remember the time (sybil)

  sybil & joey

  remember the time

 

Aujourd'hui, je suis restée plus longtemps à la boulangerie. Même si la boutique était fermée, j'ai essayé de refaire des gâteaux. Le résultat n'a pas été fabuleux et pour être honnête, ça m'a démotivé. J'ai passé des heures à essayer de construire quelque chose de mes mains mais ça n'a pas marché. On dirait que c'est récurrent chez moi de casser ce que j'essaie de construire. Alors, je n'ai pas eu envie de rentrer chez moi, je ne voulais pas retrouver mon pitoyable appartement, vide. Je suis sortie faire les magasins, pour me vider la tête, pour essayer de penser à autre chose. Bon, c'est plus amusant à deux mais ce n'est pas bien grave. J'ai mis la musique dans les oreilles, déjà pour ne pas entendre les vendeuses qui viendraient me vendre tous types de produits dont je n'ai pas besoin. Et j'étais dans ma bulle. Mes lèvres bougeaient sur les meilleurs morceaux de mon téléphone.

Là, je n'ai pas vu le temps passer. Il était déjà tard quand je suis arrivée au centre commercial mais ils viennent d'annoncer que le bâtiment va bientôt fermé et que tous les clients doivent sortir. Même si c'est un rêve de gamine d'être coincé dans un magasin la nuit pour pouvoir manger, jouer, ne rien faire dans ce magasin, mais ici, je pense que la sécurité est bonne et je serais très rapidement découverte. De un, l'amusement n'aurait pas durer longtemps, de deux, j'aurais des problèmes, comme si je n'en avais pas assez en ce moment. Alors, avec les autres clients, je me suis dirigée vers la sortie, des sacs dans les mains. Est-ce que c'est ma mauvaise humeur ou ma déception qui m'ont fait acheté des hauts et des jeans ? Je pense. Même si j'aime toujours beaucoup dépensé. Mais c'est rare que ce soit dans des fringues. L'argent, je ne met surtout dans des livres et des films. Je crois que dans une autre vie, j'aurais voulu être auteure sauf que je n'ai jamais été capable une idée d'histoire allant du commencement à la résolution finale. Dehors, je me sépare des autres et je marche jusqu'à chez moi.

Arrivant à l'appartement, j'allume la lumière et la réalité me rattrape. Il faudrait vraiment que je songe à changer de lieu pour vivre. Certes celui là est pratique puisqu'il est au dessus de la boulangerie, mais ce n'est en rien une habitation. Il y a tout qui se casse, tout qui rend l'âme, en commençant par la douche. Je pose mes sacs et mon courrier sur la table basse et je m'assois dans mon canapé. Du courrier dépasse une feuille. Je la prend et lis ce qui est écrit dessus. J'ai loupé le plombier. On avait rendez-vous et je n'étais pas là. Bon, il va falloir que je trouve un ami pour la nuit histoire de trouver un lieu pour prendre une douche. Je me lève du canapé et pars me changer. Je n'avais pas envie de plaire ce soir, mais pour une question d'hygiène, il va le falloir.

Me voilà dans la direction du bar le plus proche de chez moi. Je n'ai pas envie de marcher. J'entre dans le bar. Il y a du monde. Ce qui peut être bien puisque j'ai plus de choix pour trouver celui qui aura le chance de passer la nuit avec moi. Modestie quand tu nous tiens. Mon regard croise ceux de d'autres personnes mais jamais il ne s'arrête. Sauf sur un, un visage qui m'est connu. Doucement, je m'avance vers cette table pour bien voir la personne. D'un coup je doute, est-ce que c'est vraiment elle ? Ca date maintenant et ma mémoire s'amuse à me jouer des tours. Bon, je me lance et je vais vers elle.

– Sybil ?

Elle était en repos, Sybil. Après avoir enchaîné plusieurs journées à l’hôpital, n’importe qui pourrait penser que cela lui ferait du bien. Pourtant, ce n’était pas le cas, parce que depuis plusieurs mois, sa vie n’avait plus rien de normal. Elle tentait de donner le change, elle tentait de ne rien laisser paraître, d’être comme à son habitude, toujours forte et battante. Et elle y arrivait plutôt bien, parce qu’elle était forte, et parce qu’elle n’avait pas le choix. Elle ne pouvait pas laisser tous ses efforts être réduits à néant. Elle n’avait pas le droit à l’erreur, elle devait être la meilleure, ses parents le lui avait toujours répété. Elle devait avoir une grande carrière, une belle réussite, et à leurs yeux c’était tout ce qui comptait. A tel point qu’elle, elle n’avait jamais eu l’occasion d’être vraiment elle-même. Elle s’était contenté de se plier à leurs exigences, de les rendre fières. Mais cela avait-il une quelconque importance alors qu’elle avait tué un homme ? Alors qu’elle n’était qu’une meurtrière qui ne méritait pas de devenir médecin ? Alors qu’elle devait prendre des somnifères pour dormir et essayer d’oublier, tout simplement. Sybil n’était plus la même, elle se contentait de vivre sa vie, machinalement, comme un robot. Elle continuait à travailler, à être brillante, comme elle l’avait toujours été. Mais c’était comme si elle était déconnectée, parce qu’au fond d’elle-même, elle sentait qu’elle ne pourrait jamais se le pardonner. Et ce même si elle tentait à tout prix de se racheter, de tout donner à ses patients. Parce qu’elle avait toujours été adorable avec eux, bien loin de la fille qu’elle avait l’air d’être sortie des murs de l’hôpital. Et elle en faisait encore plus désormais, mais cela n’effacerait jamais son erreur. Cela ne ramènerait jamais cet homme. Alors elle tentait par tous les moyens de ne pas rester chez elle, de ne pas avoir à penser une seconde de plus à ce qu’elle avait fait. Voilà pourquoi elle avait décidé de sortir ce soir, d’essayer de profiter un peu de sa vie étudiante puisqu’elle en avait l’occasion. Alors elle s’était rendue dans un bar, avait commandé quelques verres, pas trop, parce qu’elle essayait de ralentir. Après la mort de son patient, elle n’avait fait que boire pendant des jours et elle essayait aujourd’hui de se reprendre. Mais alors qu’elle était assise au comptoir, elle entendit une voix l’appeler. Une voix qu’elle n’avait pas reconnue tout de suite, mais une fois son visage tourné vers elle, elle la reconnut immédiatement. Joey ! Elle ne pouvait pas l’oublier, ce visage. Elle l’avait rencontré il y avait deux ans de cela, Joey avait été une de ses premières patientes et elle l’avait énormément touchée avec ce qui lui était arrivé. Sybil avait souvent pensé à elle, se demandant si elle allait bien, si elle avait réussi à se remettre de son accident et… De sa perte de mémoire. Ça alors! Comment allez-vous ? Demanda-t-elle, un beau sourire aux lèvres. A cette époque, elle avait tout fait pour essayer d’aider Joey et, elle avait le sentiment d’y être parvenue. A cette époque, elle pensait sincèrement pouvoir devenir un très bon médecin. Mais aujourd’hui, tout au fond d’elle-même, elle savait que cela ne serait plus jamais possible.

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