des bleus au cœur. (ezio)

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{ des bleus au cœur }
crédit/ tumblr ☾ w/@Ezio Romani

Elle ne sait pas, Alix,
elle ne sait pas quels combats elle est prête à réussir,
elle ne sait pas lesquels sont impossibles.

Sa fille. Flora. Plus que tout, c’est sur elle qu’elle est focalisée. Tout son être, du matin au réveil jusqu’au soir quand elle rumine ses pensées néfastes sans pouvoir trouver le sommeil, tout est focalisé sur elle. Tout la ramène à elle. À cette vengeance qu’elle s’est promise de lui obtenir. Aux envies macabres qui ne cessent de l’envahir. La fille Ferreira n’est pas certaine d’être capable de mener de front cette vendetta, mais aussi de raviver cet amour avec Ezio.
Elle aurait voulu qu’il soit son pilier, sa lumière,
sa source de vie quand les abysses devenaient trop cruelles.
Mais, à la place, elle doit apprendre à surmonter de nouvelles épreuves. Elle doit… se battre, plus seulement pour sa fille, mais aussi pour son couple. C’est une charge de responsabilité bien trop lourde, qu’elle accepte de porter, uniquement par amour. Mais elle ne s’attend pas à devoir, pour ce prétendu nouveau départ, à la trahison qu’il lui demande de faire envers Flora.

Une trahison,
un abandon,
un trait définitif sur leur vie avec elle,
sur tous les souvenirs partagés avec elle,
sur tout ce qui a été mis en miettes.

Estomaquée autant qu’elle est déboussolée, la mère endeuillée écoute les explications de son mari pour justifier ce déménagement qui semble, soudain, si nécessaire. Elle ne dit pas un mot, Alix, rien. Il lui affirme ce dont il a besoin… mais elle, a-t-il songé à ses besoins ? Elle était la maman de Flora, celle qui l’a portée en elle durant neuf mois. Elle se sentait en telle osmose avec sa fille qu’elle lui manquait, tout le temps, même quand elle était juste à côté. Elle doit supporter désormais de vivre avec ce manque déchirant en elle, ce manque qui lui ronge les tripes à chaque bouffée d’oxygène qu’elle peut encore avoir quand son bébé, elle, a cessé de respirer. Elle doit supporter cette agonie, tous les jours, toutes les nuits… et maintenant. Maintenant, il lui propose un déménagement. Elle garde le silence alors qu’il s’approche, ses opales toujours ancrées dans ses orbes. Il paraît… si sûr de lui. Comme s’il y avait déjà réfléchi. Ou comme si c’était une évidence, juste, une étape à franchir. Mais Alix. Alix. Elle n’est pas prête à entendre de telles paroles. Encore moins alors qu’elle a déjà du mal à le sentir si proche. « On dirait que tu as tout prévu. » elle lance, la voix amère, alors qu’il imagine déjà cet escalier empli de clichés d’hier. Mais, plus jamais, de demain. Elle secoue la tête, finalement, de gauche à droite. C’est un non, assurément. C’est quand elle entend ses derniers mots qu’elle finit par flancher. « Non. Non. Tu as besoin d’un autre endroit. Alors s’il-te-plaît, tu ne parles pas pour moi. » l’agacement perceptible dans la voix de la ténébreuse, elle refuse de quitter cette demeure. C’est celle qui la rattache à Flora. Alors elle restera. « Je ne comprends même pas comment tu peux penser à déménager ! Ça ne fait même pas deux mois qu’on l’a perdue ! Et toi… toi, tu imagines déjà trouver une autre maison ? Mais tu te rends compte de ce que tu dis ? » Il veut la tuer. Il veut la tuer, c’est ça, hein ? Parce qu’il en prend parfaitement le chemin.

il ne part pas d'une mauvaise intention, vraiment pas. il a vraiment envie de faire les choses correctement, autant pour alix que pour lui. il ne se dit pas qu'il va trop loin dans sa démarche, réfléchissant très vite à comment inclure flora dans cette nouvelle maison sans qu'on ne pense qu'il ne la veuille pas, plus. c'est sa fille, il n'est pas idiot. il ne vit pas bien sa perte, comme il ne vit pas bien ses propres actes qui vont, probablement, avoir des conséquences insupportables.
et, face à lui, face au silence de sa femme, il ne se dit pas qu'il ne fait qu'agrandir le fossé qu'il a provoqué. pas encore ; ce sont ses mots qui l'arrêtent d'un coup. jusqu'à sa respiration, il se sent d'autant plus mal face aux accusations d'alix qui sont fausses, mais qui sont légitimes. c'est pas ce que... mais elle le coupe. a-t-il vraiment besoin d'un autre endroit ? peut-être que oui, mais il pensait vraiment proposer quelque chose de bien pour eux. ils ont besoin d'avancer, et, ce n'est pas dans cette maison aux nombreux souvenirs qu'ils vont pouvoir le faire. excuses-moi. je ne voulais pas que... ce soit interpréter de cette façon. il baisse les bras, pour ce soir. il se recule, se retient de soupirer. blesser, quand même, par sa réaction accusatrice ; comme s'il ne s'en rendait pas compte. comme si la mort de flora ne lui faisait rien. et c'est faux, c'est définitivement faux. mais ça, faut croire qu'alix ne s'en rend pas bien compte. elle est déjà en train de se faire une sale image de lui ; plus qu'il n'en a déjà. j'essayais... je sais pas. juste j'essaye alix. mais oublies. mais ne me parle pas comme si je l'oubliais. t'es pas dans ma tête non plus. sur la défensive, ezio s'éloigne pour de bon. laisses tomber, je vais me coucher. oublies, et excuses-moi. il répète. lui tournant le dos pour monter en haut. s'arrêtant devant la porte de flora, comme il le fait à chaque fois. mais c'est peut-être la première fois en deux mois qu'il se permet d'entrée. une chambre couleur orange, un lit de princesse pour une petite fille de cinq ans. l'armoire où ça dégueule de vêtement car ils n'arrêtaient pas. la caisse à jouet. rien n'a changé, si ce n'est la poussière qui s'est doucement invité. il chasse les larmes qui coulent, en se forçant à s'en aller de cette pièce. il entend du mouvement en bas, ce qui veut dire qu'alix est toujours là. elle ne va pas partir. mais il a dû mal à se dire qu'elle voudra dormir avec lui. pourtant, il n'a pas menti. il va dans leur chambre pour récupérer son oreiller, avant d'aller dans une chambre secondaire pour lui laisser la liberté.

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{ des bleus au cœur }
crédit/ tumblr ☾ w/@Ezio Romani

à bout de nerfs,
de l’incompréhension à la colère,
de l’amour à la haine,

elle pourrait trop vite flancher,
elle pourrait trop vite craquer.

Peut-être est-il seulement en train de chercher un moyen de rendre la douleur moins insoutenable. Peut-être veut-il réellement un nouveau départ. Pas en oubliant Flora, juste en apprenant enfin à vivre après son trépas. Peut-être bien, oui, qu’Ezio ne souhaite que retrouver un peu de lumière. Mais sa femme, elle, a besoin de ces ténèbres. Elle a besoin de laisser cette noirceur envelopper tout son être. C’est peut-être malsain, sans doute très autodestructeur. Mais c’est sa détresse qui lui donne la rage de continuer malgré le trou béant qui lui reste à la place du cœur. Elle a besoin, Alix, de cette aura sombre qui la submerge. Elle ne veut pas s’en délester, elle veut juste, se venger. La venger. Et cela implique, plus que tout, de ne jamais s’autoriser à l’oublier.

Même pas une heure,
même pas une minute,
même pas une seconde.

À chaque battement de son myocarde abîmé, c’est à sa fille qu’elle tente de s’accrocher. À sa fille, plus qu’à son mari. Alors elle le laisse à peine parler, déjà sur sa lancée. La voix encore maîtrisée ne laisse pas de doute néanmoins sur l’irritation qui l’a gagnée. Le cœur à nouveau cadenassé, imperméable à la tentative d’Ezio pour se rattraper, elle détourne les pupilles, aussi blessée que lui. Ils sont tous les deux à fleur de peau, écorchés vifs sur la défensive. Ils sont sur un équilibre beaucoup trop fébrile pour continuer. Mais Alix, elle continue. « Tu es prêt à quitter la maison où elle a grandi, tu dis même que tu en as besoin, alors tu l’as peut-être pas oublié mais on dirait que tu en as envie. » meurtrière, Alix, dans ses paroles. Elle sent en elle ce poids lourd qui l’étreint, une culpabilité toxique qui la submerge. Et, en même temps, elle ne peut pas retenir son ressenti. Elle a réellement la sensation qu’il aimerait, un peu, oublier le vide laissé par leur fille.

Mais oublier ce vide,
c’est l’oublier elle aussi.

Pour éviter d’envenimer un peu plus leur couple déjà bien en péril, elle choisit le silence quand il décide de partir. Elle ferme les paupières, une fois seule, imprégnée d’une douleur qui devient intenable. Elle sent l’envie de fumer la submerger, mais elle a arrêté il y a des années. Quand elle a appris qu’elle était enceinte de Flora. C’est cette idée qui la fait flancher. Elle récupère dans un paquet laissé par Ezio une clope et part dehors s’abîmer un peu plus. La cancéreuse entre les lippes, adossée contre l’un des murs de l’immense bâtisse, elle observe celui où Ezio avait lâché ses poings. Le cœur qui se tord dans sa cage thoracique, elle se débarrasse du mégot avant de retourner à l’intérieur. Les marches qu’elle monte, lentement, elle passe devant la porte de Flora où elle se force à ne pas s’arrêter. C’est dans la leur qu’elle finit par pénétrer. La première fois… depuis ce qui est arrivé. La pièce est vide, elle l’imagine dans l’une des chambres d’amis. Elle est perdue, Alix, déchirée entre le mal-être persistant qui l’envahit quand elle songe à l’idée de dormir avec lui, et la douleur lancinante de passer une nouvelle nuit loin de lui. Elle ferme à nouveau les yeux, le cœur arraché, elle choisit l’être aimé. Elle passe devant plusieurs pièces avant de reconnaître la lumière dans l’une d’entre elles. C’est sans frapper qu’elle pénètre à l’intérieur. « Je ne veux pas que tu dormes ici. » elle veut… elle veut qu’il soit avec elle. C’est déjà trop horrible, comme elle a la sensation de le perdre.

des mots sans réponse. mais des mots qui le percutent en plein coeur. si elle savait à quel point c'est faux. comment peut-il avoir envie d'oublier sa fille ? elle est horrible de lui dire ça, mais répondre ne sert à rien. alors, à la place, il fuit. si on peut dire les choses comme ça. il s'en va, à l'étage. rentrant dans une pièce vide depuis plus de deux mois. il ne parle pas, mais il n'en pense pas moins ; il ne veut pas l'oublier. et il en veut à sa femme de lui mettre ça sur le front alors qu'il n'a jamais, jamais dit ça.
l'oreiller contre les bras, il ne s'allonge pas sur ce lit aux draps propres. il est juste assis. il chasse de rage l'unique larme qu'il s'est autorisé à lâcher. la culpabilité le ronge, mais plus uniquement pour cette perte. il va perdre alix. il s'attend à ce qu'elle le mette dehors, ou à ce qu'elle s'en aille à nouveau si longtemps. il devrait peut-être lui dire qu'il s'est remis à faire des terreurs nocturnes. il en faisait, dans le passé. à cause d'épisode dramatique de son côté familiale, ou il en fait généralement quand il subit des gros événements. sans savoir pourquoi, il les a évité malgré la mort de flora. mais l'accumulation de ça, et du viol... ça le force à revivre des terreurs qu'il n'avait plus besoin, se forçant à ne plus tant fermer les yeux.
ou peut-être qu'elles sont revenues dès qu'alix a pris ses distances, car jamais ils n'ont été séparer depuis aussi longtemps.
il entend la porte qui s'ouvre. fronçant les sourcils. ce n'est même pas une question, mais un ordre. celui de reprendre son coussin et de retourner dans la plus grande des chambres qui n'est que la leur. et sans réponse, sans se battre, il se lève. il reprend les affaires, avant de les laisser sur le lit et de les reprendre le lendemain. retournant dans cette pièce, et sans un mot, il s'enfonce dans la salle de bains. s'offrant une douche. il ne dormira pas, c'est certain. pas avec alix à ses côtés, et cette peur bleue de lui faire du mal. plus qu'il n'en a déjà fait.
le peignoir en soie autour de son corps, il a pris les compresses et les produits essentiels pour soigner sa main. peut-être qu'il utilise un peu la situation, mais il sait déjà qu'alix ne va pas se coller dans ses bras, alors il a besoin de ça. deux secondes où sa peau touchera la sienne. tu peux m'aider à le changer, s'il te plaît ? montrant son bras bandé, les points de sutures encore bien présents, où elle verra qu'elle a réellement épousé un monstre.

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{ des bleus au cœur }
crédit/ tumblr ☾ w/@Ezio Romani

Il accepte de la suivre,
et y’’a ce drôle de soulagement qui l’envahit.
Un soulagement un peu étrange, ponctué de cette petite boule d’angoisse au creux de son estomac. Le soulagement de se dire qu’il n’essaie pas de protester, il n’essaie pas de l’affronter. Mais l’angoisse, aussi, de savoir comment elle va vivre cette nuit. Alix, elle voudrait oublier. Oublier cette soirée, celle où tout a dégénéré. Elle voudrait cesser de se remémorer, cet instant où elle lui a supplié d’arrêter de cette voix qu’elle ne reconnaissait pas elle-même, mais qu’il a continué. Il a continué, encore et encore, à prendre possession d’elle et a arraché, un peu, un fragment de son être. Le cœur déjà en lambeaux, elle a la sensation amère de ne plus maîtriser son propre corps. Parce que, d’ordinaire, elle viendrait lui prendre la main. Elle se blottirait dans ses bras dans une étreinte dont elle aurait terriblement besoin. Elle respirerait son odeur épicée, et les effluves parviendraient à l’apaiser. Mais elle n’a pas tout ça, elle n’a pas tout ça, depuis qu’elle a perdu tout contrôle sur cette carcasse dénuée de toute âme. Alors c’est sans un geste ni une parole que les deux époux rejoignent la chambre qui est la leur. La ténébreuse n’ose même pas poser ses iris sur le lit. Elle retire ses chaussures, tête baissée, mine déconfite alors qu’il s’enfuit vers la salle de bains. Lui viendrait presque l’envie de le rejoindre. Laver toutes les atrocités qui leur collent à la peau, laisser les flots diluviens les purifier de tous ces péchés. Mais l’idée repart de son esprit tourmenté encore plus vite qu’elle n’est arrivée. Elle retire ses vêtements pour enfiler une tenue pour dormir, oubliant les nuisettes en soie pour un long tee-shirt délavé. Tentant d’oublier tout ce qui s’est passé dans cette chambre une semaine plus tôt seulement, c’est la conversation au sujet de ce déménagement qui lui revient malgré elle. La culpabilité s’immisce dans son esprit mais, plus encore, elle a peur de le voir revenir à la charge dans ce désir trop brutal de partir. Elle n’ose même pas imaginer ce que ce serait, de quitter la maison où a vécu leur bébé. Les songes obscurs balayés, par Ezio qui réapparaît. Il revient, élégant dans ce peignoir en soie qui lui donne toujours envie de l’en débarrasser pour mieux (re)découvrir ce qui se cache en-dessous. Le cœur qui se serre un peu plus. Et puis, lui, qui lui fait cette demande inattendue. « Oh… oui, bien sûr. » elle acquiesce sans réfléchir, rejoint le matelas pour s’y asseoir avec lui. Les doigts frêles glissent contre ceux masculins pour commencer à lui retirer son bandage. Les prunelles posées sur sa tâche, elle fuit aussi son regard. Mais quand elle voit les points de suture bien visibles, elle ne peut s’empêcher de les frôler dans une caresse instinctive. « Je suis tellement désolée. » l’aveu sort de nulle part. Dans son esprit, un drôle de cheminement, entre les cicatrices visibles et la perte de Flora. Tout ça… tout ça, elle en est responsable. Mais elle ne le dit pas. Pour s’efforcer d’oublier cet instant de faiblesse, la louve reprend ses esprits en soignant sa main. « Faut qu’on arrête de se disputer Ezio. On n’y arrivera jamais sinon. » à supporter le décès de leur fille. À sauver leur couple au bord du précipice. À survivre. Juste, à vivre.

Moi, je n’y arriverais pas,
sans toi.