Invisible teardrops (Peyton)

Coeur brisé, meurtri, déchiré par la plaie laissée par l'amour quand il est rejeté. Blessure béante qui n'est apaisée par aucun baume. Des heures passées sur les planches en bois de l'une des immenses salles de danse de la Juilliard, le corps qui se tord sur le rythme de la musique, mouvements imprimés d'une souffrance refoulée. Tout va bien, Ewan. Les miroirs reflètent la silhouette spectrale du danseur qui heurte le sol de la pointe de ses pieds à chaque réception, l'esprit qui a de plus en plus de mal à se concentrer sur les gestes et les mouvements de la chorégraphie, plutôt que sur tout ce qui ne va pas dans sa vie. Tout va bien, Ewan. La cage thoracique prend de l'amplitude à chaque inspiration, à défaut de se remplir du bonheur de recevoir l'amour de l'être aimé en retour. Le myocarde trop vide, traversé par une tempête de vacuité, chargé de rancoeur. Tout va bien, Ewan. C'est elle qu'il voulait. Rien d'autre qu'elle. Mais elle, elle n'a pas voulu de lui. Elle l'a repoussé en emportant avec elle tous ses espoirs en matière d'amour. A-t-elle seulement conscience du trou béant qu'elle a laissé dans sa poitrine ? Tout va bien, Ewan. Il ramasse son sac abandonné sur le sol, rejoint les vestiaires dans l'espoir de se laver de toute la douleur qui s'est inscrite dans son épiderme, comme si l'eau chaude allait l'emporter avec elle en ruisselant sur son corps. Mais rien ne pourra lui permettre de se défaire de cette souffrance, qui l'accapare, l'encercle de ses serres acérées. Tout va bien, Ewan. Il espère s'évader de l'emprise de cette lente agonie qui le fait suffoquer depuis le premier jour de la fin de ses espérances, s'échappant de la Juilliard sans regarder derrière lui, grimpant dans sa vieille bagnole qui menace de rendre l'âme d'un instant à l'autre. Comme lui. Iggy Azalea tape un rap à la radio, musique qui comble l'habitacle de la voiture, fait bourdonner ses oreilles, sert de toile de fond à ses pensées qui ne font que radoter cette même phrase à laquelle il croit de moins en moins à chaque fois qu'elle est intérieurement répétée. Tout va bien, Ewan. Il se retrouve planté devant la porte de son appartement, se demande s'il devrait pas rebrousser chemin. Son coeur est encore plus douloureux qu'il y a quelques secondes. Rien à voir avec l'effort physique. C'est l'effet que ça lui fait de revoir Peyton sans pouvoir l'embrasser, sans pouvoir l'aimer. Deux semaines se sont écoulées depuis qu'il l'a recroisée au hasard d'une rue, alors que Stella, grande blonde à la chevelure interminable se cramponnait à son bras pour faire savoir à la terre entière - ou surtout à Peyton - qu'il lui appartient désormais. Le silence a suivi le malaise, malaise qu'il n'avait pas envie de voir perdurer. Surprise ! qu'il lance en effaçant toute preuve d'une souffrance quelconque de son visage au moment où elle lui ouvre la porte. Mot inadéquat choisi uniquement pour lui prouver qu'il vient en paix, a pas l'intention de remuer le couteau dans la plaie. J'veux pas te perdre, moi, Peyton. Alors s'il faut que j'fasse semblant d'aller bien pour y parvenir, j'le ferai. Désolé de passer à l'improviste comme ça mais j'avais envie de te voir alors... Me voilà ! J'te dérange pas ? Le sourire éclatant comme si aucun événement n'était venu entacher son bonheur récemment alors qu'il s'introduit déjà chez elle pour ne pas lui laisser l'opportunité de lui refermer la porte au nez. Et si elle lui en voulait de ne lui avoir rien dit ? De l'avoir mise au pied du mur sans lui laisser l'opportunité de se faire à l'idée qu'il a tourné la page ? Mais il a pas tourné la page du tout, Ewan. Il est toujours bloqué au premier chapitre, ses prunelles qui ne cessent de relire en boucle le passage au sein duquel il l'embrasse au sommet de la colline. Alors, qu'est-ce que tu racontes depuis le temps ? J'ai l'impression que ça fait une éternité qu'on s'est pas vu. Il peut même pas le lui reprocher, parce que c'est elle qui a fait le premier pas. C'est elle qui a essayé de recoller les morceaux la première. Parce qu'il aurait été incapable de le faire à sa place. La revoir, ça impliquait de rouvrir une vieille plaie. Lui parler, ça signifiait de foutre du sel sur cette foutue plaie encore trop fraîche. Il tourne la tête vers elle, un éclat dans les yeux terni par la douleur de l'avoir perdue pour de bon à trop en attendre d'elle. Lui qui pouvait pas se contenter de son amitié parce que ça lui suffisait pas. Ça lui a jamais suffi, Ewan qui est voué à s'enticher que des personnes qui ne voudront jamais de lui. Tout va bien, Ewan.

Pando

Mal. Mal au cœur. Celui qui peine à battre correctement. Celui qui se retrouve compressé dans sa poitrine. Mal. Mal au cœur. A cause de lui, indéniablement. A cause de lui, mais surtout d’elle, parce qu’elle est parfaitement responsable. Parce qu’elle est complètement responsable de la distance qui s’est installée entre eux. Elle a ce qu’elle mérite. Elle a ce qu’elle mérite parce qu’elle a brisé le cœur d’Ewan. Parce qu’il s’imaginait toute une vie avec elle, suite à ce baiser sur la colline. Lorsque leurs deux cœurs se sont retrouvés liés à jamais. T’as tout brisé, Peyton. T’as tout gâché entre vous. T’as mis fin à ce rapprochement inattendu mais tellement beau, tellement fort, tellement naturel entre vous. Elle a mal au cœur, à cause de lui, mais elle est bien incapable de l’avouer. Bien incapable d’admettre qu’elle est éprise, trop attachée. Incapable d’admettre qu’elle n’a jamais été capable de ressentir cela pour personne, pour aucun homme, avant lui. Et elle remet tout, la cause de son mal, sur sa maladie. Cette foutue maladie qui ne fait que la ronger, toujours un peu plus. Cette foutue maladie, accentuant ses peurs. Elle est le principale obstacle à ton bonheur, Peyton, alors peut-être qu’au fond, si t’as si mal, c’est bien à cause d’elle. Bien à cause de cette foutue insuffisance cardiaque, venue lui tomber dessus un beau jour ensoleillé. Et elle la porte, comme un fardeau. Et elle la porte, en lui mettant tout sur le dos. Elle a mal, à cause de cette maladie. Parce que c’est bien plus facile que d’admettre qu’elle ne parvient pas à ôter de son esprit l’image d’Ewan avec cette… Femme… Selma, Shella, Stella ? Son parfait opposé. Grande, blonde, barbie bimbo en tout points. Son opposé. Ewan est désormais sous le charme d’une femme qui ne lui ressemble en rien. Ewan est passé à autre chose. Complètement. Et toi, Peyton qu’est-ce que tu veux ? Qu’est-ce que t’espérais ? Qu’il reste fou amoureux de toi pour le restant de ses jours, en sachant pertinemment que vous ne serez jamais ensemble ? Elle n’a pas le droit. Pas le droit de l’exiger et tout ce qu’il lui reste à faire est de l’oublier. Définitivement. L’oublier, alors qu’il se trouve là, sur le pas de sa porte. La surprise est là, comme il l’espérait. Ewan ! Tu t’attendais pas à le voir, il n’a pas répondu à ta dernière invitation, il ne donne que très peu de signes de vie et désormais, il a une nouvelle copine. Tu ne t’attendais pas à le voir là, mais au fond, t’as le cœur un peu plus chaud en sa présence. Non, non… Ne t’excuse pas, entre… Un sourire, sincère, mais un brin gênée. Intimidée. Et c’est rare, beaucoup trop pour qu’elle ne le remarque pas. Parce qu’elle est du genre décomplexée, Peyton. Du genre sans prise de tête. Mais face à lui, en cette fin de journée, elle se sent complètement retournée. Démunie. Son regard caresse faiblement le visage de l’homme qui fait battre son cœur, elle est perdue, elle hésite, elle ne sait pas comment se comporter, comment ne pas avoir l’air trop embarrassée. C’est vrai que ça fait longtemps. Je travaille beaucoup en ce moment… Forcément, sans lui. Et toi ? Est-ce que tu vas bien ? C’est tout ce qui compte, à ses yeux. C’est tout ce qui compte, pour elle, le bonheur d’Ewan. Et c’est d’ailleurs pour cette raison parce qu’elle refuse de craquer. Qu’elle refuse de laisser son cœur s’emballer. L’entraînant dans le grand salon, elle se dirige vers le coin cuisine pour en sortir quelques boissons. Installe-toi, tu veux boire quelque chose ? Et tu veux me dire si tu m’aimes toujours, Ewan ? Si nos cœurs battent toujours à l’unisson ? Si ton regard est toujours aussi attiré par le miens ? Tu peux me dire si tu ressens toujours la même chose que moi, Ewan.

(c) calaveras.

Est-ce que ton sourire est aussi faux que le mien ? Est-ce que, toi aussi, tu fais semblant que tout va bien alors que rien ne va ? Est-ce que toi aussi tu fais comme si ta vie n'était pas en train de s'effondrer littéralement, douloureusement, sans que tu puisses rien y changer ? Est-ce que toi aussi tu as des regrets ? Est-ce que toi aussi tu as peur ? Est-ce que tu voudrais revenir en arrière, pour pas avoir à t’infliger cette vision douloureuse de ma main lovée dans celle d'une autre femme que toi ?

- Merci, c'est gentil !

Il entre dès qu'elle s'écarte, fait mine de ne pas avoir remarqué le malaise ambiant qui s'installe dès l'instant où il a franchi le pas de la porte. Lui, il est plutôt bon comédien alors il fait comme si de rien n'était, enfile le masque de l'indifférence comme s'il n'était pas déstabilisé. Déstabilisé à l'idée qu'elle puisse croire qu'il l'a déjà oubliée dans les bras d'une autre, comme si leur histoire ne représentait rien à ses yeux, comme s'il avait complètement exagéré les paroles qu'il a pu prononcer à Newburgh .

- Je ne vais pas te le reprocher, je suis un acharné de travail moi aussi. D'ailleurs, ça se passe toujours bien ?

Le sujet du boulot apparaît comme un refuge idéal, alors qu'il se demande de quoi il pourrait bien parler avec Peyton maintenant que quelque chose s'est brisé entre eux. Est-il censé pouvoir lui parler de tout et de rien ? Faire comme si rien n'avait changé ? Et s'il n'y parvenait pas ? Et s'il était tout simplement incapable de ne pas agir comme un homme blessé ?

- Oui, oui, ça va... Camille est enfin sorti du coma, d'ailleurs. Je suis soulagé.

Le coma de son meilleur ami l’avait profondément bouleversé, si bien que Peyton avait été l'une des premières à en être informée. Néanmoins, après l'épisode de Newburgh, Ewan avez gardé ses distances, avait fait en sorte de mener sa vie comme si la jeune femme n'en avait jamais fait partie. Il l'avait donc tenue à l'écart de cette bonne nouvelle apprise dans le courant du mois de mai, comme il lui avait caché sa relation avec Stella. Si Peyton n'était pas tombée sur eux, par le plus grand des hasards, au coin d'une rue, aurait-il un jour eu le courage de briser la glace pour le lui annoncer ?

- Et toi, à part le boulot, tu vas bien ?

Il lui pose la question alors qu'il sait qu'elle va lui mentir, lui cacher cette vérité qui jetterait juste un nouveau pavé dans la mare, alors qu'ils ont surtout besoin de quiétude pour tout reconstruire.

- Juste un verre d'eau, ça m'ira très bien. Merci.

Il prend place dans l'un des fauteuils comme si c'était la première fois qu'il venait ici, alors qu'auparavant, il se sentait chez Peyton comme chez lui.

- Au fait, je voulais te demander... Est-ce que tout va bien entre nous ?

Il ose poser cette question avant de retenir sa respiration, le corps qui se fige soudainement en attendant la réponse à venir, cette réponse qu'il n'est pas certain de vouloir entendre et qui pourrait pourtant permettre de balayer le malaise et de repartir sur des bases solides... Tant est que ce soit possible. Alors, Peyton, comment tu te sens depuis que tu es convaincue que je t'ai définitivement oubliée et rayée de ma vie ? Est-ce que toi aussi, tu te sens vide depuis qu'on s'est quitté à Newburgh ?

Pando

Le calme règne dans la pièce, dans le vaste appartement, mais le chaos s’est installé dans son cœur à l’instant même où son visage s’est imposé à ses rétines. Ewan et la vision de cette femme, encore, accrochée à son bras. Cette femme qui n’est pas elle, parce qu’elle ne le voulait pas. Comme un coup du destin, comme le retour du bâton, karma parfait qui lui rappelle le mal qu’elle s’est infligée. Au fond, elle est bien moins équilibrée qu’elle n’en a l’air. Bien moins équilibrée que l’image qu’elle renvoie à ceux qui jalousent sa liberté, sa légèreté. L’oiseau volage s’impose désormais bien plus de limites que ce qu’il n’y parait. Comme celle, puissante, fracassante, de ne jamais ouvrir son cœur, de ne jamais s’attarder sur une relation. Ce n’est pourtant pas ce qu’il est, Ewan. Il n’est pas qu’une relation. Qu’une simple relation parmi d’autres. Il n’est pas qu’un homme qu’elle oubliera aussi rapidement qu’une pluie d’été. Parce qu’elle tient à lui, plus que de raison. Parce qu’avant tout, il était son ami. Parce qu’avant tout, elle n’a jamais autant désiré quelqu’un dans sa vie. Parce qu’avant, il n’était pas question de banalités entre eux, de discussions taciturnes entre connaissances désabusées. Il n’y avait que rires, que folies, qu’une vie partagée à cent à l’heure. Il n’y avait qu’eux, dans l’immensité du monde. Très bien. Merci. La boutique tourne mieux que ce que j’espérais. Parfait. Il est parfait, en toutes circonstances. Même en colère, même fâché, même blessé, même désabusé, il est parfait. Il demeure Ewan, prévenant, doux, attentionné. Incapable de rester loin d’elle, comme cela a toujours été le cas, entre eux. Oh, c’est vrai ? C’est génial ! Je suis tellement contente pour toi, pour lui. J’imagine oui, tu dois être soulagé, tout comme Alejandro. Elle ne connait ni Camille, ni Alejandro, mais elle est suffisamment proche du beau brun pour connaître son entourage, au moins de nom. Parce qu’autrefois, sa meilleure amie, c’était toi, Peyton. Parce qu’avant ce baiser, sa meilleure amie, c’était toi. Parce que t’étais sa confidente comme il était le tiens. A une seule exception, celle de la maladie. Un tour dans le coin cuisine et deux verres sortis, qu’elle remplie respectivement d’eau et d’un jus de goyave pour elle, exotisme qui lui colle à la peau. Je vais bien, et toi ? Mensonge, encore et toujours. Parce qu’elle ne veut pas lui avouer ce qu’elle ressent. Parce qu’elle est incapable de s’avouer à elle-même ce qu’elle ressent. Et le fond du problème est là, elle s’est plongée dans le déni le plus total parce qu’affronter la réalité impliquerait de tout lui dévoiler. Pourtant, contre toute attente, il fait un pas vers toi, Peyton. Il cherche à savoir ce qui se passe réellement entre vous. Quelle relation vous entretenez désormais. Oui… Heu… Oui, bien sûr. Je suis contente que tu sois là, comme tu m’avais dit être plutôt occupé en ce moment… En référence à l’échange de messages, engendré par ses soins, dans le seul et unique but de ne pas perdre contact avec lui. De ne pas le perdre lui, simplement. Parce qu’elle n’est pas certaine de pouvoir l’accepter. Pas certaine de pouvoir l’encaisser. Elle refuse de le perdre mais par ses propres choix, elle y sera peut-être obligée.

(c) calaveras.

Une conversation hypocrite, pleine de bons sentiments, qui ne laisse absolument rien présager de la dispute qui a pu les déchirer il y a quelques semaines à peine, alors que Peyton venait tout juste de refouler Ewan, lui qui s’était déjà tellement projeté dans une relation qui n’avait, finalement, rien de très concret, de bien consistant. Il avait fait des plans sur la comète, se voyait déjà filer le parfait amour avec celle qui avait été capable de créer une détonation au sein-même de son myocarde. Mais rien de ce qu’il nourrissait à son égard ne semblait être réciproque. Il lui en avait d’abord voulu, avant de réaliser qu’il n’avait pas le droit d’attendre quoi que ce soit de sa part. Elle était en droit de ne pas l’aimer comme il l’aimait et peu importe à quel point ça pouvait le faire souffrir, sa colère n’avait absolument aucune légitimité.

- C’est vrai ? Mais c’est une super nouvelle ! Vous avez lancé une nouvelle collection ?

La douleur est atroce lorsqu’il faut la maintenir cachée dans un coin de son âme, la garder prisonnière alors qu’elle irradie toujours plus fort, s’attaquant insidieusement à tout un être déjà trop meurtri. Ewan ne peut rien laisser paraître face à Peyton, car il ne veut pas la mettre mal à l’aise, comme ce fut sans doute le cas lors de leur week-end à Newburgh. Alors il arbore le masque de la parfaite indifférence, comme si rien de tout ce qui s’était passé ne l’avait touché de près ou de loin. Mensonge éhonté pour garder la tête haute. Mensonge éhonté pour ne pas avoir à affronter la tragique réalité.

- Alejandro est toujours aussi peu… Démonstratif mais je pense que oui, il doit être fou de joie. En revanche, Camille a des pertes de mémoire assez conséquentes, ça ne doit pas être simple à gérer au quotidien...

Un euphémisme employé pour faire référence aux trente années de vie supprimées en un claquement de doigts, qu’il faudra reconstituer peu à peu, à l’aide de photos et d’anecdotes. Trésor enfoui dans les profondeurs de l’océan mémoriel qui remontera un jour ou l’autre à la surface. Ewan a du mal à se mettre dans la peau de Camille, à s’imaginer ce qu’il pourrait ressentir s’il se réveillait un matin, dans une chambre d’hôpital, avec le sentiment d’avoir à nouveau treize ans. Il ne peut tout simplement plus concevoir d’évoluer dans une dimension au sein de laquelle Peyton n’existerait pas.

- Ca va aussi.

Réponse simple et mensongère qu’il lui fournit alors qu’il se saisit du verre qu’elle lui tend en affichant un petit sourire qui est censé appuyer la véracité de ses propos, mais qui transpire en réalité la mauvaise foi. Et en même temps, comment pourrait-il lui dire que plus rien ne va depuis qu’elle a refusé de faire partie de sa vie ? Depuis qu’il a compris qu’elle ne l’aimait pas et ne l’aimerait sans doute jamais ? Non, Peyton, ça va pas. Y a plus rien qui va depuis ce week-end passé loin de New York, loin de tout. J’ai l’impression que tu m’échappes, que j’ai merdé, que j’ai brisé un vase qui pourra plus jamais être réparé. Je voudrais tout faire pour recoller les morceaux, je voudrais effacer ce soir-là si ça peut te permettre de te sentir à nouveau à l’aise avec moi. Mais c’est impossible. J’ai tout gâché et je vais devoir vivre avec ça pour un long moment.

- Oui, oui, c’est vrai, excuse-moi… Je t’ai vraiment délaissée ces derniers temps mais je dois préparer un ballet. C’est l’effervescence complète depuis quelques semaines… Tout devrait rentrer dans l’ordre d’ici le début du mois de juillet.

Nouveau mensonge pour pas avoir à reconnaître qu’il a pas osé prendre contact avant qu’elle ne le fasse elle-même, parce qu’il avait bien trop honte. Il aurait jamais été capable de soutenir son regard, et encore ce soir, ça lui semble être une épreuve innommable. La préparation d’un ballet n’a jamais, au grand jamais, été un prétexte pour mettre Peyton de côté. Il a toujours su lui trouver une place, même dans un planning surchargé. Car elle a toujours été la plus importante à ses yeux, et jamais il ne l’aurait reléguée au second rang, si quelque chose de plus sombre ne l’y avait pas poussé.

- En fait, je te pose cette question parce que je veux m’assurer qu’il n’y ait pas de… Malaise ? Je… Tu sais, je suis vraiment désolé pour ce qui s’est passé à Newburgh, je… Je ne sais pas ce qui m’est passé par la tête. Je veux que tu saches que je ne t’en veux pour rien. Je n’ai même pas à t’en vouloir, en fait. Tu n’as rien fait de mal. Tu étais parfaitement en droit de refuser… Mes avances et ce, sans te justifier. J’ai vraiment été… Lourd et je tenais à m’en excuser.

Avec le recul, il se voit désormais comme le type insistant, qui a forcé encore et toujours, jusqu’à ce que l’autre cède, jusqu’à obtenir ce qu’il désire. Pourtant, à l’époque, il lui avait semblé avoir décelé une étincelle… Mais sans doute a-t-il rêvé.

Pando

Les mots qui trouvent grâce à ses yeux, peu importe lesquels, parce qu’ils viennent d’Ewan. Parce qu’ils viennent de celui à qui elle tient tant, de celui à qui elle avait peur de devoir dire au revoir, depuis son absence de nouvelles. Quelque chose qui n’est pas commun, dans leur relation, de rester sous silence. D’ordinaire, c’est bien un message chaque jour que t’envoies, Peyton. Même pour dire une bêtise, même pour parler de la plus et du beau temps, tu ne restes jamais sans nouvelles de lui. Ce qui déjà dû alerter ton palpitant, parce qu’il y a bien des années déjà que tu n’entretiens plus ce genre d’amitié. Elle n’est pas du genre à donner des nouvelles, pas du genre à préserver le contact, ceux qui prennent une place dans sa vie sont rares, comme des merveilles, des trésors trouvés et gardés. Ewan en est le premier. Son premier trésor. Le perdre serait comme dire adieu à un fragment de son âme. Le perdre serait comme sacrifiée la seule et unique personne qu’elle est capable de réellement aimer. Un sentiment, si fort, que tu gardes pourtant pour toi, à l’abri pour ne pas le blesser lui. Pour ne pas faire naître cette incompréhension justifiée dans son esprit. Parce qu’il ne comprendrait pas, Peyton, pour quelles raisons tu t’obstines à le maintenir à distance alors que ton esprit ne pense qu’à lui, que ton cœur ne bat que pour lui. On la lance la semaine prochaine. Un sourire, sincère, qui découle de la seule chose qui lui appartient, elle qui vogue depuis toujours refusant de jeter l’ancre. Depuis que t’es malade, tout est différent, Peyton. Ta vie d’avant balayée, remise en cause par ce putain de cœur qui en fonctionne plus. Mais grâce à lui, t’as quand même su trouver ta voix, t’as quand même su trouver Ewan. Ewan qu’elle écoute, avec intérêt, parce que tout ce qui se passe dans sa vie compte pour elle. Réellement. Oh, je suis désolée pour Camille… Si tu as besoin d’en parler… Tu sais où me trouver… Maladroite manière de lui confier qu’elle souhaite être là pour lui, qu’elle ne demande toujours qu’à être là pour lui, comme avant. Comme avant, malgré le changement. Malgré la cassure qui lui fait mal au cœur. Mais il a toujours la même importance, pour toi, Peyton. Peu importe ce qui s’est passé. Peu importe le fait qu’il est désormais au bras d’une autre. Il sera toujours ta priorité, toujours. Une priorité pour qui elle est prête à faire tous les efforts du monde, même les plus difficiles, même ceux avec lesquels elle est le moins à l’aise, comme les discussions sérieuses. Comme ce genre de moment, celui qui chuchote à son oreille qu’il est l’heure de crever l’abcès. Et les paroles d’Ewan te font mal au cœur, Peyton, parce qu’il ne mérite pas ça. Parce qu’il ne mérite pas de se sentir aussi mal, par sa faute. De se sentir rejeté, par sa faute. Ewan, je t’en prie, ne t’excuses pas. C’est ma faute, j’ai été tellement nulle et maladroite… J’avais peur de te blesser et c’est exactement ce que j’ai fini par faire. Une confession qui la rend malheureuse, le regard baissé, parce que c’est tout ce qu’elle cherche à éviter, toujours. Tu es un homme incroyable, parfait, le problème c’est moi et… Non, il n’y a pas de malaise de mon côté… J’avais juste peur que tu ne veuilles plus jamais me revoir. Une peur panique, une peur qui dévore son âme, qui brise l’image de légèreté, de la femme qui ne s’attache jamais. Une peur qu’elle aimerait faire disparaître, définitivement, pour le retrouver comme avant. T’es prête à mettre un mouchoir sur ce que tu ressens, Peyton, tant que t’as toujours l’autorisation d’être près de lui. Parce que t’es plus sûre d’y arriver, maintenant, sans lui à tes côtés.

(c) calaveras.

Tout ce qu’il veut, Ewan, c’est que Peyton soit heureuse. Il s’en voudrait de l’avoir froissée ou brusquée d’une quelconque manière, parce qu’il n’a jamais voulu ça. Il n’aurait jamais pensé s’enticher d’elle de cette façon, il n’aurait jamais cru que son coeur se perdrait dans ses yeux comme on s’égare dans les profondeurs d’une immense forêt. Il n’aurait jamais soupçonné la force de la douleur qu’il ressentirait au moment où elle refuserait ses avances, car il n’avait même pas envisagé qu’elle puisse le repousser. Il était convaincu qu’elle l’aimait, elle aussi. Et constater qu’il s’était trompé sur toute la ligne l’avait littéralement foudroyé sur place. Il avait mis plusieurs semaines à digérer la douleur, à accepter ce que son esprit avait refusé de croire à Newburgh. Aujourd’hui, la souffrance est moins intense. Ou, disons plutôt, qu’il a appris à la refouler et à vivre avec au quotidien, comme on poursuit son existence après avoir perdu un membre, un pan de l’âme ou un engrenage de la mécanique du coeur.

- Je suis tellement content pour toi… Tu me diras comment ça s’est passé ?

Une précision qu’il juge nécessaire car il ignore si Peyton adoptera encore ce réflexe, autrefois spontané, maintenant qu’un fossé semble s’être creusé entre eux, depuis le tremblement de terre créé par l’annonce de ses sentiments, ayant séparé les plaques tectoniques entre elles, d’une façon suffisamment violente pour que le paysage se retrouve définitivement changé, ne soit plus jamais le même.

- Merci, t’es adorable…

Il sait qu’elle est là, parce qu’elle a toujours été là, loyale et fidèle, prête à l’écouter en toutes circonstances. Peyton est peut-être l’être qui le connait le mieux en ce bas monde, la seule qui puisse lire en lui comme dans un livre ouvert, décelant chacun de ses mystères car elle dispose du code nécessaire au déchiffrement de son âme.

- Sincèrement, tu n’as pas à t’excuser. Tu as simplement été honnête, je ne peux pas t’en vouloir pour ça.

Même si ça lui a écorché le coeur d’entendre la vérité, de devoir l’affronter, car il aurait sans doute préféré ne pas avoir à y être confronté, lui qui ouvrait son coeur pour la première fois depuis si longtemps, avec la candeur de croire que ses sentiments seraient forcément réciproques.

- Je ne veux pas t’entendre dire que tu es un problème, d’accord ? Parce que c’est complètement faux, lui dit-il d’une voix assurée en posant doucement sa main sur son poignet, comme pour la convaincre de réfréner toute volonté supplémentaire de se faire passer pour la source de tous leurs maux alors que finalement, il n’y a pas véritablement de responsable à leur mal-être, juste une succession de malentendus maladroits et de défauts d’interprétation.

- Et il est quand même peu probable que je ne veuille plus jamais te revoir un jour… Du moins, pour l’instant, je ne conçois même pas que ça puisse être un jour possible.

Peu importe à quel point il s’est senti blessé, il serait tout simplement incapable de la rayer de sa vie définitivement. Certes, il a pris ses distances avec elle, afin de pouvoir recoller les morceaux de son coeur brisé, mais il aurait forcément fini par refaire surface un jour ou l’autre. Doucement, il écarte sa main de son poignet. Vu que la discussion a pris une meilleure tournure que ce qu’il aurait imaginé, il estime que c’est le moment ou jamais de se jeter à l’eau pour lui parler de Stella. Il lui doit bien ça, après tout.

- Tant qu’on est dans les mea culpa, je voulais te parler d’une dernière chose…

Ou plutôt, de quelqu’un. Une personne que Peyton a déjà croisée furtivement, tombant nez à nez avec la vérité au coin d’une rue, alors qu’elle devait encore être convaincue qu’Ewan avait sombré par sa faute. Qu’avait-elle bien pu penser quand elle l’avait vu au bras de cette blonde à la taille fine et aux grands yeux glacés ? Elle s’était très certainement dit qu’Ewan était le genre d’hommes qui parle de sentiments sans véritablement savoir ce que cela signifie, qu’il a prétendu ressentir quelque chose de fort pour elle alors que quelques semaines plus tard, elle était déjà rayée de son esprit, remplacée par une autre. Pourtant, le danseur n’a jamais eu l’intention d’oublier Peyton en partageant la vie de Stella. Loin de là, même. Peyton l’a toujours hanté d’une manière ou d’une autre, telle la toile de fond occupant quoi qu’il arrive l’arrière-plan d’une scène, incapable de se défaire d’elle car d’une certaine manière, elle est désormais bien trop ancrée en lui.

- Je suis désolé de ne pas t’avoir présenté Stella plus tôt et que tu aies eu à faire sa connaissance dans ces circonstances un peu… Maladroites. Je t’assure que mon but n’était pas de te cacher quoi que ce soit.

Ni de te laisser croire que tu comptes pas vraiment. Parce que tu comptes plus que tout, Peyton. Plus que personne n’a jamais compté. Plus que Stella. Plus que les autres qui lui succèderont dans l’espoir d’atténuer le souvenir de tes lèvres contre les miennes, souvenir qui ne s’arrachera jamais de ma mémoire, et avec lequel je devrai vivre pour l’éternité, faisant le deuil d’un baiser qui ne se reproduira plus jamais.

Pando

Un signe de tête, un oui à peine mimé, une promesse silencieuse de continuer à lui raconter ce qui se passe dans sa vie, ce qui arrive dans son quotidien. Comme avant, comme les deux amis qu’ils sont. Peut-être un peu plus. Peut-être un peu plus, mais en secret. Secret qu’elle tait, qu’elle garde en elle, parce que c’est bien plus facile de prétendre que d’avouer que son cœur bat la chamade pour lui. Que son cœur presque mort ne cherche qu’à trouver le sien. Tu devrais peut-être, Peyton. Tu devrais peut-être te jeter dans cet amour, dans cette sécurité qu’il aimerait pouvoir te donner. Mais tu t’y refuses, pour lui. Pour lui offrir une chance d’être heureux. Tu t’y refuses, pour toi, parce que tu n’as jamais aimé, parce que tu te refuses qu’il soit le premier en sachant pertinemment que tu ne feras qu’échouer.
La sensation ultime d’être en roues libres, bien plus encore qu’à son habitude. Parce qu’elle mesure le risque, pour la première fois. Parce qu’elle prend conscience de ce qu’elle pourrait détruire, pour la première fois. Quand, autrefois, elle ne se contentait que de vivre sans penser aux conséquences. Contrecoup de la maladie qui la pousse à devenir plus responsable, à prendre la mesure des choses, alors même qu’elle s’y refuse. alors même que tu t’y refuses, lorsqu’il s’agit de toi, Peyton. Mais pas pour lui. Pas lorsqu’il est question de le protéger, de préserver sa vie.
Et cela fait mal. Mal de chien, de le voir réagir exactement comme il le faut. Toujours parfait, toujours compréhensif, toujours doux, envers elle. Les cris de Newburgh sont vites oubliés, en sentant la main d’Ewan caresser son poignet avec toute la tendresse qu’elle lui connait. tu es beaucoup trop gentil, tu sais. Mais je suis rassurée d’entendre que tu ne m’en veux pas. tellement qu’elle ne saurait l’exprimer, tellement que c’est peut-être un peu trop suspect pour l’expliquer. Elle tente, plus que tout, de garder le cap. De maintenir sa position, ferme mais pas inébranlable. Au fond, elle craque. Elle craque déjà. je ne voulais surtout pas te perdre. pas lui, pas cette complicité, pas cette relation, pas cette effluve de sentiments.
Mais peut-être que fatalement, elle y est destinée. Destinée parce qu’il n’attendra pas toute sa vie, parce qu’il la refera, sans elle. Avec une autre. Une autre déjà présente, une autre qui fait désormais battre son cœur comme il fait battre le sien. t’en es persuadée, Peyton, persuadée qu’il retrouve l’amour avec cette fille, cette stella. Persuadée que tôt ou tard, il finira par définitivement t’oublier. stella. Le sujet abordé comme un coup fatal. Elle se crispe mais tente de ne rien laisser paraître. Ce sentiment qu’elle ne comprend pas, qu’elle ne contrôle pas. Un brin de jalousie qu’elle n’a jamais ressenti, de toute sa vie. arrête, tu n’as pas à être désolée. C’était ton droit, ton choix, de me la présenter ou non. Tu n’as pas de comptes à me rendre. faible sourire qui se veut rassurant alors que la réalité est toute autre. puis avec ce qui s’est passé, enfin… je comprends que tu aies préféré y aller à ton rythme. même si tu refuses de l’imaginer avec elle, préférant te voiler la face. Prétendant que seul son bonheur compte alors qu’au fond de toi, tu sens bien que ce n’est pas à ses côtés à elle, qu’il devrait être. Pas à ses côtés à elle, qu’est sa place.

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Il voudrait lui dire que ce n’est pas la gentillesse qui le fait agir ainsi. Il voudrait lui hurler que c’est tout l’amour qu’il ressent pour elle et qui déborde de son coeur qui le rend aussi conciliant envers elle. Il a tellement eu peur de la perdre, de la voir s’évaporer dans la nature à jamais, qu’il ferait tout pour qu’elle reste, pour qu’elle ne s’en aille plus jamais, peu importe si ça lui fait un mal de chien de se contenter des miettes qu’elle aurait à lui offrir. Mais comment pourrait-il seulement encore attendre quelque chose d’elle, alors qu’il est avec Stella maintenant ? C’est à elle qu’il devrait entièrement se consacrer, c’est elle qui devrait occuper toutes ses pensées, ses songes, ses perspectives d’avenir. Et pourtant, le goût des lèvres de Peyton vient encore parasiter tout son être, le rendant pratiquement hermétique à toute autre intrusion extérieure. Comment peut-il encore regarder Stella dans les yeux en sachant cela ? En sachant, tout au fond de lui, que sur le plan sentimental, il ne lui sera jamais entièrement fidèle ? Peut-être devrait-il la quitter ? Peut-être devrait-il la libérer plutôt que de lui mentir ? Et de se mentir à lui-même ?

- Moi non plus. Surtout pour si peu. Tu as une place très importante dans ma vie.

Minimiser l’ampleur de la blessure ressentie pour mettre en avant la taille considérable de toute l’affection qu’il ressent pour elle. Refouler pour mieux se préparer à la suite, sans doute encore plus redoutable, plus douloureuse, plus insupportable. Persévérer dans cette course infinie vers ce mur qui se dresse droit devant lui, meurtrier, se rapprochant toujours plus, toujours plus vite, sans que lui ni Peyton n’envisage la possibilité d’écraser la pédale du frein.

- C’est pas une question de compte à te rendre. C’est juste que… C’était important pour moi de te présenter la personne avec qui je partage ma vie. J’aurais juste aimé faire les choses correctement.

Et il est convaincu que ça lui fait absolument rien, Peyton, de le savoir dans les bras d’une autre. Si elle semblait vaguement déstabilisée le soir de sa rencontre fortuite avec Stella, c’est sans doute simplement parce qu’elle ne pouvait qu’être étonnée d’avoir entendu Ewan prétendre avoir des sentiments pour elle quelques semaines auparavant, pour, finalement, s’enticher d’une autre aussi rapidement. Elle avait été prise au dépourvu, avait été surprise, mais n’avait probablement jamais souffert de le savoir énamouré d’une autre femme qu’elle.

- Merci de te montrer aussi compréhensive… J’apprécie.

Peyton, elle comprend toujours tout. Même quand il se comporte comme un goujat, elle essaye de se mettre à sa place, de lui trouver des excuses pour expliquer pourquoi il l’a balayée aussi rapidement de son esprit - du moins, en apparence. Mais en même temps, c’est elle qui n’a pas voulu de lui, de tout ce qu’il aurait pu lui offrir. Alors si elle ne ressent rien d’autre que de l’amitié pour lui, pourquoi lui en voudrait-elle ? Tout le monde commet des erreurs. Tout le monde commet des maladresses. Pourquoi ruiner une amitié pour un léger malaise ?

- Si tu es d’accord, et quand tu auras un peu de temps évidemment, je me dis que ça pourrait être sympa d’organiser un repas à trois avec Stella… Ce serait l’occasion de tout reprendre sur de bonnes bases.

Ewan, il est loin de s’imaginer le sacrifice qu’il lui demande. Lui, il est juste convaincu que ce repas, ce sera un simple moment de partage pour Peyton. C’est à croire qu’il aurait presque oublié les bribes d’aveux qu’elle a pu lui faire alors qu’ils étaient à Newburgh. Il a préféré tout oublier pour s’éviter de revivre la douleur ressentie ce jour-là. Pour éviter de s’infliger l’idée que leur histoire aurait pu être possible si Peyton n’avait pas eu si peur. Peur de tout briser. De tout voir voler en éclats.

- Tu n’as qu’à y réfléchir de ton côté et tu me tiens au courant ? Je ne vais pas trop tarder, histoire de pas te déranger plus longtemps… Déjà que c’était pas prévu que je passe ce soir. On s’appelle, d’accord ?

Déjà, il se lève, comme s’il ne voulait pas lui laisser d’autres choix que d’accepter son ultimatum, cette décision douloureuse qu’il lui impose sans même le savoir. Il ravale toute la peine qu’il peut avoir à l’idée que tout soit terminé entre eux, pour de bon, et la rapproche furtivement de lui pour déposer un baiser fugace sur son front, avant de se tourner vers la porte, sans que cette envie de pleurer ne l’ait quitté.

La scène est presque surréaliste. Ils sont là, tous les deux, dans son appartement en pleine discussion sur la nouvelle petite-amie d’ewan. Sur cette fille dont elle ignore tout, qui, sans le savoir, a pris sa place le plus rapidement qui soit. Elle n’est pas le genre de fille qui se vexe, peyton. De celles qui se comparent sans cesse, qui cherchent à tout prix à se mettre en avant. Et puis elle est responsable, responsable de la situation, alors elle ne lui fera pas l’affront de mal le prendre. Elle ne lui fera pas l’affront de jouer la femme blessée, quand, elle est celle qui blesse le premier. peut-être qu’il ne te doit rien, peut-être pas, mais tu tiens à lui plus que tout. Son bonheur compte plus que tout. S’il est heureux avec elle, tu ne peux que l’être en retour, peu importe que ça te brise le cœur. des sentiments nouveaux, qu’elle découvre, qu’elle n’imaginait pas connaître. L’oiseau volage qui prend l’amour pour un mythe, pour une légende urbaine sans intérêt, trop connue pour être vraie. tu le sens pourtant, que ce n’est pas totalement anodin, entre vous. Que l’alchimie est trop belle, trop grande, pour être inventée. Il est ton âme-sœur, ewan. La plus belle perle de ton cœur. et elle est prête à tout, pour lui. Tout sauf à lui ouvrir son cœur. Alors elle accepte. Tout simplement. Elle acceptera tout ce qu’il proposera. et toi aussi tu es important pour moi. Tellement. Alors je serai contente de pouvoir passer et rencontrer stella. la rencontrer, pas vraiment. Mais la créatrice sait qu’il le faut, qu’elle doit faire en sorte que tout se passe bien. Pour ewan. Uniquement pour ewan. tu n’as pas à me remercier, appelle-moi dès que tu le peux. un sourire, et le cœur qui se serre, en sentant son baiser. Ce baiser qui signifie tant. Qui évoque l’amour qu’ils se portent, encore. qu’ils se porteront, toujours.

(c) calaveras.