One more night, one more day, one more smile on your face - Suileabhan

Le moment de la fameuse discussion est arrivé. Je ne me sens pas bien à l'idée de parler à coeur ouvert. J'imagine que ça doit être libérateur de se confier et d'enfin dire ce que je pense librement. Mais j'ai surtout peur des retombées. Déjà que mon aveu sur mes sentiments pour Suile a causé pas mal de tord pour notre relation, il est normal que je craigne que ça empire avec cette conversation. Pourtant je sais qu'il le faut. Que nous ne pouvons pas rester dans ce stand by sans fin. Il faut mettre les choses à plat, dire une fois pour toute le fond de notre pensée pour espérer tirer un trait sur cette histoire et avancer sereinement. Je sais bien que c'est nécessaire, qu'il le faut. Mais ça ne veut pas pour autant dire que c'est facile. Loin de là. Le fait que Suile soit aussi nerveux que moi ne m'aide pas. Mais il prend la parole en premier, lançant le sujet pour que l'on ne reste pas dans un silence gêné trop longtemps. Je prends le relais et laisse les mots s'échapper de mes lèvres avec naturel. Je m'accuse d'être responsable de cette situation. Je n'aurais jamais dû l'embrasser. Même s'il a répondu à mes avances, il n'aurait jamais pris les devants.

A peine deux secondes après mon accusation, Suile rétorque et tente de faire pencher la balance de la culpabilité dans son camp. Plutôt pour rééquilibrer les responsabilités que pour s'auto-accuser comme je l'ai fait. Autant je suis d'accord avec sa première phrase. Autant je n'accepte qu'il s'en veuille de ne pas avoir vu mes sentiments pour lui. "Tu ne pouvais pas le savoir. J'ai fait attention de ne rien laisser paraître... pour justement que ça n'arrive jamais" Ce malaise entre nous me bouleverse tellement que chaque mot que je prononce m'arrache le coeur. Je n'ai rien dit de fou pourtant, mais c'est dur d'exprimer ainsi ses sentiments, de lyncher un moment qui a toujours été un rêve irréalisable pour moi. Je pousse un soupir quand il me demande depuis combien de temps j'éprouve ces sentiments. Je doute que la réponse apporte quoi que ce soir à notre problème. "Tu veux vraiment connaître la réponse à cette question ?" A part mettre un nouveau malaise, je ne vois pas ce que cette révélation va apporter.

Que je lui annonce que je suis amoureuse de lui depuis le début ne fera que mettre de l'huile sur le feu. Parce que ça voudra dire que je jalousais secrètement Jenny pendant toutes ces années. Je ne veux pas qu'il interprète mal, qu'il m'imagine en train de maudire leur amour. C'était tout le contraire pour moi. J'ai toujours su qu'ils étaient faits l'un pour l'autre, j'étais la première heureuse lorsque Jenny m'a présenté sa bague de fiançailles. Ça peut paraître dingue d'un point de vue extérieur pourtant je n'ai jamais voulu nuire au bonheur de ma soeur. C'est bien pour ça que je n'ai rien dit, rien fait. Que j'ai essayé de noyer le poisson en me mettant en couple. J'avais vraiment espoir de tomber amoureuse d'un autre à force d'essayer. Ça n'a jamais fonctionné malheureusement. "Ça ne changera rien de toute manière." Mon ton sonne très fataliste et c'est ce qu'il faut. Pour espérer que les choses s'arrangent, il va bien falloir que je lui prouve que je peux maîtriser mes sentiments, voire carrément les tuer. Plus facile à dire qu'à faire. "Je n'ai jamais voulu ça tu sais..." que j'ajoute finalement en observant mes mains. "Ça m'est tombé dessus, je n'ai rien pu contrôler. J'aurais vraiment voulu pouvoir empêcher ça." Mon but est de rendre mon entourage heureux, pas de créer des tensions supplémentaires. Je suis la dernière personne a souhaité cela. Et il le sait, je l'espère.

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AVATARS PAR MORPHINE & DOOMDAYS

 

"Tu ne t'es jamais dit que j'en avais besoin, moi aussi ?" Je lève un instant les yeux vers lui. Les miens sont embués mais les larmes ne coulent pas. Pas encore. Nos rapprochements physiques n'étaient pas prémédités. Ils étaient naturels, sincères. Nécessaires. Ils m'ont permis de guérir et j'ose croire que ça lui a apporté du réconfort. Au moins un peu. C'était malsain bien sûr, mais pas assez pour me faire reculer quand il s'approchait pour me faire un câlin ou un baiser sur la joue. Jamais je n'aurais pu faire ça. Même maintenant, avec tout ce qui s'est passé, je serais incapable de lui refuser une étreinte. C'est plutôt lui qui met des freins, à juste titre d'ailleurs. "Avec le recul, bien sûr que j'aurais dû prendre des distances. Mais je n'y arrivais pas. Tu souffrais. Tu en avais besoin." Je pèse mes mots. Sa dépression suite au décès de Jenny a été violente. Il a été encore plus renfermé que d'habitude avec les gens qu'il aime. Que je sois parvenue à passer outre sa barrière protectrice montre bien que j'ai eu un impact positif sur sa guérison. Non ?

"Tu aurais compris que quelque chose cloche en plus. Tu es doué pour déchiffrer les gens." Et comment aurais-je expliquer que je refuse un câlin de sa part moi ? C'est totalement ridicule. A part lui faire du mal, je n'aurais rien réussi de plus. Suile n'aurait jamais laissé planer un tel mystère, il aurait cherché à comprendre ce qui n'allait pas. Et le résultat aurait été le même. Il aurait fini par comprendre que mes sentiments pour lui n'était pas qu'amicaux ni fraternels. Que quelque chose de bien plus profond se trouvait derrière mes sourires de façade. Et alors quoi ? On n'aurait peut-être pas fait l'amour, mais le problème, non le dilemme, aurait été le même. "Honnêtement, je n'ai pas de date précise à te donner. C'est arrivé très vite. Quand tu a commencé à venir souvent à la maison. Que j'ai pu apprendre à te connaître autrement qu'à travers les yeux de Jenny." Je hausse les épaules, les yeux à nouveau baissés sur mes mains. "J'en sais rien Suile. Ça ne s'explique pas ces choses là."

Le coeur a ses raisons que la raison ignore. "Je pourrais t'énumérer les choses que j'aime chez toi mais ça n'arrangera pas les choses, au contraire." Si je lui dis qu'au début, l'attirance n'était que physique non plus. Je l'ai vu évoluer, développer sa musculature, se faire progressivement tatouer la peau, trouver son style de coiffure, se laisser pousser la barbe.. bref il est devenu de plus en plus beau au fil du temps. Puis il y a son caractère taciturne. Beaucoup le lui reproche, mais moi je le comprends. Je suis la même alors je sais à quel point c'est dur, de prendre la parole, d'exprimer ses sentiments et ses pensées les plus secrètes quand on n'a pas l'habitude. Que ça nous fait flipper. Ça ne veut pas pour autant dire qu'il est incapable d'aimer, bien au contraire. Il sait déchiffrer un regard, une expression et en tirer les bonnes conclusions. Ce n'est pas pour rien qu'il était un excellent flic. Il pouvait lire les différentes expressions de Jenny, savoir quand elle lui cachait quelque chose, quand elle était triste ou au contraire, heureuse. Ça prouve qu'il sait observer, qu'il sait aussi écouter. Chose dont peu d'hommes sont capables aujourd'hui.

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Je me rends compte que les mots franchissent assez facilement la barrière de mes lèvres. J'ai un peu travaillé mon discours bien que je ne savais pas à l'avance comment la discussion allait se passer. J'ai juste envie d'être honnête et si mon soudain flot de mots peut aider à dénouer la situation, je ne vais pas m'en plaindre. J'arrive aussi à parler de façon relativement calme, contrairement à mon intérieur qui tremble et mon coeur qui bat la chamade. J'ai l'impression d'avoir un étau brulant qui le comprime. C'est à la fois douloureux et suffoquant. Mais à mesure que les phrases sortent, je me libère d'une pression qui s'était logée sur mes épaules. Au moins, je rentrerais chez moi le coeur léger. "Peu importe." Parce que ce n'est pas que mon bien être qui compte dans l'histoire. C'est le sien avant tout. C'est pour lui que j'ai fait tout ça. Que je me suis battue pour le voir sourire et reprendre goût à la vie.

L'entendre confirmer que je l'ai aidé me fait beaucoup de bien. J'ai même un faible sourire qui se dessine. Puis une larme unique qui coule pour tomber directement sur ma paume. Je l'essuie rapidement dans l'espoir qu'il ne remarque rien. "Et je le referais mille fois s'il le fallait." Ça, c'est une certitude. Il n'y a rien de plus important pour moi que son bonheur, à lui et les enfants. Je ferais la même chose pour mes parents bien sûr. Mais avec Suile, tout est différent. C'est l'amour qui parle, j'en ai bien conscience. Il n'empêche que je ferais tout pour l'aider, si c'est en mon pouvoir. Peu importe le mal que cela pourrait me procurer. Je suis même prête à feindre d'être ravie le jour où il décidera d'ouvrir son coeur à une autre. Ça ne me tuera pas, ce sera juste douloureux. Très douloureux. Bon je doute qu'il soit dans cette optique encore. Il y a bien trop de choses à régler avant pour qu'il ne pense à ça. N'est-ce pas ?

Je déglutis difficilement en sentant mes mains recommencer à trembler. Je les sers plus fort l'une contre l'autre et prend une grande inspiration en l'entendant poser la question fatidique. Là est tout le problème. Je ne sais absolument pas comment me débarrasser de mes sentiments pour lui. J'ai déjà tout essayé. Je suis sortie avec d'autres hommes. J'ai voyagé à travers le pays dans l'espoir que la distance amoindrirait mon amour pour lui. Je ne vois vraiment pas ce que je suis sensée faire. Lui trouver des défauts qui n'existent pas ? Le détester plutôt que l'aimer ? Impossible, je n'y arriverais jamais. "Vivre avec ?" Je ne peux m'empêcher de proposer cette seule solution viable. Qu'il accepte que j'ai des sentiments pour lui et qu'on apprenne à s'y habituer. C'est risqué, c'est même très malsain. Mais là tout de suite, j'ai du mal à trouver autre chose. "J'ai promis de tout faire pour arranger les choses entre nous. Je suis sincère. Mais imagine que ça ne fonctionne pas ?" Je me tourne vers lui, la peur a pris le contrôle de mes émotions à présent et forcément les larmes coulent plus nombreuses cette fois. "Je ne me vois pas vivre sans toi ni les enfants Suile."

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Aucun de nous n'a de solution à apporter à cette situation. Il n'en existe aucune sans doute. Vivre avec semble être la seule chose à faire dans l'immédiat. Rien ne prouve que ça va marcher, surtout maintenant qu'il connaît mes sentiments profonds pour lui. J'ai envie de croire que les choses peuvent redevenir comme avant. Mais je le connais, Suile. Je sais qu'il réfléchit beaucoup et je doute qu'il arrive à être tactile avec moi comme il l'a été. Rien qu'un baiser ou une accolade, je ne demande pas la lune. Il s'y risquera à un moment donné, mais ce ne sera ni spontané ni naturel. Je n'ai aucune envie qu'il se sente obligé de m'apporter de l'attention, autant arrêter les frais tout de suite, si c'est ça. Mais je veux tout de même nous laisser une chance d'y arriver. Au moins nous n'aurons aucun regret. J'essuie mes larmes tant qu'elles coulent. Ce n'est qu'une raison de plus pour nous mettre dans l'embarras. Je ne les contrôle pas, j'aimerais pouvoir rester stoïque et de marbre. Ne rien ressentir de douloureux pour changer.

"Oui d'accord." C'est tout ce que je peux promettre pour le moment. Je ne sais pas moi même comment je vais réagir dans les prochains temps. J'ignore si je vais supporter de l'avoir si près de moi sans pour autant l'avoir totalement, maintenant que j'ai pu avoir un aperçu de ce que ça fait. Mais je dois essayer, je n'ai pas le choix. "Je veux juste récupérer notre complicité. Ça me manque tellement.. Tu me manques." J'essaye d'être forte et de laisser mes faiblesses de côté mais je n'y arrive plus. Je craque et cache mon visage dans mes mains. Je pleurs le plus silencieusement possible pour ne pas en rajouter. Je suis encore plus sensible qu'avant depuis cette histoire. Je n'arrive pas à gérer mes émotions, c'est le bordel dans ma tête. Si seulement il pouvait ressentir la même chose que moi. Si seulement il n'était pas mon beau-frère ! J'aimerais m'excuser pour craquer comme ça subitement mais aucun mot n'arrive à franchir mes lèvres. J'ai la gorge serrée, nouée même. Tout ce qu'il me reste à faire c'est d'attendre que l'orage passe. Pour pouvoir me ressaisir et tenter de récupérer un minimum de fierté.

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Je déteste être faible comme ça. Je n'ai pas le droit de craquer comme ça devant lui. Ce n'est pas juste pour lui. Je n'ai pas envie de le faire culpabiliser d'avantage. Ni qu'il se sente obligé de me réconforter. C'est un homme bon, il le fera peu importe les conséquences, je le sais. Et pourtant je n'arrive pas à endiguer les larmes. Elles coulent sans s'arrêter maintenant. Un vrai torrent. Je m'en veux de ne pas avoir tenu quelques minutes supplémentaires. La conversation était plus ou moins arrivée au bout de toute manière. Il m'aurait suffit d'attendre que je sois sortie de son appartement. Je tente tout de même de les stopper pour ne pas me ridiculiser d'avantage. Peine perdue. Je suis à fleur de peau, envahie par des émotions contradictoires qui me font souffrir. J'arrive au bout de mes capacités de combat. Je n'arrive plus à les contrôler seule et ça me fait peur. Je ne veux pas dépendre de quelqu'un d'autre, encore moins de Suile qui n'a pas besoin de ça en ce moment.

Je sens sa présence à mes côtés avant qu'il n'amorce un geste vers moi. Puis ses bras se referment sur moi et m'entrainent contre lui dans une étreinte que je réclame depuis des semaines. Je suis immédiatement envahie par son parfum et par le confort de son corps. C'est là que je me sens bien, sereine et en sécurité. C'est chez moi. Sauf que ce n'est qu'une illusion. Il est prêt à reprendre notre relation où nous l'avions laissé avant que ça ne dérape totalement entre nous. Avant que je ne goûte au bonheur d'être aimée par lui, ne serait-ce que d'une façon illusoire et éphémère. Je donnerais tout pour revivre ça une nouvelle fois. Une dernière fois. Mais je n'en ai pas le droit. C'est ce que je me répète inlassablement pour me convaincre. En attendant, ce sont bel et bien ses bras rassurants qui calment ma crise de larme. Pas sa tentative de me réconforter par des mots. Uniquement ses bras. Je ferme les yeux et tente de calquer les battements de mon coeur aux siens.

Je sens que mes dernières larmes mouillent son pull mais ni lui ni moi ne bougeons pour autant. C'est dingue à quel point un simple câlin peut apporter réconfort et bien être. J'ai l'impression d'être enfin entière dans ses bras. Alors qu'avant je ne faisais que survivre, blessée et privée de ce lien devenu essentiel à mon existence. Je risque de devenir totalement folle s'il me prive encore une fois de sa présence. Je ne tiendrais pas sans lui dans ma vie. Mais je ne tiendrais pas non plus avec une simple amitié. Je le sais maintenant que je suis dans ses bras. C'est de ça dont j'ai besoin. Tout ce qu'il ne peut pas m'offrir. J'ignore comment je vais me sortir de ce bourbier, ni si j'y arriverais vraiment. Je préfère ne pas y penser pour le moment. Je profite de tout ce qu'il peut m'offrir. De ses doigts dans mes cheveux, son torse contre ma joue, son odeur masculine si addictive. Tout ce qui fait qu'il est lui, tout simplement. C'est de ça dont j'ai besoin dans ma vie. Il est mon âme soeur, mon tout. Je ne suis peut-être pas la sienne mais il n'empêche que je l'aime au delà des mots. Et qu'à ce moment là, il n'y a absolument rien à dire de plus. A part profiter du temps qu'il nous reste.

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