J'AI TA MAIN

traits de caractère / un tout ou rien. un trois ou quatre. une scie ou hache. une lettre un chiffre. freddy intensivement aigrie. le sensible des nuits chaudes. la colère à grande gueule. le sourire carnassier de ses jours mauvais. l'envie d'apprendre plus. con d'avoir la fainéantise d'apprendre. impulsif d'être téméraire. la joie d'aimer. la tristesse de détester. cogner pour se rendre plus fort. caresser pour sentir les peaux poisseuses. avoir ou tout avoir. bordélique intensif. l'envie de contrôler le monde d'une main, la même qui tient celle de sa famille.

le gamin aux rires lunaires. lui qui attendait déjà enfant, le cul posé sur la barrière, la sortie de l'école pour mater les têtes brûlées. comme confronté à l'envie de se confronter, de prouver par A plus B, de prouver au monde entier, de prouver à la vieille voisine sénile qu'il était le plus fort de ce quartier. qu'il pouvait combattre à mains nues. que ses baskets couraient le plus vite. que son visage rougi par la peur était l'un des plus beaux. que ses paroles étaient les plus envahissantes. depuis toujours il voulait faire parti de ce quartier. de cette ville. de ce pays. de ce continent. de ce monde. voir un jour son prénom pendre aux bouts des langues. queens, ville recrute. ville d'un nouveau tour de passe-passe. queens, ville de ses premiers mots. ville de ses premiers pas, de ses premiers émois, de ses premiers jours. de tout. de rien. c'est queens encore et à jamais. sa gueule se confond désormais dans la pelouse du stade abandonné. c'est freddy, futur maire imaginaire de la ville.

freddy c'est un con. on l'évite freddy, malgré sa gueule d'ange (il tire toujours la gueule) et ses mots gentils face aux autres. on l'évite parce que parfois il fait peur. parce que c'est le cerbère de cette famille rafistolée. on ne touche pas aux autres. on ne touche à personne qui connaît de près ou de loin freddy. car il a la main lourde. les insultes qui fusent. pas besoin d'un bac plus cinq pour frapper dans un sac. pour donner un coup de poing au visage. pour cracher à la gueule des minots qui viennent se moquer de lui. c'est comme le ding délicat du micro-onde qui affiche la fin de cuisson. le même son qui vient tinter contre sa cervelle, lorsqu'il devra utiliser poing et violence pour se faire entendre. la gueule en sang, les soirs de pleine lune. le sourire pourtant collé au visage, quand il se fait casser la gueule. plus fort que lui, ça devrait pas exister. pour son propre bien. pour le bien de toute une vie. c'est l'ange gardien de sa propre justice. mérite celui qui touche à janis, de finir sa soirée sur un brancard.

grand rêveur de comédie romantique. c'est le regard hagard qui gueulera fort et fier, qu'il ne regarde que des films d'action. menteur délibéré. le soir, seul, à chialer sur des films à l'eau de rose. se remplir la tête de ces comédies romantiques. de ces fins délicates et touchantes. il en gobe des conneries freddy. celle-ci, serait bien la pire. parce qu'aimer dans un film, et aimer dans la réalité, c'est différent. handicapé d'amour. il aime intensément aux premiers baisers. aux premières nuits. aux premiers rendez-vous amoureux. et ça tombe. ça fane. si vite. si vite. si vite. il recommence. avec une autre. l'aime si fort. avant de la laisser tomber. pour une autre. et l'aimer si fort. pour l'oublier quelques heures après. c'est quoi aimer? ça se pose cette question cent fois de suite. sans jamais rien comprendre. oublier le sens du verbe 'aimer'; embrasser pour faire plaisir à l'autre. s'oublier soi-même. tourbillon de sentiment qu'afflue secrètement dans l'esprit d'freddy. il en parle pas. jamais. laisse des indices ici et là. hausser les épaules quand on lui en parle. comme si c'était normal. décent de changer de copine comme de chemise.