neon impasse | héra

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neon impasse
@héra harper

Il est tard, Jimmy vient à peine de s’endormir après avoir écouté une des histoires pour enfant que tu lui racontais le soir. Lessivée de la dure journée que tu venais de passer, enchaînant les cours chez tes clients le matin, t’occupant du gamin l’après-midi, tu t’affalas sur le canapé. Ta vie avait tellement changé ces dernières années, l’ancienne Romane n’était plus qu’un vague souvenir, quoique certains de ces petites addictions te donnaient envie parfois, mais tu ne pouvais pas retomber aussi bas. Tu ne le devais pas. Pour Jimmy. Dans quel environnement allait-il grandir si sa mère redevenait ce qu’elle était durant ses années d’adolescente ? Tu te rappelais encore ta mère, qui elle n’était pas alcoolique, mais qui était arrivée à te détruire au plus haut point. Ce genre de relation mère-fille, tu n’en voulais pas pour ton fils. Tu lui voulais un bonheur tellement grand que tu ne l’avais même pas encore connu toi-même.

La pluie qui s’écoulait dehors t’apaisait, comme une berceuse. Tellement calme que tu t’endormis, là, sur le sofa du salon, sans t’en rendre compte. Il était seulement vingt et la maman que tu étais devenue s’endormait comme un vrai bébé à chaque fois. Les nuits que tu passais étaient souvent entrecoupées des pleurs de Jimmy, il ne dormait jamais bien, en grandissant ça ne s’était pas arrangé de ce côté là. Ta vie était devenue d’un tel ennuie. Seules quelques personnes te permettait de ne pas oublier la jeune femme que tu étais. Celle qui avait le droit de s’amuser, de rencontrer de nouvelles personnes. Tes yeux s’ouvrirent à nouveau deux heures plus tard, la pluie ne s’était pas arrêtée. Une envie de boire quelque chose te prit, comme à chaque fois que tu te réveillais. Ton bon côté te résigna à prendre un verre de soda. N’ayant plus rien dans le frigo, tu décidas de commander des sushis d’en face, aucune envie de sortir t’engager sous cette tempête. Ton téléphone vibra sur le plan de la cuisine, un rapide coup d’oeil, c’était Héra qui était en chemin, ça lui arrivait très souvent de débarquer quelques soirs sans prévenir chez toi. Ton frère n’était pas là, sortit quelques heures plus tôt tu ne sais où, sûrement à la reconquête de son ex petit ami. Ces deux-là ne pouvaient pas rester séparés plus longtemps, tu le savais, connaissant Gabin et Nate depuis le temps, peut-être trop même. Une dizaine d’années et des soirées passées. Tu répondis au message de la belle Héra, en lui parlant furtivement de sushis.

Tu t’installas à nouveau sur le sofa et observa l’extérieur par les grandes fenêtres qui arpentaient les murs du loft. Les neons de la rue d’en bas reflétaient sur ton visage.

Quelques minutes passèrent et une première sonnerie se fit entendre. C’était le livreur de sushi. Plus rapide que ton amie.

Et enfin Héra se pointa. Sans frapper. Tellement habituée à entrer comme chez elle.

« C’est pas le moment de me dire que t’es allergique au poisson, je peux plus annuler. » Tu pris la brune dans tes bras, lui déposa un baiser sur sa joue en guise de bonsoir, tu avais toujours été tactile depuis ta tendre enfance. « Je vois que t’es bien arrosée. » La pluie ne se faisait jamais d’amis.

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@Romy Harrington

'La danseuse étoile sera Héra' Des astres plus brillants que le soleil naissent dans ton regard à l'entente de ces mots si attendu, si désirés, par cette petite fille rêveuse que t'as toujours été. Tu as ton petit cœur qui tambourine fort dans ta cage thoracique, l'adrénaline qui coule encore dans tes veines après une performance exceptionnelle ; et les cristallines prêtent à s'élancer sur tes joues encore enfantines. Tu es Joie et Fierté à la fois. C'est un rêve, un rêve qui s'accomplit dès ce soir. Enfin. Tu touches le summum, tu atteins l'apogée d'une carrière toute entière. Ou pas. Tout ça, ce n'est que dans ta tête, pauvre gamine. Petite Alice des temps modernes, t'as été éjectée du monde des merveilles. Ce n'est pas Héra qui brillera vendredi soir, mais la grosse Lara. Tu redescends bien vite, la réalité te rattrape ; tant insidieuse que douloureuse. Tu te prends une gifle ; forte et violente. C'est la baleine qu'ils ont choisie, et tu la détestes pour t'avoir volé la vedette. Dans ton regard, les astres deviennent nébuleuses, tandis que le vert de tes pupilles s'assombrit d'une couleur encore plus sombre que le noir en la regardant se pavaner. T'es jolie d'apparence, c'est vrai, mais t'es bien laide à l'intérieur ; tu le sais. La jalousie envenime ta salive. « Boule de suif, vraiment ? » Elle te fait marmonner des choses inaudibles pour tout le monde, sauf pour cette colère que tu nourris, là, caché bien au fond et qui te pourrit ta beauté d'âme. Colère qui bout, brûle tes veines, saccage toutes pensées. Pensées qui d'ailleurs se pervertissent à mesure que tu l'observes elle, et son hideux sourire. Grosse et laide ; voilà ce qu'elle est. Pourquoi elle ? Pourquoi elle ? Pourquoi elle ?! Litanie qui devient poison. Chaque pensée n'est dédiée qu'à cette garce que t'imagines déjà étalée sur le sol, en bas de l'escalier … Avec une ou deux jambes cassées. Elle souffre, et tu souris. Oh t'es horrible, jolie poupée. C'est vrai. Le pire c'est que tu le sais, mais ce n'est pas de ta faute, non. C'est celle de cette ambition dévorante, de tes rêves de grandeurs que toutes ces connes te volent à chaque spectacle depuis trop longtemps déjà. Tu l'as remarqué, la passion de la danse te dévore. Mange ta chaire, morceau par morceau, rogne tes os … Se délecte de ton âme. Tu te mords la lèvre. T'as cette envie de pleurer ; doux mélange d'une colère sourde et d'une amère déception ; mais tu ne le fais pas. T'es trop fière pour montrer tes larmes. Il faut que tu sortes. Vite. Tu te changes rapidement et tu te jettes littéralement dehors. Il pleut à torrent, mais tu t'en fiche. Pluie ou larme, ton visage est humide. Tu cries de frustration, et tu te jures que la prochaine, elle sera pour toi cette victoire. Ton pied tape dans un caillou, et tu cherches ton téléphone bien au fond de ta poche. 'J'arrive'. C'est tout ce que t’envoies, il n'y a jamais eu besoin de plus de toute façon. Parce que c'est elle. Tu te sens horriblement mal ; il faut que tu la voies. Maintenant. C'est toujours Romy qui te prend dans ses bras quand tu pleures, parce qu'elle est délicatesse ; quand Roméo est passion. Tu marches comme un fantôme dans les rues, quand t’arrives enfin chez la jolie blonde. Tu ne frappes pas. Inutile. Chez elle c'est un peu chez toi, au final. Elle est là ; enfin. T'as ce sourire qui se dessine automatiquement sur tes lèvres, parce qu'elle a ce pouvoir sur toi Romy ; et elle te prend dans ses bras, comme prévu. Après un bisou sur la joue, tu te niches dans son cou, hume doucement ce parfum qui te calme, apaise ton esprit déglinguer. Tu t'en fiche si t'es trempée. « Poisson ? » Tes yeux se posent sur un sac qui se trouve sur sa table basse. Du japonais. « Tu sais bien que j'adore les sushis ... » Tu te détaches un peu d'elle, tu renifles. « Oui, c'est le déluge dehors. » Comme dans ton cœur.

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@héra harper

Chaque fois que tu posais les yeux sur celle qui portait le nom d’une déesse grecque, tu pensais à une autre connaissance, elles se ressemblaient tellement que la première fois que tu l’avais croisé, tu l’avais de suite détestée, comme si la haine que tu entretenais pour l’une s’était directement collée à l’autre. C’était surtout une ressemblance de caractère, elle qui te faisait tant penser à ton ex petite amie d’il y a quelques années. C’était loin dans le temps, mais toujours là, présent dans ton cœur, enfoui sous des décombres de bonheur et de rancœur comme si c’était hier. La pire trahison, celle qui t’avait fait plonger dans le néant, accélérant ta chute un peu plus. Tandis que l’une t’avait enterrée, l’autre t’avait réveillée. Parfois, tu te demandais même si ton cerveau n’avait pas transporté tes anciens sentiments – toujours existants, malgré les années – sur une personne qui était capable de les supporter, sans vraiment l’avouer. Parce qu’avec Héra, au début, ça avait été très compliqué, elle qui était si proche de Roméo, elle qui avait un caractère aussi sanglant que le tien, presque pire. A l’époque, tu l’aurais surpassée, mais aujourd’hui, ton fils t’avait calmé, il t’avait apaisé et t’avait fait grandir. Tu avais laissé l’alcool couler dans tes veines et finalement s’en échapper, car c’était lui qui te rendait si froide et désagréable. Puis avec le temps, tout était rentré dans l’ordre. Maintenant, vous en étiez là, à passer du temps ensemble sans vraiment savoir comment nommer ce sentiment. Elle qui était dans les griffes d’un autre démon et que tu souhaitais sauver, les deux si possible. Sinon, le choix serait très dur à faire.
Tout en l’enlaçant, tu remarques ce que tu n’avais pas vu dès les premières secondes, tu ne savais plus si c’était la pluie ou les larmes qui avaient refroidi son beau visage de poupée. Une de tes mains emmêlée dans ses cheveux frôle sa joue, ton doigt qui essaye de balayer ces gouttes loin d’ici, car tu détestes voir les gens que tu aimes dans cet état. Aujourd’hui avait été une journée importante pour la ballerine, elle t’en avait parlé. Et tu savais que ce milieu était vraiment trop exigeant, il faisait mal, comme un couteau dans le dos après tant d’effort donné. Tu avais bien ramassé des morceaux de Mia à l’époque, elle qui avait fini par être en haut de l’affiche, mais sans toi. La natation était déjà un secteur dur et fatiguant pour toi, tu n’imaginais pas ce qu’était la danse pour certaines filles. Toute leur vie. C’était le cas pour Héra. Et telle de vraies compétitives, que ce soit dans l’eau ou sur un parquet, perdre était vraiment quelque chose d’impensable, le rêve de devenir la numéro une était plus grand que n’importe quelle autre envie. Le tien de rêve était parti en fumée, tu ne gardais que des cendrées dans ton esprit, des souvenirs souvent trop douloureux et moins joyeux, des accidents, des blessures, des cris et tout ça pour rien. Tu ne souhaitais pas ça pour Héra. Elle qui détestait passer au second plan. Tu poses tes yeux dans les siens et garde la question fatidique pour plus tard. Elle en parlerait peut-être d’elle-même. « Tu sais bien que j'adore les sushis ... » Inconsciemment, tu avais dû le deviner. Puis c’était le plus proche et le plus rapide à faire livrer dans les environs. « Oui, c'est le déluge dehors. » Tu tournes ton visage vers l’extérieur, ça c’était même intensifié en deux petites minutes. « Tu peux rester ici si ça ne se calme pas. » que tu réponds, tu n’allais certainement pas la laisser partir dans une tempête pareille, même s’il elle n’habitait pas très loin non plus. « Par contre, mon frère est revenu. » Arrivé sans prévenir depuis quatre ans d’absence. Elle savait très bien comment tu l’avais mal vécu, même si elle ne le connaissait pas encore. Car elle allait sûrement le rencontrer un de ces jours. Vous vous dirigez vers le salon, tu reprends place sur le canapé, déposes un plaid sur tes jambes et laisse une petite place à ton amie, qui devait être frigorifiée par le froid qu’il faisait dehors. « Mais ça change rien, tu peux toujours venir quand tu veux, c’est chez moi. » Nate n’allait pas te faire changer ton train-train et il n’oserait pas, après ce qu’il avait fait en partant pour l’Europe aussi longtemps. Tu attrapas à l’aide de baguettes un premier sushi. « Comment tu te sens ? » que tu demandas finalement, ne sachant pas si elle allait pleurer de joie ou détruire la moitié de l’appartement.

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@Romy Harrington

Ce qui est terriblement violent quand t'es quelqu'un de sensible ; c'est que tu ressens jamais rien à moitié. Toujours trop expressive, ou bien trop renfermée. Il n'y a jamais d'entre deux avec toi. Trémolo dans le cœur lorsque la jolie t'embrasse, et glisse ses mains dans le mordoré de tes cheveux. Le vert qui se mélange au bleu de ses yeux, ton esprit s’égare, se perd peu à peu dans son regard. Ne dit-on pas que les yeux sont les fenêtres de l'âme ? Tu te demandes alors si elle peut le voir, ce 'truc' caché, bien enfouit dans tes pupilles fatiguées. Laid et vil, noir et difforme. Ton monstre. Celui qui te définit ; celui qui te pousse à danser jusqu'à l'épuisement, celui-là même qui te corrompt les pensées, noirci tes desseins. Il est rare qu'il se dévoile, tapis dans l'ombre, il se cache toujours. Or, il est inutile de le faire avec Romy. Elle sait qui tu es, ce que tu as été ; et devine ce que tu deviendras un jour. Elle est comme ça la belle blonde. Proche, sans doute un peu trop. Elle te caresse les joues, ses doigts récoltant précieusement l'élixir fait de tes larmes et d'une pluie froide. C'est là, sans doute, que tu l'aimes le plus ta Romy. Elle prend soin de toi, souhait silencieux d'une petite fille qu'on a toujours délaissée. Elle te calme, te canalise ; te comprends. Rage d'antan se muant petit à petit en symbiose magique. L'ironie a voulu que tu la détestes, pour ensuite l'aimer sans limite. 'Tu peux rester ici si ça ne se calme pas.' Vraiment ? Les mots t'atteignent, pansent tes gros bobos ; c'est que t'es encore une gamine malgré tes airs de grande fille. T'as besoin de soutien, de piliers. De gens comme elle. « Alors que la pluie tombe en torrent, et que l'orage gronde. » Un souhait que tu délivres de vive voix sans rougir. Elle le sait, cet appartement est ton havre de paix, le temple d'Héra ; déesse de pacotille. Tu veux rester avec elle toute la nuit, qu'elle apaise ton mal-être, ta colère. Plus qu'un caprice d'enfant, c'est un besoin virulent. Immensurable colère ; indéniable peine. Tu as travaillé dure, sacrifié du temps, de bons moments ; tout ça pour quoi finalement ? Ballerine dévouée, que vas-tu devoir encore abandonner pour toucher enfin au but ? Ton corps se vide, ton esprit aussi. Un jour ou l'autre tu n'auras plus rien à offrir, et tu as peur de ça, terriblement peur. 'Par contre, mon frère est revenu. Mais ça change rien, tu peux toujours venir quand tu veux, c’est chez moi.' Tu sais que son départ l'a beaucoup affecté, ne lui donnant aucune nouvelle, pas même une carte postale pour lui dire qu'il n'avait pas encore crevé. Et là, il est revenu … Pourquoi ? « Ton frère ? » Il ne t'a jamais vraiment aimé Nate, toi la petite pétasse qui détestait sa chaire et son sang. Tu la rejoins dans le canapé cherchant naturellement à te réchauffer. T'es bonne pour un rhume, c'est sûre. T'enlèves ton manteau, et tu t'installes sous le plaid. 'Comment tu te sens ?' Tu prends une paire de baguettes toi aussi, piochant dans le plat. Un sushi au saumon ; sans doute tes préférés. Tu dégustes avant de répondre. Tu réfléchis. Tu n'aimes pas spécialement étaler tes échecs, tu te sens déjà assez bonne à rien pas vrai ? Pourtant, tu te dévoiles. T'en as envie. Il faut que tu en parles, ça te brûle, te démange ; tu dois éteindre cet incendie tout de suite. « Mal. » Tu annonces la couleur, que cette discussion risque de ne pas être agréable, ni pour l'une, ni pour l'autre. Au risque de plomber l'ambiance, tu lui dis « Je l'ai raté … encore. » La prima ballerina, la danseuse étoile. C'est ce que tu convoites, tu veux être celle qu'on regarde, qu'on admire. Tu reprends un deuxième sushi, puis un troisième. Te dévoiler ; révéler ton échec te pousse à manger. Tu sais comment ça va se finir n'est-ce pas ? La tête dans la cuvette. « Et toi ? Comment ça s'est passé avec ton frère ? » Sincèrement intéressée, tu veux savoir ce qui se trame dans la vie de ta moitié.

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@héra harper

La présence de la jeune femme te permettait de radoucir parfois tes journées moroses, celles où tu pensais à certaines choses dont tu avais juré de ne plus approcher. Et même lors des plus belles journées, elle les illuminait encore un peu plus. Au fond, tu savais que c’était pas forcément bon pour toi, si jamais un jour elle décidait de s’en aller, comme ils l’avaient fait tous, un par un, année après année. Ils ne restent jamais pour toujours. Les amitiés, les amours, ils ont toujours un couteau à te planter dans le dos que tu leur as presque offert de tes propres mains. Pour l’instant, ça ne te vient pas à l’esprit, mais le jour où elle partira, elle arrachera une partie de ta douceur et l'écrasera. T’auras plus qu’un seul souhait, toujours le même, pour ne pas changer. Le tonnerre retentit à l’extérieur, tu pensas soudain à ton fils, qui pourrait se réveiller à un moment ou à un autre à cause de ce temps. Assez rare à New York, tout de même. « Alors que la pluie tombe en torrent, et que l'orage gronde. » Tu souris doucement, comprenant que même s’il ne pleuvait pas et que si dehors le calme était revenu, elle n’aurait jamais dit non à rester ici, chez toi, avec toi, là où rien ne pourrait l’atteindre. Pas la danse, pas Roméo, pas tous ces problèmes qui pouvaient ébranler son chemin. A vrai dire, tu aimais ça, que quelqu’un de proche de toi se sente comme chez lui ici, quelqu’un tu aimais sans vraiment le savoir, que tu admirais, sans jamais trop le montrer. Ça avait été compliqué au début entre vous, à cause de certains détails dans vos vies qui s’étaient entrechoqués, comme des caractères bien trempés, des cœurs émiettés. Mais un jour, tout s’est arrangé. Et vous en étiez là, à manger des sushis dans ton salon, vous protégeant de la catastrophe qu’était devenu ce monde et du déluge qui tombait dehors. « Ton frère ? » qu’elle demanda, quand tu lui avouas de son retour, inattendu, après quatre ans d’une longue absence, d’un vide qu’il avait laissé en toi. C’était ta plus grande fierté, ton frère, ton plus grand amour, ton meilleur ami, comme un jumeau, celui que tu n’aurais jamais cru pouvoir te laisser. T’abandonner. Et pourtant. Maintenant, son retour t’avait laissé une étrange sensation. Du bonheur, mais de la tristesse mélangée avec, comme s’il revenait pour repartir de plus belle. C’était pas de ta faute, tu pensais toujours au pire, une partie de ton caractère, cette dépression là constamment, lorsqu’il fait beau ou moche c’est pareil. Tu lui répondis simplement en hochant la tête, ne souhaitant pas forcément en parler plus pour le moment. Dans tes yeux, on pouvait y voir des millions d’émotions différentes, comme des millions d’étoiles éclatantes ou moins luisantes. « Mal. » Mal, ce mot t’était trop familier. Et tu détestais quand Héra le prononçait, ça n’annonçait rien de bon. Pour sa carrière, sa vie. Vos vies. « Je l'ai raté … encore.» Tu soupiras doucement, comprenant son chagrin, ne sachant quoi dire, du moins de nouveau, rien que tu n’avais pas déjà dit. Qu’il ne fallait pas qu’elle lâche l’affaire, qu’elle garde espoir, que son jour pour briller viendra. La danse, la natation, ça se rapprochait pas mal, c’était un sport, un art. Une compétition. Des larmes. Des cris. Des joies. Des prix. Des blessures et des marques laissées à vie. Alors au lieu de dire des mots qui ne pouvaient plus rien faire, tu attrapas sa main et la serra, pour la consoler. T’aurais voulu dire que ça allait venir, mais t’en savais rien, or tu ne voulais pas lui donner de faux espoirs, c’était le pire. « Et toi ? Comment ça s'est passé avec ton frère ? » Le sujet revint rapidement tel un boomerang sur ton frère. Tu avalas d’autre sushi et des gorgées de ton verre d’eau. Ton regard chercha un échappatoire vers l’extérieur, observant les néons de la rue. Tu lâchas sa main et posa tes yeux sur son visage. « Mhh… c’était, comment dire… Bizarre. » Un instant et tu repris. « Au début, j’avais envie de lui crier tout ce que je pouvais pour lui faire du mal, mais j’ai rien pu dire. Et puis ma rancœur est partie… On a parlé, un peu. Je lui ai présenté Jimmy. Je lui en veux toujours, mais au fond je suis tellement heureuse qu’il soit revenu. » Tu n’ajoutas pas le fait que tu ne pensais pas vraiment qu’il soit rentré pour toi. Mais pour son grand amour. Tu pouvais le comprendre. Malheureusement. Ça te donnait envie de boire une bouteille de whisky, ou même deux. Ou de te cacher sous tes draps et de ne plus jamais en sortir.