(rose&alexis) such a beautiful nightmare.

Le soleil venait dominer les murs du Queens, la chaleur se voulait étouffante, lourde, c’était souvent le cas, probablement parce que les buildings empêchaient quelques fois l’air de bien circuler, ou peut être même à cause de la pollution. Les passants soufflaient, certains s’essuyaient le front dans un geste de désespoir de leur avant-bras, d’autres semblaient imperturbables, les chanceux. Rose, elle marchait tranquillement, son meilleur ami Kendrick à côté d’elle. Ils se connaissaient depuis des années, ça aurait pu déraper entre eux, plusieurs fois, parce que Kendrick était un beau garçon, parce que Kendrick était cool, parce que Kendrick avait tenté sa chance, mais Kendrick n’avait jamais été Alexis et Rose ne lui avait jamais laissé sa chance. Il s’était contenté de l’amitié, c’était la seule chose qu’elle avait à proposer à cette époque la. Aujourd’hui, elle était célibataire, lui aussi, mais elle ne franchirait pas la ligne, pas après tout ce qu’ils avaient provoqué, pas après cette scène gravée dans leur mémoire. Trop de drames, trop de mensonges, trop de conséquences. Aux yeux de tous, ils étaient sans gêne, ils étaient les parias qui s’étaient foutu d’Alexis, ses amis s’étaient retournés contre elle, contre eux, deux égoïstes qui n’avaient pensé qu’à leur propre bonheur sans se soucier du mal qu’ils causaient, ils étaient deux pourris qui se méritaient l’un l’autre. Ils s’étaient fait une raison, en apparence, et si ça aurait pu les séparer, ils s’étaient beaucoup soutenus, surtout lui, il avait été le rempart dont elle avait besoin avec cette rupture, après ces mots horrible qu’elle avait prononcé, ces mots qu’elle n’avait jamais pensé mais qu’elle avait balancé comme un bouclier. Il était resté près d’elle, sûrement parce qu’il connaissait la vérité, le stratagème, aussi parce qu’il savait qu’elle souffrait, bien qu’elle n’en montrait rien. Il avait été cette épaule, ce mouchoir humain, sans rien attendre en retour. Un mec bien en somme, un ami, un vrai, un garçon qu’on doit garder dans sa vie.

Rose, elle prenait la vie à fond, et aujourd’hui ne dérogerait pas à la règle. Virage à quatre-vingt-dix degrés imprévu qui entraîna Kendrick dans un demi-tour mal maîtrisé, il leva les bras au ciel. « Rose, t’es casse-bonbon ! » Elle éclata de rire, puis s’arrêta net. « Mais qu’est-ce que tu fous ? » « Chuuuuuut » Mima-t-elle, lui faisant signe d’écouter. Il secoua la tête, incapable d’entendre autre chose que le bruit des voitures, quand il perçut un miaulement, faible, mais réel, venant d’un peu plus loin. Il comprenait à présent le caractère urgent de ce revirement de situation et toute l’intensité que la jolie brune mettait dans sa quête du silence. Doucement, elle avança, pas après pas, à la recherche de la source de ces petits cris de détresse. « Rose… » Elle ignora son appel, bien décidé à recueillir ce petit chat et lui sauver la vie. « Rose… » Encore, qu’est-ce qu’il venait la souler alors qu’elle était concentrée, elle avait aperçu des petits yeux au fond de la poubelle en alu, il était là ce pauvre petit bout, coincé au fond d’une poubelle vide dans laquelle il était tombé. Depuis combien de temps était-il en train de se déshydrater, de crier famine ? Aucune idée, mais il fallait faire quelque chose. Elle plongea la tête dans la benne, la respiration coupée, pour attraper la petite boule de poil affaiblie. « Je l’ai ! Ca va aller mon bébé… N’aies pas peur, on va s’occuper de toi maintenant. » Elle le serrait contre elle, avançant les yeux rivés sur ceux de l’animal. « Rose… » Elle finit par lever la tête, haussant les sourcils. « T’as vu Ken, le petit amour… Ça va devenir notre petit warrior hein… » Il ne réagissait pas, et c’est en suivant le regard de son meilleur ami qu’elle comprit. Sa gorge se noua, et son regard vint se poser sur ses yeux à lui, ces mêmes yeux qui la transperçaient, sur son visage à lui, ce visage fermé qu’elle ne voulait pas croiser, sur cette silhouette et ce corps qu’elle avait tant serrés. Il était là, face à elle, face à eux… Encore une fois.

C'est comme une balle en plein coeur, de regrets et de rancoeur... Ton absence qui résonne, me déraisonne.  

Pando

"Allez encore une petite longueur ! S'il te plait, je suis fatigué, tu m'auras peut-être ! " Dans la piscine, son pote Terence faisait grise mine, clairement épuisé déjà et lui vraiment. Alex s'en fichait, quand il s'agissait de sport, il avait toujours envie de plus, d'aller plus loin. C'est comme une balle qu'il s'élançait, sans attendre de réponse. Ce qui devait arriver, arriva et c'est encore une fois lui-même terminait la longueur en tête. Son sourire était légèrement narquois. Bon, le sport n'enlevait pas la rigolade et il lui ébouriffait les cheveux à cet anti-sportif du jour, mais ami surtout, bon joueur. " Rales pas, on y va, je vais te payer un verre."

C'est lorsque lui et Terence se retrouvaient dehors qu'il se rappelait pourquoi il avait choisi la piscine comme activité pour aujourd'hui. Il faisait chaud, mais du genre à faire cuire un oeuf sur le toit d'une voiture. Son regard exprimait complètement son envie d'aller de nouveau se jeter à l'eau. Repéré. "Non ! " Il acceptait, non sans une moue boudeuse en enfilant ses lunettes de soleil, tout en cherchant la moindre parcelle d'ombre qu'ils pouvaient croiser dans la rue.

Ils avaient repéré une terrasse et surtout des parasols sur celle-ci, pas une minute à perdre avant de fondre. Alexis retrouvait sa mine joyeuse, en commandant son coca et celui de son acolyte. "Tu as prévu quoi ce soir ? On sort ? " Qu'est ce qu'il avait prévu ? Rien pour l'instant, mais cette question passait en second plan aussi vite qu'étaient venues les premières idées de sorties. Son regard venait de changer radicalement, basculant doucement, mais surement vers quelque chose d'agressif. Il n'en croyait pas ses yeux. D'ailleurs, il retirait ses lunettes pour être sûr. "Al' ?" Il n'écoutait plus du tout. Sa vision, une demoiselle qui sortait une boule de poile d'une poubelle, jusque là merveilleux, mais ... C'était Rose. Pas la joie de la voir, mais ce n'était pas la raison principale de son impulsivité soudaine. Elle était avec Kendrick. Moins à l'horizontale que la dernière fois qu'il les avait vus ensemble, mais curieusement, ça faisait presque le même effet. La colère. Ca le piquait encore au vif cette histoire.

"Alex, viens on s'en va. Ça n'en vaut pas la peine." Terence avait vu Rose, Kendrick donc et compris pendant que lui retrouvait son ouïe. Son regard par contre, il était figé vers les deux personnes un peu plus loin. " Je vais juste dire bonjour, par politesse ! Bouges pas. Ce sera pas long." Il n'allait pas bouger, son pote n'aimait pas les problèmes, mais ça ne le dérangeait pas. Il n'avait besoin de personne dans l'immédiat.

Rapidement, Kendrick l'avait repéré, pas Rose et c'est à mi-chemin qu'elle fut alertée sur un ex-fiancée en approche. C'est là qu'Alexis affichait un beau, mais très faux, sourire, pour applaudir, en continuant d'avancer. "Bravo, franchement, il est très mignon." Complimenter Ken ? Cet ancien ami qui l'avait trahis avec son ancienne amoureuse, oh que non. "Le chat, il est très mignon le chat, beau geste." Ce n'est qu'arrivée à leur hauteur qu'il jeta un coup d'oeil au garçon d'abord, lui tapotant virilement l'épaule. "Tu vas bien le tombeur ? " Puis rose ... Un peu plus dure au niveau des mots, des possibles remarques. Il avait d'ailleurs marqué un temps d'arrêt, avec presque le besoin de trouver ses mots. "C'est ce que vous faites maintenant ? Vous sauvez des chats ? J'approuve ce changement d'activité." Il était gentil là ... Enfin gentil, dans le sens ou intérieurement il aurait bien sauté sur le meilleur ami de Rose, mais d'abord, il voulait juger, jauger et surtout voir leurs réactions. " Ne faites pas les timides, voyons, ça ne vous ressemble pas."

C'est comme une balle en plein coeur, de regrets et de rancoeur... Ton absence qui résonne, me déraisonne.  

Pando

C’était à la fois bouleversant, surprenant, et même gênant de voir Alexis s’approcher. Elle n’avait pas prévu ça, et bien que l’inconnu ne lui faisait pas peur, cette situation-là ne lui plaisait absolument pas. Statufiée, voilà ce qu’elle était, son cœur battait la chamade, le chat devait sentir son emprise s’accentuer.  Ce garçon avait représenté la vie idéale, il était celui avec qui elle se voyait femme, épouse, et mère un jour. Elle se voyait heureuse à ses côtés, vieillissant dans les bras de cet homme qu’elle aimerait toujours, nourrie de ce sourire qui la faisait craquer, de ce regard dans lequel elle lisait l’immensité d’une vie à s’aimer… Et puis ce regard s’était assombri, cette lueur s’était éteinte, ces sourires n’étaient plus, ou alors plus brefs, plus polis, ces bras qu’elle aimait tant voir l’entourer ne tenait plus son corps à elle, mais un téléphone, ces caresses qui la faisaient vaciller effleuraient à présent un clavier, alors elle avait fait le choix de l’électrochoc, le choix d’un changement radical, le choix d’arrêter d’ignorer une situation vouée à l’échec, et elle avait fait venir Kendrick dans leur lit. C’était rien, c’était un tableau dans un regard vide, c’était une guerre d’égo plus qu’une bataille pour sauver leur couple, et il avait préféré abandonner, il avait préféré omettre ses fautes pour se concentrer sur la supposée faute de sa dulcinée, de son ex dulcinée. Il n’avait été plus question que de ça, de cet adultère, de ce péché, des « comment as-tu osé ? »… Mais comment avait-il osé ne plus entretenir la flamme, comment avait-il pu laisser son travail prendre le pas sur leur relation, comment avait-il pu ne pas voir ses appels, ses bouteilles à la mer ? C’était de sa faute à elle si tout était détruit, elle était la seule à blâmer, c’était tellement plus facile… Les souvenirs la frappaient, les uns après les autres, des images, des mots, ses cris ce soir-là, ces choses qu’ils s’étaient dites, ces atrocités sur lesquelles ils étaient restés.

Le sourire aux lèvres, avec une aisance qui sonnait faux, une assurance qui masquait de la colère, il s’avançait, vaillant, prêt à provoquer une énième querelle, une énième cicatrice dans ce cœur déjà bien abimé. Il parlait du chaton, jouant le bon samaritain, la parole d’évangile, le félicitant pour ce geste authentique. Rose ne bougeait pas, ne disait rien. Elle ne savait pas quoi dire, ni même à quoi s’attendre. Son attitude la dérangeait, il les prenait de haut, lui, le pseudo mec parfait, le gendre idéal, mais les autres étaient loin du compte. Alexis était gentil, bien sûr, mais savait être cruel aussi, elle était bien placée pour le savoir. Une claque sur l’épaule à Kendrick, il voulait jouer le patron, mais son meilleur ami avait le sang chaud, et surtout, était tout aussi costaud que son ex… Elle lança un regard de supplication à Ken afin qu’il ne se lance pas dans une bagarre inutile, puis posa ses yeux sur Alexis. Elle était froide, la peur et l’appréhension laissaient place à l’amertume, et ce n’était pas bon. Il fallait à tout prix qu’elle se calme avant que ça dégénère et que le spectacle ameute les promeneurs alentours. Un sourire hypocrite, miroir de celui qu’il se forçait à observer, elle balança sans détour. « Oui, tu comprends, il est tellement doué avec la mienne que je me disais que ça serait dommage de ne pas en faire profiter le monde. » Elle parlait de sa douce Wisconsin, sa majestée du ronronnement, fan numéro de la pâté et impérial reine de son arbre à chat, mais le sous-entendu sexuel était volontaire, pour lui clouer le bec, pour voir sa réaction, pour essayer de capter un sentiment dans ce regard vide qu’elle maudissait tant. « Si t’as besoin de cours, je peux te laisser son numéro, il sait vraiment y faire, pas vrai ? » En attendant que son meilleur ami confirme, elle s’approcha de lui et lui caressa le bras, feignant une alchimie et une tension amoureuse entre elle et meilleur ami. Elle ne le laisserait pas gagner cette bataille des nerfs, à ce jeu-là, Rose était une championne, tant pis si elle le regrettait, car elle le regretterait, c’était évident, elle ne pouvait pas laisser entrevoir qu’elle était touchée, que son cœur battait un peu plus vite, un peu plus fort en sa présence, surtout pas.

C'est comme une balle en plein coeur, de regrets et de rancoeur... Ton absence qui résonne, me déraisonne.  

Pando

Croyez le ou non, si cela avait été très facile d'avancer jusqu'à eux. Si l'envie d'aller à leur hauteur, les provoquer s'était faite en première intention, sans fléchir. Il était en revanche beaucoup plus difficile d'être là, maintenant qu'il avait mit les deux pieds dans le plat. Se retrouver en face des deux personnes responsables de tous ses maux récents, c'était électrisant, mais aussi et surtout tristement éloquent.

Alexis se retrouvait seul, eux ils étaient restés deux. Il avait tout perdu et là, ses pensées se mélangeaient dans son esprit. Dans un coin de sa tête, il avait espéré ne pas revoir cette image, ne pas devoir revenir en arrière, mais c'était impossible maintenant. Impossible de ne pas y songer. En perdant Rose, il n'avait pas perdu seulement sa fiançée, il avait perdu une ligne directrice dans sa vie. Amour basé sur la passion, le seul feu qu'il croyait impossible à éteindre. Alors que la vie est faite de changement, de haut, de bas, il avait toujours vu la jeune femme comme une constante pour lui. La certitude que ça au moins, ça ne changerait jamais. Pendant cinq ans de couple et quelques années aussi avant d'amitié, que cette relation ait explosé, c'était inconcevable pour lui. Inimaginable. Et pourtant. La colère, la tristesse, la rancune, voilà ce qu'il restait de tout ça désormais. En tout cas là, tout de suite, en les regardant tous les deux. Surtout quand son regard se posait sur elle. Triste constat d'échec, mais pour lui ce n'était pas le sien. Alexis voulait de la patience, du temps, mais Rose, c'est la fougue, la tornade et au contraire l'impatience. Finalement, ce qui était arrivé était du domaine de la logique.

Il était évident que Rose n'allait pas se laisser faire devant ses attaques, ce n'était pas son genre, il ne le savait que trop bien. Il était par contre hors de question de paraitre déstabilisé, déboussolé. Alex avait la désagréable impression que ses jambes allaient se dérober. Il devait donner le change. S'empêcher de rougir et s'empêcher de serrer trop fort le poing aussi. Un sacré bordel dans sa tête. " Je m'en doute pas que tu dois en faire profiter le plus de monde possible. Sinon, tu te lasses. " Non Alex, allez on répète. Pas de provocation. Il devait se voir au-dessus de cette démonstration d'alchimie, mais il n'y arrivait vraiment pas et ses poings ... Ses poings devenaient dangereux. Le tremblement devant l'effroyable vérité.

Puis, c'était fichu, trop tard. Quand Rose parlait de cours et que Kendrick s'apprêtait à approuver. Les caresses de la jeune femme allait dans ce sens. C'était de la provocation. Il le savait, il avait anticipé, mais il ne voulait pas entendre ça, il ne pouvait pas l'entendre parler de Rose. Pas lui. Black out. Il avait frappé si fort sur la benne à ordure qu'il avait dû faire peur au chat. Des passants s'étaient retournés et même Terence avait décidé de se lever pour approcher. Au moins, il avait évité une bagarre, pour l'instant. "Je ne veux pas t'entendre dire quoi que ce soit Kendrick, je te préviens. " Il ne sentait pas la douleur, ce serait sans doute pour quelques minutes plus tard, mais par contre la colère, elle s'amplifiait. Qu'est ce qu'il faisait là ? Pourquoi il s'était approché ? C'était évident que ce n'était pas une bonne idée. "Ça t'amuses de me voir comme ça pas vrai ? Tu y as pris goût la première fois déjà. Ça suffit, j'en ai marre. " Ses yeux s'étaient à peine levés sur elle, mais c'est à Rose qu'il s'adressait cette fois. Il en avait marre de regretter le passé, qu'on le lui rappelle sans arrêt, alors qu'il y pensait déjà beaucoup de lui-même. Il n'était pas fautif. Et marre de cette petite démonstration. Un point de non retour, voilà où il en était. Elle avait toujours été plus forte mentalement que lui, il avait essayé de mener un combat, sans armes et contre une armée. Il ne comptait pas rester là, il n'était pas supposé l'être. En se pinçant la langue, comme pour se calmer, il regardait Si Terence arrivait. Il allait partir trop loin à leur contact.

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Pando

Elle avait chaud, ses joues étaient vraisemblablement rouges tomate, elle sentait les nerfs qui lui montaient, pourtant, des frissons la parcouraient. C’était contradictoire, Rose était la définition de la contradiction. Tout en elle se brûlait d’amour pour ce mec, debout face à elle, pour l’avenir qu’ils avaient imaginé, pour ces sentiments qu’elle avait enfouis très très profondément, ces sentiments qu’elle était persuadée d’avoir enterré à tout jamais. Rien n’était pire que la rancœur, encore plus venant d’une fille comme Rose, une femme fière, bornée, impulsive, prête à tout pour prouver qu’elle avait raison. Ses mots à elle, agissaient comme des lames de rasoir, blessants, secs, et elle était celle qui s’évertuait à appuyer sur la tranche. C’était plus fort qu’elle, mécanisme d’auto-défense, peu importe ce qui allait en résulter. Alexis rendait coup pour coup, du moins il essayait, mais ils étaient deux, deux souvenirs amers qui venaient lui exploser au visage. Lorsqu’il ordonna à Kendrick de ne pas discuter, ses poings étaient serrés, elle l’avait remarqué Rose, elle avait vu ses tremblements de colère. Il était touché, encore, et elle avait l’impression de revoir ce regard plein de rage, ce regard brisé, plein de souffrance qu’elle avait vu dans la chambre ce jour-là, ce regard qui autrefois était plein d’amour et d’étoiles, qui aujourd’hui ne montrait plus que du dédain. Ce qui devait arriver arriva, il envoya un coup dans la benne qui ne bougea pas d’un pouce. Elle le sentait venir, mais le choc la fit sursauter malgré tout. La douleur devait être vive, et sans même le réaliser, elle fit un pas en avant vers sa main qu’il venait de fragiliser pour quelques semaines. Elle ne l’avait pas remarqué, ce pas en avant, cette main tendue vers la sienne, parce que c’était irréfléchi, c’était naturel, c’était incontrôlé. Et puis elle reprit ses marques, ramenant son pied en arrière et ses mains vers elle. « Lex, arrête je t’en prie, tu me fais peur. » Elle était sincère, elle ne l’avait jamais vu comme ça, aussi à fleur de peau, aussi agressif. Elle avait les larmes aux yeux, son cœur se brisait alors qu’elle réalisait à quel point elle avait fait de lui une épave. « T’as le droit de m’en vouloir, t’as le droit d’être en colère, de m’insulter, tu l’as déjà fait de toute façon, mais ça… T’es con putain. Tout le monde nous regarde ! » Ca ne lui ressemblait pas, ce n’était pas l’homme duquel elle était tombée amoureuse autrefois.

Son regard cette fois se posa dans ses yeux à lui, ses yeux bleus qui la transperçaient. Elle aurait aimé lui répondre quelque chose, lui dire la vérité, lui dire qu’il n’y avait toujours eu que lui, lui demander pardon d’avoir été maladroite, de ne pas avoir su lui dire et lui faire comprendre les choses autrement, mais elle n’avait pas trouvé d’autres solutions à ce moment là, ça lui avait semblé logique sur le coup. Elle aurait aimé lui dire qu’elle n’en avait rien à faire de Kendrick, qu’il n’y avait et qu’il n’y avait jamais rien eu entre eux, qu’il était une simple couverture, un grain de sable devant l’immensité de l’océan, lui dire qu’elle avait mal en même temps qu’elle le voyait souffrir et perdre pied, mais rien. Elle n’y arrivait pas. C’est à ce moment là que Kendrick s’approcha, et posa sa main sur l’épaule de la brune, prêt à envoyer un énième tacle à Alexis. Mais c’était trop pour Rose, les gens les scrutaient de loin déjà, et elle venait de se prendre une claque terrible en réalisant que l’homme qu’elle avait tant aimé se laissait dévorer par ses démons. « Lâche-moi Ken, ne dis rien. Tu sais quoi, laisse-moi, j’ai besoin que tu t’en ailles… s’il te plait. Tiens, prends le chat, je pense qu’il a eu sa dose. » Elle était au bord des nerfs elle aussi, elle ne voulait pas qu’il soit là, elle ne voulait pas hurler, pourtant, elle venait de lui crier dessus, à lui, à son meilleur ami qui avait toujours fait ce qu’elle attendait de lui. Le truc, c’est que face à Alexis, elle était incapable de se gérer, elle passait du rire aux larmes, elle jouait tellement la fille insensible depuis des semaines que la réalité la rattrapait. « Ecoute, on n’est pas obligé de se parler, mais laisse-moi t’emmener soigner ça, ta main est violette.  Ca valait le coup franchement de t’exploser comme ça ?! Comment tu vas faire maintenant hein ?» Elle l’avait fait, elle avait posé sa main gonflée sur la sienne, et son cœur s’était soulevé. Elle était restée impassible, remuant la tête de dépit, mais son corps entier criait à l’aide. Sa colère s’était dissipée face à la situation, à présent elle avait peur, peur de ce qui allait arriver, peur de ne plus avoir le contrôle de la situation, peur de s’emporter et d’empirer la situation, peur qu’il la blesse et qu’elle renchérisse en ajoutant des phrases horribles à la liste des mensonges qu’elle avait pu lui dire déjà, peur de le voir la renier et d’affronter la triste réalité de ce qu’était devenu leur histoire.

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Pando

Se laisser envahir par la colère, perdre le contrôle, ça ne ressemblait tellement pas à Alexis que lui-même était un peu dans le flou après coup. Maintenant qu'il commençait à réfléchir, à regarder, à comprendre. Il était doué pour prendre sur lui d'habitude, pour réussir à encaisser les aléas de la vie de manière posé. Cela représentait même une de ses forces au sein de sa famille, auprès de ses amis mais là ... En cherchant dans sa mémoire, à ce point-là, si on mettait de côté des petites broutilles, ça ne lui était arrivé que deux fois et ces deux fois étaient liées à Rose. A l'instant et lorsqu'il les avait retrouvés dans le même lit. C'était peut-être même pire cette fois. Le temps lui avait fait du mal et même s'il donnait le change auprès de son entourage, comme il pouvait, les blessures ne s'étaient pas guéries. C'était évident maintenant. Au contraire, une boule de colère s'était formée, il avait laissé faire et elle venait de pointer le bout de son nez. Irrémédiablement.

Il s'attendait à ce que Rose et Kendrick l'enfoncent encore. Qu'ils profitent de cette vulnérabilité soudaine pour porter le coup fatale, mais ce n'était pas le cas. Pas elle en tout cas. Alex l'avait vu s'approcher, il voyait du coin de l'oeil qu'elle semblait fébrile. Avant qu'elle ne recule et ne mentionne la peur. Peut-être que lui aussi il avait peur là, il ne comprenait pas, comment il pouvait en arriver là. Il ne disait rien et il n'osait plus regarder personne. Sauf quand elle mentionnait qu'on les regardait. Là il portait son regard vers les gens qui effectivement avaient les yeux rivés sur eux. " C'est bon ? Ca vous a amusé ? Allez le spectacle est terminé maintenant. " Il se voulait incisif dans sa remarque et la plupart traçaient leur route, non sans un coup d'oeil de temps à autres.

Si Rose semblait comprendre la gravité de la situation et qu'elle montrait même une certaine inquiétude, ce n'était pas le cas de Kendrick. Le bougre tentait de se rapprocher de la jeune femme et lui et il semblait prêt à l'enfoncer. Alexis fut surpris qu'elle l'envoie bouler presque et qu'elle coupe court à tout possible dérapage. C'était aussi un signe qu'il s'était vraiment exposé, il ne savait pas trop comment réagir. Pendant ce temps-là, Terence était arrivé à sa hauteur, à sa tête, lui aussi avait peur. "Je vais y aller, je te ramène ? " Alex lui fit non de la tête, il y avait des choses à régler. "Je te rappelle plus tard."

Kendrick, qui s'était fait crier dessus et Terence prenaient congés et il ne restait plus que lui et Rose. Loin d'un tête-à-tête romantique. Les deux semblaient aussi chamboulés l'un que l'autre. La demoiselle fit un geste qui fut révélateur. Peut-être plus que ses paroles en elles-mêmes. D'un, la douleur pointait le bout de son nez, la douleur physique et un regard aux deux mains lui soulignait à quel point il venait de faire une connerie. Ca le lançait, enfin et il était parti pour douiller. Ensuite, ce contact lui manquait, elle lui manquait, il avait encore beaucoup de sentiments pour elle, plus qu'il ne voulait l'admettre. Mais le mal était fait, il était hors de question de pardonner. C'est pour ça qu'avec une grimace il retirait sa main.

La colère était partie, mais il restait néanmoins complètement perdu, abasourdi. "On peut y aller, tu n'as qu'à me déposer devant l'hôpital, mais ça ne sert à rien de parler. On s'est déjà tout dit non ? " Si sa phrase pouvait sonner comme une petite pique ou du moins, comme s'il la repoussait. Dans l'intonation et le regard qu'il lui lançait, c'était une vraie question. Il n'avait pas dit ça méchamment et le fait qu'il accepte qu'elle l'accompagne était déjà en soit, un pas en avant. Le dernier peut-être, mais un pas en avant quand même. Il venait de voir qu'elle s'inquiétait, qu'elle avait eut peur. Alexis n'était pas quelqu'un de méchant, il était seulement blessé, au plus profond de lui, mais il ne pouvait pas la rejeter. Pour la première fois depuis leur rupture, il se mettait un tout petit peu à sa place. " Merci d'avoir empêché Kendrick d'en rajouter. Je ne te pardonne pas, je ne te pardonnerai pas, mais je sais que tu n'es pas quelqu'un de mauvais." Un compliment glissé au milieu d'une fatalité. C'était ça Rose et Alexis aujourd'hui, deux personnes avec beaucoup d'affection l'un pour l'autre, mais sur un tableau brisé, irréparable.

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Pando

Si on lui avait dit en se réveillant le matin-même qu’elle s’apprêterait à monter en voiture avec son ex, seul à seul, qu’elle aurait même pris sa main et qu’ils auraient chacun renvoyé leurs amis respectifs pour finalement se retrouver juste en tête à tête, elle ne l’aurait pas cru. Déjà, parce qu’elle était en colère Rose, encore touchée par les mots d’Alexis au moment de leur rupture, par le fait qu’il lui ait envoyé en pleine gueule qu’elle ne représentait rien, seulement un comble à la solitude, et même si elle ne voulait pas le croire, ça résonnait encore et encore. Avec cette rupture, il l’avait mise à l’écart de ses proches, de leurs amis, sa vie à elle avait complètement basculé. Il ne lui restait plus que son boulot… Et Kendrick. Et pourtant, elle aurait tout échangé pour lui, pour eux, pour ce qu’ils avaient avant, au début, pour revivre ces moments de bonheur ad vitam eternam, mais c’était mort. Si cette scène laissait présager du positif, aucun d’entre eux n’en ressortirait apaisé, parce que le passif était lourd, parce qu’ils avaient été durs, l’un comme l’autre. Rose savait qu’elle avait mal fait les choses, mais elle était face au mur, et n’avait vu que cette solution. Il pouvait lui en vouloir, elle comprenait, mais ce qu’elle n’acceptait pas, c’était cette manière qu’il avait de refuser de remettre en question son attitude à lui, de tout lui mettre sur le dos comme s’il était la victime innocente d’un adultère. De un, elle ne l’avait pas trompé, et de deux, même si elle l’avait fait, c’était son comportement à lui qui l’y aurait poussée. Quoiqu’il en soit, ils étaient là, tous les deux, on aurait pu se croire au bon vieux temps si on ne lisait pas la gêne sur leur visage respectif. « Je suis garée par là-bas. » fit-elle en pointant l’angle entre l’avenue principale et une rue au fond. Elle ne savait pas quoi dire la brune, c’était rare. Il avait retiré sa main quelques instants plus tôt, lorsqu’elle lui avait attrapée, mais le contact avait été électrique, comme si cette connexion était toujours là, enfouie, perdue. En y pensant, Rose esquissa un petit sourire plein de nostalgie, qui s’installa définitivement quand il lui dit qu’elle n’était pas mauvaise. Un compliment à demi-mot, résultat de son inquiétude et de son attention probablement.

En avançant vers la voiture, ils passèrent devant une boutique qu’ils connaissaient bien tous les deux, la pâtisserie préférée de Rose, celle qui réalisait les meilleures cheesecakes du monde, le pêché mignon de la demoiselle. Inconsciemment, elle scruta la vitrine, nourrissant sa gourmandise par le plaisir des yeux. « Tu veux un petit truc à grignoter pour la route ? » Au fond, elle voulait bien une part elle aussi, mais c’était mieux si ça venait de lui. Il la connaissait par cœur, il se doutait sûrement qu’elle avait vu l’énorme gâteau dans la vitrine, surplombé de kinder bueno en morceaux, mais il souffrait et elle n’osait pas, ne souhaitait pas le voir grimacer plus longtemps. « J’ai lu un truc comme quoi le sucre apaisait la douleur, je pense pas que ce soit très scientifique mais ça me plaisait bien. » Elle faisait comme si de rien était, riant à ses conneries, le doigt en l’air, jouant la savante, naturelle finalement, presque comme avant. C’était irréfléchi, elle venait de se replonger dans ce qu’était leur quotidien fut un temps, ce petit tour à la pâtisserie le dimanche, ses blagues pourries qui amusaient la galerie, c’était juste elle, et c’est auprès d’Alexis qu’elle était complètement elle-même, c’était une certitude pour tout le monde, sauf pour eux vraisemblablement. Elle avait déjà ouvert son portefeuille, prête à balancer son billet contre une dose de sucrerie. Au milieu de ses cartes, une photo d ‘eux trainait encore, c’était le Noël d’il y a 2 ans, amoureux comme au premier jour, hilares, se regardant dans les yeux, un moment de complicité comme ils n’en avaient pas eu depuis bien longtemps. Elle prit conscience du malaise, et réalisa soudain qu’il avait juste envie d’un conducteur jusqu’à l’hôpital, qu’il aurait sûrement choisi quelqu’un d’autre si elle n’avait pas montré un peu de compassion, et que de l’entendre bavasser et baver sur des pâtisseries était sans aucun doute irritant, même si combler son stress dans la bouffe lui avait semblé être une bonne option sur le coup. « Désolée, je ne devais pas parler, juste conduire. C’est juste que… » Elle haussait les épaules sans toutefois finir sa phrase, c’était des bons souvenirs, des souvenirs sur lesquels elle refermait son porte-feuille. « La voiture n’est plus très loin ».

C'est comme une balle en plein coeur, de regrets et de rancoeur... Ton absence qui résonne, me déraisonne.  

Pando

"Alexis, ça va bien ? Tu sais quoi, aujourd'hui tu vas d'abord t'amuser avec un pote et ensuite, tu croiseras Rose. Avec Kendrick. Vous allez vous embrouiller d'abord, mais après, vous allez vous retrouver rien que tous les deux. Elle va t'accompagner à l'hôpital parce que, de colère, tu te seras pété la main. Ta main justement, elle va te la prendre dans la sienne. Ca va finir en tête dans un endroit aussi étroit qu'une voiture. Bonne journée Alex." On aurait pu le prévenir, mais en même temps si un type lui avait dit ça, quelques heures auparavant, il aurait rigolé en prenant son interlocuteur pour un malade mental. Deuxième option, il aurait pleuré en sachant ce qui allait lui arriver. Dernière solution, il serait resté au lit. Dans tous les cas, ça sonnait comme absurde cette histoire, impossible à imaginer et très ... bizarre. Ce n'était définitivement pas le programme rêvé et pourtant.

Oui Alex se retrouvait seul à seul avec son ex-fiancée et effectivement, ils étaient obligés de partager un premier moment ensemble, depuis de longs mois pleins d'amertumes. Après la colère, place à la douleur et il était évident qu'Alex ne pouvait pas conduire comme ça. Il aurait dû demander à son pote, Terence de le déposer. Ca semblait évident après coup, alors que Rose lui indiquait la direction de sa voiture, mais il l'avait suivi, elle. Il avait écouté, il avait accepté et ça, il ne pouvait pas le nier. Alexis avait encore des réflexes qui le précipitaient vers celle avec qui il avait longtemps partagé sa vie. Un constat qui rendait encore plus douloureux tout ce qui s'était passé entre eux.

"Franchement, Rose, j'ai pas faim là." Cette phrase sèche et intuitive, il l'avait prononcé sans la regarder, alors qu'elle s'était arrêtée devant sa pâtisserie préférée. Il n'écoutait même pas la suite. C'est en levant les yeux qu'il le remarquait. Le monde est si petit. Il suivait son regard, rivé vers cet énorme gâteau. Il devinait lequel. Il la connaissait par coeur, c'était elle qui avait faim surtout et il savait très bien l'objet de sa convoitise. L'espace d'un instant il revoyait celle dont il était tombé amoureux. Cette légèreté, cette impatience, ce naturel et pour lui, cet aspect enivrant. "Si la voiture n'est plus très loin, un arrêt ne va pas tuer ma main." Qu'elle range son porte-feuille, il laissait faire, mais il se décidait d'entrer dans la boutique. Lorsqu'il ressortait de l'endroit, le gâteau en main, il haussait les épaules, comme pour se trouver une excuse. "J'avais faim finalement." C'était évident qu'elle remarquait qu'il avait juste craqué. Elle le connaissant tout autant que lui pouvait la connaitre. Oui bon, il avait eut un moment de faiblesse lui aussi. C'était dangereux de passer du temps avec elle, très dangereux. "Tu peux considérer ça comme ... contre-partie, pour le taxi." telle une lettre à la poste et il avait souri même. Sourire qui s'évaporait bien vite en même temps qu'il reprenait ses esprits. Cette impression que tout était comme avant, il n'en voulait pas. Tout n'était pas comme avant. Ca ne le serait jamais avec ce qui s'était passé.

Il était peut-être temps d'en parler de tout ça. Plus posément. Si Alex n'arrivait pas à oublier, en restant en colère, avoir une discussion plus calme servirait éventuellement de solution. Tant pis pour l'hôpital, il n'était pas à l'agonie. Juste très con. "On mange ça là-bas ? " Il montrait des petites marches un peu plus loin. Ses amis le mangeraient de savoir ce qu'il était en train de proposer, mais pas grave, il en ressentait le besoin dans l'instant. Ils étaient tous les deux, c'était une occasion qui n'arriverait possiblement plus jamais. Au fond, il ne s'agissait pas tant de parler, il était surtout question de comprendre. Son visage n'exprimait pas de la sympathie, ce qui dégageait Alex là, tout de suite, c'était de l'appréhension. A tout moment, il savait qu'un mot, qu'un geste pouvait tout faire exploser de nouveau. Avoir le bon timing n'étant pas leur spécialité actuelle.

C'est comme une balle en plein coeur, de regrets et de rancoeur... Ton absence qui résonne, me déraisonne.  

Pando

Ses yeux, cette douceur, cette lueur, elle ne l’avait pas vue depuis des lustres, et là, l’espace d’une fraction de seconde, elle avait eu l’impression de le retrouver, de se retrouver, comme autrefois. C’était simple, c’était presque évident, et probablement que de l’extérieur, les gens n’y voyaient que du feu, mais pourtant, plus rien était évident. La vie elle-même était devenue compliquée, s’installer sur le canapé était dur, se réveiller était même devenu délicat parce qu’il n’était plus là, elle ne voyait pas son visage enfoncé dans l’oreiller, elle ne se moquait plus de ce petit filet de bave qui lui « hydratait la peau du menton » dans son sommeil, elle ne l’attaquait plus sur le canapé pour l’empêcher de manger ses bonbons préférés, il avait disparu de sa vie. Pourtant, avec ce gâteau pour les séparer au beau milieu du trottoir, c’était imperceptible, c’était même un grain de sable dans le désert qu’était devenue leur histoire d’amour. Oui, il s’agissait de ça finalement, d’amour, de haine, de regrets et de rancœurs, un mélange salé de sentiments sur lesquels poser une seule définition serait impossible. « T’as pas oublié… » Ca lui avait fait du bien, c’était con, c’était ridicule, mais de savoir qu’il la connaissait par cœur, encore, lui mettait du baume au cœur. Il n’avait pas tout effacé, il ne l’avait pas rasé de sa mémoire, pas complètement, des fragments étaient restés là, enfoncés, et c’était rassurant comme effrayant. C’était pareil pour elle, et pourtant, la réalité était telle que l’idée de passer à autre chose en gardant toutes ces évidences, tous ces réflexes vis-à-vis de lui semblait presque insurmontable. Pourtant, lorsqu’il mentionna sa faim, cette excuse à cet élan de nostalgie finalement dans lequel il était tombé, la brune ne put s’empêcher de rire, un éclat de rire léger et chantant, un poids qui doucement venait alléger ses frêles épaules.

Et puis c’était fini, ça n’avait duré que quelque seconde, l’oubli. Une contrepartie pour le taxi ou bien un geste naturel parce qu’ils auraient toujours cette connexion ? Une simple politesse, elle ne pouvait décemment pas y croire. Pas lui. Il lui avait depuis des mois bien fait comprendre qu’elle n’était plus personne pour lui, ses yeux lui avaient lancé plus d’éclair qu’un orage électrique dans les Tropiques, ses mots l’avaient ramenée plus bas que terre, il ne savait pas faire semblant, alors c’était peut-être une éclaircie parmi l’orage, ça durerait le temps que ça durerait, le temps d’une discussion posée ? Oh mon dieu, oui, ils en étaient là, il le lui avait proposé, et elle avait senti son estomac faire trois tours. Maintenant ? Là ? Elle n’était pas prête à l’entendre lui reprocher les mêmes choses, elle ne voulait pas gâcher cette image qui lui avait fait tant de bien. « On a qu’à aller s’asseoir par là-bas, y’a les petites tables sous les arbres, enfin, tu sais… » Bien sûr qu’il savait, il passait du temps ici lui aussi fut un temps… Rose avança en silence vers l’abattoir, elle avait l’impression que cette discussion allait marquer un tournant dans sa vie, l’espoir d’une quelconque amélioration ou bien un livre refermé à tout jamais. L’une comme l’autre des solutions seraient positive, l’une parce qu’au fond, elle ne pouvait nier les battements de son cœur qui s’accéléraient, l’autre parce qu’à long terme, ça lui ferait du bien de se reconstruire. Finalement, elle s’assis, glissant ses jambes sous la table en bois du parc, et prenant un bon bol d’air avant de sentir son cœur la lâcher. « Je t’en veux tu sais… Ca va te paraitre incompréhensible, ironique voir même complètement dingue, mais j’ai besoin que tu le saches… » Ca la rongeait, cette douleur, cette colère aussi, ces images de lui qui ne la regardait plus, ces silences qui s’étaient installés chez eux, leurs rituels qui n’en étaient plus sur la fin… Elle lui en voulait de l’avoir sacrifiée, parce que c’était ce qu’elle ressenti, au détriment de sa carrière. Il avait éteint la flamme de leur histoire à petit feu, et la réaction de Rose n’avait finalement été qu’une petite averse dans l’ouragan qu’il avait laissé s’installer au dessus de leurs têtes. Il ne l’avait pas compris, il n’avait vu que l’averse, c’était plus facile, tellement plus simple… Mais c’en était assez, elle devait lui dire, et si ce n’était pas pour elle, au moins pour lui, qu’il ne reproduise pas les mêmes erreurs, et puis, si, pour elle aussi. Parce qu’elle avait souffert, et qu’elle souffrait encore.

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Pando

"Oublier quoi ? J'ai simplement faim." Un joli petit mensonge bien senti. La seule solution que trouvait Alex pour se livrer sans trop le faire. Non, évidemment que non, il n'avait pas oublié toutes leurs habitudes. Il n'avait pas oublié les mimiques, les expressions et ce qu'elles signifiaient, ce que Rose voulait quand elle le voulait, il le savait. Ils n'étaient plus ensemble, mais que tout parte en fumée, dans l'oublie, c'était impossible. Il y avait des restes et plus que ça même, c'était sans doute pour ça que la rancune était tenace. Tenace, mais Alexis venait d'avoir un moment de faiblesse qu'il contrait par les mots.

Il était tiraillé là, tout de suite. D'un côté, la possibilité de se parler, enfin, de mettre les choses à plats. De l'autre, prendre le risque que ça dérape, encore une fois. Alexis n'avait pas les idées claires vis-à-vis d'elle et il savait très bien au fond de lui que la colère pouvait prendre le dessus à tout moment. A quoi bon se faire du mal ? Bonne question. Et la tremblote ? Sans doute provoqué par ce dilemme cornélien. "D'accord. Je te suis." Elle lui proposait un lieu qu'il connaissait très bien, mais il choisissait de zapper la fin de sa phrase. Oui, il savait. Il n'avait par contre pas envie de se remémorer tous les moments passés ensemble, ce n'était pas le but recherché. Ca lui traversait l'esprit quand même, irrémédiablement. Foutu sentiments. Elle prenait place et il en fit autant, sans trop savoir ou regarder. A quoi s'attendre ? Des excuses peut-être déjà pour commencer. Qu'elle reconnaisse ses torts. Ce serait un bon début. Alex choisissait encore de voir la situation qu'à travers son regard à lui, pas celui de Rose. Un problème qu'il ignorait royalement.

Le gâteau pour leur faire barrage, il n'osait même pas y toucher. Peut-être qu'il allait finir dans la tête de l'un ou de l'autre. Une crampe d'estomac lorsqu'elle mentionnait le fait qu'elle lui en voulait. Ce qui accentuait cette probabilité. Non, mais ... C'était une blague non ? L'espace d'un instant il cherchait même à voir dans ses yeux une quelconque ironie, de l'humour mal placé, mais non. Elle était sérieuse et apparemment ça lui tenait même à coeur de le dire. "Tu te moques de moi pas vrai ? Franchement ...Quelle mascarade." Non, mais honnêtement, comment c'était elle qui pouvait lui en vouloir ? Rose l'avait trompé, du jour au lendemain, alors qu'ils étaient fiancés. Elle s'affichait tout sourire avec celui qui avait été dans son lit et c'était elle qui devait être en colère ? Il devait se calmer, mais ça montait encore, le sang dans ses veines. La tempe gonflée. - Du calme Alex. - Il s'agissait de parler, c'était dur, mais il devait faire un effort. "Tu veux que je te rappelle la situation ? " Un effort, juste un ... Pourquoi il n'y arrivait pas, il avait encore envie de tout balancer, de revenir sur les conneries qu'elle avait faites. Comme un aveugle guidé non pas par un chien, mais par sa rancune. "Alors, Rose, on était fiancés. Soit-disant amoureux et tu as choisi de coucher avec ton meilleur ami, dans mon lit. Tu peux donc m'expliquer en quoi là c'est toi qui dois m'en vouloir ? Ca me rend curieux, vraiment. J'ai besoin que tu le saches. " Le ton était devenu trop sarcastique, surtout la fin pour reprendre ironiquement ses propres paroles. Encore une fois, ils se dirigeaient vers une discussion de sourd, peut-être que des mois n'avaient pas suffis pour avaler la pilule. Le besoin de plus de temps ? Pas sûr que ça ait le moindre effet. Tant qu'il refuserait de se mettre à sa place, ça ne servirait à rien, mais il n'était pas prêt à le faire.

Il croisait les bras, le regard cette fois-ci assuré, rivé sur elle, attendant qu'elle s'enfonce dans ses mensonges, dans ses cachotteries, dans ses erreurs. Déterminé à savoir pourquoi elle pensait de cette manière. Déterminé pour répliquer dès qu'elle l'aurait fait. Sûr de son fait. "Peut-être qu'il me manque une partie ?" Oui, alex, c'est exactement ça. Le soucis c'est que sont point de vue à lui refuserait toutes les explications. Courage Rose.

C'est comme une balle en plein coeur, de regrets et de rancoeur... Ton absence qui résonne, me déraisonne.  

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