who's gonna save me now? (héra)

WHO'S GONNA SAVE ME NOW?

Héra & Milo

La première chose que remarqua Milo en reprenant tout doucement conscience, c’était la douleur. Elle était lancinante et torturait, sans relâche, chaque nerf de son corps. Ce qu’il remarqua ensuite, en ouvrant péniblement et partiellement les yeux, c’était qu’il n’avait pas la moindre idée de l’endroit où il se trouvait. Et, enfin, il remarqua une silhouette totalement inconnue se mouvoir dans la périphérie de son champ de vision. Lentement, les yeux plissés et le visage grimaçant sous l’effet de la douleur, il tenta de focaliser son regard et son esprit brumeux sur la personne qu’il venait d’apercevoir, se doutant qu’elle pourrait répondre aux nombreuses questions qui s’étaient mises à fuser dans sa tête dès lors qu’il s’était réveillé. Au prix d’efforts conséquents, il distingua ses traits, sa moue inquiète, et conclut rapidement qu’il n’avait aucune idée de son identité. Elle s’était levée précipitamment pour le rejoindre dès lors qu’il avait commencé à esquisser quelques mouvements hasardeux en se réveillant, comme si elle attendait qu’il émerge depuis un moment. « Qu’est-ce que… », commença-t-il à bredouiller d’un ton confus, sans trop savoir quelle question il allait lui poser en premier.

C’est alors que quelques bribes de souvenirs lui revinrent en tête. Au final, elles n’étaient que peu différentes de celles qu’il avait l’habitude de se remémorer régulièrement – plus précisément, à chaque fois qu’il se mettait dans des états lamentables en s’enfilant à peu près tout et n’importe quoi pendant toute une soirée. Cette fois-ci ne dérogeait pas à la règle : il était sorti, avait, comme toujours, trop bu et, comme toujours, n’avait pas tenu compte du fait que l’alcool faisait piètre ménage avec les cachets d’oxycodone qu’il avait coutume de prendre comme des smarties. Résultat, il était devenu incontrôlable, et il lui revenait maintenant des flashs de lui-même, en train de provoquer des brutes devant le bar, avant de se faire passer à tabac par celles-ci. Plutôt mérité, en fin de compte. Il avait passé les minutes suivant l’assaut recroquevillé sur le trottoir, à cracher de temps à autre un filet de sang tout en grognant à cause de la douleur fulgurante provoquée par les coups de ses assaillants. Et, après ça, tout était plus flou. Mais il avait l’impression d’avoir vu ce même visage que celui qu’il venait d’apercevoir là maintenant – cette jeune inconnue qui le fixait désormais d’un air inquiet, lui posant une question qu’il n’entendit qu’à moitié.Ce ne fut qu’au bout de quelques secondes d’un silence au cours duquel elle le fixa d’un air interrogateur qu’il comprit qu’elle attendait une réponse. « P… pardon ? », articula-t-il péniblement, tout en tentant furieusement de se remémorer comment il était arrivé ici.

Au final, ce n’était pas si compliqué de retracer la suite des événements, même si la mémoire n’était pas au rendez-vous. De toute évidence, elle l’avait ramassé dans la rue, était, d’une façon ou d’une autre, parvenue à traîner le colosse de près de deux mètres dans l’appartement où ils se trouvaient maintenant, et –il jeta un coup d’œil à son torse nu et à ses bras pour se rendre compte qu’il avait effectivement vu juste là-dessus– s’était affairée à panser ses blessures. Il remarqua une ou deux compresses, des pansements sur le ventre et les mains, et lorsqu’il porta ses mains au visage, devina qu’elle avait soigné celui-ci aussi. Il se redressa péniblement, grimaçant une nouvelle fois de douleur, et posa à nouveau ses prunelles noisette sur l’inconnue, qu’il détailla un peu plus attentivement. Elle avait les traits poupons et le regard profondément doux. Dans ses grands yeux se lisaient tant bien la curiosité que l’inquiétude, et il se demanda ce qui avait bien pu la pousser à ramasser un type visiblement mort saoul, tabassé comme pas deux et, par conséquent, fort probablement peu fréquentable pour l’emmener dans un appartement où ils avaient l’air d’être seuls. La confusion devait être notable dans le regard de Milo, qui ne savait toujours pas quelle question il devrait poser en premier, alors il resta planté là, à la regarder, l’air incertain, à moitié assis, à moitié avachi, sur ce canapé inconnu.

WHO'S GONNA SAVE ME NOW?

Héra & Milo

Promesses salines. De tes lèvres qui se retroussent doucement dans un sourire tendre. Langueurs océanes qui te rendent mélancolique. Âme libre. Cœur pris. Et de soupirs qui se perdent dans le vent marin. Promenade dans le sable en attendant que l’être aimé revienne. Moment de calme aussi. C’est ce que te raconte la mélodie. Tu danses, fait quelques pas pour t’entraîner au milieu du salon. Grand spectacle qui approche, t’es de plus en plus nerveuse ; mais qu’importe. Tu dois réussir. Et puis ça t’aide à attendre aussi. T’attends que l’homme qui gît sur ton canapé se défait des bras de Morphée. Hier soir, quelle mouche t’as donc piqué ? T’es encore surprise parce que tu as fait. Âme charitable ou fille totalement inconsciente. C’est en rentrant d’une soirée que tu l’as vu le grand brun, gisant sur le bitume humide et froid. Visage abimé, aux couleurs changeantes, mi- bleu, mi- violet. Presque inconscient, et seul en plein milieu de la nuit. Pas une seconde, tu n’as hésité ; et t’es revenue chez toi avec lui à ton bras. T’as eu du mal à l’amener le grand dadet, complètement ivre ou drogué … Ou les deux. Oui, t’es inconsciente sale gamine. T’as peut-être fait entrer le loup chez toi, ou pire encore. Idiote. Mais tu n’as pas eu la force de le laisser là. T’es atteinte du syndrome de la sauveuse faut croire. Tu achèves ton dernier pas de danse en repensant à la nuit dernière, quand tu entends une voix sorti d’outre-tombe qui surgit au milieu de la pièce.

« Qu’est-ce que… » La ‘Belle aux bois dormant’ se réveille … Tu éteins la musique et tu te hâtes pour le rejoindre. Mine affreuse, il a pourtant cet air sauvage qui te ravit. Tu t’agenouilles à côté de lui, ayant préparé de quoi le soigner sur la table basse. Linges propres, médicaments. Le strict minimum, mais t’es juste danseuse toi, pas médecin. « Ne bouge pas. » Ta voix est douce, bien qu’elle vibre d’une certaine appréhension. T’es inquiète, tu l’es depuis que tu as franchi le pas de ta porte ; cet inconnu à ton bras. T’as eu peur de le voir dans cet état, t’as eu peur qu’il y passe sur ton canapé. T’as pas dormi toi, t’as veillé sur lui, vérifiant avec obsession son poux toute les trois secondes. « P… pardon ? » Tes mains se plaquent doucement contre sa poitrine dénudée pour l’empêcher de bouger. Tu l’as déshabillé cette nuit, peu désireuse qu’il salope ton canapé. « Je t’ai dit de ne pas bouger. » Ta voix se veut plus sévère cette fois. Tu te retournes, prends un linge humide, et tu viens délicatement lui frotter le visage. Tu le regardes, à la fois timide et curieuse. Qui est donc cet homme ? Qu’a-t-il fait cette nuit ? Tu commences à lui imaginer une vie. « Je m’appelle Héra … » La base. Tu le vois déboussolé, alors t’essaie non pas de le rassurer, mais de lui expliquer. « Je t’ai trouvé inconscient dans la rue cette nuit, alors je t’ai ramené ici. » Tu esquisses un petit sourire.