NEW YORK / premier pas.

y'a son téléphone qui continue de sonner toutes les cinq minutes, le même rappel qui s'inscrit sur l'écran. d o n ' t b e l a t e . parce qu'aujourd'hui c'est le jour de la grande réunion. le foutu projet de fin d'année qui commence à mois de septembre, jordan elle a pas capté pourquoi est-ce qu'il fallait déjà prévoir le bail alors qu'il y a plus de neuf mois pour le faire. c'est leur bébé qu'un des mecs du groupe lui a balancé pensant être drôle. loupé. la vérité c'est qu'hier elle s'est défoncée la gueule au gin jordan, au gin et au joint et à des pilules multicolores. parce qu'elle pense pas pouvoir faire face à silas. silas, celui qui a accomplit des miracles selon la bible, alors pourquoi à chaque fois, jordan a l'impression de faire face à belzebuth. elle est pas encore arrivée dans la salle de groupe qu'a été réservée par l'auto-désignée cheffe de groupe, pourtant elle peut déjà sentir son regard glacial se poser sur elle. elle est trempée jordan, énième punition pour ne pas avoir été capable de se réveiller à temps. elle tremble quand elle ouvre la porte de la petite salle, trop intimiste à son goût. je sais princesse, j'ai du retard. elle s'adresse même pas aux deux autres, a déjà oublié leurs prénoms quand elle s'installe bruyamment. et elle tente de l'éviter pendant trente secondes, mais pourtant elle croise son regard. si bleu, si glaçant, un regard si similaire à celui de l'amour de sa vie. un regard qui la fait frissonner d'une manière que le froid ne peut pas imiter. noé. et y'a son coeur qui manque un battement et sa gorge qui se serre. et il lui faut toute la volonté du monde pour détacher son regard d'elle. elle attrape une feuille qui appartenait à son voisin et lui arrache le stylo des mains avant de se racler la gorge. on en était où ? pas que ça l'intéresse, elle aura de toute façon une bonne note, elle veut juste s'extirper de cette salle le plus rapidement possible.

y'a plus que l'aggressive lumière qui vient se fondre dans les néons, que les murmures répétés dans la salle aux murs trop acerbes. drôle de sentiment pourtant, qui s'manifeste dans le creux de l'estomac, qui creuse la chair lorsque l'orage semblerait prêt à gronder. les prunelles bleues se sont perdues dans ce vide trop familier et le visage impassible comme à son habitude, silas a le myocarde sur le point d'imploser. (mille morceaux à dessiner sur le sol) y'a les paroles des autres qui se confondent, douces mélodies qu'elle rêverait de chasser, ces mots qu'elle peine à écouter. mais trop tard! gamine est piégée, enveloppée d'attentes trop exorbitantes et silas porterait sur ses épaules le poids des autres, de leurs destins déjà tout tracés. (elle voit dans leurs regards; elle sait) elle sait silas, qu'ils la regardent d'un autre oeil, ils savent eux, que silas a perdu de son éclat glaçant. silas se fâne, silas dépérit devant eux, enfant au chagrin trop encombrant, ils l'observent comme on regarderait avec attention, quelqu'un qui attend la mort avec conviction. et la tempête arrive, annoncée pourtant, mais plus dévastatrice qu'attendue. jordan, foutue tempête, foutue jordan. rage au méchanisme prononcé qui se met en marche, et le coeur, à quelques secondes près, lui exploserait dans la poitrine. tu comptes nous faire le plaisir de t'attendre à chaque fois? le ton n'a jamais été aussi froid et silas s'est bien appliquée d'y mettre toute la violence possible. le coup est envoyé, le glas presque sonné, et pourtant berzins sait bien que les mots retournés tenteront aussi de s'frayer un chemin vers son crâne. putain dieu, quitte à choisir, t'auras dû prendre la bonne personne. la haine dans l'encéphale, c'est la colère qui formente, se transforme en amas de ressentiments nucléaires pour faire dérailler ce monde fade. à quoi ça sert un monde sans noé? c'est le trou béant sous son plexus qui s'emplifie à chaque fois qu'elle croise le regard de jordan, l'électrochoc d'une piqûre de méduse que rien, si ce n'est la promesse d'une rancoeur noire puisse effacer. perdue silas, perdue, le pied à demi dans la tombe qu'elle s'applique soigneusement à creuser! j'sais même pas pourquoi t'es venue jordan. j'sais même pas pourquoi moi j'suis venue. et le temps deviendrait électrique, tous les quatre plongés dans cette valse de souvenirs brisés.

elle s'attendait pas à autre chose que des reproches jordan, mais ça l'empêche pas de se figer en entendant silas lui balancer ses reproches. c'est pas nouveau, y'a toujours eu cette animosité entre elles, depuis le lycée. elle a jamais vraiment capté pourquoi jordan, jamais vraiment cherché à améliorer les choses. c'est arrivé que trois fois en deux semaines. et excuse moi d'avoir une vie, si toi t'es pas sociable, c'est pas mon problème. elle se laisse pas faire jordan, parce que silas a cette facilité à faire monter la colère en elle, à ajouter de l'essence sur une petite flamme constamment allumée. et puis y'a eu noé. et noé il a toujours tenté d'arranger les choses entre sa soeur et sa meilleure amie, il a toujours pris les balles, les reproches et les insultes. et elle avait promis de faire des efforts jordan, mais noé, il est plus là. elle a plus besoin de se forcer, parce qu'elle peut plus rester des heures à le regarder sourire. alors elle s'installe, laisse le mec de leur groupe les séparer d'une place pour éviter tout envie de se jeter sur elle si elle va trop loin. parce qu'elle est mauvaise silas, jordan est persuadée qu'elle finira par régner sur les enfers, que même le diable doit la craindre. et elle a raison de se poser la question silas, parce qu'en toute honnêteté elle sait pas non plus pourquoi elle est venue, sûrement pour éviter de se faire dénoncer à leur prof, pour montrer qu'elle n'a pas mis que de la mauvaise volonté. je sais pas silas, peut-être parce que sans faire le moindre effort, je suis major de promo. tu sais ... devant toi. et y'a un rictus qui vient naître sur ses lèvres, la fierté est visible sur chaque trait de son visage. parce que silas était derrière et que dans le coeur de noé, elle avait pris une place immense jordan. ils savaient qu'ils allaient finir ensemble, ils avaient juste décidé de prendre leur temps. ils ne pouvaient pas se douter qu'ils n'en avaient pas, du temps. tu sais quoi, t'as qu'à faire ton truc avec les deux boulets à côté, tu m'envoies ce que tu veux et comme ça, j'aurai plus besoin de vous supporter, toi et ton sourire légendaire. elle fait pas gaffe jordan, à la surprise des membres du groupe, elle fait pas attention de savoir si elle peut blesser. je me demande si au lit t'es aussi autoritaire ou bien si tu restes aussi frigide, en tout cas il en faut du courage pour te baiser. et y'a l'électricité qui vient prendre place dans l'air et ça devient lourd, pesant, comme un soleil de plomb en plein désert. c'est une bouteille de gaz qui rencontre une cheminée et y'a pas de belle fin à cette histoire.

c'est le bruit d'une guerre qui s'annonce, d'une guerre où les seules armes seront les mots, qui détonne dans le crâne de silas. y'a plus que l'animosité dans les prunelles, symbolique aux couleurs de furie malsaine, la rancoeur s'étale sur l'épiderme comme un feu qui brûlerait tout sur son passage. c'est silas tempête, silas au chagrin déchaîné, gamine sans aucun contrôle lorsque la hargne se loge au creux du plexus. ressentiments tapis dans l'ombre, elle l'excère plus que tout jordan, plus que tout et son visage ne semblerait plus qu'un vague souvenir hanté, ceux qu'on plante dans un coin d'sa tête pour ne plus jamais y faire face. mais comment on fait quand on doit s'taper ce souvenir tous les jours? comment on fait quand les plaies s'rouvrent chaque jour? foutues plaies. parce qu'il faut un coupable pour que la douleur s'attenue (ne serais-ce qu'un instant) c'est sur jordan que les accusations se portent. l'azur des iris a perdu de son éclat englouti par le trouble d'un fardeau invisible, des promesses faites à un mort qu'on ne peut réussir. alors gamine vise dans le cas, trop précipité, néccésité morbide de blesser les autres pour avoir la timide illusion de retrouver son innocence. mais ils savent tous qu'il n'y a jamais eu une once d'innoncence en silas. conquérante de ses propres songes, silas s'casse la gueule sur le bitume quand l'amertume s'échoue dans ses tristes paroles. j'me suis toujours demandée qui t'avais sucer pour avoir des notes pareilles sans rien foutre. le rictus se dessine à peine, l'échange se fait acharné, et leurs paroles tentent de se faire violence, de viser pile dans un coin du myocarde. mais cette fois, silas écoute à peine, la lucidité envolée pour quelques moments du passé, et y'a l'espoir, faible espoir, foutu espoir d'revoir noé un jour. un jour. quoi qu'elle fasse, quoi qu'elle dise, jordan n'a jamais été à la hauteur pour noé et ça l'irritait silas, d'savoir que lui ne s'en rendait pas compte. stupides gamins. parce qu'en plus tu crois sincèrement que je vais t'envoyer quoi que ce soit? et malgré tout le discours rempli d'anarnement qu'elle sort, silas, elle est incapable de regarder jordan en face. ça fait mal. trop mal. parce qu'elle ne peut s'empêcher de penser aussi à noé. comme elle aimerait les oublier. mais y'a ses promesses qui restent en suspens, réussir. mais puisque noé n'est plus là, faut réussir pour deux, quitte à s'perdre en route. quitte à ne pas revenir. dans tout les cas, j'préfère pas imaginer l'aspect de ton lit vu tout ce qui doit passer dedans... les lippes s'étirent en un sourire mauvais et elle attend silas. elle attend des cris, une gifle, des cahiers jetés, des coups. elle attend l'apocalypse qu'elle tente bien que mal de créer. tout ça pour quelques fragements d'adrénaline.

elle le sait jordan, qu'elle a lancé les hostilités, que tout ce qui va en découler sera de sa faute. mais elle ne peut pas s'en empêcher, elle adore ça, les problèmes, la déstabilisation. silas a passé trop de temps à la juger et à la rabaisser auprès de noé et ça c'est jamais passé. alors elle joue avec ses armes jordan, sur ses notes incroyablement hautes alors qu'aucun effort n'a été fourni. et puis y'a silas qui répond et c'est si simple de jeter dans ce combat., figure toi que je n'en ai même pas eu besoin. le talent sans doute. mais si tu veux, ils peuvent enlever leur pantalon pour toi, tu sais histoire que tu puisses approcher de mon niveau. parce qu'ils la détestent les profs, ne comprennent pas eux non plus, d'où vient une réflexion pareille quand elle ne prend même pas la peine de se présenter en cours. elle fait grincer des dents et elle est persuadée que chaque bonne note est une souffrance pour eux. y'a une tension qui est présente et c'est comme un shot d'adrénaline dans ses veines. défier les autres, faire part de son mécontentement c'est une partie où elle excelle, c'est sa vie finalement. et silas est le meilleur des adversaires car elle est la plus facile à faire réagir. et elle rigolerait presque de la surprise de la brune quand elle lui propose de lui envoyer sa partie à faire. elle hausse les épaules jordan, c'est perdu pour eux. et puis elle jette un regard au garçon qui se trouve figé derrière elle, lui fait rapidement signe de tout lui envoyer et voilà qu'il acquiesce gentiment. ça va, boulet numéro 1 va le faire. je disais ça pour toi, comme je sais que t'es du genre psychorigide, je voulais pas te faire perdre la tête. elle se souvient jordan des soirées passées à se moquer de silas avec noé, à se moquer de son besoin d'être toujours en contrôle. c'était presque trop facile. comme jouer à fifa avec son petit frère et gagner 8-2, mais elle s'en lassera jamais jordan, pas quand c'est silas en face. elle regarde silas sourire et lutte pour ne pas laisser le sien se montrer sur son visage, lui laisse savourer cette fausse victoire. elle plante son regard dans celui de la brune avant de passer sa lèvre sur ses dents parfaitement blanches. un sourire carnassier. l'aspect de mon lit n'avait pas l'air de déranger ton frère. ton frère, pas noé. et c'est pas forcément vrai, mais c'est pas comme si c'était inimaginable. tout le monde savait qu'il y avait un truc entre eux, qu'ils allaient finir ensemble, alors le fait qu'ils aient pu coucher ensemble n'est pas une surprise en soi. mais je pourrais t'y accueillir un jour, te faire ce cadeau silas. j'accepte de prendre sur moi pour t'offrir quelque chose que tu n'as jamais connu ... une once de bonheur. elle peut entendre les chaises raclées le sol et une porte se fermer. c'était la phrase de trop pour les deux autres. elle se penche en avant jordan, ses yeux qui détaillent les traits, plus que beau, du visage de silas. la ressemblance avec noé est quelque chose qui l'obsède. comment deux êtres peuvent se ressembler autant physiquement et être si éloignés psychologiquement parlant. c'est fascinant. il suffit de demander. parce qu'elle se souvient jordan, de son immense crush pour silas quand elles étaient encore au lycée, quand elle passait son temps à traîner chez les berzins avec noé, dans le simple but de l'apercevoir. à la base c'est pour ça qu'elle est devenue amie avec lui, grâce à coeur qui battait trop vite quand elle la croisait dans les couloirs du lycée.

drôle de nuage dans l'air, drôle de sentiment qui prend place dans la poitrine au fur et à mesure que les mots semblent se faire violence. elle croit toucher en plein dans le mile silas, mais c'est à peine si elle vise jordan. c'est à peine si elle lui inflige le quart de ce qu'elle endure, et y'a plus que l'érosion du myocarde pour garder quelques onces d'amertume. toutes ces paroles brûlent son épiderme, la renvoie inlassablement vers les chimères d'un autre temps, quand le désespoir n'était qu'un loin sentiment. avant que noé crève. avant que la mort l'enveloppe dans ses bras. c'est le trou sous le plexus, comme une évidence, qui se nécrose de lui-même. mais cette fois, silas se tait, gamine au silence inscrit sur les lippes, à l'attente impatiente de lancer le dernier coup. pourtant, y'a quelque chose qui lui tord les tripes à silas, qui la lacérerait presque tant la sensation est impétueuse. cette foutue vérité qu'on lui crache à la figure, cette foutue vérité qu'on préfère ignorer. silas échoue. silas s'échoue sur le vieux bitume de new york, tant écrasée par le poids des promesses faites aux disparus, par ces promesses qu'on ne peut tenir. alors les certitudes s'envolent, s'oublient pour n'être plus qu'un amas nocif de ressentiments égarés. silas n'est pas la première, silas s'est trahie, silas s'est perdue à vouloir récolter tout les mérites. et y'aurait l'ombre de noé dessinée sur le moindre échec, cette ombre à la couleur cauchemardesque qui s'éveille lorsque les nuits d'insomnies paraissent trop sombres. elle l'écoute à peine jordan, se contente de lui accorder de brefs regards, trop satisfaite de ce qu'elle croyait une énième victoire. (c'est faux, trop faux) et au fond, elle attend l'enfant, elle attend l'élan empoisonné qui viendra se fracasser contre son cœur, qui lui donnera l'envie d'se barrer de la salle en balançant quelques chaises. jordan vise trop juste et ça ne fait qu'accentuer la haine logée dans la simple évocation de son prénom. doux souvenirs qui viennent peupler son crâne, elle s'souvient silas, des mots de maman, avant qu'elle se barre. (cinq ans c'est long) problèmes de colère. mauvaise gestion des émotions. et avec le temps, la structure déjà abîmée s’effondre, ce n'est que question de temps. et en un instant, le feu s'allume, et les ecchymoses tant attendues lui reviennent en plein dans le visage. et c'est la goutte de trop pour les deux autres qui partent, lassés de leurs comportements, de cette atmosphère électrisante qui pèse dans la pièce toute entière. elles sont seules à présent. elles sont seules et silas a le myocarde qui implose sous les yeux de jordan. et elle s'contrôle plus, furie aux airs humains qui viendrait venger un proche. on sait toutes les deux que noé, tu le méritais pas. oh, au fond, elles le savent bien. ça fait longtemps que t'aurais dû le laisser tranquille. elle l'excère silas, et ça se ressent trop sans ta voix, dans son regard, qui pour la première fois, accroche celui de la rousse. j'espère que t'es consciente que tout ce bordel, c'est d'ta faute. elle la lâche pas du regard silas, et elle peine à déceler ce qui passe par la tête de son interlocutrice, elle peine à savoir si les mots la toucheront comme les siens l'ont touché. ce ne serait plus qu'un jeu entre elle, se faire mal. et tu sais que j'ai raison. sinon il serait encore là.

l'étroite salle se transforme peu à peu en ring de boxe. c'est le combat du siècle, celui que beaucoup avait imaginé. les joutes verbales étant nombreuses au moment des présentations de travaux de l'une ou de l'autre. c'est mohamed ali contre joe frazier. et à chaque fois c'est jordan qui gagne, parce qu'elle est plus vive, plus habile. mais pas aujourd'hui, aujourd'hui elle est ali quand silas est frazier, première défaite et y'a pas de ko, mais les mots pénètrent sa chair et ça fait plus mal qu'une droite. elle a pas tord silas, noé, il était trop bien pour elle. lui l'ange princier, elle, la gamine des rues élevée par les loups et les cauchemars. roméo et juliette des temps modernes. wow, félicitations, tu remportes le prix de la pire garce, j'espère que t'es fière de toi. y'a tout qui a changé, y'a jordan qui s'enfonce dans sa chaise, brise la proximité qu'elle avait elle-même installée avec silas. t'as raison il était trop bien pour moi, mais j'ai toujours été là pour lui. j'ai pas passé mon temps à le juger, je l'ai accepté comme il était. elle l'aurait aimé qu'il soit bourge ou mendiant, il était son univers et elle aurait tout donné pour être à sa place, allongée sur le bitume, le corps fracturé et le sang qui inonde la cinquième avenue. t'as jamais été une soeur pour lui, t'as juste été un rappel constant qu'il n'était pas comme vous vouliez qu'il soit. elle se souvient jordan, des nuits à le consoler, à le ramasser à la petite cuillère parce qu'il arrivait pas noé, à faire face à la déception constante qu'il pouvait voir dans les yeux de ses proches, de silas. il n'était pas digne de toi non plus. t'es un putain de mur de glace, une dingue psychorigide. et elle tape avec ses deux mains sur la table et la douleur n'est rien comparé à sa colère. y'a la culpabilité aussi. tu crois que je souhaite pas chaque jour d'avoir été à sa place ? tu crois que je ressens pas de la culpabilité ? tu crois que c'est facile de te regarder tous les jours et avoir l'impression de lui faire face à chaque fois ? je te déteste tellement silas, je te hais, mais pas parce que t’es qu'une conne, mais parce que chaque jour tu me rappelles ce que j'ai perdu. et elle s'en rend compte que maintenant jordan, que y'a une larme, puis deux, qui quittent ses yeux. et elle soupire, souffle difficilement comme si elle venait de courir le marathon de boston. sentiments à la con.

chaos et désillusions prononcés, les coeurs se feraient en quête de vérité quand l'annihilation tombe, sanglante, déchirante. elle attend silas, érinye vengeresse, le faux pas pour se jeter sur son adversaire, celle qui hantait ses jours depuis trop d'années. elle attend silas, le dernier coup de glas qui viendra mettre fin à ces mots emplis d'une haine débordante. la vérité est jetée, puis niée, et silas jubilerait presque de la rage qu'elle créé. l'enfant s'éffondre et tente d'emporter avec elle tout ceux qui l'approche, entraînés avec elle dans la déchéance qu'elle ne fait qu'accentuer. néfaste silas, impassible silas, pourtant, c'est un foutu rictus qui vient s'planter sur son visage, la douleur des souvenirs remémorés est cachée, omise, enterrée six pieds sous d'autres regrets. (quelques instants, rien ne dure) alors maintenant quand on dit la vérité, on est une sale garce? dans ce cas, ouais. leur regards se rencontrent, et c'est comme une sensation de décharge sur l'épiderme, comme une brûlure à l'ammoniaque qu'on aurait oublié de soigner; tout se gangrène, tout s'envole au fur et à mesure que les jours passent. et après tu comptais t'barrer avec son argent? les traits du visage pâle redeviennent impassibles, comme à leur habitude, comme d'habitude depuis que noé s'est envolé, trop loin, d'elle, d'eux. y'a que le chaos qui peut la soulager silas, y'a que la vision de voir la terre brûler qui peut l'apaiser, gamine qui s'nourrit des destructions qu'elle provoque. mécanisme de défense qu'ils disent, mais au fond, ils savent tous que y'a juste un truc qui cloche, y'a toujours eu un truc qui a cloché, même avant que noé s'retrouve dans un cercueil. arrête avec ton numéro de veuve épleurée, j'commence à en avoir marre. et la voix s'élève d'un coup, et les mains se mettraient à trembler, ultime preuve de la contradiction qui s'imice dans l'esprit, de l'illusion que silas applique chaque jour sur son visage, dans sa conscience, dans l'espoir de s'anesthésier un peu plus, puis de ne plus jamais rien ressentir. parce que c'est tellement plus facile comme ça. parce qu'elle passe réellement un jour cette douleur? et jordan flanche, tout comme silas, la colère commune, le mal de vivre ancré à présent dans la chair, qui trace les sillions de leur malheur. y'a les reproches qui vont rebondir contre sa cage thoracique, qui affolent son coeur quand les mots manquent, quand y'a plus rien à dire, plus rien à quoi s'accrocher. non, elle n'était pas digne de lui non plus silas. ni même des berzins. elle a raison jordan, encore une fois, elle a toujours eu raison, elle a toujours su où viser et ça ne fait qu’excéder la haine de silas, drôle d'amas d'émotions, drôle de cocktail (molotov) qu'on finira par jeter. loin, mais pas assez pour que ça n'explose pas. question d'années sans doute. non, silas n'a jamais été digne des autres. mais si elle ne l'a pas été pour noé, c'est hors de question que ce soit jordan qui l'ai été. pas une autre. pas jordan. c'est silas ou rien. mais qu'est-ce que tu crois? que c'est facile pour moi? d'te voir ici? (putain, dans la même pièce) tu crois que t'es la seule à le vivre mal? t'as perdu, quoi un gars que t'aimais bien? j'ai perdu mon frère, j'ai perdu noé et c'était le seul truc qui comptait. pourtant, elle se tait, cette fois, quand elle aperçoit deux larmes dévaler les joues de jordan. elle étouffe silas, elle crève de ces pauvres paroles et y'a que cette envie de fuir, quelques temps, d'prendre un avion pour l'étranger, tout de suite. de regarder new york s'engloutir sous la hauteur. qu'est-ce que tu veux que je te dise? que j'compatis?  que je t'en veux pas, que je t'en ai jamais voulu? ce serait des foutus mensonges. le vide dans le regard, la déchéance plantée dans les myocardes.