brûle avec moi. (nuria)

le papillon a les ailes brisées. la luciole a perdu de sa lumière autrefois irradiante. c'est la ville toute entière qui est plus terne en ce début de journée, les nuages sont venus recouvrir l'astre solaire pour l'empêcher de venir éclairer sally. l'enfant n'a plus rien d'exceptionnel aujourd'hui, sans son éclat elle n'est qu'une personne comme les autres, une malade que les passants regardent avec pitié. une fille trop fine, sûrement anorexique d'après les rumeurs. un fantôme, un zombie, la fumée d'une bougie éteinte qui laisse la chaleur s'échapper. elle n'est plus que ça, son dernier passage aux urgences l'a achevée. sa respiration reste difficile, sifflante, l'air vient toujours irriter ses poumons malades mais elle est là. elle n'est pas encore morte, seulement brisée par un étudiant en médecine et ce plaisir sadique  de lui faire frôler le néant. elle est foutue, le suicide reste la meilleure option. c'est les mots qu'elle a entendue cette nuit-là, elle aurait mieux fait de rester gisante sur le sol de son salon. elle a beau boucher ses oreilles pour fermer la porte aux voix cauchemardesques, les pensées sont toujours là. jamais dans toute sa petite existence elle ne se laissera bouffer par des idées noires, elle a encore trop de sourires à offrir. comme ce rictus qui vient s'imposer sur ses lèvres. timide, blessé, mais bien présent. elle n'a besoin que d'une seule personne pour remonter cette pente trop ardue pour elle seule. nuria, le second soleil qui vient la compléter à la perfection. nuria la douceur qui apaise toutes les blessures. nuria avec ses mots pour soigner les maux. nuria, la seule personne que sally a réellement envie de voir, la seule personne avec qui elle peut se permettre de faire couler quelques larmes, parce qu'elle sait qu'il n'y aura aucun jugement. jamais. elle se répète inlassablement ces quelques mots pour pousser sa carcasse à se lever du canapé dans un grognement douloureux. peu importe la souffrance, tant qu'elle peut avancer. peu importe la pénombre s'il lui reste un éclat faiblard au fond du coeur. les métastases peuvent bien aller se faire voir quand sally a une idée en tête. le chemin n'est pas très long pour arriver dans le quartier effervescent, mais il est suffisant pour vider les maigres forces de la cancéreuse. ses doigts tremblants ne prennent pas la peine d'appuyer sur la sonnette, son soleil sur pattes a déjà été avertie de son arrivée par un simple message. les étages lui donnent l'impression de gravir des montagnes entières qui ne font que carboniser ses poumons engorgés, elle doit se retenir plusieurs fois à la rampe pour retrouver un souffle difficile. son poing s'abat deux fois sur la porte, mais c'est sans attendre de réponses qu'elle se glisse à l'intérieur de l'appartement pour retrouver son endroit favori. les bras de nuria dans lesquels elle se love en poussant un long soupir. c'est toutes les tensions qui s'envolent, la douleur s'efface elle aussi dans les bras réparateurs. le visage de sally retrouve un peu de sa lumière quand il vient afficher un sourire bien plus franc. « tu m'as manqué. » chaque seconde qui passe sans elle provoque ce manque qui vient enserrer son palpitant. c'est comme être privée d'air pur alors que c'est la seule chose qu'elle demande. respirer. sourire. vivre.

Dehors, le soleil.
assise sur le rebord de sa fenêtre, les jambes balançant dans le vide. Elle a pas peur de la chute nuria, elle n'attend que l'envol. Elle a cet air rêveur qui sied bien aux enfants, qui fait d'elle une jamais-vraiment-adulte. Le goût des espoirs fous au bout de ses lèvres quand elle fantasme des ailes se déployant pour monter jusqu'à l'astre. Rejoindre les cieux. Elle voudrait pouvoir voir le monde depuis une étoile. Observer l'univers fourmillant de vie qu'elle parvient trop peu à saisir d'ici. Une rue à peine – un microcosme ridiculement petit - quand l'Humain s'étend à perte de vue, quand elle voudrait tout voir, tout connaître, tout découvrir mille fois. Vibrer au milieu des battements de cœur.
ne rien faire d'autre qu'aimer.
Aimer les autres, aimer ce qu'elle voit, ce qu'elle sent, ce qu'elle touche. aimer, aimer, aimer c'est un verbe à conjuguer à tous ses désirs. Le seul peut-être qu'elle ai vraiment. Et dans sa réalité un brin onirique elle entend la porte qui s'ouvre sur un autre amour. sally Sally en halo de lumière. Sally comme un ange aux ailes déplumés. Fatiguée de se traîner plus que de voler. Mais sally toujours belle, si belle. Et nuria déploie ses bras comme une couverture qu'elle repose sur ses épaules. Rassemblant les morceaux d'elle qui semble parfois se disloquer. Serrant contre son cœur le corps tant aimé.
Dans ses bras, le soleil.
C'est tout ce qu'elle peut faire quand elle voudrait faire bien plus encore. Se rêverait d'être le baume pour qu'elle ne ressente plus la douleur à défaut de savoir être le sérum qui la guérira. Mais nuria n'a pas la prétention d'être dieu lorsqu'elle n'est qu'elle-même. Beaucoup et trop peu. Énormément mais pas assez. Simplement le havre de paix au milieu du tumulte, elle se fait refuge dans une étreinte comme un futur adieu, comme un éternel bonjour. « c'est que t'aurais jamais du partir alors. » elle sourit tout contre sally, rarement égoïste nuria elle se fiche bien de la voir partir pourvu que ce soit ce dont elle ai besoin -ou envie-. Toujours trop heureuse de la retrouver pourtant. Elle préfère ne pas penser au jour ou elle ne viendra jamais plus. Trop d'instants encore ou elle est bien là, tangible sous ses doigts, pour se perdre dans des prédictions funestes. La fatalité n'est jamais à craindre quand on a eu le temps de s'y préparer. Et elle demande pas si ça va nuria, elle voit bien que c'est pas le cas. Qu'elle brille moins fort que d'habitude sally, d'un éclat plus discret. Une flamme encore bien là, étouffée par la maladie. Elle demande pas ce que disent les médecins, elle demande pas le temps qu'il reste. Elle demande rien, elle dit juste « t'es très belle » t'es toujours belle et ses doigts caressent les cheveux de sally, même eux semblent fatigués. Ils ont le doré des crépuscules, ceux qui s'en iront bientôt. Et nuria, elle peut rien faire d'autres qu'observer ce spectacle tragiquement beau de l'étoile qui s'éteint. Elle a aucunes certitudes sinon celle qu'elle restera jusqu'au dernier matin

les bras pansements, les bras qui agissent comme un baume sur une plaie qui reste tout de même ouverte. les pensées sombres forcent le passage pour s'envoler, partir loin de cet appartement pour le transformer en véritable antre de douceur. il n'y a plus qu'elles, deux âmes écorchées qui unissent toutes leurs forces pour maintenir l'éclat du soleil qu'elles partagent. elles sont loin d'avoir un soleil chacune, il n'y a que la moitié de l'astre brûlant qui vit dans leurs poitrines pour mieux les rassembler une fois que leurs corps se retrouvent naturellement. c'est beau, c'est poétique, c'est simple. nuria elle ne pose jamais les questions qui forcent sally à penser au pire, elle ne demande pas de nouvelles sur son état de santé parce qu'elle sait bien que ça s'empire, il n'y a pas de solution miracle. sally va mourir, c'est un fait. peut-être dans deux semaines, peut-être dans deux ans, ça reste trop court. petite fleur a tout juste le temps d'ouvrir ses pétales avant de faner pour retourner à l'état de poussière. ça ne l'empêchera pas de répandre toute sa couleur et son odeur fleurie sur sa trainée, d'offrir des sourires pour remplacer les larmes. il y a des jours comme ça pourtant où elle a l'impression d'être desséchée, à bout de forces, incapable de faire des cadeaux à d'autres personnes que sa petite personne. dans ce cas là le meilleur des remèdes porte le nom de nuria qui la serre tout contre son palpitant. boum. il bat, elle peut l'entendre malgré son visage d'enfant enfoui dans le cou de la brune. boum. le propre coeur de sally s'aligne parfaitement, ça se remet déjà en route alors qu'elle se retrouve bercée par sa voix calme. un murmure, un compliment qui force un fin sourire sur les lippes de sally alors que les regards se rencontrent. c'est toujours comme la première fois avec elle, l'émotion est palpable quand leur bulle se referme autour d'elles. « c'est toi qui me rend belle. » comme une magicienne elle embelli tout ce qu'elle touche du bout de ses doigts de fée. sans rien faire elle parvient à recharger la lumière de sally, redonner un éclat à ses yeux qui ne sont plus seulement brillants à cause de la peine sur ses épaules frêles. « c'est égoïste si je te vole un peu de ta lumière pour survivre aujourd'hui ? » l'étreinte des bras se défait dans la douleur, la malade se fait plus timide, presque gênée face à cette demande sortie de nul part. elle qui a pour habitude de redonner du baume aux visages les plus ternes, elle a besoin d'être aidée pour une journée. d'être aimée.

Elle voudrait pouvoir offrir quelque chose d'important. Quelque chose qui a du sens. Mais elle n'a rien entre ses mains nuria. rien d'autre qu'elle-même et si c'est tout ce qu'elle peut donner à sally elle le lui offre sans concession. Son âme qu’elle donne à bras le cœur sur l’autel de leur amitié. Un peu de sérénité dans la tourmente.
toi et moi dans les étoiles
Des instants comme des comètes qu’on voit passer trop vite. Qui ne dure jamais assez longtemps. mais du temps, on en à jamais trop pour aimer elle vibre de cet amour qu’elle veut lui laisser, qu’elle n’en manque jamais pour les jours d'infortune ou pour les derniers instants. qu’il n'y ai rien à regretter et elle rit nuria, parce que tout semble facile quand il y a sally. « ça non, tu l’as toujours été. » elle aime pourtant bien croire qu’elle l’a rend plus belle encore. Si c’était possible. Elle a jamais eu besoin de ça, sally elle brille plus encore que le soleil. Peut-être même qu’elle est née d’un de ses rayons. Trop éblouissante pour ce monde trop terne. C’est l’univers mécontent et jaloux qui l'a condamné. Il n’y a que ça pour justifier l’injustice. Ce sentiment dérangeant qui semble prendre la forme d’un monstre rongeant le cœur quand sally s’éloigne, quand sally à les yeux triste, quand sally demande quelque chose qu’elle a pourtant toujours porté en elle mais qui aujourd'hui semble lui faire défaut. Et nuria sourit, elle voudrait faire disparaître sa gène. «  tout ce que j’ai est à toi. prend tout ce que tu veux. » j'te donne tout. ma lumière. Et ma vie pour que la tienne dure plus longtemps. De l'air pour mieux respirer, un bout de mon cœur pour que le tien ne s'éteigne pas trop vite. n’importe quoi pourvu que le temps cesse de tourner trop vite. Que maintenant dure toujours quand, avec sally, tous les lendemains paraissent incertains. « demain, ça ira mieux? » une question ou une prière. Elle empêche pas son cœur de se tordre d'inquiétude, craindre que son corps las marque le début de la fin. de sa fin elle sait que ça viendra sans doute bien plus vite que pour d’autre, elle l’accepte la plupart du temps. Mais parfois, parfois elle aimerait croire que Sally est éternelle. Que rien ne pourra éteindre la flamme qui brûle en elle, trop vive pour mourir. Elle voudrait dire pas maintenant attend encore. Un jour, un an, une vie. C’est trop tôt pour le couché du soleil. L’aube de leur vie. Elle a beau savoir que tout fini parfois trop vite certains jours elle sait pas, nuria, comment elle pourrait faire pour vivre sans elle.

on ne peut pas parler de soleil et de lune dans ce genre de situation. c'est plutôt la lune et la terre en personne. la lune qui tourne autour de la terre pour la jalouser secrètement, l'avoir toujours dans son champ de vision pour qu'elle reste égoïstement sienne. sally elle voudrait voir le visage de nuria jusqu'à ce que son éclat ne se décide à ternir, jusqu'à ce que sa rotation ralentisse au point de s'arrêter. ce visage, aucun autre. c'est dans ses bras qu'elle a trouvée refuge depuis l'annonce fatale, ce coup de massue venu pour lui apprendre que son temps est compté, que son horloge défile beaucoup trop vite pour elle. la lune s'est emballée, elle s'épuise à force de tourner, gravitant inévitablement vers une fin pas si lointaine. c'est bientôt un an, ça passe trop vite, sally n'aura pas le temps de profiter de nuria suffisament, d'apprendre à la connaitre sur le bout des doigts. c'est tout ce qui l'importe, ne pas avoir assez de temps pour profiter des gens qu'elle aime. ça lui fait peur, ça vient recouvrir son astre de nuages trop épais. elle a besoin de la lumière pour disperser les ombres, de la chaleur des bras de la brune pour respirer un peu mieux. elle ne prend pas de traitements, ça ne sert à rien puisque son amie se charge parfaitement de lui apporter la force nécessaire. elle est belle, sally. c'est tout ce qu'elle veut attendre. elle est belle, elle le restera jusqu'à ce que le sablier arrive à expiration, sans cheveux qui tombent, sans voir les os saillants qui semblent déchirer sa peau porcelaine. elle se perd dans l'étreinte offerte de bon coeur par nuria, boit ses paroles comme une enfant qui écoute un joli conte avec un éclat dans le fond des yeux. elle la considère comme un tout, un idéal qu'elle n'aura jamais le temps d'atteindre. ses doigts fins glissent dans le dos de la brune pour saisir un bout de t-shirt, les serrer pour s'assurer qu'elle ne s'échappe pas, jamais. il faut qu'elle reste jusqu'au dernier souffle, un départ ne ferait que précipiter sa condamnation. « ça va toujours mieux le lendemain, pas vrai ? » mais demain sera un jour de moins, elle se retient de le dire, mais elle ne veut pas blesser nuria. tout ce qu'elle veut c'est voir son sourire, encore et encore. tout finit par passer, même les plus grosses peines, même un deuil auquel elle doit se préparer avant l'heure fatidique. « je suis seulement fatiguée, mon soleil me manquait. » c'est un sourire un peu forcé qui nait sur ses lèvres, mais un sourire quand même qui s'écrase sur la joue de la brune en un baiser éphémère. « ta journée s'est bien passée ? »  du sally tout craché, elle se préoccupe toujours des autres avant de penser à sa petite personne. trop généreuse, pas assez égoïste, trop lunaire, pas assez terre à terre.