side effects, (wilkes)

dialogues :

Les sanglots continuent de la secouer. Lui arrachent la gorge, lui détrempent les joues. La mauvaise drogue qui tombe au fond de l’estomac, tirée de force dans une réalité qu’elle avait désespérément tentée d’échapper. Ander trop réel, trop brusque, face à une Mimi qui veut se laisser retomber comme une poupée de chiffon. Ne plus trop faire partie du monde, pendant quelques heures, mais il ne le laisse pas. Ne veut pas qu’elle se défile - n’en a plus le droit, après ce qu’elle a fait. Après ce qu’elle lui a fait subir, ce qu’elle a fait subir aux autres. Mimi qui est désolée, mais qui n’arrive pas à l’être, qui ne veut pas affronter tout ça. Trop réel, trop douloureux, elle préfère s’échapper, se défiler, trouver autre chose, quelque chose de stable contre lequel se fracasser, elle se préoccupera du reste quand - quand ? Jamais. Elle ne fait pas dans les regrets, sauf quand son jumeau l’y force, et voilà qu’il ne cesse de la brutaliser, de la forcer. Mimi, toujours en sanglots, résignée à se laisser crever s’il le faut, n’importe quoi sauf se remettre sur pied, pff, elle a déjà essayé, ça a pas marché. Ça sert à rien, de toute façon. Elle et Flip en sont les preuves vivantes. Quand on est maudit, c’est pour la vie.

À peine quelques pas, les pieds qui se traînent contre le sol rempli de débris. Quand soudainement, on lui attrape les cheveux. Les doigts qui tirent violemment sa tignasse déjà en bordel. Ça lui arrache un cri strident, éraillé, à peine assumé. Ses mains qui essayent d’attaquer la main ennemie, mais c’est sans peine -  la poigne d’Ander est trop solide. Il la traîne jusqu’à lui, et elle continue de couiner. La voix brisée, la gorge éraflée. « Let go ! » Qu’elle veut hurler, mais ça ne sort qu’en un gémissement pathétique. Le visage de son jumeau confronté au sien, les sanglots qui redoublent d’ardeur, alors qu’elle se essaie de se débattre, sans vraiment le pouvoir. Chaque petit mouvement qui envoie des ondes de douleur, les larmes qui coulent de ses yeux, torrents brûlants. « Yeah you fuckin’ stabbed me. And if you didn’t want me to come after you, you should have fuckin’ killed me. But you can’t even do things properly, can you Mimi ? » Les pleurs qui continuent, les sanglots de l’animal blessé. Elle essaie de lui arracher les doigts de ses cheveux, mais il tire, lui arrachant un autre cri éraillé. « Ander, stop ! » Les murmures incontrôlables, stop, please, please, you’re hurting me. Le regard forcé à se frotter au sien, à plonger dans sa colère. À voir ce qu’il voit, juste une foutue junkie pathétique. Il a raison, juste une idiote qui ne sait rien faire, rien terminer, qui accumule les erreurs et les conneries, qui détruit tout, qui ne construit rien. Moins que rien. « Now you’re gonna stop being such a sorry ass. You’re gonna find the fuckin’ money you owe whoever-they-are, and you’re - gonna - get - your - fucking - shit - together. » Le corps secoué, comme un jouet usé, maltraité. Mimi qui continue de sangloter, la douleur toujours aussi perçante. « Y’hear me Mimi ? » Le regard qu’elle ne peut pas éviter, la voix relevée. « Fine ! Fine. I hear you… I hear you. I’ll do it. Please… » Et finalement, il la libère. Mimi qui vacille un peu, pose sa main contre l’arrière de sa tête douloureuse. Les sanglots étranglés qui lui manquent de s’étouffer. « I’m sorry. I’m sorry. » Continue de couiner. La colère et la violence de son frère, qui la secoue toute entière. Elle ne peut pas le blâmer, pourtant. Il a raison. T’es qu’une vermine, Mimi.

Claque à l’arrière de la tête, Mimi qui couine. Gémit, comme une âme en peine. « Now walk out. » Elle renifle. Main toujours posée sur sa nuque, comme pour la protéger. Les yeux qui se relèvent vers son frère, vitreux, rouges, larmoyants. « We’re gonna find you a place to stay for the night. You ain’t gonna bail on me this time. » Elle renifle, à nouveau. Glisse sa manche sur son nez, sur ses joues, pour enlever les larmes. Tremblante, la voix qui parvient mal à retrouver de son ampleur. « Yeah, yeah. Ok. » Regard fuyant, alors qu’elle mets son corps en mouvement. Difficile, d’avancer. Le petit pas chétif de celle qui ne voudrait que pouvoir disparaître. Ça ne sert à rien d’essayer de se défiler - Ander l’a dit. Il ne la lâchera pas. Cette fois, t’as pas le choix. Et alors elle fait glisser ses chaussures trouées sur le sol du squat. Se traîne, jusqu’à l’extérieur. Le corps toujours secoué de sanglots, reniflant à toute allure. Essuyant des yeux brumeux, recroquevillée sur elle-même. L’ombre d’Ander derrière elle, qui guette ses mouvements. Pas comme si elle pouvait courir, de toute façon. L’extérieur qui frappe les joues, qui secoue l’esprit. Mimi qui prend une grande inspiration, avec un regard pour son frère. Ander, si différent d’elle, et pourtant si semblable. Deux morceaux d’un même être, un être trop paradoxal pour être stable.

Mimi ne sait pas où aller. Mais elle trouvera. Ils trouveront. Jusqu’à la prochaine chute.

dialogues: