karma.

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{ karma }
crédit/ tumblr ☾ w/@Médée Marlowe

Vide,
c’est vide,
si vide sans Flora,
vide dans cette villa,
vide dans son myocarde,
vide dans son esprit,
vide dans sa vie.

Les prunelles en demi-teinte sont posées sur l’écran de son ordinateur portable dernier cri, annihilées d’un quelconque intérêt pour ce qu’elles lisent. Les lignes se suivent et se suivent, futiles, vides. Vides de sens dans son esprit. Ou vides tout court, elle ne sait plus. Elle est incapable d’être captivée par l’anniversaire de mariage de princesse quémandé par la snobinarde aux milles doléances. Elle est tellement, tellement loin de ces considérations, Alix, bien trop immergée dans les abysses de ses propres souffrances. Piètre tentative avortée de recommencer à travailler, quand la seule fonction qui puisse la stimuler reste la vengeance qu’elle veut orchestrer. Dans un soupir las, elle abaisse l’écran du mac, sans donner de réponses à la riche, mais non moins agaçante, héritière.
Elle est fatiguée, Alix.
Fatiguée de lutter.
Fatiguée de simuler une vie emplie de banalités.
Fatiguée de se laisser croire que tout peut continuer, normalement, comme si rien n’était jamais arrivé. Comme si elle ne vivait pas avec ce putain de vide. Comme si on ne lui avait pas arraché sa fille. Incapable d’accepter le poids de ce deuil, la louve ne retrouve vie que lorsqu’elle se laisse envahir par les ombres perfides qui rodent autour d’elle. Celles qui l’appellent, celles qui hurlent à cette guerre. Guerre interdite par les siens, par le sang qui coule dans ses veines. Elle ne pourra pas l’éviter, Alix, elle le sait. Elle a besoin de tuer celui qui a ôté la vie de son bébé. Elle a besoin d’entendre son dernier souffle pour espérer enfin, peut-être, retrouver un semblant de sérénité. Les pensées confuses, l’âme brisée est surprise par le cristallin de la sonnette d’entrée. Elle laisse Charles ouvrir, le cœur loin d’être prêt à une quelconque visite. Elle se lève de cette prestance macabre, cette ombre qui plane. Au-dessus d’elle, partout en elle, les ténèbres.

Mais elle réalise que les ténèbres,
elles sont aussi face à elle.

Médée.
Médée.
M é d é e .

Médée. Elle est là, à quelques mètres, comme irréelle. Après autant d’années, elle ne semble pas avoir changé. L’assurance qui frappe ses traits, ses billes bleues qui peuvent glacer n’importe qui risquant de s’y plonger, cette douceur à peine voilée, qu’elle, elle connaît. Alix, elle sent son cœur s’arrêter, juste une seconde, sans entendre la voix du majordome tenter de s’expliquer. « Ça ira, Charles. Vous pouvez disposer. » elle lui précise, juste, pour qu’il s’en aille. Que le silence s’installe. Si ce n’est dans ses pensées, au moins ici, à ses côtés. Médée, elle ne pensait pas qu’elle oserait. Qu’elle franchirait le pas de sa demeure après l’avoir reniée toutes ces années. Médée, sa plus fidèle alliée. Médée, son amie, relation intense et explosive, relation qui s’est brusquement finie, quand elle est partie. James n’est pas le seul à avoir vu son départ comme un exil. Un abandon incompris, une soif de liberté jugée égoïste. Elle se retrouve, Alix, devant celle qui l’a sans doute haïe. Alors que les rouages de son esprit continuent de s’acharner, la princesse échappée observe le faciès si familier. Elle entend ses mots, au loin, comme un sombre écho. Mais elle est trop chamboulée pour les contrôler. « Ta présence ne m’incommode pas, elle… me surprend. » Elle me déstabilise. Me perturbe. Me déroute. Me secoue tout entière parce que je ne l’avais pas prévue. Je ne la voulais pas. Ça aurait été plus facile, sans toi. Seulement Alix, trop fière, trop altière, elle n’admettra jamais son trouble. La confusion des sentiments qui l’anime devant cette amie qu’elle a abandonnée ; cette amie qui l’a rejetée ; cette amie, de la famille qui lui pris sa fille. « Je… je ne m’attendais pas à te voir. » elle essaie de se reprendre, elle essaie de retrouver contenance. Mais il y a trop de choses qui la submergent. Une multitude de souvenirs qui reviennent. Une infinité d’émotions contradictoires qu’elle est incapable de contrôler.
Et elle ne sait pas, Alix, comment le cacher.
Tellement déstabilisée qu’elle en perd ses moyens devant Médée.

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{ karma }
crédit/ tumblr ☾ w/@Médée Marlowe

Le cœur latent,
depuis trop longtemps,
le cœur absent,
retrouve ses battements
le cœur en berne,
soudain, s’accélère.

Il y a des jours que rien ne l’a surprise. Des jours que rien ne parvient à éveiller un éclat dans sa carcasse devenue vide. Des jours qu’elle ne s’attend plus à rien, Alix, si ce n’est au pire.
Mais, là, tout de suite,
elle n’est pas seulement surprise,
elle est prise au dépourvu,
submergée par ce trouble,
submergée tout court.

C’est comme un électrochoc. L’esprit tout entier mis sur pause. L’encéphale habitué à fonctionner à plein régime, d’une Alix aussi rapide que pragmatique, devient comme abruti. Il y bien une myriade de sentiments et de songes contradictoires qui s’opposent en elle. Autant de paradoxes que la reine des glaces éveille chez elle. Mais le chaos est bien trop présent, et elle bien trop bouleversée, pour qu’elle soit capable d’y mettre de l’ordre. Face à son malaise, Médée l’observe, elle, et cette demeure trop luxueuse dont elle doit déjà avoir relevé le moindre détail. C’est cette pensée-là qui sort la mère endeuillée de sa léthargie pour reprendre enfin une contenance édulcorée. Ou peut-être est-ce, soudain, de la voir approcher. Alix, comme une louve sur le qui-vive, retrouve cette lueur vive. Une longue inspiration qu’elle prend sans bouger, la fille Ferreira contemple de ses iris noirs celle qui est censée être sa rivale, lui offrir cette proposition indécente. Alix n’oublie pas, elles sont chez elle, l’oreille d’un serviteur non loin. Et le mari, aussi, celui qui pourrait rentrer sans prévenir. Elle s’avance sans un mot jusqu’à la sortie de la pièce pour refermer avec précaution les deux pans de la porte. Il est hors de question, assurément, qu’on les entende avoir une telle conversation. Elle fait volte-face pour retrouver à nouveau les deux océans dans lesquels elle reconnaît aussi ceux de son frère. Ceux de James. « Je ne comprends pas, Médée… je croyais que tu me détestais. » la question est formulée à demi-mots, elle raisonne entre les murs comme un écho.

Pourquoi es-tu là, Médée,
après toutes ces années,
toutes ces années à m’ignorer,
tout ce temps passé à me détester,
Pourquoi es-tu là, Médée,
alors que j’ai promis la guerre,
à ton très cher frère,
pourquoi rien n’est clair,
pourquoi je me perds,
entre aujourd’hui et hier,
chaque fois devant ces yeux clairs,
entre ce qu’on a été,
et ce qu’on ne sera plus jamais ?

Pourquoi es-tu là, Médée ?

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crédit/ tumblr ☾ w/@Médée Marlowe

C’est toi, Médée,
c’est toi qui m’as dit que tu me détestais,
chaque jour où tu es restée à l’écart,
chaque nuit où tu es restée loin de moi,
c’est toi qui me l’as prouvée,
sans jamais me parler,
juste en me laissant filer.

Peut-être s’est-elle fourvoyée. Peut-être Médée a-t-elle seulement accepté, sans rancœur ni bleu au cœur, l’exil de celle qui les a tous délaissés, seulement pour mener son existence comme elle l’entendait. Peut-être Médée n’est-elle simplement pas de celles, qui prennent des nouvelles. Mais, toutes les deux, elles étaient si proches. Alix, si elle n’a jamais cherché à se justifier auprès d’elle, c’est parce qu’elle a conscience de son affront. Elle savait, que c’était un abandon.
Elle, à la place de Médée, elle lui en aurait voulu de la laisser tomber.
Mais elle encaisse le coup sans un mot. Et elle ne l’admettra pas, bien sûr que non. Alix, elle est trop fière pour ça. Trop dans la retenue, sur ce qu’elle éprouve, pour ça. Les années ont filé, elles ne sont irrémédiablement plus ce qu’elles étaient. Elle se persuade que ce n’est pas son cœur qui vient de s’écorcher, juste son égo qui est touché. Fierté mal-placée, pour une amitié effilochée. « J’ai dû me tromper dans ce cas. » et le calme dans sa voix laisse à peine entrevoir, son désarroi. Imperceptiblement, pour quelqu’un qui ne la connaît pas.

Oui, j’ai dû me tromper dans ce cas. Chaque fois que je me surprenais à penser à toi. À mon envie de te voir. À me retenir pour ne pas que ta rancœur m’explose au visage. Chaque fois que je me suis empêchée, de venir sonner, à la porte de cette demeure que vous partagez. À te fuir, toi, pour lui échapper à lui. À eux.

Les iris intrigués de Médée basculent sur les lieux et lui permettent, à elle, de retrouver une pleine maîtrise d’elle-même. C’est le serviteur que la reine glaciale a entrevu, mais c’est le mari qu’elle évoque. « Mon mari ne sait pas qui tu es. » vaine tentative de l’amoindrir, quand son silence est en réalité plus explicite, que tout ce qu’elle aurait pu lui dire. Légère inspiration de la ténébreuse, elle essaie d’envisager comment Ezio accueillerait cette femme dont il ignore tout. Médée, par sa seule allure, ses grands océans glacés, et cet air impénétrable, elle ne laisse pas de marbre. Il comprendrait, sûrement vite, trop vite, qu’elle n’est pas juste une amie venue la voir. Elle est tellement, tellement plus que ça. Médée, imprévisible Médée. Elle lui a toujours donné la sensation de la connaître par cœur sans pour autant être capable de comprendre son ressenti. Sa manière de vivre. Ni rien de ce qui l’anime. Elle ne comprend pas, Alix, mais elle a le cœur qui chavire. Médée, à sa manière bien à elle, lui témoigne de son affection ; de sa compassion, bien plus que ne l’a fait son frère. La louve se mordille inconsciemment la lippe, chamboulée, fébrile. Elle avance d’un pas, elle aussi, en direction de son ancienne amie. « J’ai vu James, tu sais. Ça ne s’est pas bien passé. » doux euphémisme, pour celle qui lui a déclaré la guerre avant de partir. Elle ne comprend pas comment un Marlowe peut accepter de se battre contre elle, et l’autre… l’autre, lui offrir toute son aide. Elle ne sait plus, Alix, elle est perdue. Entre son cœur et sa raison, tout la chamboule. « Comment peux-tu m’aider si j’ai la conviction que ça vient de quelqu'un de chez vous…? » elle demande, enfin, la voix prise d’incompréhension, plus que de reproches. Et tellement de questions, encore, qu’elle se retient de poser. Tellement de contradictions qu’elle retient de la submerger.

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crédit/ tumblr ☾ w/@Médée Marlowe

Notre sphère,
tu en parles comme si on vivait dans le même univers,
j’ai quitté ce monde pour tout son contraire,
Médée, ne vois-tu pas que je ne suis pas comme vous,
que les ténèbres qui t’étreignent,
je les ai refusés pour la lumière ?
Ne vois-tu pas que vous représentez, vous,
tout ce que je me suis acharnée à fuir ?

Ou peut-être que c’est moi qui n’ai jamais rien vu.

Un frisson lui parcoure l’échine quand elle entend les mots de son ancienne amie. Elle évoque le monde dans lequel ils vivent, tous, les Marlowe, les Ferreira, comme un monde qui est encore le sien. Mais elle l’a fuit, ce monde-là. Peut-être pas suffisamment fort, peut-être pas suffisamment loin. Seulement assez pour que son mari ne soit pas mêlé à ce milieu. Qu’il n’ait rien à voir, lui, avec ce milieu. Et la louve ignore exactement pourquoi elle est aussi froissée d’entendre Médée parler de lui, mais elle voudrait qu’elle arrête, elle voudrait… oublier combien leurs destinées s’entremêlent. « Ezio n’évolue pas dans votre sphère. » et elle se retient d’ajouter, il vaut bien mieux que vous et toute la cruauté qui coule dans vos veines. Dans, nos, veines. Elle détourne la tête, se dit qu’elle aurait bien besoin d’un verre. Plus vrai encore, quand elle se voit contrainte de parler de lui, de l’ex, du rival… de James. Tandis que la Némésis joue tranquillement avec un bibelot qui ferait vivre une famille pendant un an, Alix, elle, garde toute son attention pointée sur elles. Ses grandes prunelles sombres à la recherche des océans qui la fuient. Jusqu’à ce qu’elle arrive, la colère, celle qui apparaît dès lors qu’on s’en prend à son frère. La fille Ferreira ne sera pas celle qui lui en voudra. Mais elle encaisse bien moins la manière dont son premier amour a pu présenter leur dernière entrevue. « C’est ce qu’il t’a dit ? Que je vous ai accusés, vous? » le timbre de sa voix laisse déjà entrevoir qu’elle ne l’a pas ressenti ainsi, Alix. Ça aurait été tellement plus facile si elle s’était seulement pointée pour l’accuser de tous ses maux. Elle était perdue, elle était chamboulée, elle a même manqué de craquer devant lui. On ne se comporte pas ainsi devant son ennemi. Alix, elle cherchait juste des réponses ; elle les a obtenues par les réactions de James, rien d’autre. Un soupir qu’elle ne cherche plus à retenir s’échappe de ses lippes. Ils vont tous finir par la rendre folle s’ils continuent. « Depuis quand as-tu peur de perdre, Médée ? » elle oublie à qui elle s’adresse, la reine des glaces. La féline la connaît trop bien pour se laisser avoir. Tout comme elle se fiche bien, en réalité, de tout ce que sa famille perdrait. « J’ai perdu ma fille, je te signale. Je me fiche bien de vos petites guerres de territoires. » elle recule enfin pour aller se servir un verre de whisky. Instinctivement, elle en prépare aussi un pour son ancienne amie. Elle se rapproche d’elle pour lui tendre le verre, puis sans attendre, boit une longue gorgée du sien. « Pourquoi as-tu attendu deux mois pour venir me voir ? Tu serais venue si James ne t’avait pas parlé de notre entrevue ? Tu serais venue me voir, Médée ? » et elle n’a plus cette retenue froide. Elle n’a pas, comme Médée, cette poigne. Sujette à ses émotions, Alix, elle est aussi dangereuse qu’imprévisible. Elle n’est qu’une bombe à retardement qu’aucun n’arrive à désamorcer. Peut-être est-elle juste destinée à exploser.

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{ karma }
crédit/ tumblr ☾ w/@Médée Marlowe

Et je ne saurais t’en vouloir,
de te fier à ton frère si précieux pour toi,
l’être le plus important de ta vie,
quand moi, j’en suis partie,
quand moi je me suis enfuie,

je ne saurais t’en vouloir,
pourtant, comme ça fait mal.

C’est, comme si, elle avait fermé les yeux, Alix. Toutes ces années, elle a détourné ses iris, de ce fossé qui se creusait, chaque jour un peu plus entre eux. Entre elle et les Marlowe. Entre elle et Médée. Elle a repoussé les sentiments indélébiles en se persuadant qu’ils n’étaient qu’une nostalgie venue tout droit du passé ; de ces amitiés cendrées d’une enfance que l’on n’oublie jamais, jamais tout à fait. Je ne voulais pas déclarer la guerre. Ni à toi, ni à ton frère. Mon cœur s’est déchiré de me dire que votre famille avait pu me faire une chose pareille. À d’autres, j’aurais fait la peau. J’aurais propagé la mort, sans retenue, sans vergogne. Ne le vois-tu pas ? Tout ce qui me retient, c’est vous, c’est toi. Les confessions inavouables restent soigneusement prisonnières de ses lippes alors que Médée, belle et imprévisible Médée, vient soudain la bouleverser des mots que son cœur refuse d’écouter. « J’ai déjà tout perdu. » elle affirme, princesse arrogante et trop fière pour admettre ses faiblesses. Pour laisser basculer un palpitant que son amie d’antan pourrait utiliser contre elle. Car les mots de la Marlowe laissent entrevoir, les reliques d’un attachement auxquels elle refuse de croire. Mais le cœur bascule, pourtant, beaucoup trop vite, aux propos suivants.

Tu avais oublié,
comme elle a cette faculté,
Médée,
comme elle peut te bouleverser,
comme ça, sans prévenir,
la reine de glace paraît si solide,
que tu oublies,
que tu as toujours oublié,
comme elle savait te réchauffer.

C’est sans retenue que la louve l’observe, cette fois. Les traits saillants, l’allure qui déborde d’assurance. Guerrière si forte et inébranlable, on pourrait la croire incapable d’états d’âme. Elle demeure plus honnête que James et Alix tout à la fois. La mère endeuillée fixe cette amie d’hier, qu’elle a soudain la sensation de retrouver, comme si aucune année ne s’était écoulée. « Tu vois, James ne m’a jamais dit un seul des mots que tu viens de prononcer. » non, bien sûr que non. Le grand souverain des ténèbres ne s’abaisse pas à prouver sa bonne foi. L’égo froissé, ou peut-être le cœur amoché – elle n’ose y croire tout à fait- s’est juste contenté de lui donner exactement ce dont elle avait besoin, pour embrasser ses sombres desseins. C’est après sa rencontre avec James qu’elle a décidé, véritablement, de cette guerre. Une guerre pour laquelle aucun sang n’a encore été versé. Alix ne prend pas le temps de réfléchir suffisamment, elle laisse déjà entrevoir les incertitudes et les interrogations qui pèsent dans son cœur en perdition. Nouvelle gorgée de l’ambré, elle se trouve la force de continuer. Et de découvrir ce qu’elle savait déjà : Médée ne serait pas venue si son cher aîné ne s’était pas plaint auprès de sa  siamoise. Un nouveau coup encaissé, ce ne sera pas le dernier. « Ce n’est pas toi que j’ai cherché à fuir. » un bref instant. Une seconde, peut-être deux, elle contemple Médée en silence. Les prunelles sombres la scrutent comme elles le faisaient par le passé, quand aucun mot n’était nécessaire pour qu’elles se comprennent. Quand elle avait juste à noyer son encre dans l’océan glacé pour lui faire savoir, tout ce qu’elle était incapable de dire à haute voix. Embarrassée, soudain, par ce si court instant de faiblesse pourtant à peine perceptible, la princesse des ténèbres glisse la main qui ne tient pas le cristal dans sa chevelure ébène. Fébrile, mal à l’aise. Elle cherche ses mots encore un peu avant de retrouver l’usage d’une voix, finalement, plus adoucie. « Ce n’est pas… je ne te fais pas de reproche. Et je n’ai jamais voulu croire que vous étiez personnellement responsables. » elle n’est pas sûre d’être bien claire, Alix. Mais elle est partie, alors elle poursuit. « Mais je n’étais plus une menace dans le milieu… personne d’autre n’aurait eu de raison de s’en prendre à ma fille. » sauf vous. Sauf vous que personne n’a pu réellement toucher. Sauf vous, point trop sensible, auquel j’étais la seule à pouvoir me confronter.