Step by step

Le grand jour ou plutôt le grand soir. Ce soir, après le travail, Ivy n’allait pas retourner s’enfermer chez elle jusqu’au lendemain matin. Quelques jours plus tôt, Thomas, un client qu’elle avait récemment rencontré chez Jo’, alors qu’elle travaillait, et avec qui elle avait passé ce qui pouvait ressemblé à un pacte, d’essayer de s’entraider tant bien que mal. Pour être honnête, la blondinette était persuadée qu’elle n’avait rien à apporter au jeune homme, en revanche lui semblait bien décider à lui apprendre à ne plus avoir si peur. Elle était effrayée à l’idée de cette soirée en compagnie de Thomas. Elle se demandait si elle avait bien fait d’accepter, elle avait eu l’idée d’annuler mais elle avait été incapable d’envoyer un message en ce sens au jeune homme. Elle ne voulait pas le décevoir, elle devait prendre sur elle. Pour l’instant, elle ne connaissait pas très bien le brun mais il lui avait fait une bonne première impression. Il avait l’air gentil et respectable. Il n’avait pas de mauvaises pensées en tête en l’invitant ce soir. Ivy se trompait souvent sur les gens, elle s’était souvent faite avoir et ce depuis qu’elle était enfant. Elle avait toujours eu la naïveté de croire que les êtres humains avaient tous, forcément, un bon fond, même les pires. Elle voulait toujours voir le bon chez les autres, elle occultait toujours le mal, elle refusait de le prendre en considération. Elle n’avait pas la prétention de faire changer les gens mais elle était juste profondément persuadé que tout le monde à du bon en lui et que quand quelqu’un commet un acte mauvais, méchant, malveillant, il y a une raison à cela. Elle avait beau avoir beaucoup souffert depuis l’enfance, elle voulait encore croire en la beauté fondamentale du monde, elle refusait de voir les choses comme elles l’étaient vraiment c’est-à-dire moches, fausses, douloureuses. Cette façon de voir les choses lui avait causé beaucoup de souffrances et pourtant, elle était incapable de changer. Sa rencontre avec Thomas en était une preuve. Elle avait beau être méfiante, apeurée, face aux inconnus, elle ne savait pas dire non, elle ne refusait jamais les invitations. Thomas lui avait fait bon impression, il lui avait paru gentil, bienveillant, il s’était comporté avec douceur et correction à son égard sans chercher à la brusquer, sans se moquer d’elle et de son attitude parfois déphasée mais elle ne l’avait vu que quelques secondes. Peut être avait elle fait une erreur qu’elle allait regretter ? Elle était convaincue que non mais elle ne pouvait pas s’empêcher d’avoir peur. La simple perspective de passer un moment avec quelqu’un qu’elle ne connaissait pas beaucoup l’effrayait beaucoup. Elle avait quitté le travail plus tôt qu’à l’ordinaire aujourd’hui, Joseph l’y avait autorisé, voyant bien que l’esprit de sa serveuse était un peu ailleurs. Il se doutait certainement que quelque chose se tramait mais il ne lui avait pas demandé quoi, il s’était contenté de lui dire avant qu’elle ne quitte les lieux, de ne pas hésiter à l’appeler, quelle que soit l’heure du jour ou de la nuit, si elle avait besoin d’aide ou simplement de présence. Dans son appartement, Ivy avait mis des heures à se préparer. Cela faisait si longtemps qu’elle n’était pas sortie. Ce n’était pas un rendez-vous galant, simplement une sortie entre amis ou entre futurs amis pour être plus précis, entre gens qui essaient de vivre normalement malgré les tourmentes mais elle ne parvenait pas à savoir comment s’habiller. Elle ne voulait pas en faire trop mais elle voulait faire suffisamment bonne impression. Thomas l’avait déjà vu mais le contexte était bien différent. Finalement elle avait finit par choisir une tenue simple, un slim noir accompagné d’un chemisier fluide à la coupe ajustée, elle avait accompagné le tout de son sac à main favoris et d’une paire de derbys noires et elle avait jugé qu’elle était plutôt présentable. Sa tenue n’avait rien de particulier, mais Ivy aimait passer inaperçue, et puis elle n’allait pas non plus monter les marches du festival de Cannes. Après une dernière caresse à Socrate, son adorable petit chat noir, elle avait quitté son appartement, la boule au ventre et la gorge nouée. Bien avant l’heure elle était arrivée au point de rendez vous et elle avait fait les cents pas en attendant l’arrivée de son compagnon du jour. L’attente lui semblait insoutenable et elle se demandait ce qu’elle faisait là, si elle n’avait pas fait un bêtise. Elle était persuadée que Thomas allait passé la soirée la plus embarrassante de sa vie avec elle parce qu’elle n’était capable que de mettre les autres mal à l’aise et elle priait pour ne pas fondre en larmes avant de rentrer chez elle ce soir, voulant éviter à tout pris de passer pour une folle devant ce jeune homme. Elle voulait réellement essayer de devenir son amie, pour une raison inconnue cela lui tenait vraiment à coeur, et personne ne voulait être ami avec une pleureuse ou une folle.

L’attente. Une chose simple de la vie, banale, courante, qui était insupportable pour Ivy. Elle était toujours en avance, quel que soit le rendez-vous, quel que soit l’endroit où elle était attendue parce qu’elle avait une sainte peur d’être en retard, de faire attendre les autres. Elle ne voulait pas se faire remarquer et surtout pas en mal donc hors de question de se faire désirer. Et, par conséquent, en étant toujours en avance, déraisonnablement en avance même, elle se retrouvait toujours à attendre. Et lorsqu’elle attendait, même si elle essayait d’occuper son esprit sur des choses concrètes comme par exemple observer les alentours avec calme, sans se faire de films, son esprit se mettait toujours à vagabonder. Elle avait toujours besoin d’être occupée, de rester concentrée sur quelque chose sinon ses pensées divaguaient sans qu’elle ne puisse les contrôler et ses démons avaient tôt fait de revenir et de prendre possession de chaque cellule de son corps pour l’attirer vers les abimes qu’elle connaissait si bien. Elle avait pris ses médicaments avant de quitter son appartement, elle en avait honte mais, pour essayer de rester elle même, elle n’avait pas le choix. Elle ne souffrait pas d’une maladie grave, les personnes atteintes d’un cancer ou une autre maladie gravissime devaient se moquer des gens comme elle qui n’était pas réellement malade. Mais, si elle voulait faire en sorte que les choses se passent pour le mieux, elle ne pouvait pas s’en passer, pas encore, peut être qu’elle ne pourrait plus jamais sans passer d’ailleurs. Elle avait un besoin presque vitale de ses petites gélules que le médecin lui prescrivait, adaptant le traitement à l’état psychique de sa patiente. Cela lui faisait croire qu’elle pouvait être normale, lui donnait l’espoir qu’elle pouvait réussir à faire des choses comme les autres. Quand on est seule, comme elle pouvait l’être à l’intérieur, on trouve la compagnie où l’on peut. C’était comme ça qu’Ivy comblait, ou tentait en tout cas, le vide en elle. En attendant Thomas, elle faisait les cents pas, incapable de cacher sa nervosité, elle jeta plusieurs regards anxieux à son téléphone pour s’assurer qu’il n’avait pas annulé cette soirée cinéma. Peut être qu’elle aurait été soulagée si tel avait été le cas. Elle ne savait pas vraiment, son esprit était trop embrouillée, parasité par tout un cortège de pensées négatives. Soudain, une voix retentit derrière elle, elle se crispa une seconde. Elle avait entendu son prénom, on s’adressait donc forcément à elle." Ivy .. T'es là ! " Sur le qui-vive, elle avait sursauté avant de faire rapidement volte face pour découvrir, sans surprise puisqu’elle l’attendait mais non sans un certain soulagement, Thomas qui lui souriait. Tous ses sens étaient en alerte, la blonde était dans un état de vigilance extrême et pourtant elle s’était faite surprendre. Heureusement c’était Thomas, celui qu’elle attendait. Elle pouvait être rassurée, du moins un peu parce que c’était peine perdue de croire que son esprit allait se calmer maintenant que le jeune homme était là. Elle lui avait fait signe pour le saluer et elle allait prendre la parole mais il l’avait devancée. " Tu es très belle ! " Evidement, elle qui n’arrivait pas à accepter les compliments, elle se crispa, le rouge lui monta aux joues, elle baissa les yeux en restant muette. Quelle idiote elle faisait, incapable de répondre à cette remarque, gentille, du brun. Depuis toujours, elle avait eu du mal à accepter les compliments, elle avait du mal à croire qu’elle pouvait attirer l’attention de qui que ce soit de façon positive, elle avait toujours pensé qu’il était impossible qu’on puisse la regarder. Mais depuis sa rupture, la dernière en date en tout cas, la dernière de toute apparement, son esprit refusait de penser qu’elle pouvait plaire à qui que ce soit. Elle n’avait pas été capable de garder son fiancé, l’homme que le destin lui avait adressé, elle ne méritait donc pas que qui que ce soit puisse la regarder et apprécier ce qu’elle était que ce soit physiquement ou mentalement d’ailleurs. Alors que Thomas lui fit signe d’avancer vers le cinéma elle se mit en marche, lui emboitant le pas, et après un long moment de silence, la gêne toujours omniprésente, elle réussi à articuler une phrase plutôt correcte. « Heu… Merci, c’est gentil. Je… Excuse moi je n’ai pas l’habitude de sortir, je suis un peu nerveuse.  ». Sans blague ? Est ce qu’elle avait vraiment besoin de dire cela ? Croyait elle que Thomas n’avait pas remarqué, sentit sa nervosité à peine était il arrivé ? Ivy ne voulait pas qu’il croit que c’était de sa faute parce que ça n’était pas le cas. Tout du moins pas complètement, la situation, être dehors le soir au lieu d’être chez elle, en sécurité, dans son appartement avec son chat sur les genoux, était déjà déstabilisante pour elle. Ensuite la compagnie de Thomas l’était aussi. Ceci dit, elle était partagée entre la sensation de sécurité parce qu’elle n’était pas seule, elle sentait que le jeune homme pouvait la protéger en cas de danger. Et en même temps, son esprit lui rappelait régulièrement qu’elle ne le connaissait pas beaucoup et que comme  avec toute personne inconnue, elle devait faire attention, essayer de se contrôler ce qui lui demandait une énergie insoupçonnée. Elle avait tenté de lui sourire brièvement pour essayer de faire passer un peu la pilule, espérant peut être qu’ainsi le brun ne la prendrait pas pour une folle furieuse. Instantanément, le contact de la main du jeune homme dans son dos la fit se raidir, il ne lui voulait certainement aucun mal, rien de négatif n’émanait de lui à ce moment là mais Ivy ne parvenait pas à contrôler les réactions de son corps. Le moindre contact physique, même sans arrière pensée, avec qui que ce soit, réveillait tous les signaux d’alertes de son corps et de son esprit. Elle avait créé des mécanismes de défenses si puissants pour essayer de se reconstruire, de recoller les morceaux de son coeur et de son esprit, qu’elle avait totalement perdu le contrôle sur ses derniers. Toujours fidèle à lui même, sans poser de questions qui auraient fait paniquer la blonde, Thomas continuait la conversation, comme si de rien n’était. Il ne le savait peut être pas mais c’était la bonne solution pour contrer un peu les défenses de la jeune femme et essayer de la calmer un peu. " T'as passé une bonne journée ? ". C’était leur tour de passer à la caisse. Elle était gênée que ce soit Thomas qui règle la totalité, elle pensait payer sa place mais visiblement ça n’était pas dans les plans du brun alors elle le remercia par un faible sourire avant de répondre à sa question alors qu’ils s’avançaient côte à côte dans le couloir du cinéma, en direction de leur salle. « Oui, oui rien de spécial, c’était une journée tranquille au café. On a eu quelques touristes étrangers et des habitués enfin voilà, rien d’intéressant à raconter et toi ? » En réalité, Ivy aurait pu parler de sa journée au café pendant des heures. Après ce qu’elle avait traversé et avec toutes les choses négatives qui la parasitaient constamment, ce travail chez Jo était une véritable bouée de sauvetage pour elle. Trouver un emploi avait été la condition principale de son retour à New-York et ce job qu’elle avait trouvé était idéal. La journée avait été banale et pourtant elle aurait eu un millier de chose à raconter, comme chaque jour, parce qu’elle était passionnée par ce qu’elle faisait, elle rencontrait des gens intéressants, même si parfois ils n’étaient que de passage, elle apprenait de nouvelles techniques de cuisine, discutait pendant de longues heures de recettes à tester avec le patron et elle pouvait s’ébahir pendant des heures devant le topping d’un cup-cake réalisé parfaitement. Mais elle ne voulait pas importuner Thomas, il n’en avait peut être pas grand chose à faire et cela n’intéressait certainement qu’elle. En revanche, elle avait un peu honte mais elle ne savait pas ce que le jeune homme faisait dans la vie, elle ne le lui avait pas demandé lors de leur première rencontre, pas parce qu’elle s’en fichait mais parce qu’elle avait peur de poser une question qui dérangerait son interlocuteur.  

Pendant un bref instant, dans cette attente qui lui semblait interminable, la jeune femme s’était une nouvelle fois demandé si elle avait fait le bon choix en acceptant la proposition de Thomas. Ce n’était qu’une sortie au cinéma mais c’était déjà beaucoup pour Ivy. Et finalement, même si le brun lui avait fait bonne impression, elle ne le connaissait pas plus que cela, pas plus que les quelques banalités qu’ils avaient pu échanger autour d’un part de cheesecake et d’une boisson froide qu’elle n’avait pas su ou pas pu refuser. Elle qui ne savait pas dire non de peur de blesser ou de vexer qui que ce soit, même un parfait inconnu. Elle avait été touchée par la douceur, la sensibilité qui se dégageait de Thomas quand elle l’avait rencontré. Elle avait sentit quelque chose en lui sans pouvoir réellement le percevoir, c’était un peu comme une onde, une vibration qui l’avait heurtée dès le premier regard. Elle avait l’impression d’avoir une faille en lui sans qu’elle ne puisse l’expliquer parce que ça n’était pas un sentiment rationnel, c’était quelque chose de très subtil et de difficilement saisissable mais elle avait l’impression de partager quelque chose avec le jeune homme sans même le connaître. Mais elle savait qu’elle pouvait être naïve et que, souvent, elle accordait trop facilement sa confiance à autrui. Elle se faisait avoir ensuite, dans la majorité des cas. Alors qu’elle était aux prises avec ses pensées, trop rapides, trop nombreuses, qui lui donnait le vertige et faisait monter en elle une angoisse qui lui enserrait la cage thoracique, limitant légèrement sa respiration, la voix de Thomas s’était faite entendre derrière elle, l’interpellant. Elle ne pouvait plus faire machine à arrière, elle allait devoir affronter ses peurs. Et surtout sa peur de ne plus être capable de mener une vie normale, sa peur de fondre en larmes à tout moment si ses émotions la débordaient. Elle inspira profondément avant de faire face au jeune homme. " C'est moi, c'est moi. Ne t'en fais pas ! " Son sursaut, son inquiétude n’avait pas échappé à Thomas, évidement. Elle n’essayait même pas de la cacher, c’était peine perdue, de l’énergie gaspillée inutilement alors qu’elle avait besoin de toute ses capacités pour tenter, au minimum, de contrôler ses émotions et ses pensées vagabondes. De toute façon elle ne pouvait pas maîtriser les réactions de son corps qui, bien souvent refusait de lui obéir. Elle avait légèrement sourit suite à la phrase de Thomas, il se voulait rassurant et c’était très gentil de sa part même si cela ne suffisait pas à faire taire les peurs d’Ivy qui d’ailleurs ne savait pas vraiment si elle pouvait accorder toute sa confiance au brun. D’un côté, sa naïveté lui disait que oui, il avait l’air tellement gentil, doux, il ne pourrait pas lui faire de mal. Mais de l’autre, la voix qui hurlait dans sa tête à longueur de journée, lui criait de faire attention pour ne pas se faire avoir une fois de plus, pour ne pas se retrouver blesser, à terre, trainée dans la boue comme bien souvent elle l’avait été. "ça va aller, je te le promets. Je suis là, je ne vais pas t'abandonner ! " Inévitablement son corps s’était raidi lorsqu’elle avait sentit la main de Thomas sur la sienne. Ce geste la gênait, la mettait mal à l’aise parce qu’elle ne savait pas vraiment comment le prendre. Pourtant c’était certainement à cause de la foule, même si elle restait relative, pour ne pas se perdre avant l’entrée du cinéma, il n’y avait probablement rien de mal la dedans mais elle n’arrivait pas à se détendre. Toutefois, les mots de Thomas, même s’ils avaient l’air banals, lui faisait quand même du bien et lui donnait un peu de douceur. Au milieu de cette foule, elle ne se sentait pas rassurée, pas à l’aise du tout et se retrouver soudain seule, au milieu de tous ses gens, l’effrayait au plus haut point. La présence de Thomas, même si elle le connaissait peu, la rassurait d’autant qu’il se montrait toujours aussi doux. Il se tenait près d’elle, trop près peut être pour le pauvre coeur et le pauvre cerveau d’Ivy qui fonctionnaient à mille à l’heure, ne sachant quoi penser, quel comportement adopter, et la blonde se sentait, quelque part, tout de même rassurer de ne pas être seule. « Je… Merci, merci beaucoup. Ca faisait longtemps que je n’étais pas allé au cinéma.  ». Elle avait bégayé cette phrase avec une certaine difficulté, preuve de la tempête qui faisait rage dans son esprit. La main de Thomas avait quitté la sienne et elle n’avait pas tardé, alors qu’ils s’étaient glissés dans la fil d’attente qui s’était formée au guichet du cinéma, à sentir le bras du jeune homme passer autour de ses épaules. Bizarrement ce geste la mettait moins mal à l’aise que le fait qu’il lui prenne la main comme il avait pu le faire précédemment. Peut être parce que, dans son esprit il était moins ‘intime’. Thomas était plus grand qu’elle et, même s’il n’avait pas un physique si impressionnant, elle se sentait un peu rassurée. Il était là pour la protéger d’une éventuelle agression extérieure et cela l’apaisait quelques secondes, jusqu’à ce que son esprit lui rappelle avec fermeté qu’elle ne connaissait pas si bien que cela le jeune homme qui l’accompagnait et que le danger pouvait tout aussi bien venir de lui. " Tu me dis si ça te met mal à l'aise. J'ai promis de t'aider mais .. j'suis encore novice .. ". Ivy lui avait rendu son sourire assez instinctivement, sans avoir à trop réfléchir pour une fois. Thomas était très prévenant avec elle et il faisait tout ce qu’il fallait pour la rassurer. Au fond d’elle Ivy lui faisait déjà confiance, elle voulait lui faire pleinement confiance en tout cas et il mettait tout en oeuvre pour qu’elle puisse y parvenir. Cependant, elle ne pouvait pas non plus chasser si facilement ses réflexes devenus naturels suite aux mécanismes de défense qu’elle avait construit pour essayer de minimiser sa détresse psychologique et elle restait dans un état d’hypervigilence constante. « Ca va… enfin… je ne vais pas te mentir, je ne suis pas à l’aise… pas du tout même mais ça ne viens pas de toi je pense…. Je… j’ai un peu de mal à savoir ce qui est acceptable ou non et je ne voudrais pas paraitre excessive non plus… » La blonde avait terminé sa phrase en baissant les yeux, un peu honteuse. Elle avait clairement perdu les codes de la vie en société, un rien la mettait mal à l’aise et le contact physique était une véritable hantise pour elle, tout comme les relations sociales, qu’elles soit amicales ou plus intimes, la terrifiaient parce qu’elle savait qu’à tout moment, un mot, une odeur ou simplement une sensation pouvait la faire exploser, perdre ses moyens et fondre en larmes. Elle ne voulait pas passer pour une folle devant Thomas, elle voulait essayer d’avoir l’air normale et c’était pour cela qu’elle avait accepté son invitation aujourd’hui comme la part de cheesecake quelques jours plus tôt. Mais être ‘normal’ c’était quelque chose qui était devenue très difficile pour elle, côtoyer des inconnus, sortir de chez elle, tout cela étaient de véritables épreuves pour la demoiselle. Elle savait que ce qu’elle venait de dire pouvait paraitre étrange à ceux qui ne connaissaient pas son histoire comme c’était le cas de Thomas et c’est pour cette raison qu’elle avait baissé les yeux. Elle avait beau faire tous les efforts du monde pour avoir l’air normal. Elle espérait juste que le jeune homme qui l’accompagnait n’allait pas mal prendre ce qu’elle venait de dire même si elle s’apprêtait d’ors et déjà à voir le regard qui posait sur elle changer, elle savait exactement la lueur qui traversait les yeux des autres lorsqu’ils avaient pitié d’elle ou la prenait pour une folle. C’était arrivé tellement de fois déjà. Le duo avait avancé et se retrouvait maintenant dans la salle de cinéma. Ivy n’était pas totalement détendue mais elle se sentait malgré tout plus à l’aise qu’au milieu de la foule qui allait et venait dans la rue. " ça va ? Si ça va pas, tu me le dis, on sortira et on fera autre chose !" Ivy sentait le regard de son voisin de siège la parcourir, il ne la quittait pas du regard pendant qu’il lui parlait et elle était extrêmement gênée, elle qui avait du mal à accepter que l’on puisse la voir, la regarder, ses nerfs étaient mis à rude épreuve. Pour le moment elle tenait bon mais jusqu’à quand ? Elle s’accrochait de toute ses forces, mettant en application les conseils de ses médecins pour faire redescendre la pression lorsqu’elle se sentait partir à la dérive. Thomas n’agissait pas dans le but de lui faire peur, de la mettre mal à l’aise, il essayait d’être gentil mais finalement, c’était peut être avec ça que la blonde avait le plus de mal, que l’on soit gentil avec elle. Après tout ce que la vie lui avait fait traverser elle estimait qu’elle devait faire pénitence et que, pour cette raison, elle ne méritait pas la gentillesse, la bienveillance et l’attention positive des autres. Elle ne pouvait pas l’expliquer, elle ne connaissait pas assez Thomas pour lui parler de tout cela et de toute façon, même si elle avait voulu le faire, elle savait que les mots n’arrivaient jamais à franchir la barrière de ses lèvres, elle les gardaient en elle, dans son coeur, fermé à double tour. C’était douloureux mais tout laisser sortir le serait encore plus et c’était pour cette raison, en particulier, qu’elle fuyait les autres, surtout s’ils étaient aussi bienveillants avec elle que ne pouvait l’être le brun. Lorsque ses émotions prenaient le dessus, son coeur et son cerveau était sans dessus dessous, elle risquait à chaque fois de craquer, de se mettre à pleurer et elle avait peur qu’un jour elle finisse par laisser sortir tout ce qu’elle cherchait à enfouir en elle, à oublier. Elle vivait comme une funambule qui marchait sur un fil si fin qu’il risquait une chute fatale à tout moment. Après un moment de silence anormalement long, pendant lequel ses pensées avaient divagues dans des contrés brumeuses, elle réussi à revenir au moment présent. Fébrile elle repris la parole. « Ca va… pour le moment en tout cas. Je me sens mieux ici à l’intérieur que dehors pour être honnête. » Elle avait sourit en relevant les yeux vers Thomas avant de reprendre rapidement la parole pour tenter de dissimuler sa gêne. «C’est un film qui parle de quoi ? Tu veux que j’aille nous chercher du pop corn ? »

 

Lorsque Thomas était arrivé jusqu’à elle, elle était encore partagée. Etait elle réellement plus en sécurité maintenant qu’elle n’était plus seule ? Certainement, Thomas ne pouvait pas lui vouloir le moindre mal. Il lui avait parut si gentil, attentif, lors de leur première rencontre. Elle l’avait sentit sensible et bienveillant, d’une manière qu’elle ne pouvait pas très bien expliquer. Ivy avait toujours beaucoup ressentit les choses et les gens autour d’elle, elle avait toujours eu une intuition assez développée, un genre de sixième sens mais, depuis son hospitalisation, elle avait l’impression que cette capacité s’était amplifiée. Parfois, elle se trompait, un peu comme si son esprit embrouillé n’arrivait pas réellement à percevoir correctement les vibrations, l’aura dégagées par les gens qu’elle rencontrait mais, il lui arrivait encore plus souvent qu’avant de se sentir submergé par les émotions des autres, sans même qu’ils n’aient à lui raconter quoi que ce soit. C’était étrange, inexplicable parce que clairement irrationnel mais c’était pourtant si réel pour elle, presque palpable même. Et, lorsqu’elle avait rencontré Thomas, elle avait immédiatement vu en lui une grande sensibilité qui, quelque part, l’avait touchée et elle avait aussi perçu ce qui semblait être une faille comme s’il cachait quelque chose d’infiniment triste derrière son sourire. Malgré cela, elle ne réussissait pas à éteindre tous les signaux d’alerte que l’arrivée du brun avaient allumés en elle, la voix dans son crâne lui hurlait de faire attention, de ne pas se laisser avoir encore une fois, de se protéger. Mais Ivy, elle ne savait pas se protéger et elle voulait faire confiance à Thomas. Quelque part d’ailleurs, elle lui faisait certainement déjà confiance car, malgré la tension qui était plus que palpable et qui habitait tout son être, elle se sentait quand même rassurée de la présence de ce dernier, son corps baissant peu à peu sa vigilance quant aux éléments qui les entouraient. Le sourire franc, sans arrières pensées malsaines que le jeune homme avait scotché sur les lèvres et qui illuminait son visage rassurait Ivy parce qu’il dégageait une chaleur qu’elle n’avait pas beaucoup connu ces derniers temps, pas beaucoup vu depuis sa descente aux enfers et qui la réchauffait agréablement." eh bien, grâce à moi, tu y es retourné ! " Ivy avait sourit à la phrase du jeune homme. Il avait raison, même si ça n’était pas facile pour elle, elle était belle et bien là et elle s’apprêtait à assister à une séance de cinéma en compagnie de Thomas. Il était presque un inconnu mais elle était persuadée, lorsqu’elle arrivait à faire taire les pensées négatives qui revenaient sans cesse , qu’ils pouvaient devenir amis si elle ne gâchait pas tout comme elle savait si bien le faire avec son instabilité émotionnelle chronique. Il était positif dans sa remarque et Ivy avait besoin de s’entourer de personnes comme lui, elle avait toujours du mal à voir le positif lorsque cela la concernait et ce genre de commentaire lui faisait du bien, lui mettait du baume au coeur en lui permettant de voir le chemin qu’elle avait parcouru et qu’elle avait avancé même si elle était persuader de stagner. « C’est vrai. Et c’est entièrement graphe à toi, toute seule je n’aurai jamais sauté le pas je pense alors… merci.  ». A nouveau elle avait sourit au jeune homme en posant les yeux sur lui. Elle ne devait pas crier victoire trop tôt, elle avait le temps de fondre en larmes mille fois et de gâcher cette soirée qui ne commençait pas si mal mais elle pouvait déjà remercier le jeune homme. Il ne passerait certainement pas la meilleure soirée de sa vie mais elle lui faisait confiance quand il disait qu’il n’allait pas la laisser tomber au milieu de toute cette foule. " Bon, c'est un bon début déjà ! Et ma présence ne te gêne pas ?". Thomas semblait vraiment content pour elle en apprenant qu’elle était plus rassurée maintenant qu’ils étaient à l’intérieur du cinéma et cela avait arraché un large sourire à Ivy. Elle avait toujours du mal à être fière d’elle, à voir ses progrès, elle pensait souvent qu’elle ne progressait pas et ce serait un long travail avant qu’elle n’arrive à se rendre compte seul qu’elle avançait même si parfois cela lui prenait du temps. Son thérapeute serait certainement très content d’elle lorsqu’elle lui raconterait cela à la prochaine séance et ce serait grâce à Thomas parce que seule, elle serait restée chez elle comme elle en avait l’habitude, bien en sécurité dans sa bulle. La question qu’il avait posé ensuite concernant sa présence l’avait mis mal à l’aise et son sourire s’était crispé. Elle n’était pas des plus à l’aise avec Thomas, pas encore, c’était trop tôt trop rapide pour elle même si elle avait déjà envie de lui faire confiance. Son corps et son esprit étaient souvent en contradiction d’ailleurs et même, dans sa tête, ses pensées se livrait bataille car, même si son corps trahissait toute sa crispation, sa tension, elle voulait faire confiance à Thomas, d’ailleurs elle lui faisait déjà confiance puisqu’elle l’avait suivi jusqu’ici malgré sa nervosité mais, d’un autre côté elle avait peur mais elle avait tant souffert à cause de mauvaises rencontres, parce qu’elle était naïve et qu’elle se faisait tout le temps avoir. En plus, le jeune homme était tactile et Ivy n’était plus habitué au contact de ses semblables et si elle avait le choix, elle préférait le fuir car le moindre effleurement pouvait la perturber, chambouler son esprit déjà fragile. On dit que la peau à une mémoire qui lui est propre et dans le cas d’Ivy cela semblait on ne peut plus vrai. Elle avait toujours été réservée mais, après les multiples traumatismes qu’elle avait subi, elle avait du mal à accepter trop de proximité, une proximité qui permettait que l’on puisse la toucher. C’était étrange, elle ne voulait pas mentir à Thomas mais en même temps elle ne savait pas comment avouer la vérité sans passer pour une folle et sans risquer de le vexer. « Je… non, ça va. Je suis désolée si je suis un peu nerveuse, ce n’est pas contre toi. » Elle n’avait pas été capable d’expliquer de manière plus détaillée le fond de sa pensée, c’était prendre un trop grand risque de se mettre à pleurer ce qu’elle voulait absolument éviter. Elle n’avait pas mentit, ça n’était pas la faute de Thomas si elle était dans cette état. La proximité qu’il entretenait avec elle n’arrangeait rien, certes, mais elle avait l’impression d’être dans l’excès, une fois de plus. Elle savait que le problème venait probablement d’elle parce qu’elle avait du mal à supporter le foule, parce qu’elle ne sortait plus et qu’elle ne savait plus vraiment en quoi consistait la vie en société, les interactions sociales. L’angoisse prenant le dessus, elle s’était empressée d’enchainer, demandant de quoi parlait le film que le brun avait choisi. " C'est un film d'auteur qui raconte la relation amoureuse entre deux personnes que tout oppose." Elle avait hoché la tête dans un signe d’approbation. C’était tout à fait son genre de film. Elle avait toujours été sentimentale, un peu trop d’ailleurs ce qui n’était pas une qualité dans le monde actuel. C’était certainement à cause de cela qu’elle avait été brisée tant de fois, parce qu’elle croyait en l’amour, qu’elle donnait toujours tout dans ses relations, qu’elle s’accrochait fort, beaucoup trop fort, contre vents et marées et qu’elle ne savait pas quitter le navire quand il était encore temps, avant que son coeur ne se fracasse contre les rochers du rivage de la réalité. Elle s’identifiait souvent aux personnages de ce genre de film, un peu trop d’ailleurs. Le film lui plairait surement mais elle devrait prendre sur elle, certainement, pour ne pas pleurer excessivement et amener Thomas à se poser plus de questions sur son cas. Elle avait ensuite proposé d’allé acheter du pop corn " Hum.. pourquoi pas, ça pourrait être un bon exercice pour toi mais... Promet-moi de revenir, d'accord ?! " L’inquiétude qu’elle avait vu passer dans les yeux de Thomas avait fait naitre une appréhension chez Ivy. Elle ne comprenait pas se soudain changement d’attitude alors que jusque là il avait paru si détendu. Lorsqu’il lui avait attraper la main, elle avait sentit un frisson la parcourir et elle avait réprimé un mouvement de recul, inquiète elle aussi de ce qu’il allait bien pouvoir lui dire. Finalement de l’étonnement pris place sur son visage face à l’aveu du jeune homme, elle ? L’abandonner là dans la salle de cinéma ? Surement pas. Cela ne lui avait d’ailleurs même pas effleurer l’esprit, jamais elle n’aurait pu faire ça mais la question de Thomas était certainement légitime. « Oui, oui bien sur que je vais revenir aucune inquiétude à avoir là dessus. » Elle lui avait adressé un léger sourire et ses joues avaient légèrement rougies en croisant le regard de Thomas, elle avait rapidement détourné le regard, gênée par la situation même si elle n’avait rien d’extrêmement dérangeant pour une personne lambda puis elle avait été cherché du pop corn. Ivy ne mangeait pas beaucoup, elle grignotait souvent, rien de plus mais, même si elle était angoissée d’être là, se retrouver seule quelques instants allait lui permettre de souffler un peu alors qu’elle sentait l’anxiété gagner du terrain dans son cerveau. Après avoir acheté du pop corn comme prévu et pris le temps de souffler un peu, elle était revenu dans la salle et le film avait commencé. La salle plongée dans la noir, l’esprit d’Ivy était agité, des pensées en tout genre lui venaient en tête et, à chaque fois que Thomas avait le malheur de bouger, elle sursautait. Elle avait beau essayé de faire le vide dans sa tête, de respirer profondément et de se concentrer sur le film à l’écran qui racontait une très belle histoire, c’était difficile pour elle. Pourtant, elle était persuadé que le jeune homme était un type bien et qu’elle pouvait avoir confiance mais c’était au delà de ses forces. Le générique de fin s’afficha finalement à l’écran, Ivy avait pleurer face à cette belle histoire et, alors que la lumière se rallumait, elle s’était rapidement essayé les yeux, espérant que son maquillage n’aurait pas coulé, et elle s’était tournée vers Thomas. Elle ne savait pas vraiment ce qu’elle était censée dire ou faire et sa gêne était, une fois de plus, très mal dissimulée. « Tu as aimé ? Moi oui, c’était un très bon choix. ». Elle avait tenté de sourire pour faire passer un peu les choses et masquer le fait qu’elle ne savait pas réellement comment agir maintenant.

 

Cette soirée, sous ses airs banals pour une personne lambda, était une véritable épreuve pour Ivy. Déjà quitter son appartement alors que le soleil était en train de se coucher, à la faveur d’une soirée d’été agréable, c’était déjà quelque chose qu’elle n’avait pas fait depuis son retour à New-York. La blonde n’avait jamais été une accro aux sorties. Même quand elle était plus jeune, adolescente puis jeune adulte, elle était sortie certes, boire des verres dans des bars, faire la fête, aller aux restaurants mais c’était souvent plus pour faire plaisir à ses amis que par véritable plaisir. Cependant, depuis son retour à New-York, elle n’avait plus réellement d’amis, ou du moins elle n’avait pas recontacté ceux qui lui restait peut être par honte et par peur de devoir parler de ce qui s’était passé, de ce qui l’avait conduit à disparaitre totalement du paysage new-yorkais pendant plus d’une année et, de ce fait, elle ne sortait plus et elle se complaisait la dedans. Son nouvel appartement était une véritable bulle d’oxygène pour elle. Elle ne s’y sentait pas toujours bien parce que c’était impossible pour elle, il ne l’empêchait pas d’avoir l’esprit brouillés, d’être traversées par des pensées sombres, il n’empêchait pas ses angoisses de refaire surface jusqu’à la posséder, ni les crises de larmes mais elle s’y sentait en sécurité, c’était sa bulle, comme un sas de décompression où elle pouvait se laisser aller et exploser à l’abri du regard des autres parce qu’elle avait déjà craqué, violemment, douloureusement, en public et qu’elle savait ce que c’était, elle connaissait le poids des regards sur son corps frêle et secoué par les sanglots et elle connaissait la honte et la culpabilité et elle ne voulait plus jamais avoir à revivre cela. Son appartement était cozy, confortable, calme et il remplissait à merveille son rôle de refuge après des journées de travail passionnantes mais parfois éprouvantes pour ses nerfs encore fatigués et à vif. Thomas n’avait pas tardé à pointer le bout de son nez et Ivy était partagée entre le soulagement de ne plus être seule au milieu de la rue et l’angoisse d’être accompagnée par une personne qu’elle ne connaissait finalement pas temps que ça. La soirée promettait d’être éprouvante mais Ivy faisait de son mieux, si elle réussissait à aller au bout de cette dernière sans fondre en larmes ou prendre la fuite sans explication pour rentrer chez elle, alors ce serait une vraie petite victoire pour elle, une victoire sur elle même et sur ses blessures profondes et encore suintantes malgré le temps qui passait. " Je tiens quand même à dire que j'suis fier de toi. T'es venu ! ". Ivy avait sourit plus largement avant de baisser les yeux. Thomas était plus que conscient de ses fragilités et de ses faiblesses. Elle avait beau essayer de les cacher, de les garder au fond d’elle, il était trop facile de lire en elle et de se rendre compte que quelque chose clochait chez elle. Seulement Thomas semblait réellement bienveillant et il avait l’air, sincèrement, de vouloir lui apporter son aide et pour cela, Ivy lui était reconnaissante. Le duo était entré dans le cinéma, Ivy suivant de près son accompagnateur du soir pour être certaine de ne pas le perdre dans la foule relative qui évoluait dans le hall du cinéma en cette soirée de début de week-end estival. Face à la réponse qu’elle avait servie à Thomas lorsqu’il lui avait demandé si elle était aussi gênée à cause de lui, le jeune homme s’était mis à lui caresser le dos de la main avec une douceur qu’elle ne connaissait plus depuis longtemps. Elle se sentit frémir légèrement tandis que son corps se crispait sans qu’elle ne puisse le contrôler. Gênée elle baissa les yeux alors qu’il reprenait la parole. " ça va aller. Je promets de ne pas te manger ! ". Elle avait sourit avant de remonter timidement les yeux vers lui tentant un trait d’humour face à la phrase de Thomas pour essayer de dissiper le malaise qu’elle avait elle même créer. « Je crois que je ne suis pas très comestible de toute façon… » Ensuite, la blonde réussi l’épreuve d’aller seule acheter un seau de pop corn et le film commença.  Ivy fut rapidement absorbée par le film et les images qui défilaient à l’écran. Occuper son esprit était toujours une bonne solution même si elle n’y parvenait rarement plus de quelques heures consécutives, elle finissait toujours par retomber dans ses travers et les pensées harassantes qui ne la laissait jamais réellement tranquille revenait toujours trop vite. Elle avait tout de même remarqué qu’à coté d’elle, Thomas avait du mal à rester en place, elle espérait simplement qu’il ne s’ennuyait pas. Le film se termina et Ivy termina, elle, d’essayer les larmes qu’elle n’avait pu retenir. Elle était sensible, beaucoup trop sensible et un rien pouvait la faire pleurer, que ce soit triste, joyeux, romantique, elle avait la larme facile et c’était quelque chose dont elle avait honte. Elle n’avait jamais supporter sa trop grande sensibilité et, depuis son hospitalisation, cette dernière c’était encore accentuée et Ivy ne l’acceptait que très mal. Elle n’avait pas le choix, elle devait faire avec, essayer de vivre avec cette hyperémotivité qui l’handicapait au quotidien mais elle n’en était pas fière. La lumière s’était rallumée et le jeune homme avait tourné la tête vers elle bien trop vite, il avait remarqué ce qu’elle aurait préféré pouvoir cacher." t'as pleuré ?". Ivy avait baissé la tête, elle aurait aimé pouvoir se cacher, disparaitre sous terre, mais ça n’était pas possible alors elle avait laissé échapper un léger rire emprunt de gène avant de répondre. « Ouais… je sais c’est nul mais je suis trop sensible je crois. » Elle en était même sûre mais elle essayait de botter un peu en touche face à la remarque de Thomas qui n’avais certainement rien de moqueur mais qui la mettait mal à l’aise. Thomas enchaina rapidement ensuite pour répondre à sa question, certainement conscient des sentiments qui traversait Ivy. " Ca va oui, il était pas mal. Franchement, c'était un très bon film et je lui mettrais un six sur dix. Et toi ?." Ivy, elle, avait adoré le film même si elle avait pleuré mais elle avait peur que Thomas la prenne pour une folle ou une petite fille niaise, fan de films à l’eau de rose. Elle avait toujours eu beaucoup de mal à affiner ses propres opinions même pour quelque chose d’aussi futile et subjectif qu’un avis sur un film, elle tenta alors de rester modérée malgré le fait qu’elle aurait encore pu débattre de l’histoire pendant des heures si on lui en avait laissé l’occasion. « Hummm… J’ai bien aimé moi, je lui mettrais plutôt un sept et demi ou peut être un huit… mais c’est peut être parce que ça fait longtemps que je n’ai pas été au cinéma que ça me fait cet effet là…». Sans en avoir l’air c’était encore une tentative de se justifier de la part d’Ivy. Elle n’arrivait pas à faire quoi que ce soit sans avoir à se justifier, c’était un automatisme chez elle, un peu comme une maladie, un mauvais tic. Thomas l’avait ensuite invité à sortir de la salle et elle avait suivi le mouvement, la tête encore un peu dans le film qu’elle venait de voir et qui lui faisait ressentir un drôle de sentiment, certainement à cause de cette histoire d’amour si belle et si pure qui avait été racontée. " Bon, ça te dit qu'on aille prendre un verre ou bien on peut se trouver un truc à manger. Pizza ? Burger ? Dis-moi ce dont tu as envie !" Ivy resta silencieuse, surprise par cette nouvelle invitation. Elle avait passé un bon moment au cinéma une fois assise dans la salle et elle était fière d’elle, pour une première sortie c’était déjà une belle victoire pour elle. Elle voyait cette invitation du jeune homme, qui n’avait pourtant rien d’extraordinaire, comme une nouvelle épreuve. Si elle acceptait elle serait obligée d’affronter plus longtemps le regard de Thomas, elle devrait travailler sur elle pendant encore quelques heures et elle ne savait pas si elle en était capable. Elle se sentait bien sur l’instant et elle était tentée d’accepter mais, d’un autre côté elle avait peur d’en faire trop d’un seul coup et d’anéantir tout ses efforts. Elle était restée silencieuse et le duo s’était retrouvé à l’entrée du cinéma, Thomas avait repris la parole certainement pour inciter la jeune femme à répondre enfin. " On peut simplement marcher si tu veux !" Elle releva les yeux vers lui et inspira profondément avant de donner sa réponse, prenant véritablement sur elle, réellement désireuse de faire des efforts et elle ne voulait pas non plus décevoir Thomas. « Heu… On peut aller manger quelque part si tu veux, si on trouve un endroit où il n’y a pas trop de monde » Elle avait sourit légèrement au jeune homme en relevant le regard vers lui à la fin de sa phrase. Elle avait elle même du mal à réaliser ce qu’elle venait de dire alors qu’elle aurait pu prendre la solution de facilité et demander à rentrer directement chez elle en continuant à discuter du film ou d’autres banalités avec le brun mais non, elle avait donné son accord pour aller manger avec Thomas. Après tout, cela lui éviterais de devoir se préparer quelque chose à manger en rentrant chez elle ou alors cela lui évitait de jeuner jusqu’au lendemain matin car, avec l’émotion, elle n’avait pas réellement faim et, peut être que de se retrouver à manger avec quelqu’un, elle se sentirai obliger de grignoter un peu plutôt que de sauter un repas de plus alors qu’elle savait pertinemment que ce n’était pas bon pour elle et pour sa santé tant mentale que physique. Thomas était gentil et pendant le film il était resté très respectueux, il n’avait pas chercher à lui faire du mal ou à abuser d’elle alors qu’il en aurait eu tout le le loisir, Ivy commençait à lui faire confiance, c’était peut être encore un peu tôt mais la blonde avait la fâcheuse tendance à rapidement faire tomber ses défenses face à quiconque lui montrerait un peu d’attention en étant capable de rester courtois et respectueux simplement quelques heures et encore. Elle savait qu’elle était souvent trop naïve et trop crédule parce qu’elle s’était souvent faite avoir par le passé mais elle voulait croire que Thomas n’était pas comme les autres, qu’elle pouvait se faire un réel nouvel ami, ce serait une si grande victoire pour elle. Elle lui avait sourit plus largement pour confirmer sa réponse avant de lui emboiter le pas à la recherche d’un restaurant pas trop bondé où ils pourraient s’installer.