hundred ways (( anju ))

Les chiffres défilent sur le cadrant du réveil de la douce Arizona et cela fait plusieurs heures qu’elle à rejoint les bras de Morphée. On pourrait croire comme ça en la voyant si paisiblement allongée dans son lit aux draps de soie. Elle a l’air d’être reposée de prime abord, mais dans ses rêves, rien ne va. Tout se bouscule, tout s’entremêle et elle ne sait plus où donner de la tête. Elle voit des choses atroces, vit des choses qu’elle ne souhaiterait même pas à son pire ennemie et pourtant, elle finit par se réveiller en sursaut voire même en pleurs. Le myocarde qui palpite, elle sent une bouffée de chaleur la prendre de part en part et elle essaye de se calmer. Elle ne sait pas pourquoi elle fait des cauchemars à répétition ces derniers temps, mais elle les fait. Alors elle se lève et se rend dans la salle de bain pour se débarbouiller le visage à l’eau chaude avant de revenir à sa chambre pour s’asseoir sur le rebord du lit. Elle déverrouille son téléphone avant de voir un message de son garde du corps. S’est-elle endormi vraiment tôt pour n’avoir même pas vu ce message ? Alors elle regarde l’heure sur son réveil. Trois heures. Il est un peu tard pour lui souhaiter une bonne nuit, mais tant pis.

(( Toi aussi, passe une bonne nuit. ))

Qu’elle tape doucement sur son clavier puis clique sur envoyer. Elle ne s’attendait sûrement pas à cette heure si tardive, recevoir une réponse, et après un échange rapide, il était convenu qu’Anju se déplace jusqu’à chez elle. Bien que tous les mois, elle lui versait un salaire, elle l’avait toujours considéré comme plus qu’un simple employé et ça ne la dérangeait pas de dépasser les limites avec lui. Encore traumatisée par ce mauvais rêve, elle attend sagement avant de se lever pour lui ouvrir une fois sur place. Pas le temps pour les salutations qu’elle finit par fondre dans ses bras en pleurs. Anju est sûrement le seul sur cette planète à voir Orna dans tous ses états.

Il ne peut nier qu'elle hante ses pensées, pourtant il s'interdit de lui avouer son attirance pour de multiples raisons. Qu'elle soit plus jeune que lui en fait partie, elle doit certainement s'intéresser à des garçons de son âge. Lui, qui a la trentaine, est loin de ses fantasmes. Et il travaille pour elle, ses parents ne seraient sans doute pas ravis de savoir que leur fille fricote avec son garde du corps. Alors il se contente simplement d'être présent pour elle, de la regarder avec intérêt du coin de l'oeil mais sans jamais se prononcer. Ce n'est pas la peur de se prendre un râteau qui lui tiraille le ventre mais bien de la perdre pour toujours ; ils sont devenus proches tous les deux, il n'a pas envie de perdre son amie. Et elle est encore dans un coin de sa tête alors qu'il caresse machinalement son chien sur le canapé, les yeux rivés sur son bouquin éclairé faiblement par une lampe. Il remonte ses lunettes de lecture sur son nez quand la lumière de son téléphone attire son attention - froncement de sourcils avant de s'en emparer pour constater que c'est Orna qui lui envoie un message à une heure si avancée de la nuit.
C'est hors de question qu'il la laisse seule après un cauchemar.
Après tout il est payé pour la protéger, la rassurer et être toujours là pour elle. Alors il s'empare de son long manteau, fait grimper son chien dans la voiture et part en direction de chez la jeune femme. Et il se félicite de s'être tenu éveillé aussi tardivement quand il voit dans quel état est Orna. Même Origami, son chien, se dresse sur ses pattes arrières pour apporter du réconfort à la jolie asiatique. Anju ressert un peu plus ses bras autour de la taille de son interlocutrice. « C'est régulier ces derniers temps, non ? » il ne va pas mentir, ça l'inquiète. Sa langue claque contre son palais, il rompt l'étreinte - presque à contrecoeur - pour plonger son regard dans celui de la belle. Son rythme cardiaque qui s'accélère et pourtant il ne laisse qu'un léger sourire rassurant se dessiner sur ses lèvres. « Tu veux que je reste avec toi jusqu'à ce que tu te rendormes ? » il se mordille l'intérieur de la joue « je te chanterai bien une berceuse mais il risque de pleuvoir à torrent après. Personne ne veut d'un tsunami à new york. »

Elle s’accroche à lui comme elle s’accrocherait à une bouée de sauvetage en pleine tempête. Étrangement, Anju était l’homme dont elle avait besoin à des heures tardives de la nuit. Il était le seul qui avait les mots et les gestes pour la rassurer, lui montrer qu’elle n’était pas seule et qu’elle n’avait rien à craindre. Alors la poupée coréenne hoche positivement la tête contre lui dans un petit geste. ce n’était pas seulement régulier, c’était récurrent et quotidien. Elle se réveillait de plus en plus avec ces terreurs nocturnes qui parfois lui bouffait la vie. Elle était heureuse de na pas avoir un ‘travail’ à proprement dit et qu’elle pouvait s’organiser suivant ses envies et sa motivation parce qu’avec ses courtes nuits et le manque certain de sommeil, elle savait que dans un bureau, elle ne tiendrait pas deux jours ainsi. « Tous les jours… » qu’elle lui dit d’une voix encore éraillée alors que le garçon à la peau hâlée se détache un peu plus d’elle. Elle hausse les sourcils surprise par sa proposition et après avoir passé le revers sa manche sous son nez pour essuyer les quelques larmes qui y stagnaient, elle reprend la parole. « Si tu veux ? » mais elle ne pouvait pas le forcer, il était clairement en dehors de ses heures de boulots. « J’veux pas te monopoliser si on t’attend chez toi… » qu’elle lui avoue. Parce qu’elle ne sait rien de sa vie à lui au final. Il à souvent était le garçon qui la suit de partout et rien de plus jusqu’à ce qu’elle s’intéresse un peu plus à lui et qu’ils développent une belle amitié. Et un rire fendit ses lippes alors qu’elle vient à s’abaisser pour caresse Origami qui avait tenté de la réconforter quelques minutes auparavant. « non alors, pas de berceuse. ça serait triste qu’on succombe dans un tsunami par ta faute. » et elle se redresse avant de s’avancer dans le salon où elle tape sur le sofa pour laisser la chienne s’asseoir là. « est-ce que tu veux boire un truc ? »

Il n'aime pas la voir dans cet état, il n'aime pas savoir que quelque chose va mal pour elle au point de gâcher ses nuits. C'est quelque chose qu'il ne peut pas comprendre, c'est pas un intrus à qui casser le nez mais quelque chose qui se passe dans son esprit, quelque chose qu'il ne peut attendre - sa seule solution est de rester auprès d'elle pour qu'elle puisse se rendormir en étant un peu plus rassurée par sa présence. « Tu te surmènes trop, Orna. Il faut que tu prennes le temps de te reposer. » ses mains viennent encadrer le visage de la douce poupée pour la forcer à relever la tête, il plonge son regard dans le sien. « Je vais finir par te porter comme un sac à patates pour te forcer à te mettre au lit, si tu continues à n'en faire qu'à ta tête. Tes abonnés peuvent attendre. » et ce n'est pas avec ses petits poings, si jamais elle décide de le frapper pour qu'il la pose, qu'elle parviendra à le faire flancher, il n'est pas garde du corps pour rien. Il est là pour protéger son corps d'une éventuelle agression mais ce n'est pas pour autant qu'il doit la laisser tomber de fatigue ou être victime de ses cauchemars. Il hausse négligemment les épaules « personne ne m'attend, qui veux-tu qui m'attendes chez moi à cette heure-là ? » il la gratifie d'un clin d'oeil. Et puis de toute façon il n'a pas de femme, pas d'enfant, ni même de simple petite amie. « Un thé ! Et pour toi aussi, ça va te faire du bien. T'as pas une tisane mille et une nuit ou des conneries du genre ? » il lui fait signe de s'installer sur le canapé près de l'être canin. « C'est moi qui vais tout préparer d'ailleurs, va près d'origami ! »