(rose&alexis) such a beautiful nightmare.

La situation était grotesque, deux anciens amants, deux anciens amis aujourd’hui déchirés par une montagne de non-dits. Ils s’en voulaient mutuellement, ils s’étaient balancés des horreurs l’un l’autre, et aujourd’hui aurait pu être différent, si seulement ça avait été le cas. Rose aurait vraisemblablement dû dire autre chose, elle aurait pu parler de tout ce qui lui manquait, lui dire combien elle le trouvait beau, mais elle avait sorti ce qu’elle avait sur le cœur depuis bien trop longtemps, comme ça, comme pour se décharger d’un poids qui la rendait fébrile depuis des mois maintenant. Bien sûr, il ne comprenait pas, comment pouvait-il s’imaginer ? Alors elle prit des gifles verbales, image après image, et elle sentait la colère gagner celui qu’elle avait tant aimé. Oui, à ses yeux, elle était cette garce qui l’avait trompé dans son propre lit, dans ce lit qui leur était réservé, à eux deux, dans ces draps qu’ils avaient froissés d’amour maintes et maintes fois. Il n’en était rien, mais avec son coup monté, elle avait cassé de toute manière le côté sacralisé de leurs souvenirs charnels, et elle avait brisé sa confiance, son coeur et leur histoire. C’était un fait, avéré sur ce point, mais elle ne l’avait pas trompé, et il ne le savait pas. Toutefois, à quoi bon lui avouer, il ne la croirait pas. “Ecoute Alex, je suis désolée...” Elle était sincère, et s’excuser ne faisait pas partie de ses qualités premières, mais elle pensait qu’elle lui devait ça, pour la déception qu’il avait subi. “Je n’ai jamais voulu que ça en arrive là, je... Je t’aimais tu sais, même ce jour-là, c’est à toi que je pensais...” Elle n’était pas très sûre que ça arrange les choses de lui dire qu’elle pensait à lui avec un autre, mais c’était aussi la vérité. Elle avait fait tout ça en espérant qu’il change, qu’il réalise que son comportement les menait dans une impasse. “Depuis des semaines, tu ne me regardais plus, tu étais concentré sur ton travail, il n’y avait que ça qui comptait. J’avais beau faire des efforts, tout faire pour essayer de te séduire et détourner ton attention de tes papiers et de ton téléphone, tu ne me voyais pas... Tu ne me remarquais pas assise dans le canapé à t’attendre jusqu’à pas d’heure, tu ne voyais pas le dîner froid qui était resté sur la table, tu n’as pas daigné me dire que j’étais belle dans cette nuisette que j’avais acheté pour toi, pour nous, pour retrouver la passion. J’ai essayé Alex, mais rien ne t’a fait réagir, jusqu’à...” Elle n’en dit pas plus, il pouvait s’imaginer qu’elle avait couché avec Kendrick, qu’elle lui avait manqué de respect et qu’elle avait tout foutu en l'air, peu importait, la base de cette histoire, c’était qu’il l’avait déjà éteinte bien avant le “drame”.



La voix de la jeune femme tremblait, c’était douloureux de revivre ça, de revivre cette frustration, cette tristesse jour après jour. Elle sentait les larmes monter et ses mains s’agrippèrent à la table afin qu’il ne remarque pas la fragilité qui venait s’emparer de son corps tout entier. Elle était forte Rose, elle était courageuse, mais devant lui, elle perdait pied. Le regard fixé sur le gâteau, elle peinait même à avaler sa salive tant son coeur s’était serré. Affronter son regard serait trop dur, cette situation était trop dure. Elle qui pensait avoir enfin réussi à relever la tête, elle réalisait que ses cicatrices étaient encore des plaies ouvertes, que les sentiments qu’elle croyait avoir un peu oubliés étaient plus réels que jamais, l’amour comme la rancœur, mais pire encore, elle réalisait qu’elle n’était plus que l’ombre d’elle-même, assombrie par leurs fautes respectives. Finalement, elle leva ses yeux humides et les plongea dans ceux d’Alexis. Elle s’effondra, les larmes ruisselant sur son visage rose. C’était la pression qui redescendait, c’était sa manière à elle d’évacuer ses nerfs, c’était aussi le constat d’échec qui se dressait face à eux, elle finissait par pleurer pour la première fois depuis leur rupture. Elle avait tenue à se montrer forte, à tenir le coup, à faire bonne figure mais là, elle craquait : “J’ai tellement mal au cœur...” finit-elle par prononcer entre deux chagrins.

C'est comme une balle en plein coeur, de regrets et de rancoeur... Ton absence qui résonne, me déraisonne.  

Pando

Cette colère, cette douleur, c'était difficile de faire avec ça. Ce n'était pas dans le caractère d'Alexis de s'emporter, il ne le faisait jamais d'ordinaire. Le nombre de fois ou il avait perdu le contrôle de ses nerfs, à ce point, c'était simple à compter. Jamais. Faire le deuil de cette relation, sans la voir, ce n'était pas facile. D'ailleurs, pour être honnête, Alex ne l'avait jamais complètement fait. Il n'avançait plus dans sa vie depuis cette rupture. Il n'arrivait pas à passer à autre chose. Pourtant, ce n'était rien comparé à ce qu'il devait affronter là, tout de suite. Son regard, la vision de celle qu'il avait considéré comme la femme de sa vie. Sa faiblesse, ses regrets, sa rancune et les souvenirs. Tout se mélangeait tellement. Plus elle parlait, plus il avait envie de crier. Ce que faisait son coeur d'ailleurs, il hurlait.

Qu'elle soit désolée ? Ca lui faisait une belle jambe. Pourtant, et il n'aurait pas dû, il la sentait sincère. C'était sans aucun doute le plus déroutant. Que Rose croit tellement fort à ses mensonges. Qu'elle s'enfonce là-dedans. Et encore, ce n'était pas le pire. Un haut le coeur dès qu'elle mentionna des mots précis. -Je t'aimais tu sais - Il était bloqué là-dessus, n'entendant même pas le reste, n'écoutant pas. La puissance de la claque qu'il venait de se prendre. Le deuil n'était décidément pas fait. Ca ne pouvait pas être le cas puisque intérieurement il s'effondrait presque de l'entendre parler de l'amour au passé. Sombre idiot qui faisait tout pour l'oublier en ne faisant rien. Si des mois ne suffisait pas, qu'est ce qui pourrait y faire ? Ses yeux étaient brillants, mais il était hors de question qu'il se mette à pleurer, il préférait encore s'énerver. Il n'y arrivait plus. "Tais-toi s'il te plait. Stop." Elle devait se taire, absolument se taire. Il ne remarquait même pas qu'il tremblait, fermant les yeux quelques secondes pour essayer de se reprendre.

Malheureusement pour sa santé mentale, elle avait des choses à dire Rose. Des arguments. Mais qu'est ce qu'il foutait là ? Elle n'avait pas tort, mais il refusait de l'admettre. Incapable de faire la part des choses. "Jusqu'à quoi ? Pourquoi tu ne veux pas le dire ? T'as honte ? Tu ne devrais pas." Le ton se voulait sarcastique et irrémédiablement accusateur. Il avait la désagréable impression de n'entendre que des conneries. "Donc c'est ça ton explication ? Un passage à vide, une période plus délicate et toi tu fais quoi ? Tout exploser ? Tu ne pouvais pas me parler ? J'oubliais... Tu ne sais pas parler toi. Tu agis. " Il était dur avec elle, mais comment il aurait pu faire autrement ? Qu'elle s'effondre, ce serait mentir de dire que ça ne lui faisait rien. Ca le touchait autant que ça le déstabilisait, mais il n'avait pas le droit de faiblir à ce point. Au point d'avoir de la compassion pour elle, Rose ne le méritait pas. Alors, non sans quelques difficultés pour respirer, il avait l'envie de l'enfoncer. Qu'elle ait aussi mal que lui. " Je ne te plaindrai pas. Si tu as mal, tant mieux. Tu as une vague idée de ce que je ressens, c'est bien." Et voilà. Alexis détournait le regard. Le dire c'était une chose, le penser sincèrement, regarder ses larmes, trop difficile. Même aussi touché, blessé qu'il l'été et avec toute la volonté du monde, il n'arriverait pas à vraiment lui vouloir du mal. Qu'il soit là, avec elle, c'était dangereux. Il fallait qu'il écourte cet échange, qu'il trouve une issue, une échappatoire. Se lever déjà pour commencer, toujours sans un regard. "Tu sais quoi. Ce n'était pas une bonne idée de se parler. Je vais me débrouiller pour ma main. Comme je me suis débrouillé avec le reste." Le reste ... Bien plus douloureux que sa main. Il n'avait rien à attendre de Rose désormais. Il se devait de l'entendre, il était dans l'obligation de tout faire pour ne plus être accroché à cette histoire. "Tu as choisi de tout gâcher. Tu assumes. " Un coup d'oeil, inévitable, sans colère, mais plein de tristesse. Le gâchis dans leurs yeux.

C'est comme une balle en plein coeur, de regrets et de rancoeur... Ton absence qui résonne, me déraisonne.  

Pando

Assise, vidée par ce trop plein d’émotions, Rose ne réalisait pas vraiment ce qui venait de se produire. Elle avait enfin dit à Alexis toute la peine qu’elle avait gardée enfouie au fond de son cœur, elle avait tenté de lui expliquer sa douleur, sa frustration, une raison à tout ce drame, sans pour autant lui dire que ce qu’il s’imaginait n’avait en fait jamais eu lieu, que Kendrick n’avait jamais été qu’un ami et qu’elle ne le considèrerait jamais autrement, qu’il n’y avait toujours eu que lui, que sa peau contre la sienne, que son souffle dans son cou, il n’y avait que dans ses yeux qu’elle voyait un avenir… Elle aurait pu lui dire tout ça, lui dire combien elle regrettait… Mais elle n’en fit rien, résolue à le perdre, résolue à ce qu’il ne veuille pas comprendre. Elle le regarda se lever, impuissante, fâchée, déçue et finalement amorphe. Elle aurait aimé Rose qu’il se remette en question, qu’il réalise qu’il avait sa part de responsabilité, que son attitude désinvolte l’avait conduite à employer les grands moyens, qu’elle avait essayé de lui parler mais il rentrait trop tard pour avoir une réelle conversation, il était noyé dans le boulot, il n’avait « pas le temps », son expression préférée. Seulement tout ça, il l’avait oublié, volontairement rayée pour ne garder que l’adultère de l’horrible Rose, cette égoïste trainée qui l’a trompée dans son propre lit, celle qui pour un coup, a choisi de renier une relation sincère et profonde. Elle avait endossé le rôle de la méchante sous sourciller, comprenant très vite que rien qu’elle ne puisse dire ne changerait l’opinion ni la déception d’Alex.


Lorsqu’il lui indiqua vouloir gérer sa main sans elle, coupant court à leur discussion, elle ne tenta même pas de lui faire entendre raison, elle partageait son avis. Enfin une chose en commun depuis ce temps, une chose sur laquelle ils étaient finalement d’accord. « Je comprends que tu sois en colère Alex… Tu as tes raisons, bonnes ou mauvaises, et je veux quand même que tu entendes une dernière chose avant que tu t’en ailles… » Elle le fixait, et pour ce qui suivait, elle voulait qu’il ait le courage de la regarder, de plonger ses yeux dans les siens, il y lirait la sincérité, il la connaissait pas cœur. « Regarde-moi s’il te plait… C’est la dernière chose que je te demanderai jamais. » Elle attendit un instant, puis s’approcha de lui, une dernière fois. Délicatement, elle posa sa main sur sa joue, et scruta son visage comme pour s’en imprégner et ne jamais l’oublier. « Tu as été tout ce que j’avais Alexis Hamilton, avec toi, j’me suis sentie vivante pour la première fois, j’ai compris pourquoi j’étais en vie, j’ai compris le sens de la vie en étant à tes côtés. J’ai connu les vertiges de l’amour, je me suis vu vieillir et plus rien ne me faisait peur parce que je t’avais toi, et que je savais que quelque soit la suite, j’aurais toujours une épaule sur laquelle me reposer, l’épaule d’un homme que j’aimais plus que tout. Tu es quelqu’un de merveilleux, doux et charismatique à la fois, tu es un homme exceptionnel, un amant exceptionnel, et un jour, tu seras un père exceptionnel aussi. Je regrette que tu aies cessé de l’être les derniers temps, j’espère sincèrement que tu te retrouveras parce que cet homme-là est la personne que j’aime le plus sur cette Terre, et je souhaite à la personne que tu rencontreras après moi de le connaitre. Je te souhaite d’être heureux, de t’épanouir et de vivre tes rêves. Ne t’oublie pas en chemin, je t’en prie. » Elle baissa les yeux, et en lui disant au revoir, en lui donnant sa bénédiction pour vivre une vie sans elle, elle sentit sa rancœur s’en aller, comme un poids qui venait s’alléger de ses épaules. « Au revoir Alex… » Voilà. C’était terminé, une belle histoire qui s’arrêtait définitivement ce jour-là, dans ce parc qui les avait pourtant vu si heureux quelques mois plus tôt.
 

C'est comme une balle en plein coeur, de regrets et de rancoeur... Ton absence qui résonne, me déraisonne.  

Pando