anamorphose. (luz)

traits de caractère /
(nouvelle vague) passionnée par le vieux cinéma, surtout le cinéma français. passionnée par tous les idéaux prônés par les cinéastes participants à ce mouvement, luz devient un stéréotype ambulant de leur bonne parole. elle est tout ce qu'ils dépeignent dans leurs personnages, ce symbolisme outrancier de l'égoïsme, d'indépendance, quitte à enfreindre la loi. l'amour est l'unique préoccupation qui fasse palpiter son myocarde quand sa famille et la société n'obtiennent qu'un intérêt mi-figue mi-raisin, presque dédaigneux.
(jane birkin) elle a ce côté naïf et presque enfantin qui lui colle à la peau. elle a ce côté sulfureux et pulpeux qui sied tant à la comédienne. elle est cette sugar baby qui chamboule les palpitants en quelques œillades énamourées et palabres susurrées. muse au charme érotiquement tentant, elle est incroyablement provocante et délicieusement scandaleuse.
(stanley kubrick) elle est ce renouveau, cette curiosité malsaine et maladive. elle est ce besoin constant d'essayer de nouvelles choses, d'aller toujours plus loin - parfois trop. elle est ce perfectionnisme agaçant pour les plus petits détails, la méticulosité dans chaque geste. elle est ce 2001, l'odyssée de l'espace emprunt de science-fiction quand elle s'amourache des mensonges pour créer une vérité édulcorée, trop intelligente pour être démasquée. sans cesse dans le besoin d'être crue et d'être écoutée, dans sa quête de vérité, luz est incapable de se concentrer plus de deux secondes sur autre chose que ses envies impérieuses et impatientes.
(fast and furious) elle a l'adrénaline qui palpite incessamment dans ses veines. elle a ce côté volcanique qui ne demande qu'à exploser. comme un peu trop de nitroglycérine planqué dans un réservoir qui ne demande qu'à être activé, luz est une bombe à désamorcer - impossible pourtant à arrêter. elle a ce besoin constant de se mettre toujours plus en danger, d'avoir les muscles douloureux à force d'être utilisés. c'est pour ça qu'elle n'a jamais dit non à son anonyme qui l'appelle sans cesse pour de nouveaux petits boulots - toujours plus dangereux, toujours avec les conditions de la gamine.
(la casa de papel) elle se croit intouchable, jolie luz aux plans toujours trop bien pensés pour être contrecarrés. elle se prend pour le professeur, œuvrant pour la richesse et l'opulence quand elle flirte avec la frontière de la légalité. son patron et son oncle ayant tout prévu, le moindre petit problème, elle est ce géant qui marche sur les maisons en papier pour déverser sa vision du monde, chaos et anarchie voguant main dans la main. ne manque plus qu'un pion mal placé pour que le jeu s'arrête, prenant un tournant dramatique. à moins que ce ne soit une histoire d'amour qui vienne foutre le bordel dans la vie si bien organisée de luz adkins.

- que faisiez-vous, dans la nuit de dimanche à lundi ?
- j'étais chez mon frère. azhar.
un sourire ingénu qui se dessine sur les lippes parfaitement dessinées. les tâches de rousseur font un tour de montagne russe quand le sourire s'agrandit encore davantage, remontent sur le nez mutin.
les sourcils de l'officier se froncent, désapprobateurs. il fait quelques pas, vérifie les menottes qui enserrent les poignets de luz et va murmurer quelques palabres dans l'oreille de son collègue.
- très bien.
il marmonne finalement. et puis il attrape une tablette entre ses mains vieillies - son alliance déforme légèrement son annulaire, lui donnant un air boudiné. après quelques manipulations, il tourne l'engin pour montrer la vidéo qui s'y joue.
on y voit une femme, dans une combinaison à l'effigie de the venus, une entreprise locale du queens. elle a l'air de faire la même taille que luz, presque la même corpulence.
- vous ne trouvez pas qu'il y a une certaine ressemblance ?
luz se penche légèrement en avant - autant que faire se peu - et analyse quelques instants les morceaux animés. elle marmonne finalement :
- avec ariana grande ? si si, sans doute.
nouveau sourire qu'elle adresse à l'inspecteur. il ne se fait plus avoir par ses petits numéros de charme, et de toute façon, ce n'est absolument pas lui qui l'intéresse.
- vous vous ressemblez fort, vous et cette jeune femme.
elle hausse les épaules.
- c'est vrai qu'une femme qui fait dans les 1m60 maximum pour une cinquantaine ou une soixantaine de kilos, ça ne court pas les rues.
elle se replace dans le fond de son fauteuil, provocante, délibérément je-m'en-foutiste. et elle sait qu'elle le tient et qu'il n'a plus d'arguments quand il se passe la main sur le visage, attrape l'arrête de son nez entre le pouce et l'index.
il passe à autre chose en attrapant un morceau de papier - que luz devine être une photo. il lui tend, et elle prend le temps de la regarder sous toutes les coutures.
- c'est donc moi...
elle marmonne, intriguée.
- vous auriez pu me dire que vous vouliez une photo, plutôt que d'en faire une caché dans un buisson. non seulement vous auriez eu l'air moins pervers, mais j'aurais également préféré avoir mon droit à l'image de sauvegardé.
elle relâche l'image sur la table, sans y prêter plus d'attention. sur la table lisse et monochrome, le papier fait quelques centimètres avant de s'arrêter dans un bruissement.
- vous vous mettez souvent sur votre 31 ?
elle relève les yeux vers l'inspecteur, de plus en plus agacée. ce petit manège ne cesse de se répéter, et si elle apprécie quand un beau brun aux cheveux mi-longs l'interroge, ce n'est que moyennement le cas face à l'inspecteur murphy.
- je suis une femme, et je suis célibataire. alors ça m'arrive souvent, oui.
le regard qu'elle lui adresse devient courroucé. et elle s'empresse d'ajouter en voyant les lèvres du policier s'entrouvrir pour l'assommer de nouvelles questions :
- vos questions n'ont ni queue ni tête. vous n'aviez rien à mon sujet, alors j'aimerais autant aller profiter de mon après-midi shopping.
elle relève légèrement les poignets de la table, désignant du regard ces derniers.
- vous permettez ?
et l'officier soupire un long moment, jauge le miroir où se dressent quelques petites dizaines d'agents de police et s'empare finalement des clés pour lui libérer les poignets.
luz jubile. parce qu'une fois encore, ils se doutent de son implication dans des évènements qui troublent l'ordre public mais n'en ont aucune preuve. luz est douée, son oncle y a veillé. ne jamais laisser d'empreintes, toujours avoir des alibis.
et même si azhar risque de râler parce qu'elle l'a encore utilisé - et qu'il va avoir droit à un petit appel de murphy - elle est certaine qu'il la couvrira. parce que c'est ce que fait un grand-frère, pas vrai ? et luz est suffisamment intelligente pour passer assez de temps avec lui pour qu'il puisse être un alibi solide. la plupart du temps, quand les policiers ont un doute, luz est cloîtrée à la maison.
luz remue exagérément des hanches en faisant le tour de la table pour rejoindre la porte et quitter la prison dans laquelle ils s'évertuent à la faire revenir si souvent.

au fond, luz ne peut pas franchement se plaindre de ces visites hebdomadaires dans le pénitencier. non seulement ça lui donne l'occasion d'aller embêter ce gardien de prison qu'elle aime tant, mais elle s'ennuierait sans doute beaucoup plus sans ça. luz s'improvise braqueuse de bijoux, à la ocean height, s'amusant du désarroi de la police locale - persuadée qu'elle est fautive, sans pouvoir le prouver. et c'est encore plus drôle quand elle a effectivement commis des crimes.
mais luz ne passera jamais la frontière - oublier son intégrité et offrir son corps contre de l'argent sera toujours refusé. tout comme le fait de soustraire la vie d'un corps, qu'il soit innocent ou non. luz ne fait que de petits boulots, profitant de sa jeunesse et de son minois poupin pour passer les barrières, profitant de ses charmes pour se faire quelques alliés.
si luz est orpheline de naissance, le fait de mentir inlassablement à sa famille adoptive commence à lui peser. jusqu'à quand durera la mascarade ?