we're gonna be alright (kenan)

tu déambules dans les rues du queens, tes deux sacs de courses à la main. bon, dis toi que ça te fait des muscles. kenan avait toujours eu pour habitude de venir t'aider faire les courses. trouver le produit le moins cher du rayon, porter une grande partie des sacs en plastiques sur le trajet, et même glisser quelques articles sous son manteau. mais ça, tu vas devoir apprendre à le faire toute seule, maintenant. et pas que ça. faire le ménage, préparer à manger, s'occuper des petits. comme une grande. tu tournes à droite, pianotes le code d'entrée sur le clavier, et t'engouffres dans l'immeuble. un courant d'air vient caresser tes jambes nues. t'as jamais vraiment compris pourquoi c'était si difficile d'isoler ce couloir : en hiver, il fait encore plus froid que dans les rues, et en été, c'est une véritable fournaise. m'enfin bon, pour le peu d'argent que réclame le propriétaire, vaut mieux ne pas commencer à faire la fine bouche. tu peines à gravir les marches, un sac sur chaque bras. faudrait que je pense à emmener kalvin et tara avec moi, la prochaine fois... ces deux petits n'en ont peut-être pas l'air, mais ce sont de vrais guerriers. au moins, tu sais que maintenant, tu peux compter sur eux. enfin, c'est pas comme si t'avais vraiment le choix. depuis son accident, kenan est un fardeau que tu dois accompagner chaque jour pour à peu près chaque tâche à effectuer. un revenu en moins : les jumeaux vont très vite devoir commencer à se faire un peu d'argent. tu préfères ne pas penser à ce qui arrivera lorsque les réserves de kenan arriveront seront totalement utilisées. t'arrives enfin devant la porte, et tu tournes la petite clé dans la serrure. « c'est moi... lily. » s'annoncer en entrant dans l'appartement : encore une nouvelle habitude à prendre. les médecins vous ont assuré qu'avec le temps, les malvoyants apprennent à reconnaître leurs proches en fonction de la lourdeur et de la régularité de leurs pas. mais pour l'instant, il vaut mieux s'assurer de ces petits détails, histoire que personne ne panique. tu entres dans la chambre principale, et tu vois kenan, couché dans son lit. enfin, dans votre lit, plutôt. celui que vous partagez depuis de nombreux mois, même si votre relation se rapproche plus d'une relation frère/soeur que de celle d'un jeune couple. quoique, les petits pourraient presque passer pour vos gamins. tu t'assieds sur le bord du lit. « hé... ça va ? » tu touches le front de kenan, tout en souriant. même si tu sais pertinemment que ce sourire, il ne le voit pas. et qu'il ne le reverra probablement jamais. tu remplis le verre d'eau posé sur la table de chevet et prends sa main pour qu'il puisse l'attraper. « bois un peu, ça te fera du bien. »

@kenan brixton

Assis dans le noir, une belle poésie, car tu n’es pas sûr qu’il fasse nuit, normalement dans le salon qui sert aussi de chambre, vous pouvez voir la beauté du paysage, d’autre immeuble collé au votre. Mais bon c’est que dans ça ou tu peux vivre. Pas riche, plus du style pauvre à courir après les petites pièces. Un mendiant, presque. Pour le moment tu n’es plus rien, pas grand-chose en tout cas. Tu ne sais pas quoi faire de toi, dormir, mais tu peines à dormir sans cacheton, tout le temps dans le noir, t’es pas fatigué, t’es déprimé de tout. Tu voudrais aider, revoir le sourire des jumeaux, mais ce n’est pas possible et c’est ainsi. Toujours en pyjama, tu ne peines à voir le temps passer, tu peines beaucoup. Relaissant les anciens fantômes te prendre à l’âme te piéger dans une frénésie qui va te tuer à petit feu. Tu l’interroges et elle répond, un mécanisme, une torture, car le temps ne s’égrène pas assez rapidement à ton goût. – On est le 27 Octobre et il est 16heures 18 minutes et 15 secondes de l’après-midi. Autant dire que les secondes sont les pires. Pourquoi tu aurais besoin des secondes ? Aucune idée, mais ça t’horripile. Tu décides de te lever, de bouger jusqu’à la chambre où se tienne toutes les fringues. Le parcourt du combattant. Tu n’es là que depuis une semaine, le retour, un retour catastrophique. Des mots qui volent : aïe, putain, fait chier, j’en ai marre. T’es à bout de nerf, t’es pas bien et comment il faut faire pour que ça aille mieux récupérer la vue, mais non tu es juste dans le noir et tu le seras peut être pour toute ta putain de vie. Tu te demandes s’il ne faut pas prier pour qu’elle vienne vite celle-là, que tu sois débarrassé de ce poids. T’y as jamais pensé à mettre fin à tes jours, aprés tout pourquoi y penser quand de base ta mère avait tenté de tuer quelques fois, car tu étais une menace pour elle et son bonheur. Enfin tu finis par arriver à la chambre, puis tu finis par trouver des vêtements, mais tu as du mal. Beaucoup de chose, trop, tu ne sais pas ce que c’est. Tu choppes un jean, mais tu n’es pas sûr que ce soit ta taille, que ce ne soit pas l’un de Tara ou encore de Lily. Tu commences à paniquer, ce qui te prend cinq secondes en temps normal, quand tu étais normal te prends des minutes pas possible. Tu pourrais l’interroger encore, mais à quoi bon ? À part te foutre un coup en plus au moral ? À rien. Tu laisses tomber l’affaire. Tu prends les vêtements que tu penses à toi et tu refais le parcourt du combattant, n’évitant pas les meubles, car c’est un plaisir de te cogner encore et encore. Puis tu retrouves le canapé, qui n’est pas plié, alors tu t’allonges et c’est à ce moment-là que tu entends Lily rentrer enfin, mais tu ne bouges pas. T’aimes pas être seul et le savoir, mais être seul en ne l’étant pas c’est un peu mieux. La main de Lily sur ton front, tu grognes un peu. « Je n’ai pas un rhume, ma cécité va pas partir avec de la fièvre ou sans … hein ! » Que tu lui rappelles violement. Ta situation est à jamais, c’est ainsi et tu ne veux pas entendre autre chose, pas avoir la foi en une putain de solution, non. Puis t’as des remords. Tu ne veux pas t’en prendre à elle, mais pourtant tu l’as fait, mais c’est les nerfs, c’est ainsi, tu es à bout, un moins que rien et tu t’en prends à elle maintenant.

@Lily Emerson