la peur des mots, la peur des maux, shun.

première vraie mission. xinyi est terrifié. pourtant shun lui a bien expliqué qu'ils ne craignent pas grand chose. juste du repérage. basique. personne n'en est mort. « encore heureux » songe xinyi. il n'a aucune envie d'y laisser sa peau. et c'est bien ça qui le terrifie. et s'il se passait quelque chose ? et s'il y avait une embuscade, et si...? mettre dans la tête de shun qu'il n'est pas prêt est impossible. d'après lui, xinyi est parfaitement capable de le suivre dans cette mission. il n'aura pas à sortir d'arme, juste à observer, grapiller des informations. les mots de shun ne l'ont pas rassuré pourtant il est bien là, sur les lieux de leur fichue mission. les quartiers sont laids, les bâtiments un peu trop délabrés à son goût et des ruelles s'échappent un mélange d'urine et de carburant. ça ne l'aide en rien à se détendre. puis au fond, que doit-il chercher ? lui, il n'a pas l'oeil. il n'est pas fait pour ça. alors tout ce qu'il se contente de faire c'est de tourner la tête un peu partout, sans aucune discretion. peut-être que shun trouvera ce qu'ils cherchent rapidement et tous deux pourront rentrer illico presto.

« bon, tu vois quelque chose ? » marmonne-t-il les dents serrées. agacé et apeuré, xinyi veut juste retourner au quartier général. finalement, les entrainements sur le ring sont bien plus intéressants et moins dangereux. « c'est quand qu'on rentre ? » gamin capricieux. c'est pas son univers ça. merde. ses mains sont faites pour tenir un livre pas pour fouiller dans les merdes des autres et encore moins agripper une arme. bon, il n'en est pas encore là. doué comme il est xinyi s'imagine déjà manipuler le pistolet à l'envers et se tirer une balle dans le pied. il préfère laisser ça à shun. on n'est jamais trop prudent. quoi que s'il se blesse peut-être échappera-t-il a tout ce merdier ?

à l'instant, il a l'impression d'être un petit canard suivant sa maman de près. jamais il n'a été si heureux d'avoir shun à ses côtés. son ennemi de la veille est aujourd'hui la personne qu'il veut garder dans son champ de vision à tout prix. s'il pouvait lui donner la main, il le ferait sans hésiter. pas sûr que son ainé en soit enchanté. « dépêche toi. j'ai froid. j'vois rien. et y'a des bruits bizarres. » ça ne le rassure pas, ces fichus bruits. et si quelqu'un arrivait ? « y'a quelqu'un j'suis sûr. » xinyi n'est sûr de rien mais il a peur. les bruits de la villes le terrifient. chaque coup de klaxon lointain le fait sursauter. et peut-être que ces bruissements sont dûs aux pigeons. sales bêtes. « écoute, y a des pas ! j'suis sûr que... » se retournant vivement et butant contre shun, xinyi ouvre grand les yeux. un homme se trouve là, non loin. il les fixe et le plus jeune n'arrive pas à savoir si c'est mauvais ou non. après tout, il ne pourrait être qu'un passant ? mais l'arme qu'il voit à sa ceinture le ramène bien vite à la réalité. ils sont en plein sur un territoire ennemi. ce passant est sûrement un membre du gang adverse. et bordel, qui viendrait se promener dans un endroit aussi infect ?
quelqu'un d'expérimenté aurait sorti son arme, menacé, peut-être même détalé pour se protéger. xinyi, lui trouve juste refuge dans le dos de shun, cramponné à sa taille, le visage contre ses omoplates. impossible de réfléchir. il veut pleurer. «fais quelque chose, je t'en prie ! » sa voix n'est qu'un murmure désespéré. tout son corps tremble alors que le temps semble s'être arrêté. tout tourne au ralenti pour xinyi. « shun... » énième plainte alors que ses doigts se crispent sur la veste de son bouclier humain. il veut juste disparaitre et retourner dans la chaleur de son lit.

(c) calaveras.

mission minime, du moins c'est ce que shun en comprend lorsque monsieur li et d'autres membres du gang exposent l'idée. il acquiesce simplement de la tête, son opinion n'étant pas nécessaire pour ces choses là. il pouvait largement se contenter de suivre le mouvement. cohabitation avec xinyi depuis quelques temps. l'animosité ne s'est pas dissipée mais il y a une certaine familiarité qui s'est créée. les piques sont toujours lancées et interceptées, joute verbale qui ne s'arrête jamais. celle physique n'a lieu que sur le ring, même si shun a souvent hésité à dépasser les limites. xinyi a l'art d'appuyer là où ça fait mal et de l'énerver comme jamais personne ne l'a fait. peut-être était-ce un talent au final.

il s'est pris à lui expliquer en détail ce qu'ils devaient faire. en résumé, observer, observer et observer. pas de gens à tuer, ni à tabasser. une sortie simple et sans risque. évidemment, il y a toujours un risque mais la probabilité qu'on les attaque était faible. le gang adverse avait sûrement d'autres choses à faire que de surveiller les ruelles. ils prennent la voiture et quittent leur zone. shun choisit toutefois de la garer dans un coin plus isolé, pour ne pas attirer l'attention trop facilement. le mot d'ordre était discrétion. personne ne devait savoir qu'ils venaient dans le quartier pour jeter un oeil à cette ruelle précise, en quête d'informations. béton qui domine, du gris sans âme. des habitations un peu délabrées, loin du confort de l'appartement de xinyi. odeurs nauséabondes, la ville qui révèle son véritable visage. sale gamine mais shun est habitué à cette misère. elle ne le choque plus, malheureusement.

ils marchent dans les rues avant que shun ne les emmène finalement à destination. xinyi semble totalement hors de son élément. shun l'observe avec agacement avant de finalement se concentrer sur la mission. « tais-toi, je peux pas me concentrer. » réplique t-il, le ton plus gentil que les mots. il sent la peur et ne la comprend pas. il n'y avait rien d'effrayant, à l'heure actuelle. xinyi continue de l'asséner de questions et shun décide de l'ignorer. il se prend toutefois à lui répondre. « quand on aura trouvé un truc. » repartir les mains vides ? hors de question. il observe les écritures sur les murs, une brique qui semble avoir été déplacée. shun s'y intéresse de plus près alors que son 'partenaire' continue de ne rien faire. à part se plaindre, xinyi ne faisait pas grand chose. il mentionne même la présence de quelqu'un et si shun avait entendu des bruits, la ville bourdonnait à chaque seconde. « c'est rien. » dit-il, cherchant à attraper ce qui était entre les briques. et peut-être qu'il aurait dû croire le garçon. lui aussi entend les pas. temps de réaction, xinyi qui panique et il le sent. shun regarde enfin au loin et aperçoit une silhouette. merde. lui aussi, il voit le gun et il pense au sien. xinyi se cache derrière lui alors que l'individu approche à grands pas. shun sait.

il entend les plaintes, la peur il la sent. le murmure, il fait écho dans sa tête. xinyi se crispe contre lui et shun décide de le prendre par le bras. « faut pas rester là. » ses yeux lui disent de courir, de ne pas s'arrêter. alors shun il prend les devants, il lance la course. il tient xinyi par le bras, serre assez fort pour l'entraîner avec lui. ils passent d'une ruelle à l'autre et l'inconnu aussi. il ne s'arrête pas, tire même un coup. heureusement la balle ricoche et ne les troue pas. shun réplique sans succès, un coup avant de continuer. il n'y a que l'adrénaline qui domine. mille pensées dans sa tête. la voiture est encore trop loin, il faut courir ou se cacher. labyrinthe énorme, shun qui décide qu'ils doivent se fondre dans le décor. grillage facile à escalader car des murets aident à la montée. passage évident mais shun s'y risque. « dépêche putain. » dit-il alors qu'il tire xinyi de l'autre côté. il le rattrape comme pour limiter les dégâts. respiration manquante, plus pour xinyi que lui mais il n'est pas non plus dans une forme extrême. ils ne pourront pas courir pendant des heures, impossible. shun l'entraîne dans une seconde rue où il voit des bennes à ordures, camions et autre. derniers pas de course avant de pousser xinyi contre une pote condamnée et d'attraper des planches abandonnées (heureusement) pour les placer devant eux. « respire, je sais pas si on va rester ici longtemps. » il essaie de reprendre son souffle et réalise finalement à quel point ils sont proches; et que tout cela pourrait les mener à leur fin.

(c) calaveras.

la relation entre shun et xinyi n'est plus définie. les tous premiers jours, le plus jeune les qualifiait d'ennemis. shun n'était pour lui que la représentation de sa nouvelle vie qu'il détestait tant. pourtant, son ainé n'est en rien responsable de tout ça. certes, il l'entraine, le maltraite, lui donne quelques petits coups, lance des pics... mais il n'a pas choisi de le mettre dans cette situation, il n'est qu'un des nombreux pantins de son père. seul le chef Li est responsable mais xinyi est trop lâche pour s'en prendre à lui. aucun contact avec son paternel depuis l'annonce. il le fuit comme la peste. parfois, il s'imagine agir autrement et aller hurler sur son père qu'il ne lui obéirait plus. son rêve dure deux secondes avant de sentir un frisson parcourir son échine et réduire ses espoirs à néant. il est incapable de lui tenir tête.

alors il subit la présence de shun. il répond aux pics, renvoie les coups, en esquive d'autres. s'améliore-t-il ? il n'en a pas l'impression. pourtant il continue de s'acharner. pourquoi ? il donne raison à son père et sa foutue organisation. est-ce la solution ? au fond, il ne réfléchit plus. il suit shun machinalement. rares sont les moments où ils ne sont pas ensemble et xinyi vient à trouver la situation presque étrange, dérangeante. cette présence, si désagréable soit-elle, est si rassurante à ses yeux mais ça, jamais xinyi ne l'avouera. y penser le gêne mais il ne peut oublier ce petit malaise qui s'installe en lui quand il croise le regard de shun ou quand celui-ci s'en va pour une mission qui semble durer une éternité.

aujourd'hui, tout est différent. la mission, ils la font ensemble. la première de xinyi. rien d'extraordinaire pour shun mais son cadet est malgré tout terrifié. ses pas se calquent sur ceux de shun et même s'il râle presque toutes les deux secondes, il ne s'éloigne jamais de celui qu'il voit comme une protection ambulante. xinyi a beau se dire que sa peur est irrationnelle et qu'ils ne craignent rien, le moindre bruit fait voler en éclat le peu de confiance qu'il a. ça le tue de voir shun aussi serein. ils sont sur un terrain ennemi après tout ! rien n'est sûr. « c'est rien. » xinyi n'en est pas convaincu alors ses yeux scrutent, épient le moindre mouvement. shun est trop absorbé par un mur pour l'aider dans son inspection d'arrivée d'ennemi.

finalement, n'aurait-il pas dû l'écouter ? l'homme armé qui les fixe n'a pas l'air d'apprécier leur présence. pétrifié, le cerveau de xinyi ne fonctionne plus. seul son corps répond au stimulus de shun lorsqu'il lui attrape le bras. courir. courir sans s'arrêter. xinyi n'a pas la condition mais il ne réfléchit plus. ses jambes suivent le rythme imosé par celles de shun. sa gorge brûle et il se demande même si l'humidité sur ses joues qu'il pensait être de la sueur n'est pas due aux larmes qui s'échappent de ses yeux. peu importe. xinyi continue de courir et ne peut empêcher une plainte lorsque des coups de feu sont échangés. étaient-ils si près de quelque chose d'important pour que ce mec décide de les poursuivre pour les achever ? cette mission anodine ne le parait plus autant.
il n'y a que dans les films que xinyi est temoin de ce genre de scène, il n'est pas censé les vivre mais aujourd'hui il se retrouve à escalader un grillage pour sauver sa vie. il ne sait pas d'où cette énergie lui vient. peur, adrénaline, présence de shun. tout l'entraine et le pousse à courir encore plus vite. s'il s'arrête, il s'effondre xinyi le sait.

et c'est caché, collé à un mur, protégé par shun qu'il finit par lâcher prise. un sanglot s'échappe d'entre ses lèvres. puis un autre.
il n'a pas honte. son corps panique, son coeur s'emballe. sans réfléchir, il agrippe de nouveau shun. une main dans la sienne, l'autre dans le tissu de sa veste et son visage de niche contre la nuque de cet ennemi si rassurant. il vient sûrement de lui sauver la vie. alors il se blottit contre lui ne pensant même pas à la crainte d'être repoussé. il a besoin de contact, besoin de sa chaleur humaine. « respire, je sais pas si on va rester ici longtemps. » cette chose inconsciente qu'est la respiration lui semble si difficile à présent. il panique. totalement. alors il force shun à se retourner dans leur abris de fortune et se colle complètement à lui, visage dans son cou, main agrippée à la sienne. il tremble de plus belle lorsque les pas de leur assaillant se font plus proches. il cherche. il fait des allés-retour. s'éloigne un peu. est-il parti ? xinyi n'en sait rien. ses oreilles bourdonnent alors qu'il tente de caler sa respiration sur celle de shun. « j'veux pas.. mourir ici » sa voix n'est qu'un tout petit murmure. peut-être shun ne l'aura-t-il même pas entendu. mais xinyi se calme, doucement. sûrement. grâce à lui. bien sûr, il pleure toujours. ses yeux le brulent. sa gorge est serrée et ses mains tremblent mais la présence de shun a l'effet d'une éponge. xinyi a l'impression que sa peur est absorbée. doucement. sûrement. alors il relève lentement la tete, son visage à quelques centimètres de celui de shun.
il n'a pas honte. pas encore. son esprit est encore brouillé mais il ne lâche pas cette main si rassurante et ces yeux habituellement trop noirs lui paraissent aujourd'hui les plus doux du monde. « pardon... » pourtant xinyi ne se décolle pas plus, ne sépare pas leurs doigts liés. il n'est pas désolé de cette proximité, juste d'avoir craqué comme un enfant.

(c) calaveras.

s'enfuir. s'enfuir pour vivre. il l'avait fait mille fois mais jamais avec autant d'appréhension. d'habitude, c'était juste lui. lui pourchassé par une bande, lui jouant avec le feu en s'en brûlant les doigts. mais aujourd'hui, l'équation était différente. il y avait xinyi. xinyi qu'il devait protéger comme jamais parce qu'il ne se pardonnerait pas d'erreur, monsieur li non plus. shun, il ne voulait pas perdre le peu qu'il avait. ce serait trop cruel d'être privé une nouvelle fois de famille, ou simplement de ce qui y ressemblait. alors lorsqu'il constate que l'individu est bel et bien là et que ce n'est pas le fruit de l'imagination de xinyi, il court. il l'entraîne avec lui, ne sachant pas si le garçon serait capable de bouger autrement. même pas le temps de se sentir stupide pour lui avoir dit que ce n'était rien. le battant qui s'excite sous l'adrénaline parce que la peur n'a pas lieu d'être. il doit les sortir de là, il ne peut pas compter sur xinyi.

ils courent, dans les ruelles dégueulasses; de l'une à l'autre, enjambant tous les obstacles présents. coup de feu auquel shun répond d'un geste sec et manqué. évidemment. sa balle n'a pas touché l'assaillant, elle n'a fait que retarder sa course. minime victoire, ils étaient loin d'être sortis d'affaire. il sent xinyi qui peine mais il le tire encore, ne se focalise pas sur sa plainte; seulement sur ce qui leur fait face. c'est finalement des ordures que vient la lumière. à bout de souffle, ils sont. shun le sait. le rythme est impossible à tenir. il faut respirer, il faut réfléchir. l'autre ne pourrait pas courir après eux pendant une éternité. du moins, il l'espérait. abris de fortune, le seul qu'ils puissent se permettre. ils sont trop loin de la voiture pour s'enfuir rapidement. l'homme est toujours après eux. shun sait qu'il n'abandonnera pas. que l'alerte sera peut-être même lancée. il prie toutefois pour que la fierté du criminel soit plus grande.  

il est plus proche de xinyi qu'il ne l'a jamais été. il ne sait pas pourquoi ce sentiment étrange s'éprend de lui. il se laisse pourtant surprendre lorsque le garçon s'accroche à lui. une main venant même prendre la sienne tandis que l'autre se colle à sa veste. raclement de gorge presque automatique. shun qui le laisse se blottir contre lui, sans réellement réussir à le repousser. il lui dit de respirer, parce qu'il n'y a que maintenant que xinyi en a le temps. le combat est loin d'être terminé. shun reprend lui aussi son souffle, le coeur mis à rude épreuve. cela faisait longtemps. nouvel assaut lorsque xinyi le force à lui faire face, malgré l'étroitesse de leur cachette. shun obtempère presque sans avoir son mot à dire. l'intention est ferme, le corps de xinyi se colle au sien.

une partie de lui voudrait le repousser, à cause de l'inconfort de son esprit. de l'attaque qu'il y perçoit parce qu'il y a des choses qu'il sait sans assumer. que xinyi vient abaisser les barrières si hautes qu'il avait mises. pourtant, il n'en fait rien. il sent le visage du garçon contre son cou, la chaleur enivrante de leurs corps qui se complètent. shun entend les pas de celui qui les coursait mais ne bouge pas. déjà vu pour lui. il sent xinyi qui semble mieux respirer, un murmure inaudible qui s'échoue contre lui. et l'humidité naît sur sa peau. des larmes. et pour une fois, il ne le chambre pas. mains tremblantes contre lui, shun qui serre celle que xinyi a prise en otage. il lui intime le silence, peut-être aussi un peu de courage. intensité de leur silence, de leurs yeux noirs qui finissent par se croiser.

pour une fois, les siens ne transpirent pas la haine, ni le mépris. nouveau regard posé sur l'être fragile, qui lui fait ressentir pour la première fois l'envie de protéger quelqu'un d'autre. centimètres minuscules entre eux, toujours rien. xinyi ne lâche pas sa main. il s'excuse sans pour autant s'éloigner. les pas ennemis semblent avoir disparus mais shun craint que cela ne soit qu'une ruse pour les faire sortir de leur cachette. « on va attendre ici encore un peu. » que la nuit tombe. que les ombres deviennent traîtres, qu'ils aient une chance de s'en sortir vivant. à travers les rayons du soleil, shun devine que cela ne devrait pas tarder. murmure que seules les oreilles de xinyi peuvent percevoir; soutenir son regard qui devient trop compliqué, shun qui ferme les yeux. il le laisse proche de lui, autant que xinyi le souhaite. les tremblements semblent moins forts qu'au début. « tout va bien. » soufflé au creux de son oreille. shun qui n'a jamais été des plus doués pour convaincre les autres.

peut-être que les minutes ont défilé plus vite à cause de la tension et du danger. shun ne voit plus aucun rayon de soleil, la nuit est tombée sur la ville. il n'entend pas de pas, tout semble désert selon son ouïe. peut-être que le gang ennemi a choisi de surveiller la ruelle qu'ils inspectaient, à la recherche de traces invisibles. shun priait pour que ce soit le cas.

« t'es prêt ? »

(c) calaveras.

proximité nouvelle. leurs corps se sont souvent rencontrés mais jamais de cette façon. jamais prolongée. pas si intime.
xinyi, en temps normal, n'aurait jamais osé. se coller contre shun ? le serrer ? ça n'aurait jamais dû arriver. n'est-ce pas ?
si xinyi ne pensait pas initier le contact, shun de son côté aurait dû le repousser. c'était son caractère. dur. bourru. violent. n'est ce pas ?
pourtant, il ne bronche pas. shun laisse les bras de xinyi entourer son corps et l'approcher encore plus. pas de mouvement de recul. le visage du cadet ne quitte pas le cocon de chaleur et de paix qu'il vient de trouver au creux du cou de cet homme qu'il ne comprend plus, qu'il n'a jamais compris finalement.
en temps normal, shun se serait jeté sur l'occasion de le malmener. se moquer de sa peur, ses larmes. l'insulter, le descendre. il n'en est rien. alors xinyi profite. il serre. il pleure. les conséquences viendront plus tard. là, il craint pour sa vie. leurs vies.

entendre que leur attente est prolongée rassure xinyi. il n'est pas encore prêt à quitter cette bulle rassurante, ces bras tendres et forts à la fois. « tout va bien. » cette voix, ces mots. xinyi veut les entendre encore. cette facette de la personnalité de shun, il voudrait la voir, la découvrir. y aurait-il au fond de lui une minuscule petite part de tendresse ? les pensées de xinyi fusent. s'évadent. et si ? toujours des questions. beaucoup trop de questions sans réponses. il ne les posera pas maintenant. le silence est leur ami.

« t'es prêt ? » prêt ? non. xinyi voudrait rester là pour toujours. cette cachette de fortune lui plait bien et le rassure. la quitter voudrait dire se mettre en danger. quitter l'étreinte de shun va faire remonter ses peurs, sa panique. et s'il les retardait ? s'il ne parvenait pas à atteindre la voiture ? il ne sait plus où il sont et il espère que shun s'est repéré. incapable de se diriger xinyi finirait peut-être même par retourner se jeter dans la gueule du loup. « non... j'suis pas prêt... m..mais on ne peut pas rester là indéfiniment. hein ? » murmure à peine perceptible. rien dans la rue ne laisse penser à une autre présence qu'eux. il serait en effet tentant de sortir. « je... te fais confiance.» à cet instant, xinyi aurait confié sa vie à shun. son regard ancré dans celui de son ainé, il finit par rompre l'étreinte tout en gardant la main de shun dans la sienne. il ne veut pas la lâcher. jamais.
alors doucement, il laisse shun les découvrir. guetter, épier. rien. pas un bruit. seraient-ils hors de danger ? xinyi aurait envie de sortir d'un coup et partir en courant mais shun est plus prudent. docilement, il suit le mouvement que son protecteur initie. ils se découvrent, marchent un peu, puis pressent le pas. pourquoi ? xinyi cherche et c'est en entendant un coup de feu qu'il comprend. ils ont été repérés à nouveau, shun l'a remarqué lui aussi et sa course a fait manquer au tireur sa cible. du moins c'est ce que xinyi pense. auraient-ils dû rester cachés encore ? impossible à savoir.
ils courent à nouveau. xinyi reconnait la rue. la voiture est là. au bout. ses oreilles bourdonnent. impossible de savoir si des pas les suivent, il se contente de courir. la main de shun l'entraine. sa respiration est erratique, son coeur chamboulé, mais il continue. l'adrénaline a un pouvoir si fort qu'il ne réalise qu'une fois dans l'habitacle qu'il est dans un état pitoyable. ses cheveux collent à son front à cause de la sueur, sa veste ne tient plus que sur une de ses épaules tremblantes et ses pieds lui font un mal de chien.

le calme nouveau est bien vite brisé par un cri. le sien. une des vitres arrières vient d'exploser. une balle est parvenue à la faire voler en éclat.
ils roulent. shun les éloigne le plus possible de cet endroit de malheur. xinyi a l'impression d'étouffer malgré les grands courants d'air provoqués par la fenêtre brisée. ils auraient pu mourir.
pour une mission banale.
pour rien.
son coeur a mal. il ne veut pas mourir. ne veut pas que shun y passe non plus. sa présence lui est devenue trop importante. sans lui, xinyi serait aujourd'hui six pieds sous terre.
au lieu de ça, il se retrouve sur le parking d'un mcdonald's. l'enseigne jaune l'éblouit et le ramène à la réalité.  « tu.. déconnes ? » chuchote-t-il comme si quelqu'un d'autre qu'eux pouvait les entendre. ils sont seuls. aucune voiture n'est parvenue à les suivre. leurs assaillants étaient à pied ou trop loin de leur véhicule, et ça leur à sûrement sauvé la vie. « tu... veux vraiment...? » décontenancé, xinyi essuie son visage de sa manche. mélange de larmes et sueur, preuve de sa peur irrépressible. ses yeux se plongent finalement dans ceux de shun et sans le vouloir, il s'y noie. ces yeux là le rassurent tellement. si shun veut s'arrêter au mcdonald's alors ils iront.

(c) calaveras.

il ne le repousse pas. situation particulière, imprévue aussi. shun n'a pas l'habitude de s'intéresser aux autres, ni même de ressentir une réelle empathie lorsqu'ils pleurent ou se plaignent. pourtant, les perles salées de xinyi l'atteignent. la proximité jouant sûrement un rôle dans ce fait mais il ne voulait pas y penser. habitué à le malmener, à être l'ennemi; il se fait étrangement bienveillant derrière ces morceaux de bois. instinct de protection enclenché par le garçon fragile. malheureusement, ils ne pouvaient pas rester ici indéfiniment. l'étau de ses bras n'était qu'un remède temporaire dont ils ne pouvaient pas abuser. les agresseurs finiraient bien par les retrouver en inspectant la ruelle minutieusement. le risque était trop grand. question posée, shun sachant pertinemment que maintenant que le soleil était couché, il fallait disparaître avec la nuit. ou mourir en essayant.

shun acquiesce à l'interrogation du garçon. parce qu'ils ne peuvent pas. ce n'est pas une question de volonté. et il se laisse surprendre par le second murmure. je te fais confiance. le coeur qui s'arrête, trop de poids sur ses épaules mais pas d'autre choix que de le supporter. il ne savait pas s'il voulait être quelqu'un à qui on fait confiance. trop de responsabilités dans cette phrase, elle ne fait que le rapprocher un peu plus de xinyi. les yeux dans les yeux, c'est lui qui se détache en premier. leurs mains restent toutefois ensemble, de quoi le bousiller de l'intérieur. heureusement, il avait appris à avoir le sang froid dans ces situations. émotions oubliées, elles n'avaient par leur place ici de toute manière.

planches légèrement bougées, shun observe la ruelle déserte. il se sent toutefois comme guetté. sens en ébullition, il sent que tout cela n'est qu'une illusion. il ne dit rien pour ne pas alerte xinyi mais les bruits l'obsèdent. et ils marchent, des secondes qui paraissent être des heures. seulement quelques pas et le cliquetis d'une arme. bruit familier, shun qui les entraîne dans une nouvelle course. sur le moment, la douleur ne se fait pas sentir. ce n'est que quelques secondes plus tard qu'il sent la brûlure et le sang qui s'écoule. cela ne l'empêche toutefois pas de courir. égratignure à ses yeux, il préférait un frôlement de balle qu'un coup de couteau.

la fuite continue. rue que shun reconnaît, heureusement il ne s'était pas trompé. la voiture est là-bas. la course se fait plus violente mais elle en vaut la peine. ils arrivent à rejoindre le véhicule et à se glisser dedans. shun au volant, le bras en sang et il a mal. il ne dit pourtant rien, se contente de faire baisser sa tête à xinyi alors qu'une balle vient briser la fenêtre arrière. il est trop tard pour tirer sur l'individu, mieux vaut conduire que de perdre du temps. tempo rapide, l'accélérateur sur lequel il continue d'appuyer. les bâtiments délabrés devant lesquels ils repassent, shun qui s'assure qu'ils ne sont pas suivis. tout qui le lance. il tient toutefois bon. goût de déjà-vu.

le trajet en voiture est silencieux. adrénaline qui redescend, xinyi qui doit se remettre de ses émotions et shun qui a d'autres préoccupations. mcdonalds en vue, shun qui sait qu'il doit compresser la blessure. la balle n'est pas rentrée mais le sang colle à sa veste et sa peau crie sa douleur. « contente-toi de me suivre. » laisse t-il échapper. il tourne la tête pour l'observer, visage de quelqu'un de dépassé. long regard entre eux, question posée. shun qui acquiesce et se défait de sa ceinture. quelques dollars attrapés, ils quittent le véhicule.

toilettes repérées, shun y entraîne xinyi alors que quelqu'un en sort. panneau mis devant la porte, de quoi leur assurer une relative tranquillité. shun se défait de sa veste, grimace de douleur qu'il ne prend pas la peine de réprimer. il déchire le tissu pour laisser le tout respirer. shun se déshabille de nouveau pour nettoyer les contours de la blessure. cela ne soignait pas le tout mais aiderait le médecin du clan. évidemment, il ne demande de l'aide à xinyi que lorsqu'il n'y arrive pas seul. « il faut nettoyer le sang autour. » pour l'instant. shun déchire un bout de sa manche pour le ficeler autour de son bras, en guise de bandage éphémère. « on devrait prendre un truc à manger. » souffle t-il, sentant son corps sonner ses envies.

(c) calaveras.

sains et saufs, le sont-ils vraiment ? pourtant, dans leur voiture qui roule à toute vitesse, xinyi se dit que c'est bon, qu'ils sont hors de danger. oui. mais pour combien de temps ? des missions, ils en auront d'autres et des bien plus dangereuses. les mains de xinyi tremblent encore. il a eu peur. il a encore peur d'ailleurs. et si la prochaine mission virait au drame ? et si l'un d'eux perdait la vie ?
xinyi grimace pour lui-même. sa vie n'est plus la seule qu'il souhaite préserver. son esprit a inclus shun sans qu'il ne s'en rende compte. sa présence est devenue une constante peut-être un peu trop rassurante à ses yeux et le perdre n'arrangerait rien à cette fichue situation.

surpris de se retrouver sur le parking d'un fast-food, xinyi s'imaginait déjà dans la sécurité de leur appartement, son appartement. sous une douche brulante pour apaiser son corps et son âme. mais il n'en est rien. aveuglé par la confiance qu'il a à présent en shun, il le suit. peut-être est-ce mieux de ne pas rentrer tout de suite ? de ne pas dévoiler l'emplacement du logement au cas où quelqu'un les aurait suivi ? des questions que xinyi ne posera pas. ses pas suivent juste ceux de shun, acceptant cette pause si banale après ce qu'il viennent de vivre.
sa surprise ne fait que grandir lorsqu'ils avancent vers les toilettes et non pas les bornes de commandes. xinyi veut protester, il n'a pas envie de se soulager, il veut juste manger un truc mais lorsque son regard se pose sur shun, l'affolement le gagne directement. du sang. partout.

partout sur le bras de shun. « mais.. t'es blessé ? » la fin de sa phrase part dans les aigus, trahissant sa panique grandissante. « non...»  marmonne-t-il pour lui-même. ils s'en sont sortis ! pourtant shun est-il blessé ? « pourquoi tu m'as pas dit ?! » Sans réfléchir, il obéit et attrape du papier pour nettoyer le sang autour de la plaie. ses oreilles bourdonnent de nouveau. le sang, il déteste ça mais il s'attelle particulièrement délicatement à sa tâche. une des balles de leur poursuivant a dû toucher shun et tout ce qu'il espère c'est que ce n'est rien de grave. il n'y connait rien. est-ce une égratignure ? est-ce que shun va réellement bien ? « t'es... sûr que...? on devrait...» xinyi s'inquiète. il n'a pas vu de plaie montrant que la balle s'est logée dans le bras de shun mais il n'est pas certain que la blessure ne soit qu'une éraflure. Ses yeux scrutent le visage de shun alors que celui-ci se fait un bandage de fortune. a-t-il mal ? supporte-t-il bien la douleur ? ment-il pour le rassurer ? joue-t-il l'homme fort juste pour ne pas l'inquiéter ? xinyi n'en sait rien. il ne le connait pas tant que ça finalement. ils n'ont jamais été dans une telle situation et il aurait voulu que ça n'arrive jamais.

sortant de sa torpeur, xinyi réalise que shun veut manger, ce qui était leur but premier en venant ici après tout. « mais... on doit rentrer, shun. » ce prénom sur sa langue a une sensation particulière. il ne l'utilise que trop peu.
inquiet, xinyi préfèrerait qu'ils soient en compagnie d'un médecin à cet instant mais il n'a aucun poids face à la décision de shun qui s'avance déjà vers la sortie des toilettes. « attends ! » Sans laisser le choix à shun, xinyi pose sa propre veste sur les épaules de shun pour couvrir son corps meurtri. dans ses mains, il récupère celle tachée de sang et la serre contre lui. « tu.. seras plus à l'aise avec... celle la.. le.. le tissu est moins.. raide et.. ça va.. enfin, ça... va pas appuyer.. sur la blessure... » xinyi stresse, marmonne. son geste le perturbe et il est certain que shun est dans un état similaire au sien. les marques d'affections ne sont que trop peu présentes entre eux, voire absentes. aujourd'hui, tout semble différent mais xinyi n'est pas plus à l'aise. il craint un dur retour à la réalité. shun et lui s'ouvriront-ils l'un à l'autre ou la peur d'un rapprochement va-t-elle tout casser ? « t..tu veux vraiment manger quelque chose..? » dit-il en montrant la porte d'un coup de tête peu sûr de lui.

(c) calaveras.

en vie. c'était tout ce qui importait à l'heure actuelle. même si la blessure lançait, même si la sueur dévastait leurs front; ils respiraient encore. ils étaient sortis de cette allée pourrie où il n'y avait que la mort qui respirait. tranquillité de l'esprit ou presque. shun choisit tout de même de faire un arrêt imprévu après s'être assuré qu'ils n'étaient pas suivis. mcdo. il sent xinyi qui s'interloque mais le suit quand même jusqu'aux toilettes. blessure dévoilée, peu dramatique mais pas d'une beauté sublime. le garçon questionne l'évidence, panique palpable dans ses mots. « c'est rien. » assure t-il, en ayant vu des plus belles. il préférait largement celle-ci à d'autres qu'il avait pu avoir par le passé.

la voix de xinyi résonne de nouveau, trahissant presque une certaine inquiétude. « t'es sensible..» soufflé, pas pour lui rappeler sa faiblesse mais plus pour souligner le fait qu'il n'avait pas voulu l'inquiéter davantage. la situation avait été assez compliquée pour qu'il se taise. le silence était parfois mieux que des mots inutiles, à l'effet néfaste. suggestion soufflée, xinyi qui s'exécute. grimace lorsque les endroits sensibles sont touchés. le garçon semble s'appliquer, ce qui a de quoi surprendre shun. il le voit dans le reflet du miroir. profil plus charmant qu'il ne peut se l'avouer. évidemment, il détourne rapidement le regard. ils n'ont pas ce genre de relation.

bandage fait rapidement. « on appellera le médecin tout à l'heure. » parce que ça peut attendre. qu'il ne va pas mourir dans l'heure qui suit. douleur présente mais le bandage et le nettoyage ont un peu calmé le tout. on doit rentrer, shun. son prénom, si rarement dans la bouche de quelqu'un ; encore moins dans celle de xinyi. ses yeux se posent sur lui, silence qui règne. shun continue d'avancer, il ne comptait nullement manger sur place. xinyi lui demande d'attendre et il s'arrête finalement, se retournant de nouveau pour sentir une veste se poser sur ses épaules. la sienne est prise, un acte de xinyi. il sent les incertitudes dans ces mots marmonnés mais audibles. les yeux sur lui, il ne dit qu'un mot. « merci. » on s'occupe peu de lui depuis bien longtemps. attention louable du garçon, qui semble moins le détester aujourd'hui que d'habitude et c'est réciproque.

ils ne sont pas habitués à tant de gentillesse. voix qui fait écho, shun qui acquiesce de la tête. « mais pas ici, on emporte. » on, eux. il sort en direction des bornes et incite xinyi à commander ce qu'il veut. commande extravagante mais la course se devait d'être récompensée. dollars encaissés, numéro appelé. ils disparaissent vers l'extérieur, shun respirant le parfum de xinyi à travers cette veste prêtée.

retour sur la route, le paysage qui redevient familier au fur et à mesure. shun qui finit par garer la voiture et ils retournent à l'appartement. passer la porte d'entrée lui fait étrangement plaisir. sensation d'être apaisé, loin du monde vorace qui voulait les engloutir. il se dirige vers la table basse du salon et s'échoue au pied de celle-ci. nourriture déposée, sms envoyé au médecin. ses yeux trouvent la silhouette de xinyi et sa main vient se poser sur le front du garçon. « tu peux aller te doucher. » soufflé alors qu'il sent les traces de leur soirée monstrueuse sur la peau du garçon. geste presque affectueux, xinyi qui semblait aller bien physiquement. « le médecin va passer dans la soirée. » il retire finalement sa main des quelques mèches qu'il avait fini par replacer harmonieusement sur xinyi. shun, il s'abandonne. il se défait de la veste du garçon qu'il pose sur le canapé, le temps de manger. « enfin ce que j'veux dire c'est que t'es pas obligé de rester avec moi. » si tu ne le veux pas. parce qu'une part de lui recherchait la présence réconfortante, presque enfantine de xinyi à ses côtés. l'impression d'être invincible, les battements désordonnés.

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c'est rien. rien. rien. vraiment ? comment une blessure par balle peut être associée au terme : rien. bien sûr, xinyi est conscient que cette balle n'a pas touché d'organe vital, que shun ne va pas mourir sous ses yeux à l'instant même. mais l'inquiétude est bien présente. ça le ronge sans qu'il ne réussisse à se contrôler. il aurait voulu que shun lui dise directement ou peut-être le remarquer de lui-même. a-t-il été égoïste de ne penser qu'à la fuite sans s'intéresser à l'homme qui l'a protégé ? la culpabilité s'immisce en lui. sensible jamais il n'aurait pensé l'être pour lui. quelques semaines auparavant, xinyi a souhaité qu'il disparaisse de sa vie, qu'il le laisse tranquille, peut-être même qu'il a espéré secrètement sa mort dans un moment de méchanceté qui ne lui ressemble pas. aujourd'hui, il n'est plus certain de ce qu'il veut, de ce qu'il pense de shun. il déteste toujours cette situation, il ne veut pas faire partie du gang, tout est clair pour xinyi mais il ne parvient plus à vouloir shun hors de sa vie.

ce soir, tout semble différent entre eux. au fond de lui xinyi se demande s'ils vont continuer sur cette voie ou si tout va de nouveau s'effondrer autour et surtout entre eux. leurs attitudes se font plus douces, leurs mots sont rassurants. perturbants.

xinyi n'a plus le temps de penser, le temps défile à une vitesse affolante. commande, retour en voiture avant de finalement être enveloppé par la chaleur familière de son appartement. leur appartement. une fois la porte refermée, les bruits assourdissants sont étouffés, les peurs sont refoulées. à cet instant, seule la main de shun sur son front compte pour xinyi. il crève de chaud. non. a-t-il froid ? incertain, ses yeux s'ancrent dans ceux de shun puis sur ses lèvres qui bougent. les mots ne parviennent qu'à moitié aux oreilles de xinyi, trop subjugué par le contact qui se fait entre eux. jamais il n'aurait imaginé shun capable d'un tel geste et ça lui fait un bien fou. il n'est pas de ceux qui aiment la tendresse, courent après les étreintes... non, il a toujours été très solitaire mais ce soir il aimerait sentir cette main encore longtemps contre sa peau.

« t'es pas obligé de rester avec moi. » hébété, xinyi reste figé alors que shun s'installe pour manger comme si de rien n'était. comment fait-il pour paraitre si sûr de lui ? xinyi est-il le seul des deux à être chamboulé par tout ce qui vient de se passer ? il n'a aucune envie de partir, de se doucher. il veut juste rester là. avec lui. pourtant, il s'échappe un instant vers la salle de bain et farfouille dans le placard où il range le nécessaire en cas de blessure. avant de rencontrer shun, jamais il n'en a eu besoin. ces dernières semaines cependant, il n'a cessé de racheter encore et encore de quoi soigner ses plaies. après être passé chercher un tshirt ample dans sa garde robe pour shun, xinyi revient les bras chargés de ce qu'il pense être utile pour soigner son protecteur et pose tout sur le canapé. « j'me fiche que le médecin arrive. s'il faut c'est dans plusieurs heures. » sans vraiment laisser le choix à shun, il le force à retirer son haut qui n'est plus qu'un miséreux morceau de tissu déchiré. de toutes ses forces, xinyi arrache son regard de ce torse si finement musclé. il n'y a vraiment rien à faire, apercevoir un peu trop de cette peau lui retourne toujours autant le coeur. alors il se concentre sur la blessure. délicatement, il ôte le bandage de fortune et grimace. « c'est quand même bien abimé... » si la balle n'a déchiré la peau qu'en surface, la plaie est tout de même importante. d'une main tremblante il prend une boite de cachets qu'il tend à shun. « essaie de prendre ça ? pour la douleur ? » regard croisé aussitôt détourné. leur proximité le perturbe mais pour rien au monde il ne reculera. au contraire, ses doigts s'activent de nouveau et préparent de quoi nettoyer correctement la plaie. « mange... de ton bras valide j'veux dire. » ordre empreint d'inquiétude. il doit manger, prendre des forces. il a perdu du sang, ce n'est pas anodin. toujours avec douceur, xinyi s'applique a désinfecter. il sait que le produit doit faire mal, le picotement sur ses toutes petites blessures lui faisait serrer des dents alors il n'imagine pas la douleur que doit ressentir shun. « désolé... ça pique... » malgré lui, un sourire se faufile sur ses lèvres. c'est étrange de s'occuper de lui alors qu'il a toujours été celui qui dirige tout. « on dirait que... ça va être à moi de te protéger maintenant ? » tente-t-il avec humour. « pour ta survie et la mienne... j'espère que tu vas... être sur pieds assez vite... » peut-être que cette blessure leur accordera une pause bien méritée ? xinyi est déjà épuisé de cette fichue situation alors que ça ne fait que quelques semaines. il a l'impression que des années sont passées. « ça.. va te faire une cicatrice... tu seras encore plus sexy pour tes conquêtes... » horrifié à ses propres mots, xinyi appuie sa compresse peut-être un peu trop sans le faire exprès. mentalement, il s'insulte. pourquoi avoir dit ça ? pire, il affirme l'avoir déjà trouvé sexy avec son encore plus. pourquoi ne sait-il pas se taire ? lèvres pincées, il enroule une gaze autour du bras de cet homme qui a chamboulé sa vie tout en se traitant mentalement d'idiot. concentré sur sa tâche il prie pour que shun ignore ses mots. ou pour que la surdité le gagne.

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temps qui s'écoule plus rapidement que lorsqu'ils étaient en train de courir, poursuivis par cet individu. ils finissent par rentrer à la maison, de la nourriture dans les mains et surtout loin de la peur et du danger. cocon protecteur, shun qui se déshabille légèrement. et puis il y a les mots qui s'échappent, sa main qui se pose sur le front de xinyi alors que rien ne l'y oblige. il ne sait pas pourquoi il se préoccupe de lui si soudainement. c'est pas habituel qu'il s'intéresse aux autres, encore moins à quelqu'un comme xinyi. non, shun c'est la force brute et les sentiments mis de côté. mais ce soir, ses yeux s'autorisent à perdurer sur le visage du garçon. contact physique établi, pour le pire comme pour le meilleur.

xinyi semble perdu lorsqu'il parle. shun, il a l'habitude de gérer tout seul. compter sur les autres, ce n'est souvent pas possible ou trop dangereux pour qu'il s'y autorise. xinyi, il n'a pas élevé de la même manière. aujourd'hui en est la preuve puisqu'il l'a suivi sans questionner une seule fois ses choix. il s'est reposé sur lui alors que leur relation n'a jamais été particulièrement positive. silence du garçon, il disparaît alors que shun le regarde faire. minutes qui s'écoulent mais elles sont rapides. xinyi apparaît de nouveau, une trousse de secours dans les mains. d'autres affaires sont également déposées sur le canapé. et sa voix fait écho dans la pièce, il semble plus déterminé que shun ne l'a vu. étrange sensation, il ne le contredit pas. pour une fois, il laisse faire. il est peu habitué à ce qu'on s'occupe de lui ainsi, ses parents n'ayant été que des chimères dans sa vie. xinyi le force à retirer sans haut, tâché de sang et autre.

le garçon semble troublé mais shun choisit de ne pas commenter. lui aussi n'est pas des plus à l'aise dans cette situation improbable. xinyi fait disparaître le bandage fait rapidement dans les toilettes ; l'apaisement n'est plus là. abîmé. « c'est pas la première fois. » soufflé, comme pour diminuer la laideur de la plaie. shun se fait docile et regarde xinyi lui tendre des cachets pour la douleur. évidemment, l'autre détourne immédiatement le regard lorsqu'il croise le sien. le détestait-il tant que ça ? « merci. » cachets attrapés, avalés tout aussi rapidement avec les moyens du bord. shun se laisse presque surprendre par xinyi, qui parle encore. ils ont échangé plus de mots aujourd'hui que les jours passés. « je préfère attendre. » l'attendre, lui. que cette désinfection de plaie prenne fin. l'ordre est refusé, shun gamin. il grimace lorsqu'il sent xinyi s'appliquer à enlever les saletés de sa blessure. picotements car la chair n'est plus recouverte, que c'est à vif. xinyi s'excuse alors qu'il n'y peut largement rien. sourire sur ses lippes qu'il perçoit et devant lequel il reste ébahi quelques secondes.

lui aussi voudrait pouvoir sourire ainsi. naïvement, comme un enfant. note d'humour lancée dans l'air. shun apprécie l'effort, parce que xinyi pourrait très bien l'ignorer et partir dans sa chambre en oubliant qu'il l'a sauvé. « t'as encore un long chemin à faire. » commentaire sur un ton doux, sourire éphémère sur les lèvres. il ne mentait pas, xinyi n'était encore qu'un débutant. il venait de goûter à la vraie peur pour la première fois. « et je serai pas toujours là. » comme pour le préparer, même si ce sera pas avant longtemps que xinyi sera seul. remerciement implicite, ses yeux qui traduisent mieux ses sentiments que sa bouche. les paroles défilent, une réelle conversation prend place. remarque qui l'intrigue, xinyi qui paraît nerveux de ses propres mots puisqu'il appuie la compresse un peu plus fort. shun vient même stopper sa main. « ça pique. » dit-il seulement alors qu'il vient croiser son regard et capte sa détresse. xinyi finit par bander la blessure et shun choisit ce moment précis pour le mettre dans l'embarras. « content de savoir qu'au moins une personne appréciera la cicatrice. » soufflé, nonchalamment alors qu'il vient enfiler le t-shirt ramené par le garçon. il ne lui laisse cependant pas l'occasion de s'enfuir. shun le fait asseoir à ses côtés et lui tend même sa boisson. nourriture disposée, atmosphère paisible ; quoique relativement étrange. « est-ce que ça va vraiment ? » vient-il confirmer après plusieurs minutes de silence, outre les bruits de mastication. plaisir de la nourriture grasse après tant d'efforts, shun dont les yeux pourraient se fermer comme un rien. repas terminé, seul xinyi qui retient son attention.

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