finest hour / primrose

clope au bec, sami vagabonde dans les rues. il erre sans réel but, se laisse porter par le vent. il se retrouve à monter dans un bus, puis dans un autre, avant de s'échouer dans le quartier commercial du queens. les pieds sur le béton, il se rallume une cigarette, enfile ses écouteurs et augmente le son au maximum. et sami, il chante. et sami, il danse. il se fiche du reste, des autres - de ces personnes qui le regardent d'un mauvais œil. il n'y a plus que la musique dans ses oreilles qui existe. elle efface tout, le transporte dans un autre monde qui n'appartient qu'à lui. il ne sait pas où il va, sami, mais c'est bien ça qu'il aime - l'inconnu, l'aventure et le hasard un peu aussi. il n'aime pas prévoir, savoir comment sa journée se passera de a à z. non, le gamin, il ne trouve du réconfort que dans l'imprévu et ses surprises. c'est pour ça qu'il n'a jamais pu, ni voulu faire des études. c'est pour ça qu'il est parti de chez sa mère, un simple sac sur le dos, et ne s'est jamais retourné. il était effrayé, sami. il avait peur mais, même dans les pires moments, il n'a jamais regretté son choix - parce qu'il n'y a rien de mieux que la liberté.
et lorsque ses yeux se posent sur l'enseigne du mcdo, il se dit que l'imprévu n'a définitivement que du bon. ses pas le portent jusqu'à l'intérieur, là où les clients se précipitent pour prendre leur commande, se bousculent, affamés. sami se faufile entre les corps, passe devant une cliente, – excusez-moi de vous déranger mais j'voulais savoir si primrose travaille aujourd'hui ? et il se retrouve comme un con quand on lui demande son nom de famille. il n'en a aucune idée, sami. alors il répond qu'il ne doit pas y en avoir des centaines, des primrose, et on lui dit simplement qu'il va devoir se débrouiller tout seul, qu'il y a une queue derrière lui et qu'il fait chier tout le monde. alors, sami, il s'assoit à une table et attend, avec espoir, d'apercevoir la silhouette de prim. il ne faut pas longtemps avant qu'il ne la voit, servant la commande de deux clients impatients. sami se précipite vers elle, attrape sa main, tout sourire. j'te kidnappe, qu'il dit. si primrose se fait virer un jour, ce sera définitivement de sa faute.

Ils disent qu'il faut profiter de la jeunesse mais qu'il faut savoir grandir un jour. Que le temps passe trop vite, mais qu'il faut prévoir son avenir dès le lycée. Ils disent soyez mature juste avant de vous dire on a qu'une enfance. difficile de savoir ce qu'il faut faire alors, prim n'est plus enfant, pas plus qu'elle n'est femme. Ne sait pas ce qu'elle veut, entre envie et besoin. Les idées flous, opacifiés par les odeurs de fritures qui lui monte à la tête et les gestes mécaniques qui rende son cerveau léthargique.
La liberté, c'est ce qu'elle voudrait.
Un désir égoïste quand les espoirs d'avenir repose sur ses épaules, que l'argent manque toujours, qu'elle voudrait être l'alter ego de son aîné et pas ce poids qu'il doit porter depuis que leur mère est partie. Une folie quand elle persiste à s'enliser dans le mensonge et l'effort. Foirer son avenir pour quelques billets qu'elle glissera dans l'enveloppe sous son lit pour amortir la chute d'un destin abîmé. Cercle vicieux, illogique au possible. C'est un carcan duquel elle ne parvient à s'extraire qu'en de rare fois – surtout quand quelqu'un est là pour l'en sortir – quelqu'un comme sami qui glisse sa main dans la sienne, étalant un sourire surpris sur les lèvres de prim. « ça a dû t'échapper, mais j'bosse là sami. » et alors ? ça murmure dans son crâne, et alors? après tout, elle veut pas être ici prim, dehors il fait beau, dehors y a la vie. Et sami qui peut montrer tant de choses, c'est qu'une pause, une infime trêve de quelques heures qui apaisera son âme. Les risques semblent moindre comparé à ce qu'elle peut y gagner quand elle jette un œil derrière elle, sur les collègues concentrés sur leurs tâches mécaniques. Des bourdonnements dans ses oreilles, surplus de pensées qui l'accable. « et puis merde. ou est-ce qu'on va ? » c'est elle qui le tire a l'extérieur, avant qu'on ne les voit. Avant de changer d'avis. et si on lui passe un savon, si elle se fait choper à traîner, si on se rend compte qu'elle a disparu qu'est-ce que ça peut faire ? Ils ont dit de profiter de votre jeunesse, prim c'est qu'une enfant qui veut prendre son envol – même s'il ne dure que quelques heures - Et aucun nuage n'est aussi agréable que ceux sur lesquels elle s'allonge avec sami.

Sami, c'est le foutu gamin qui se fiche de tout. L'enfant qui déteste les responsabilités, ne voit sa vie qu'à travers des décisions impulsives et généralement injustifiées. C'est le jeune homme de vingt-et-un piges qui a grandi trop vite, jeté dans la gueule du loup beaucoup trop jeune, mais qui voudrait rester un petit garçon pour le restant de ses jours. Et le sérieux, il l'efface de son vocabulaire. Être sérieux n'apporte rien, juste du stress dont personne n'a besoin. Il le montre une fois de plus lorsqu'il attrape Primrose et la pousse à le suivre vers de nouvelles aventures. Il ne pense pas aux conséquences, aux risques qu'elle prend si elle le suit. Il ne pense pas à rien - à rien d'autre que ce besoin d'être libre. Et c'est drôle d'être libre seul, mais c'est encore mieux s'il peut l'être avec elle. – Ça a dû t’échapper, mais j’bosse là Sami. Et ça, ça le fait sourire d'autant plus. Il hausse les épaules, prend un air innocent. Quoiqu'elle dise, Primrose, Sami sait qu'elle va craquer. Parce qu'elle est comme lui. Parce que derrière ses airs de je-suis-mature se cache une gamine en manque de liberté qui s'envolerait vers ses rêves si elle en avait l'opportunité. – Et c'est un problème ? Pour lui, ça n'en est pas un et ne l'a jamais été. C'est peut-être bien pour ça qu'il ne reste jamais longtemps au même endroit. Ou peut-être qu'il refuse simplement de s'enraciner dans un job à la con.
Peut-être.
Toujours des peut-être.
Des peut-êtres qui semblent mener une longue et dure bataille dans la boîte crânienne de Primrose. Le regard de Sami ne quitte pas son visage, cherche dans ses yeux la lueur qu'elle a toujours à ses côtés. – Et puis merde. ou est-ce qu'on va ? Il la trouve enfin. Et le gamin, il se dit quel'imprévu est définitivement merveilleux. Elle l'entraîne dehors, se cache des regards qui pourraient lui être fatals. – Tu veux aller où, toi ? Qu'il lui demande. On peut aller partout. Partout où tu le souhaites. C'est ta journée, Prim. Ce qu'il ressent à ce moment, Sami, ça se rapproche de l'euphorie. Il est heureux et il est prêt à entraîner Primrose sur son nuage de coton.

Elle voudrait se conduire en adulte.
Elle devrait se conduire en adulte.
Mais c'est difficile quand on a que vingt-et-un ans et que le monde a tant à offrir. Qu'on a l'age ingrat de l'entre-deux ou on veut tout faire et tout vivre tout en cherchant sa place pour les quarante prochaines années. Un travail pour lequel on se lèvera tout les matins, pour faire les mêmes choses et voir les même gens. Être adulte, c'est déprimant. Encore plus quand sami apparaît comme un rayon de soleil dans la monotonie des grandes personnes. Avec son sourire-promesse, qui jure des instants plus doux aux odeurs plus agréables que celle de la friture de fast-food. c'est un problème? et prim hoche la tête, puis la secoue. Hausse les épaules.
Langage corporel.
Oui. Non. Un peu. Elle sait pas. La presque-femme songe au salaire et aux absences, la quasi-plus-enfant voudrait bien poser son tablier et plus jamais remettre les pieds ici. « aujourd'hui ça l'est pas. » un bon compris. C'est important mais pas tout le temps. et prim sourit parce que la journée prend soudain des allures bien plus étincelante que ce matin. Tout a l'air mieux quand on se déleste du poids des responsabilités. L'air est plus doux, le soleil plus brillant. Même sami semble plus beau, sur sa peau y a l'éclat des jours heureux que prim ne cesse de chercher, dans ses pupilles la même envie de vivre que celle qu'elle porte dans ses tripes sans jamais la montrer.
Sami est un sauveur ouvrant la cage de primrose.
« je veux ... » exister « aller vers les baies, je veux la plage. » elle y va trop peu souvent, occupé à travailler, mentir ou tenter de plaire. Envahis par tout ce qu'elle a à faire – et souvent ne fait pas – et l'idée lui semble merveilleuse soudain. Une journée à simplement être là, les grains de sable entre les orteils et le bruissement de l'eau. Son sourire est éclatant quand elle embarque sami avec elle, certaine de ne vouloir être nul part ailleurs que là bas. Avec nul autre que lui. « j'connais un coin ou y aura pas trop de monde » ou y aura rien que nous.