le temps d'un instant, dario

tu peux fouiller dans tes souvenirs, car t’enivrer d’une illusion réparera tes plaies. -- dario & louison ( @lonepsi )

« À bientôt, madame Maillard » courtoisie qui grince contre ses tympans, en acouphènes de sa disgrâce. Le majeur qui s’élève, sa silhouette divine qui tranche le seuil de l’hôtel, la sentence inexpugnable gravée dans la souplesse de son doigté. « Allez vous faire foutre » marmonné et inaudible aux accusés. Les psaumes prennent des allures vulgaires lorsqu’elles fêlent ses lèvres pourpres. Les hautes coutures servant ses apparences ont été laissées dans cette chambre qui respire encore les effluves de sa présence ; louées comme le reste et ce qu’elle possède se cramponne par deux hanses sur son dos. Le séraphin rehausse la capuche d’un sweat qui noie la délicatesse de ses traits en même temps que les lumières lunaires qui surplombent la noirceur.

Jongle avec les masques, elle revêt celui de la mécréante qui s’est trop rapidement accoutumée à la vie entre les murs. La môme rôde des heures durant, tous les ponts ayant trouvé leur propriétaire, des chiens errants perdus dans la vase. Parce que bientôt, c’est la pluie qui cogne sur le béton et évince le bruit trainant de ses baskets. De la boue partout dans les parcs, des petites rivières éclosent dans le creux des rues ravagées. Le ciel crache ses sanglots sur Judah qui cherche un abri, les os abîmés par les eaux acides qui ont traversé son textile. À parcourir les ruelles ensanglantées du liquide divin, l’horloge fait retentir les quatre heures du matin et la gamine se dresse comme un mauvais démon sur le trottoir qui jouxte le Closer. L’établissement a déjà dégueulé son public, les portes avant sont fermées. Les rétines clairsemées s’abreuvent de ce dortoir tout désigné, la nuit fuyante s’est gravée sur l’enfant à la recherche du sommeil. L’enseigne du bar étincèle dans le gouffre de ses iris, là encore, elle fuit la lumière pour trotter vers l’arrière de la bâtisse.

Une porte claque, Louison s’efface derrière un mur et guette l’effort qui propulse l’auteur du vacarme. La tête brune lui apparait distinctement alors qu’elle lui fait dos ; Dario, les poubelles à bout de bras qu’il transporte avec ingratitude vers le conteneur. La stature nébuleuse enrôlée dans un nuage de fumée, la clope au bec qu’il tire avec flegme. La louve renifle le moment opportun pour effectuer la traversée scabreuse, le visage encore dégoulinant. Puis elle se propulse silencieusement vers les portes de Dieu tandis que l’homme s’affaire. Les gonds grincent dans un bruit sourd au moment où la poignée se tord ; le fracas imminent de son regard à lui, l’apôtre relâche à regret sa rédemption. Des océans arrogants fixés sur son bourreau. Pour une fois, elle se complait dans le silence de sa frustration. Ses manches laissent couler quelques gouttes qui rompent le calme en s’écrasant sur la pierre. Un soupir bruyant fulmine piégée dans sa propre besogne par l’indésirable.

(c) calaveras.

routine qui s’est bien trop installée dans ta vie, sans vraiment que tu ne t’en rendes compte. même si le retour de ton petit frère en ville a bougé les lignes, tu as l’impression que tout se répète dans ton quotidien. tu termines le boulot, tu rentres dormir, tu vas faire un tour en moto ou voir du monde dans l’après-midi et retourne au closer pour une nouvelle nuit. ce n’est le mode de vie que tu aimes, dario. depuis ton accident, on t’a sommé de te poser. d’arrêter tes escapades et de trouver une demoiselle. ton frère s’y met dans le lot, la situation est grave. seulement, tu sens qu’on t’as arraché ta liberté si précieuse. l’angelot amputé de ses ailes. tu n’es pas forcément en forme, dernièrement. tu te poses beaucoup d’interrogations. remets tout en question. ne ressent plus l’étincelle qui te fait vibrer, ce sursaut d’adrénaline qui te fait sentir exister. tu sais que tu n’es pas fait pour vivre une vie bien rangée. ce foutu accident. c’est depuis ce jour que tout à basculer, comme si tu étais devenu un joueur mis à la retraite anticipée. tu ne veux pas de ça, dario. la seule certitude que tu as, dans l’instant. ce soir, comme souvent ces derniers temps, tu es de fermeture. le club est bien silencieux lorsque la musique ne résonne pas entre les murs, lorsque l’éthanol ne coule pas à flots. même cette ambiance te rend morose. tu te dis que c’est une baisse de régime historique. éternel tube de tabac entre tes lèvres, tu enfiles ton sweat. il ne reste qu’à sortir les poubelles. tu entends déjà le son de la pluie qui bat à torrent contre le toit. tu sais que tu vas être trempé jusqu’à la moelle. tu soupires avant de pousser la porte de la petite court, les sacs au bout des bras. les gouttes s’écrasent contre ta peau, contre le tissu. tu arrives au vides-ordures et là, tu entends un bruit provenant de derrière ta carcasse. tu fronces les sourcils en lâchant les sacs, avant que tes prunelles se posent sur cette frêle silhouette encapuchonnée. des longs cheveux blonds s’échappent puis elle lève la tête, te laissant le loisir de contempler ses traits avec stupeur. tu t’approches doucement, roulant des yeux, toujours sous la pluie battante.
flammes du désir qui vous animiez,
pupille paraît fragile sous la pluie,
vulnérable et débraillée,
ravaler le mépris.
tes cheveux attachés gouttent dans ta nuque, tu arrives à sa hauteur. elle te lorgne d’un regard que tu ne tolère pas. tu ne la quitte pas du regard. elle veut juste se mettre à l’abri, tu présumes. « t’as décidé d’revenir me hanter. » ce n’est pas une question. affirmation que tu balances d’un ton las, emprunt de ton état d’esprit déplorable. « viens, on va pas rester là. » tu ouvres la porte avant de la laisser passer. chaleur qui vous enveloppe, tu défais ton pull. avance dans le club en détachant les mèches brunes rassemblées. comme une impression de déjà-vu. des semaines en arrière, là où elle t’a rejetée, contre ce bar. tu serres les dents. souvenirs diffus que tu préfères oublier, pour l’instant. « qu’est-ce que tu faisais dehors par ce temps ? » tu te tournes vers elle. « et surtout, pourquoi t’as essayé de rentrer ici dans mon dos ? » tu veux des réponses et vite. un ton qui ne laisse pas de place à la discussion. tu finiras par savoir. tôt ou tard.

» on dit qu'le temps détruit mais l'temps n'est pas notre ennemi (enzo)
» de feu et de cire › dario
» so cold; dario.
» el fuego (dario)
» PR / hazel, dario (15/01).