous beautés, des belles crises d'enfant pour des riens du tout. Tu t’ennuies vite, tu voudrais juste être dans ton lit. Reprendre les heures de sommeil que t'as niquées à force de sieste. Parfois, les cernes sous tes yeux te promettent que tu pourrais dormir non-stop pendant un an. Au mieux ça s'agence au bleu pâle de tes yeux, aux veines au travers de ta peau diaphane.
Tout va bien. Ou plutôt, tout allait bien alors que tu termines de dévorer un beignet coloré, les doigts encore trop sucrés que tu portes à tes lèvres en fixant ton écran qui te perds le temps. Sauf que soudain, ouais. Y'a deux types qui tentent de sortir, se retrouvent prisonnier de ton hall d'entrée, se cognant aux seules portes verrouillées. Comme des oiseaux qui foncent fièrement dans des vitres. Tu ricanes dans ta barbe. Avant de le voir. Avant de réaliser. Putain, c'est Carlos. Carlos le pote d'une pote. Carlos le gars qui t'as déjà fait jouer dans l'un de ses films, qui était là quand ton ex t'a présenté fièrement sa nouvelle pote. Qui t'as invité encore et encore chez-lui. Qui t'as dit que ne pas tomber amoureuse de lui, juste avant de te faire l'amour. Ass fucking hole. Il est là, te souris bêtement, te dis qu'il a pas l'temps de te parler, qu'il doit aller manger et tu te demandes ce qu'il fait là. Il dit qu'il va revenir te voir mais c'est faux. Carlos c'est le gars qui a baisé puis jamais répondu aux sms. Okay, t'as peut-être été intense, mais il l'a fait exprès de te faire craquer pour lui, comme quand on dit de ne pas penser à un éléphant rose, tu lui indiques la porte pour sortir, une vingtaine de minutes plus tars, la porte pour revenir, parce qu'il bosse sur l'installation de la nouvelle expo. Ton coeur se tord pas après le sourire malaisé que vous échanger. Non, tu ressens juste de la haine. Toi, petit être de lumière, petit ange de soleil, tu lui veux du mal. Tu bouilles. C'est pas que lui, mais il est l'emblème de tout ceux qui on croqué ton coeur et se sont foutus de ta gueule, la bouche encore pleine. Tu bouilles, tranquillement, mais tu vas bientôt exploser. Il te faut une pause.
Tu fermes tout, met le téléphone en attente et verrouille tout. La comptable voulait que tu prennes une pause, ba tiens, tu vas prendre un bon vingt minutes. Et l'arrêt de nicotine qui dure depuis hier aprèm ? Niqué ! Tu files t'acheter un paquet tout neuf et un énième briquet. Pas vraiment l'choix, t'en prends un noir avec une meuf nue et siliconée dessus. Ça fait quand même style. Style grosse lesbienne. Tu reviens devant la galerie d'art, te poses sur le sol devant une fenêtre. Tirant une clope pour le portant à tes lèvres, l'allumant. La première bouffée te calme déjà, la deuxième t’apaise. Tu fermes un peu les yeux, renvois ta tête vers l'arrière. Freak un peu quand une araignée grimpe sur toi. La chassant en criant. Puis tu te rassois un peu plus loin. Bon, ça va, on peut te foutre la paix aujourd'hui ou sinon, toujours ? Tu regardes ton portable vide. Vides des messages de ton petit ami qui t'as oublié, qui ne restes plus dormir avec toi les soirs, depuis que t'as officialiser les choses. Rien ne vas bien, hein ? Nope. Tu ranges furieusement ton portable, regarde plutôt la vie se passer devant toi, sous le soleil timide, la vie qui se passe sans toi.