visions i vandalize. (alix)

à chaque balle tirée, l’évacuation, la fumée sui s’envole, le poids d’une vie si courte mais déjà trop chargée. Le poids des malheurs, des malédictions, d’un destin brisé, d’une famille déchirée. Elle ne craque pas, Sofia. Comme formatée depuis toujours pour ne pas s’affaisser. Elle ne craque pas, Sofia, c’est dans les poings, c’est dans le sang, c’est dans les armes, qu’elle libère sa colère. T’es en colère, tellement en colère, que si tu dessinais ton cœur, il serait certainement noir de haine. Une colère qu’elle ne maîtrise pas, qu’elle ne maîtrise plus depuis des années déjà. A quoi bon, la finalité est toujours la même. Le prix à payer, c’est elle. C’est sa vie. C’est son âme. Son âme damnée, offrande aux Ferreira, sans débat. Une vie pour une vie, la sienne sacrifiée pour la seule personne qu’elle aime, pour la seule personne qui compte. T’es peut-être pas foutue de le lui dire, louve sur la défensive, mais tu le ressens au plus profond de ton putain de cœur, cet amour.
Celui qu’elle ne pensait plus retrouver, celui qui résonne comme un cri du cœur, le cri de la famille, le cri de l’assurance, le cri du sang. Cet amour perdu, cet amour retrouvé, avec les restes du passé, les peurs lancinantes de perdre. De perdre encore, comme elle a perdu sa mère. Peut-être que t’as lâché l’affaire trop vite, Sofia. Que t’avais peur de morfler encore un peu plus. Que t’aurais dû la chercher, et ne pas partir sans te retourner. Peut-être, des poussières, l’effondrement de l’esprit. Des peut-être qu’elle ne supporte plus, aujourd’hui. Qu’elle ne supportera plus, avec sa tante. Elle s’érige, reine de la famille, prend les responsabilités qui sont les siennes.
La force, encore et toujours. La force qu’elle trouve, retrouve ici. L’arme dans la main, concentrée sur la cible, prête à agir si la vie la pousse, un jour, à en passer par-là. Séance terminée, arme reposée, une main qui lâche ses cheveux alors qu’elle récupère son sac. Puis ce visage, qu’elle connait, qu’elle reconnait. La princesse des Ferreira. La princesse endeuillée des Ferreira, les bruits qui courent, les informations qui circulent rapidement jusqu’à sa position de bras droit. elle a perdu sa fille. Sa fille lui a été enlevée, quelque chose que tu ne saurais certainement supporter, sofia. T’as la compassion manifeste, compassion étonnante, cœur de pierre pouvant vraisemblablement être éraflé.
Une approche, difficile, les mots qui manqueront certainement, comme ils manquent toujours. Une approche qui se pourrait fébrile mais qui ne l’est pas, pas en apparence. bonjour alix. les banalités inutiles, dans une situation telle que celle-ci. Les banalités qui n’ont pas leur place dans un lieu comme celui-ci. Et sa présence, intrigante, alors qu’elle enterre sa fille. Et sa présence, intrigante, qui te pousse, toi, à en savoir plus. c’est la première fois que je te vois ici. bref sourire, léger, de ceux qui sont beaucoup trop rares. au fond, tu ne la vois jamais vraiment, une présence en dents de scie, une absence angélique parfois tâchée de noir. Ce même noir, celui qui revient, toujours.

(c) shining.

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Les lunes se sont assombries ; elles ont pris les teintes de son âme maudite. Concentrée, Alix, comme si sa vie en dépendait. Les tirs s’enchaînent, dans la poitrine, dans la tête, puis le dernier ; une balle à l’épicentre convoité ; le cœur qu’elle voudra faire exploser. Le glock 23 posé à plat, elle retire le casque, et observe le travail. Il s’agit seulement d’une cible, le dessin d’une silhouette bien loin de la vengeance à laquelle la damnée aspire. Mais il faut bien qu’elle s’entraîne ; il faut bien que sa maîtrise devienne (encore plus) parfaite pour assouvir sa quête ; accomplir la soif meurtrière. Alix, seule héritière féminine des Ferreira ; Alix, si différente d’eux et pourtant similaire à la fois. Elle a construit les fondations d’une vie solide, une vie stable loin des  affaires familiales. Elle a bâti un empire dans le monde d’en-haut pour ne pas succomber aux profondeurs abyssales.
Mais la pomme ne tombe jamais de l’arbre.

Pourrie, Alix,
ils sont tous pourris,
elle ne fait pas exception à la famille,
elle est peut-être même la pire.

Elle a cru s’en sortir, elle a cru être capable de se créer une réelle vie. Mais elle n’a jamais su dire adieu à cette famille. Elle les aime, elle les chérit, plus que sa propre vie. Au point d’en perdre sa fille. Flora, c’est pour elle et son mari, que la louve s’est tenue à distance des crimes de la meute. C’est pour elle, aujourd’hui, qu’elle revient prendre la place qui est la sienne. C’est ici, dans ce stand de tirs, que débute la première étape loin des rétines indiscrètes. Elle aurait préféré, la princesse des ténèbres, mais trop réputée, elle est précédée de la réputation qui lui colle à la peau, celle qui coule dans ses veines. Le minois beaucoup trop reconnaissable à son goût dans les quartiers malfamés, elle le cache derrière la crinière d’ébène, mais pas suffisamment. Dans le vestiaire, elle récupère ses affaires, quand elle entend une voix à peine familière. Les opales se relèvent, tombent sur elle. Sofia, le bras droit. Elle la connaît depuis qu’elle s’est immiscée dans la mafia. Elle la connaît, sans la connaître véritablement. – Bonjour. elle la salue, par courtoisie ; alors qu’elle aurait préféré éviter de croiser quelqu’un qui travaille pour sa famille. Elle n’a aucune envie que l’un de ses frères apprenne qu’elle recommence à venir au stand de tirs. Les questions qu’elle n’a pas envie d’entendre, les remontrances qu’elle ne supporterait pas ; Alix, elle veut accomplir seule sa vengeance. Mais si son sang la connaît trop bien pour faire le parallèle entre sa présence dans ces lieux et ses envies meurtrières, ce n’est pas son cas,à elle. Sofia ne la connaît pas ; c’est à elle de ne pas éveiller ses soupçons. D’autant plus quand la féline paraît déjà intriguée par son inhabituelle intrusion. – J’avais besoin d’évacuer. rétorque-t-elle, comédienne hors paire. Car elle se rend compte, en laissant échapper les mots, de leur fond de vérité. Tirer lui a permis de laisser éclater, un peu de toute cette rage qu’elle contient en elle depuis son décès. Un peu, car c’est loin de lui suffire, loin de satisfaire les envies assassines ; loin de combler les desseins morbides. – Je venais plus souvent avant que tu n’arrives chez nous. avant qu’elle, elle n’arrive… ou bien avant qu’elle, n’ait une fille. Et quoi qu’elle fasse, Alix, tout la ramène à elle.
Tout la ramène, constamment, à sa perte.

C’est un lieu, pour les personnes comme elles. C’est un lieu, pour les femmes comme elle. Pour les femmes sauvages, pour les femmes farouches, pour les femmes brisées. Ce qu’elles sont, toutes les deux, à leur manière. Ce qu’elles sont, comme deux reflets qui n’en n’ont même pas conscience. tu ne t’es jamais posée ce genre de questions, toi, sofia. Elle n’est qu’une ferreira, alix. Qu’une de plus. Qu’une branche supplémentaire de cette mafia. Qu’un maillon de plus dans la toile de l’araignée. et alix, elle est à son image. Forte, toujours forte. Comme si rien ne pouvait l’atteindre alors qu’au fond d’elle, elle est certainement en plein cataclysme. Certainement en proie au chaos. Au désespoir. Alors qu’elle est peut-être déjà morte, à l’intérieur. Une épreuve insurmontable donc beaucoup ne pourraient se remettre. tu la connais, cette sensation de crever. Tu la connais, cette impression de ne plus pouvoir respirer. De voir ton souffle couler. Tu la connais, mieux que quiconque. elle ne trouve pas les mots, la louve, parce qu’elle n’a jamais su trouver les mots pour elle-même. Parce qu’elle n’a jamais été capable de se murmurer à l’esprit qu’elle n’est pas responsable. Qu’elle n’était qu’une gamine perdue. alors, comment, aujourd’hui, dire à une parfaite inconnue qu’elle n’est pas responsable à son tour. Qu’elle survivra. Qu’elle s’en remettra. je comprends. qu’elle répond simplement, peu habituée à sociabiliser, peu habituée à se livrer. c’est aussi pour cette raison que je viens ici. aussi pour cette raison qu’elle tire, encore et encore, comme la plus puissante des matriarches. la sensation de lourdeur dans ta main, lorsque tu tiens ton bijou, lorsque la balle quitte ce dernier à une vitesse telle qu’elle en devient imperceptible. La beauté de l’impact immédiat, de l’impact d’une brutalité monstre. évacuer, c’est tout ce qu’elle cherche. C’est tout ce qu’elles cherchent. ah oui ? on aurait pu se croiser. faible sourire, à peine visible, alors qu’elle reprend naturellement. un café ? tu ne sais pas ce que tu fais, sofia. Tu ne sais pas ce que tu sais, t’improvises, alors que t’imagines plus que n’importe qui qu’elle ne doit pas avoir besoin de parler, envie de parler, surtout à pas une inconnue. Surtout pas à toi, bête féroce sans âme, sans la moindre émotion, que tu prétends.

(c) shining.

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Sofia.
Elle ne la connaît pas,
elle est apparue de nulle part.
Nièce d’une membre considérable autant que considérée de la mafia, l’une des rares qui a promis d’être toujours là ; elle connaît sa tante, Alix, elle la connaît même depuis toujours car elle a grandi à ses côtés. Plus présente pour elle, parfois, que ses propres géniteurs, elle a son affection éternelle, comme celle de ses frères.
C’est différent pour Sofia.
Elle ne la connaît pas, non, elle l’a vaguement rencontrée quand il a fallu que chacun donne son opinion sur ce remplacement inopiné. Mais la princesse de la fratrie s’est contentée d’obtempérer, elle n’a pas chercher à mieux la découvrir. Sa place n’était plus dans les trafics de la famille, ni dans ses choix stratégiques. C’est ce dont elle tentait encore de se convaincre, Alix, sans finalement avoir pu résister longtemps au sang qui coule dans ses veines. Il n’empêche qu’elle ne sait pas grand-chose sur Sofia, elle est même certainement celle qui la connaît le moins de tous les Ferreira. Et tu te dis que, peut-être, tu devrais tenter d’y remédier ; pas seulement pour la personne qu’elle est mais, aussi, pour t’en faire une alliée. Car elles seront probablement amenées à se retrouver ; la preuve étant avec ce rendez-vous loin d’être prémédité. La louve, loin de l’interroger, paraît comprendre son besoin d’évacuer. Sûrement car c’est ainsi dans son monde, dans votre monde. Les mots paraissent si futiles, bien moins utiles que la puissance et l’adrénaline. Bien moins, encore, que ses envies assassines. Simple hochement de tête de la mère endeuillée, elle réprime toutes les émotions qui pourraient la submerger. Créée pour se battre, sans jamais craquer ; créée pour lutter, sans jamais se laisser tomber ; c’est ainsi que t’as été formatée, depuis toujours et sans doute à jamais. Elle s’attend à un salut de courtoisie, puis à la fin de cet échange, mais son interlocutrice en décide autrement. Alix, elle s’apprête déjà à refuser. Mais elle pense à l’immense demeure qui paraît si vide, d’un vide abyssal, depuis qu’on lui a arraché sa fille. « D’accord. » l’enthousiasme proscrit, il n’existe plus sur le minois tiraillé par toutes ses nuits d’insomnies ; par la souffrance et l’agonie ; par le manque indélébile. Elle suit la ténébreuse jusqu’au premier café à leur portée, silencieuse, perdue dans ses sombres pensées. Ce n’est qu’une fois installées qu’elle relève son ébène vers elle. «  Alors, ça se passe bien avec Milo ? » elle demande, par automatisme, plus que par réel intérêt. Car elle sait qu’il n’est pas si évident à gérer, son frère cadet. Mais ses songes sont loin, si loin de toutes ces banalités.
Elle est là, Alix,
elle parle, elle respire,
elle vit,
mais il n’y a plus rien à l’intérieur,
plus rien dans son cœur.

L’inconnu s’efface, laissant place aux mots, aux paroles, animant le visage lointain qu’est alix. Un visage déjà observé, une fois, deux fois, peut-être bien trois, mais rien de plus qu’un banal coup de vent. Rien de plus que deux êtres qui se croisent, prisonniers des mêmes rouages. Une impression qui demeure, a toujours demeurée, celle qu’alix n’est pas réellement à sa place au sein du cabaret. Celle qu’elle s’intègre bien mieux à une vie dans la lumière plutôt que prise par les ténèbres. Ou peut-être que c’est ce qu’elle attend, tout simplement. Peut-être que c’est ce dont elle rêve, sans être capable de l’atteindre, réalité rattrapant toujours le pas sur l’espoir. Alix, elle est comme toutes les ferreira, contrainte par le destin. Alix, elle est née reine de l’empire des ténèbres et mourra reine déchue. Aucun d’eux n’a eu le choix, gregor, alix, milo, trejan, ils ne sont que le fruit d’une vie déjà toute tracée. t’es différente, toi, sofia, parce que tu t’es jetée corps et âme, sacrifiant ton âme au profit des ferreira. Parce que c’était ce que tu voulais, t’intégrer, faire partie de cet univers pour l’éternité. Le choix de la damnation, le sacrifice du coup, de ta seule et unique faiblesse. De ta plus grande faiblesse. plus aucune peur. le sang glacé. Elle ne craint ni le monde, ni la vie. elle ne craint ni les coups ni les balles. La seule chose qu’elle craignait, c’était de perdre la famille qui lui restait. Pour ne pas ressentir une nouvelle fois son cœur se vider. Pour ne pas ressentir ce que ressent alix, aujourd’hui. Et naturellement, ne calculant plus rien, elle l’invite à prendre ce café. Comme les amies qu’elles n’ont jamais été. proposition acceptée par la belle et rapidement, elles se dirigent vers le petit café du coin. un sourire maitrisé lui est arraché quand alix évoque milo et les relations qu’ils entretiennent tous les deux. enfant, il était du genre surexcité, non ? elle le connait, milo. Elle le connait par cœur. Ils sont, tous deux, comme les deux côtés d’une même pièce. Sofia est liée à lui plus qu’à n’importe qui et elle sait qu’elle lui doit tout. une forme de reconnaissance, de loyauté, que tu ne saurais contrôlé, sofia. Mais avec le temps, il devient bien plus important pour toi encore. ça va. On se comprend et on s’entend bien, à notre manière. particulière, de deux volcans en pleine irruption. il m’a dit que vous êtes assez proches, tous les deux. tu connais l’attachement de milo envers sa sœur, comme il connait le tiens envers ta tante, sofia. Une habitude de vous parler franchement, librement, pouvant parfois mener à de grandes explosions mais surtout à une confiance hors norme.

(c) shining.

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Elle n’est pas dans son état normal, Alix, sûrement pas. Sûrement pas, pour accepter de prendre un café avec le petit personnel. Sofia, elle est un peu plus que cela. Nièce de celle qui a été plus présente pour elle, pour eux, que la mère Ferreira elle-même ; elle est aussi le bras-droit de son petit frère. Celle en qui, Alix en a conscience, Milo a le plus confiance. C’est peut-être pour cette raison que la louve accepte ce moment à ses côtés. Peut-être aussi, car t’as besoin d’oublier, ta propre vie en retardant l’instant où tu vas rentrer. Celui où tu retourneras dans cette grande maison si vide, depuis que tu as perdu ta fille. Mais, traîner avec un membre de la mafia, elle ne l’aurait pas fait en temps normal. Elle ne traîne pas avec les employés, car elle refuse de créer avec eux une quelconque affinité. Elle refuse d’être liée à eux, de près ou de loin, jamais. Depuis qu’elle est partie, Alix, elle a toujours maintenu cette distance bien perceptible. La plus mystérieuse des Ferreira, celle qui est là sans être là. Celle dont on entend le nom plus que l’on aperçoit son minois. Alix, douce éclipse, qui s’évapore d’un battement de cil.
Alix, parfait courant d’air,
jamais présente, mais jamais bien loin.
Si elle a accepté cette entrevue, au fond, cela n’a rien d’anodin. Elle commence à nouer, lentement, avec ce fragment d’elle qu’elle n’a jamais voulu effleurer. Il y a cette ombre qui plane au-dessus d’elle. Insidieuses, les ténèbres sont comme autant de reptiles qui enveloppent tout son être et l’enserrent. Elles la submergent et, peu à peu, la font disparaître. Ne restera plus qu’elles.
Alix, tout doucement, plonge dans les abîmes.
Elle n’essaie plus de résister, elle n’essaie plus de s’en empêcher. C’est avec une agilité naturelle que la féline se laisse glisser. La posture impériale mais les expressions du visage encore froides, elle décide d’en apprendre plus sur Sofia. À sa remarque sur son frangin, un sourire sincère apparaît sur ses lèvres. «Je crois qu’il le sera toujours. » Milo, c’est la fougue, c’est l’énergie qui pulse ; c’est le feu dans les veines. Le café à peine commandé, toute son attention reste sur elle portée. Observatrice, elle examine autant les traits de cette femme dont elle ne sait rien, que ses gestes. Maîtrisée, tout comme elle, Sofia semble à la fois à l’aise et sur la réserve. « On s’adore ou on se déteste. » elle confie en pensant à son frère, à la relation explosive qu’ils entretiennent. Et elle décide, sans prévenir, de se confier, à celle qui connaît Milo bien plus qu’elle ne la connaît, elle. « Je pense qu’il m’en veut de m’être… mise à l’écart des affaires de la famille. C’est sans doute légitime de sa part, lui… il fait front. » elle aussi, maintenant. Mais elle ne compte pas le dévoiler de sitôt, Alix. « Je crois que ça aurait été plus facile si j’avais été comme lui. Comme toi, aussi, je me trompe ? »
Parce que toi, tu l’as choisi, Sofia,
toi, t’es pas condamnée depuis la naissance,
toi, tu es maîtresse de tes décisions,
pour toi, ce n’est pas une malédiction.

elles nouent peu à peu ce lien nouveau, inattendu, dont la louve n’imaginait rien. elles apprennent à échanger, à se connaître, à se découvrir, dans le moment qui est certainement le pire pour alix. mère au cœur brisé. et peut-être que c’est justement parce qu’elle n’est pas dans son état normal, qu’elle accepte de boire un café avec elle, qu’elle accepte ce rapprochement. la vérité, c’est qu’elle ne l’envisageait pas non plus, sofia. mais, consciente de sa situation, elle n’imaginait pas se contenter de tourner les talons de mettre un voile sur le mal-être de la ferreira. t’es pourtant loin de la douceur incarnée, sofia. loin de celle à qui on rêve de se confier. mais t’as le sens de la loyauté, l’habitude de garder des secrets, et peut-être bien qu’à toi, elle pourrait parler. maigre ambition qu’elle ne révèle pas, préférant se concentrer sur la question de sa compagnie improvisée. milo. il est certainement le plus gros point commun entre elles. frère de l’une, pilier de l’autre, l’attachement qu’elles éprouvent à son égard est certainement bien différent mais d’une force inexpliquée. tu serais pourtant incapable de l’avouer, sofia. mais à l’évocation de son nom, ton regard change. les traits de ton visage viennent s’adoucir avec une aisance propre à ce qu’il t’inspire. un sourire amusé s’appose à sa mine de tigresse, alors qu’elle se concentre davantage sur les paroles suivantes d’alix. une nuance qu’elle comprend sans mal, parce que les émotions ne sont pas maitre-mot, en grandissant dans une telle famille, en évoluant dans un tel univers. je pense quand même qu’il t’adore plus qu’il ne te déteste. il a ses défauts, milo, mais il est aussi un grand cœur. un homme bien, comme certainement trop peu le sont. mais la belle a raison sur un point, il fait face. il se bat, quotidiennement, quand elle a pris un autre chemin. une destinée qu’était la sienne. t’es pourtant curieuse, à sa question, parce que tu ne sais pas réellement ce qu’elle sait de toi, sofia. tu ne sais pas réellement ce qu’ils savent de toi, tous les ferreira. c’est auprès de milo que tu t’es acharnée pour prendre la place de ta tante, pour qu’il voit en toi le potentiel nécessaire afin de lui accorder sa clémence. je ne l’ai jamais regretté. qu’elle affirme, difficilement, car mettre des mots sur ce qu’elle ressent, sur l’état de sa tante, sur sa relation avec elle, est certainement la chose la plus difficile pour elle. alors t’es peut-être là par choix, sofia, mais ce choix il ne dépendait que d’elle. tout ce que tu voulais, c’était la protéger elle. tu le referais mille fois, sans te demander s’il s’agit bien de place de ton choix. si un meilleur endroit n’était pas fait pour toi. si c’était bien la question ? qu’elle demande à son tour, petit sourire sur les lèvres, laissant entrevoir malgré elle une vérité criante.

(c) shining.